Mme Raymonde Poncet Monge. Selon la Défenseure des droits, dont nous suivons les recommandations – pardonnez-nous de le faire, mes chers collègues ! –, le dispositif prévu à l’article 14 crée une double difficulté au regard de la protection des droits et libertés.

D’une part, il est possible que l’administration fiscale transmette à France Travail des données qui ne seront finalement pas considérées comme caractérisant des revenus illicites dans la décision définitive rendue par le juge pénal. Une telle mesure constituerait alors une violation du secret de l’instruction et pourrait conduire à adopter des décisions administratives sur le fondement d’éléments infirmés ultérieurement. Ainsi, des demandeurs d’emploi bénéficiant d’allocations chômage pourraient se voir injustement privés de leurs droits lors de la procédure.

Afin d’éviter une telle atteinte, nous proposons que soit rendu possible le réexamen de la situation d’un demandeur d’emploi en présence d’éléments nouveaux, tels qu’un jugement pénal définitif ou l’annulation de la décision initiale des services fiscaux, y compris si ces événements se produisent plusieurs années après le recouvrement du trop-perçu par France Travail, lequel sera alors considéré comme injustifié.

D’autre part, la rédaction actuelle de l’article 14 ne permet pas de déterminer si un demandeur d’emploi serait privé de l’ensemble de ses indemnités chômage dès lors que l’administration fiscale a identifié des revenus illicites sur la période considérée, ou si le montant des allocations serait simplement réduit à hauteur des revenus illicites effectivement constatés.

Le prononcé de sanctions administratives doit respecter les droits de la défense, que ce soit pour les assurés ou pour les entreprises. Afin d’éviter toute atteinte à ces droits, nous demandons à ce que soit précisé que le montant des allocations est réduit uniquement à proportion des revenus illicites effectivement constatés, dès lors que la sanction des actes à l’origine de ces revenus est prononcée dans le cadre d’une autre procédure.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement, car il vise à atténuer la portée de l’article 14.

De manière générale, en matière de fraude, qu’il s’agisse de fraude sociale ou de fraude fiscale, plus nous aurons des positions politiques claires, plus nous soutiendrons les administrations qui accomplissent un travail colossal pour mieux détecter, mieux recouvrer et mieux réprimer, et mieux la République se portera.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Les différentes mesures figurant dans ce projet de loi ont pour objectif commun de lutter contre la fraude sous toutes ses formes. Comment ? En donnant à France Travail tous les moyens nécessaires pour agir.

En l’occurrence, les dispositions dont nous discutons permettront à France Travail d’identifier de nouveaux trop-perçus, notamment dans le cas où un demandeur d’emploi aurait cumulé le versement d’une allocation et des revenus illicites. Dans la mesure où de tels revenus ne peuvent être connus directement des services de France Travail, le dispositif de l’article 14 repose sur les éléments factuels transmis par l’administration fiscale.

Je comprends l’esprit de votre amendement, madame la sénatrice, puisque certains éléments transmis par l’administration fiscale pourraient être requalifiés par un jugement pénal définitif. Toutefois, par principe, les décisions de justice s’imposent à l’autorité administrative, à qui il appartient de corriger les effets des décisions qui auraient été prises en contradiction avec un ou plusieurs jugements.

De même, pour répondre à la seconde partie de votre argumentaire, je rappelle que le cadre juridique actuel prévoit bien des sanctions pour les demandeurs d’emploi en cas de fraude : je pense à la suppression totale de l’allocation versée et à la radiation de six à douze mois de la liste des demandeurs d’emploi. À cela s’ajoute la récupération des trop-perçus, dont nous avons parlé, qui s’impute sur les droits versés à venir. Le droit positif prévoit donc d’ores et déjà un mécanisme dissuasif impliquant le remboursement des sommes injustement perçues.

Pour l’ensemble de ces raisons, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 122.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 14.

(Larticle 14 est adopté.)

Article 14
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Article 16

Article 15 (précédemment examiné)

M. le président. Je rappelle que l’article 15 a été précédemment examiné.

Chapitre II

Renforcer les sanctions administratives et pénales

Article 15 (précédemment examiné)
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Après l’article 16

Article 16

Le code du travail est ainsi modifié :

1° La première phrase de l’article L. 6231-4 est complétée par les mots : « et de transmettre les données issues de la mise en œuvre de cette comptabilité analytique à l’institution mentionnée à l’article L. 6123-5 accompagnées, lorsque la comptabilité n’est pas tenue par un comptable public, de l’attestation du commissaire aux comptes ou à défaut de l’expert-comptable reconnaissant la fiabilité des données comptables transmises. » ;

1° bis (nouveau) Au premier alinéa de l’article L. 6351-4-1, les mots : « du contrôle mentionné à l’article L. 6361-1, » sont remplacés par les mots : « au cours des contrôles mentionnés aux articles L. 6361-1 et L 6361-2, » ;

2° Après l’article L. 6355-15, il est inséré un article L. 6355-15-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 6355-15-1. – Le fait de ne pas transmettre les données issues de la mise en œuvre de la comptabilité analytique et l’attestation mentionnées à l’article L. 6231-4 à l’institution mentionnée à l’article L. 6123-5 est puni d’une amende de 4 500 euros. » ;

3° Le titre V du livre III de la sixième partie est complété par un chapitre VI ainsi rédigé :

« CHAPITRE VI

« Sanctions administratives

« Art. L. 6356-1. – Sous réserve de l’absence de poursuite pénale, l’autorité administrative compétente peut, sur rapport de l’agent de contrôle mentionné à l’article L. 6361-5, soit adresser à l’employeur un avertissement, soit prononcer à l’encontre de l’organisme contrôlé une amende, en cas de manquement :

« 1° Aux articles L. 6231-2 à L. 6231-7 et aux mesures réglementaires prises pour leur application ;

« 2° Aux articles L. 6355-1 à L. 6355-24 et aux mesures réglementaires prises pour leur application ;

« 3° Aux articles L. 8114-1 et L. 8114-2 et aux mesures réglementaires prises pour leur application.

« Art. L. 6356-2. – Lorsqu’une amende est prononcée en application de l’article L. 6356-1, l’autorité administrative informe par tout moyen le procureur de la République des suites données au rapport des agents de contrôle mentionnés à l’article L. 6361-5.

« Art. L. 6356-3. – Le montant maximal de l’amende est de 4 000 euros et peut être appliqué autant de fois que les manquements constatés se sont produits.

« Le plafond de l’amende est porté au double en cas de nouveau manquement constaté dans un délai de deux ans à compter du jour de la notification de l’amende concernant un précédent manquement de même nature.

« Il est majoré de 50 % en cas de nouveau manquement constaté dans un délai d’un an à compter du jour de la notification d’un avertissement concernant un précédent manquement de même nature.

« Art. L. 6356-4. – Pour fixer le montant de l’amende, l’autorité administrative prend en compte les circonstances et la gravité du manquement, le comportement de son auteur, notamment sa bonne foi, ainsi que ses ressources et ses charges.

« Art. L. 6356-5. – Avant toute décision, l’autorité administrative informe par écrit la personne mise en cause de la sanction envisagée en portant à sa connaissance le manquement retenu à son encontre et en l’invitant à présenter, dans un délai ne pouvant être inférieur à quinze jours, ses observations.

« À l’issue de ce délai, l’autorité administrative peut, par décision motivée, prononcer l’amende et émettre le titre de perception correspondant.

« Le délai de prescription de l’action de l’autorité administrative pour la sanction du manquement par une amende administrative est de deux années révolues à compter du jour où le manquement a été commis.

« Art. L. 6356-5-1 (nouveau). – La personne à l’encontre de laquelle un avertissement ou une amende est prononcé peut contester la décision de l’administration devant le tribunal administratif, à l’exclusion de tout recours hiérarchique.

« Art. L. 6356-6. – Les amendes sont recouvrées selon les modalités prévues pour les créances de l’État étrangères à l’impôt et au domaine. L’opposition à l’exécution ou l’opposition aux poursuites n’a pas pour effet de suspendre l’action en recouvrement de la créance.

« Art. L. 6356-7. – Les modalités d’application du présent chapitre sont fixées par décret en Conseil d’État. »

M. le président. L’amendement n° 293, présenté par Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

2° L’article L. 6355-5 est ainsi rétabli :

II. – Alinéa 5

Remplacer la référence :

L. 6355-15-1

par la référence :

L. 6355-5

III. – Alinéa 9

Remplacer les mots :

de l’agent de contrôle mentionné

par les mots :

des agents de contrôle mentionnés

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 293.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 247 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 5

Insérer quatorze alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 6355-15-2. – Le fait de ne pas renseigner le passeport de prévention prévu à l’article L. 4141-5 est puni d’une amende de 2 500 euros. » ;

…° L’article L. 4141-5 est ainsi rédigé :

« Art. L. 4141-5. – I.- Il est créé un passeport de prévention afin de faciliter le respect par les employeurs de leur obligation de formation prévue à l’article L. 4141-2. Il comporte les attestations, certificats, certifications professionnelles et diplômes obtenus dans le cadre des formations relatives à la santé et à la sécurité au travail mentionnées à l’article L. 4141-2.

« II. – Le passeport de prévention est ouvert à tout titulaire d’un compte personnel de formation mentionné à l’article L. 6323-1. Il est intégré au système d’information du compte personnel de formation mentionné à l’article L. 6323-8 et est géré par la Caisse des dépôts et consignations selon les modalités définies à l’article L. 6323-9.

« III.– Le passeport de prévention est renseigné :

« 1° Par l’employeur pour les formations dispensées à son initiative, sauf à ce qu’elles aient été dispensées dans les conditions du 3° ;

« 2° Par l’entreprise de travail temporaire, après information de l’entreprise utilisatrice lorsque les formations sont dispensées aux salariés temporaires à l’initiative de cette dernière, sauf à ce qu’elles aient été dispensées dans les conditions du 3° ;

« 3° Par l’organisme de formation pour les formations qu’il dispense directement ou par le biais d’un sous-traitant ;

« 4° Par les ministères et organismes certificateurs, dans le cadre de la communication des informations relatives aux titulaires des certifications prévues à l’article L. 6113-8 ;

« 5° Par les organismes mentionnés à l’article L. 6353-10 dans le cadre du partage des données relatives à l’emploi et au parcours de formation professionnelle prévu à ce même article.

« Le titulaire du passeport de prévention peut également le renseigner lorsque les attestations, certificats et diplômes ont été obtenus à l’issue de formations relatives à la santé et à la sécurité au travail qu’il a suivies de sa propre initiative.

« IV. – Le titulaire du passeport de prévention a accès à l’ensemble des données qui y figurent.

« L’employeur peut consulter et conserver, sauf opposition du titulaire, l’ensemble des données contenues dans le passeport de prévention, pour les besoins du suivi de ses obligations en matière de formation à la santé et à la sécurité, sous réserve du respect des conditions de traitement des données à caractère personnel prévues à l’article 4 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

« V. – Sans préjudice des dispositions prévues au II de l’article L. 6323-8, les modalités de mise en œuvre du passeport de prévention et de sa mise à la disposition de l’employeur sont déterminées par le comité national de prévention et de santé au travail et approuvées par voie réglementaire. En l’absence de décision du comité à l’issue d’un délai de six mois à compter de la publication du décret en Conseil d’État prévu au dernier alinéa de l’article L. 4641-2-1, ces modalités sont déterminées par décret en Conseil d’État. Le comité national de prévention et de santé au travail assure également le suivi du déploiement du passeport de prévention. » ;

II. – Alinéa 14

Après le montant :

4 000 euros

insérer les mots :

, sauf en cas de manquement à la disposition pénale mentionnée à l’article L. 6355-15-2 pour lequel le montant maximal de l’amende est de 2 000 euros,

La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Pierre Farandou, ministre. La mesure que nous proposons au travers de cet amendement est rendue nécessaire par la mise en place du passeport de prévention, créé par l’accord national interprofessionnel du 9 décembre 2020 et la loi du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail. La formation à la prévention est en effet l’un des principaux leviers pour réduire le nombre encore trop élevé d’accidents du travail, lesquels peuvent être graves, voire mortels.

Le passeport de prévention a vocation à rassembler dans un même outil numérique les attestations, certificats et diplômes délivrés à l’issue d’une formation à la santé et à la sécurité au travail. Il permettra donc de garantir une véritable traçabilité : l’employeur pourra s’assurer de la bonne réalisation de ces formations et les compléter si nécessaire.

Les services du ministère du travail ont créé des groupes de travail, en lien avec les partenaires sociaux représentatifs au niveau interprofessionnel, pour accompagner les développements informatiques de la Caisse des dépôts et consignations nécessaires à la mise en place de ce passeport.

Il est apparu nécessaire de clarifier les responsabilités de ceux qui le remplissent pour éviter toute rupture dans son alimentation et introduire une sanction à l’égard des organismes de formation qui auraient manqué à leurs obligations légales en s’abstenant de le renseigner.

Il importe également d’élargir le public des bénéficiaires de cet outil à l’ensemble des titulaires d’un compte personnel de formation, et ce afin d’anticiper les mobilités professionnelles, qui peuvent conduire les salariés à changer plus souvent non seulement d’emploi, mais également de statut.

Enfin, pour que ce passeport devienne un véritable instrument de pilotage de la politique de formation à la prévention, il est impératif d’en faciliter le partage avec l’employeur.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. M. le ministre a très bien rappelé l’intérêt de ce passeport de prévention et l’importance pour l’employeur de le renseigner. Cet amendement nous semble utile : avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 247 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 16, modifié.

(Larticle 16 est adopté.)

Article 16
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Article 16 bis (nouveau)

Après l’article 16

M. le président. L’amendement n° 184 rectifié bis, présenté par M. Fargeot, Mme Florennes, MM. Courtial, Kern, Laugier et Delahaye, Mme Antoine, M. Menonville, Mmes Sollogoub, Romagny, Jacquemet, Billon, Patru et Gacquerre, MM. Parigi et Houpert et Mme Josende, est ainsi libellé :

Après l’article 16

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 6351-7 du code du travail, il est inséré un article L. 6351-7–… ainsi rédigé :

« Art. L. 6351-7-. – Pour les besoins du contrôle exercé en application du présent titre, les agents chargés du contrôle de la formation professionnelle peuvent procéder à des vérifications réalisées sous une identité d’emprunt, incluant l’acquisition d’une prestation de formation financée au titre du compte personnel de formation.

« Les agents mentionnés au premier alinéa peuvent, à ce titre, accéder aux espaces de formation, supports, communications et documents mis à disposition des personnes inscrites.

« Les organismes de formation sont tenus de conserver, pendant une durée de cinq ans, les journaux de connexion, les traces pédagogiques et tout élément permettant d’attester de la réalisation effective de la formation.

« Les conditions d’application du présent article, notamment les garanties applicables aux contrôles sous identité d’emprunt, sont fixées par décret en Conseil d’État. »

La parole est à M. Daniel Fargeot.

M. Daniel Fargeot. La fraude au compte personnel de formation repose sur un mécanisme très simple : des formations fictives, sans contenu réel, qui disparaissent dès que la menace d’un contrôle se précise. Aujourd’hui, aucune base juridique claire ne permet aux services chargés des contrôles de réaliser des achats tests. Or il est compliqué de vérifier la réalité d’une formation si tout disparaît au moment où l’on se présente…

Cet amendement vise à permettre aux agents chargés des contrôles de la formation professionnelle de réaliser lesdits contrôles sous une identité d’emprunt, en prévoyant la conservation obligatoire des traces pédagogiques. Il s’agit d’étendre à d’autres administrations un dispositif auquel a déjà recours la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. On ne peut pas continuer à laisser filer des millions d’euros versés pour des prestations fantômes.

Cet amendement vise à renforcer l’efficacité des contrôles et à protéger les fonds publics en donnant simplement à ces agents une vraie capacité d’agir.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement est satisfait par l’article 11 du présent projet de loi, qui vise justement à anonymiser tous les agents des services régionaux de contrôle (SRC) de la formation professionnelle.

C’est pourquoi nous en demandons le retrait ; à défaut, nous y serons défavorables.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Même avis.

M. le président. Monsieur Fargeot, l’amendement n° 184 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Daniel Fargeot. Non, je le retire, monsieur le président, tout en rappelant que chaque euro volé au CPF est un euro en moins pour la formation réelle. Notre responsabilité est de protéger l’argent des travailleurs.

M. le président. L’amendement n° 184 rectifié bis est retiré.

Après l’article 16
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Article 16 ter (nouveau)

Article 16 bis (nouveau)

Le livre III de la sixième partie du code du travail est ainsi modifié :

1° L’intitulé de la section 2 du chapitre II du titre V est complété par les mots : « et obligations applicables aux organismes de formation sollicitant des fonds auprès des financeurs publics » ;

2° L’article L. 6352-4 est ainsi rétabli :

« Art. L. 6352-4. – Lorsqu’il sollicite des fonds auprès des financeurs mentionnés à l’article L. 6316-1, l’organisme de formation assure le traitement égal de tous les stagiaires et apprentis. Il veille au respect de la liberté d’expression et de conscience, ainsi qu’à la neutralité des enseignements dispensés. Ces obligations sont inscrites dans le règlement intérieur mentionné à l’article L. 6352-3. » ;

3° Le premier alinéa de l’article L. 6362-3 est remplacé par cinq alinéas ainsi rédigés :

« En cas de contrôle d’un organisme chargé de réaliser tout ou partie des actions mentionnées à l’article L. 6313-1, ces actions sont réputées inexécutées et donnent lieu à remboursement des fonds auprès de l’organisme ou de la personne qui les a financées dans les cas suivants :

« 1° Lorsqu’il est constaté que des actions financées par des fonds de la formation professionnelle ont poursuivi d’autres buts que ceux définis aux articles L. 6313-1 à L. 6313-8 ;

« 2° Lorsque l’action de formation est assurée par un ou des formateurs ne disposant pas des diplômes, certificats, titres, attestations, autorisations et qualités au sens de l’article L. 6352-1 en lien avec l’action réalisée ;

« 3° Lorsque l’action de formation promeut ou conduit à l’exercice d’une profession réglementée ou d’une profession de santé au sens des dispositions de la quatrième partie du code de la santé publique alors que les formateurs ne satisfont pas aux obligations mentionnées au 2° du présent article ou que les bénéficiaires de la formation ne disposent pas des prérequis nécessaires pour entrer en formation ;

« 4° En cas de manquement de l’organisme de formation aux obligations mentionnées à l’article L. 6352-4 du présent code. »

M. le président. L’amendement n° 128, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. En application de l’article 16 bis, tout organisme de formation qui sollicite des fonds auprès des financeurs publics est censé faire respecter les principes d’égalité de traitement de tous les stagiaires, de liberté d’expression et de conscience, ainsi que de neutralité des enseignements dispensés.

Par ailleurs, afin d’exclure ces organismes de l’accès aux financements publics, il est précisé que les actions de formation conduisant à l’exercice d’une activité réglementée, notamment médicale, ne donnent lieu à aucun remboursement lorsque les formateurs ou les bénéficiaires ne disposent pas des diplômes, titres et qualités requis.

Nous proposons la suppression de cet article, qui ne nous semble pas légitime dans un projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales. Ces dispositions relèvent en effet davantage d’un cahier des charges définissant le périmètre des formations, leur contenu et le cadre de travail que les organismes de formation offrent que du périmètre de la loi. Selon nous, elles auraient dû être jugées irrecevables au titre de l’article 45 de la Constitution, à l’instar de nombre de nos amendements pour lesquels nous n’avons pas eu l’occasion de démontrer qu’ils visaient effectivement à lutter contre la fraude.

En outre, une partie de ces mesures sont, de fait, déjà satisfaites, étant donné que tous les organismes de formation doivent appliquer le droit existant. Il n’y a donc pas lieu de les inscrire dans le présent projet de loi.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Frédérique Puissat, rapporteur. La commission est évidemment défavorable à cet amendement de suppression, puisqu’elle est à l’origine de l’introduction de cet article dans le texte. Pourquoi l’avons-nous fait ? Parce que, lors de nos auditions, nous avons régulièrement été alertés par les établissements ou les agences de l’État, France Compétences en particulier, qu’un certain nombre de formations étaient, par exemple, réservées aux hommes, ou que certains opérateurs se faisaient passer pour des médecins, alors qu’ils ne l’étaient pas. Il s’agit bien de fraude, et cet article a donc tout son sens dans ce projet de loi.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Madame la sénatrice, vous souhaitez supprimer l’article 16 bis. Je dois dire que cela me surprend un peu, car nous sommes, avec ces dispositions, au cœur de la lutte contre la fraude. Nous sommes même au « cœur du cœur » de ce texte. Il est incontestable qu’utiliser l’argent public pour encourager l’emprise et l’entrisme est difficilement admissible.

La lutte contre ces situations d’emprise, d’entrisme, ou contre l’exercice illégal d’activités professionnelles réglementées, comme la médecine, relève bien évidemment de la lutte contre la fraude. Outre les dangers sociaux et physiques que ces pratiques entraînent, il y a parfois, hélas, derrière ces formations des faits encore plus graves que le seul accès illégal à des financements publics : nous le savons, une fois ces organismes enregistrés, d’autres types de fraudes, comme le blanchiment d’argent, prolifèrent.

Permettez-moi enfin de souligner que cet article, introduit dans le texte par la commission, est indispensable aux agents de contrôle de la formation professionnelle pour mieux caractériser des pratiques qui, dans l’état actuel du droit, ne peuvent être que difficilement sanctionnées.

Vous le comprendrez, madame la sénatrice, je suis défavorable à votre amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 128.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 16 bis.

(Larticle 16 bis est adopté.)

Article 16 bis (nouveau)
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Article 17

Article 16 ter (nouveau)

L’article L. 6351-3 du code du travail est complété par des 5° à 7° ainsi rédigés :

« 5° L’organisme ne dispose pas de locaux lui permettant de justifier de sa capacité à réaliser les actions mentionnées au 4° de l’article L. 6313-1 ;

« 6° Le dirigeant de droit ou de fait de l’organisme a fait l’objet, dans les quatre ans précédant la demande, d’un procès-verbal constatant l’une des infractions prévues aux articles L. 6355-1 à L. 6355-22 assorti d’une annulation de la déclaration d’activité dans les conditions fixées à l’article L. 6351-4 ;

« 7° Le dirigeant de droit ou de fait de l’organisme a fait l’objet, dans le cadre d’un contrôle de ses dépenses ou de ses activités en application des articles L. 6361-1 à L. 6361-3, dans les cinq ans précédant la demande, d’une décision de rejet et de versement mentionnée à l’article L. 6362-10 et ne justifie pas du règlement du montant exigible auprès de l’administration chargée du recouvrement dans les conditions prévues à l’article L. 6362-12. – (Adopté.)

Article 16 ter (nouveau)
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Après l’article 17

Article 17

Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° À l’article L. 114-17-1, le dernier alinéa du III est supprimé ;

2° L’article L. 162-1-15 est ainsi modifié :

a) Le I bis est ainsi rédigé :

« I bis. – Le directeur de l’organisme local d’assurance maladie peut décider, après que le centre de santé ou la société de téléconsultation mentionnée à l’article L. 4081-1 du code de la santé publique a été mis en mesure de présenter ses observations, de subordonner à l’accord préalable du service du contrôle médical, pour une durée ne pouvant excéder six mois, la couverture d’actes, de produits ou de prestations figurant sur les listes mentionnées aux articles L. 162-1-7, L. 162-17 et L. 165-1 du présent code, la couverture des frais de transport ou le versement des indemnités journalières mentionnés au 2° de l’article L. 160-8, à l’article L. 321-1 et aux 1° et 2° de l’article L. 431-1 du présent code ainsi qu’aux 1° et 2° de l’article L. 752-3 du code rural et de la pêche maritime, en cas de constatation par ce service des situations mentionnées aux 1° à 5° du I du présent article, sous réserve des dispositions du dernier alinéa de ce même I.

« La condition d’activité comparable des centres de santé ou des sociétés de téléconsultation s’applique dans le ressort de la même agence régionale de santé ou au niveau national. » ;

b) Le II est ainsi modifié :

– à la première phrase, le mot : « proposer » est remplacé par le mot : « demander » ;

– la seconde phrase est supprimée ;

c) Au II bis, après la référence : « I », sont insérés les mots : « et II » ;

3° (nouveau) Le premier alinéa de l’article L. 162-15-1 est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Durant l’intégralité de la mise hors convention pour violation des engagements prévus par celles-ci, les produits de santé, les actes et les prestations prescrits par le professionnel de santé, les centres de santé et les sociétés de téléconsultation mentionnées à l’article L. 4081-1 du code de la santé publique ne donnent pas lieu à un remboursement par l’assurance maladie. L’information du patient sur le non-remboursement des prescriptions est réalisée dans les conditions prévues aux articles L. 1111-3 à L. 1111-3-2 du même code. »