CHAPITRE III -

UN COMMERCE EXTÉRIEUR FRANÇAIS STRUCTURELLEMENT EXCÉDENTAIRE ?

Le projet de budget du commerce extérieur pour 2002 s'inscrit dans un contexte marqué par un excédent commercial en voie d'extinction, qui pourrait céder la place à un déficit en 2002.

I. UN COMMERCE EXTÉRIEUR EN PLEINE CROISSANCE, MAIS TOUT JUSTE EXCÉDENTAIRE

Pour le commerce mondial comme pour le commerce extérieur de la France, l'année 2000 a été caractérisée par une très forte croissance des échanges (+ 13,8 % pour les exportations françaises et + 20,1 % pour les importations). Le solde commercial français FAB/FAB s'est établi à 2 milliards d'euros en 2000, en net recul par rapport à l'année précédente où il avait atteint 16,5 milliards d'euros. Cette évolution relève avant tout des facteurs conjoncturels (vigueur de la demande intérieure française et augmentation du prix des matières premières) et ne reflète pas un effritement de la compétitivité de la France sur la scène internationale.

A. UN SOLDE QUI ILLUSTRE, MALGRÉ TOUT, LA COMPÉTITIVITÉ DES PRODUITS FRANÇAIS

1. Des flux d'échanges nourris, un excédent fortement amaigri

Les flux commerciaux français, comme ceux de la zone euro, ont d'abord poursuivi au premier semestre 2000 une progression amorcée dès la sortie du « trou d'air », au printemps de l'année précédente. Puis, au second semestre, ils se sont nettement ralentis. Sur l'ensemble de l'année, les importations ont été plus rapides que les exportations. Dépassant 305 milliards d'euros, les exportations françaises affichent une progression de 13,8 % sur l'ensemble de l'année, soit la deuxième meilleure performance de la décennie après les résultats records de l'année 1997, où elles avaient progressé de 15,1 %. Néanmoins, les exportations ont progressé moins vite que les importations (+ 20,1 % en 2000). En effet, sous l'incidence cumulée de la forte hausse des prix des produits de base, de l'amélioration de la consommation des ménages et de la demande des entreprises, la hausse des importations est à un niveau qu'elle n'avait pas atteint depuis 1980.

En se situant à 2 milliards d'euros, l'excédent commercial FAB/FAB de l'année 2000 recule de près de 15,24 milliards d'euros, puisqu'il atteignait 16,5 milliards d'euros l'an passé.

Les flux ont progressé à un rythme identique au cours des deux premiers trimestres. Au troisième trimestre, le différentiel de croissance des échanges, favorable aux importations, entraîne la disparition de l'excédent mensuel. Après cette baisse estivale, le solde mensuel demeure stationnaire au dernier trimestre de l'année.

LE SOLDE COMMERCIAL

L'apparition de l'excédent en 1993, son augmentation entre 1995 et 1997, son maintien à de bons niveaux en 1998 et 1999 et sa contraction en 2000, ne peuvent être dissociés du décalage conjoncturel entre la France et ses partenaires, même s'il n'explique qu'une partie des évolutions.

L'amoindrissement notable de l'excédent en 2002 ne doit donc pas être lu comme le signe d'un effritement de la compétitivité française « élargie » -non limitée aux prix-, laquelle a fait preuve d'une bonne tenue.

2. La persistance d'une bonne compétitivité des produits français

La convergence de trois facteurs -un environnement de change favorable, une bonne tenue des coûts salariaux et une poursuite des efforts de marge au premier semestre- a permis à la compétitivité-prix des exportateurs français de progresser au cours de l'année 2000.

La position compétitive de la France s'est améliorée vis-à-vis tant de ses principaux partenaires de l'OCDE que des pays émergents, grâce à un différentiel d'inflation favorable qui lui a permis de retrouver des niveaux de compétitivité proches de ceux d'avant la crise asiatique.

Le taux de change effectif nominal de la France vis-à-vis de ses 42 principaux partenaires a poursuivi un mouvement de dépréciation pendant la majeure partie de l'année, avant d'opérer un net redressement au cours des deux derniers mois. En moyenne annuelle, la baisse s'établit à 5,5 %. En glissement de décembre 1999 à décembre 2000, le taux de change effectif nominal est en recul de 2,7 %. Cette évolution tient principalement aux mouvements du dollar (contribution de 1,4 point) et des monnaies d'Asie (contribution de 0,6 point) ainsi que dans une moindre mesure, du yen et de la livre (contributions respectives de 0,2 et 0,1 point).

La compétitivité-coût 2( * ) de la France par rapport à ses 24 partenaires de l'OCDE s'est fortement améliorée en 2000, progressant de 4 % au premier semestre et de 2,5 % au second semestre. Cette évolution est liée principalement à la dépréciation du taux de change effectif nominal du franc, contribuant à hauteur de 3 %, au premier semestre, et de 1,9 %, au second, à l'amélioration de la compétitivité-coût. En outre, le différentiel d'évolution des coûts salariaux unitaires a été favorable à la France sur la période.

La compétitivité-prix 3( * ) de la France par rapport aux 24 pays de l'OCDE s'est elle aussi améliorée. L'essentiel de la progression a eu lieu au premier semestre, avec une hausse de 3,9 % contre 1,5 % au second. La compétitivité-prix ne s'améliore pas autant que la compétitivité-coût, traduisant un moindre effort de marge relatif de la part des exportateurs français, notamment au cours de la seconde partie de l'année.

Toutefois, pour la deuxième année consécutive, la part de marché relative de la France en valeur vis-à-vis des 24 pays de l'OCDE marque un recul de forte ampleur (- 0,5 point) et atteint fin 2000 un niveau historiquement bas, à 6,8 %. A la différence des Etats-Unis et, dans une moindre mesure du Japon, les principaux pays européens enregistrent un recul de leurs parts de marché en valeur. Ce repli ne doit pas surprendre : les pays européens échangeant avant tout entre eux et en euros, le moindre dynamisme des échanges intra-européens et l'appréciation du dollar et du yen ont provisoirement réduit le poids des échanges européens dans le commerce mondial. La part de marché mondiale de la France en valeur pourrait ainsi devenir légèrement inférieure à 5 % en 2000, selon les premières données disponibles (contre 5,3 % en 1999).

L'évolution des parts de marché en valeur est un indicateur délicat à interpréter. En effet, l'évolution de la part de marché mondiale d'un pays reflète non seulement sa compétitivité intrinsèque, mais aussi la variation des prix des marchandises échangées . Ainsi :

- la flambée des cours du brut en 1999 et en 2000 a eu pour effet d'accroître le poids du pétrole dans le commerce mondial, d'où une baisse mécanique de la part de marché française. La progression de certaines autres matières premières (métaux notamment) en 2000, liée à l'accélération de l'activité mondiale, a eu un effet également négatif sur la part de marché française ;

- l'appréciation du dollar en 1999 et en 2000 a réduit mécaniquement l'importance dans le commerce mondial des échanges de la France avec ses partenaires européens (échanges non libellés en dollars), d'où une nouvelle baisse de la part de marché mondiale de la France et de ses partenaires européens.

A l'inverse, la part de marché relative en volume de la France vis-à-vis des pays de l'OCDE, qui n'est pas affectée par la variation des prix des marchandises échangées, s'est stabilisée au cours de l'année 2000 au niveau atteint fin 1999, à 7,6 %.

La baisse de la part de marché de la France n'apparaît donc pas liée à un problème de compétitivité. Elle est essentiellement liée à des effets de valorisation, comme le montre la stabilité de la part de marché relative en volume.

Au total, la compétitivité-prix à l'export et la compétitivité-coût se situent, au premier semestre 2001, à un niveau supérieur, respectivement de 11 % et de 21,2 %, à la moyenne des vingt dernières années.


La compétitivité des produits français ne s'appuie pas uniquement sur leur prix, notamment dans le secteur des biens de consommation. Comme l'illustrent les enquêtes du Centre d'Observation Economique, les produits français semblent avoir une très bonne image auprès des importateurs des principaux pays européens, du fait de leur qualité, de leur caractère innovant, de la notoriété des marques françaises, et des services afférents (délais de livraison satisfaisants, bons services commerciaux).

La qualité reste cependant une notion délicate à mesurer. L'analyse de la compétitivité à la lumière des prix des échanges s'en ressent puisque des prix élevés peuvent signaler des coûts trop importants (faible compétitivité-coût) ou des produits de haute qualité (forte compétitivité structurelle). En Europe, il semble que l'Allemagne, mais également la France, se soient orientées principalement vers une concurrence par la qualité , alors que les entreprises espagnoles et italiennes s'illustrent davantage par la compétitivité de leurs prix. La France a de larges avantages en termes de qualité dans les secteurs de l'agro-alimentaire, de l'habillement, mais également dans quelques secteurs de la haute technologie (aérospatiale, industrie pharmaceutique).

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