ANNEXE 2 - COMPTE RENDU DE
L'AUDITION DE M. OLIVIER BROCHET, DIRECTEUR DE L'AGENCE POUR
L'ENSEIGNEMENT FRANÇAIS À L'ÉTRANGER,
LE
18 NOVEMBRE 2020
M. Christian Cambon, président. - Nous accueillons M. Olivier Brochet, directeur de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE). Nous vous avons auditionné le 7 mai dernier sur les conséquences de la crise sanitaire pour le réseau des écoles et lycées français à l'étranger. Nous sommes heureux de vous entendre à nouveau, sur le projet de loi de finances pour 2021.
Les crédits de l'AEFE sont stables, mais votre budget subira les conséquences de la pandémie, qui a entraîné un recul des effectifs malgré l'augmentation du nombre d'établissements homologués. Certains établissements sont durablement fragilisés.
Un plan d'urgence, dont le montant s'élève à 150 millions d'euros, a été annoncé par le Gouvernement le 30 avril dernier. Vous nous direz comment ce plan a été mis en oeuvre. Sera-t-il suffisant, alors que de nombreux pays ont été contraints de prendre de nouvelles mesures de confinement ?
Le Président de la République souhaite doubler le nombre d'élèves du réseau d'enseignement français à l'étranger à l'horizon 2030. Est-ce encore un objectif raisonnable, alors que les emplois de l'Agence continuent de reculer ? Notre commission a affirmé à plusieurs reprises qu'elle ne souhaitait pas que cette extension du réseau se fasse au détriment de la qualité de l'enseignement.
Ce réseau est, en effet, l'un des fleurons de notre diplomatie culturelle et d'influence, je l'ai constaté encore récemment au Caire et à Rabat. C'est une composante essentielle du « soft power » français à l'étranger, à l'heure où toutes les puissances, grandes ou moyennes, mènent des stratégies d'influence de plus en plus affirmées.
M. Olivier Brochet, directeur de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) . - La crise sanitaire a effectivement rendu la situation très difficile pour l'ensemble du réseau, avec de forts écarts cependant selon les territoires - et il nous faut aussi compter avec le risque terroriste, suite à l'assassinat de Samuel Paty, qui nous a conduit à passer en revue la sécurité de nos établissements, à rappeler les règles, et, au-delà de la sécurisation physique des établissements, à développer une culture de la sécurité pour tous les personnels. Dans ce contexte difficile, je remercie les familles qui font confiance à l'enseignement français à l'étranger, ainsi que les personnels de l'Agence, sans lesquels nous ne pourrions affronter la crise comme nous le faisons.
L'impact de cette crise sans précédent a montré la résilience du réseau de l'enseignement français à l'étranger. Le 7 mai, je vous disais que tout le réseau avait dû fermer ; avant l'été, quelque 150 établissements avaient rouvert, la moitié étaient ouverts à la rentrée de septembre puis, à la rentrée de la Toussaint, il ne restait plus que 11% des établissements encore fermés. La rescolarisation des enfants est un point très positif. La situation reste fragile, nous prenons toutes les mesures pour garantir la sécurité sanitaire de nos établissements, y compris la fermeture de tout ou partie d'un établissement lorsque c'est nécessaire, mais il y a du mieux, et j'espère que cela va continuer.
En cette rentrée, les effectifs, ensuite, sont presque préservés. L'enquête dite « de rentrée » a révélé à ce stade une perte globale d'environ 1 % des effectifs. Le réseau résiste. Cependant, les variations sont fortes : 40 % des établissements voient leur effectifs stables ou en augmentation, 60 % en perdent, un tiers en perdent plus de 5%. Les pertes peuvent aller jusqu'à 50 % dans de petites structures. Aucun établissement n'a fermé. Mais nous sommes inquiets pour la capacité de certains d'entre eux à passer le cap de l'an prochain, d'autant que l'année s'annonce encore incertaine. L'analyse par zones géographiques souligne aussi les contrastes : le Maghreb fait figure d'exception, avec une progression de 6 % des effectifs, grâce à une bonne résistance des établissements existants et à l'homologation de nouveaux établissements, conformément au plan de développement ; en Europe, les effectifs baissent très peu, de 1 % ; ailleurs, la baisse s'établit aux alentours de 3 ou 4 %, mais elle atteint 5 % en Asie. Le Liban est particulièrement touché : plusieurs milliers d'élèves manquent à l'appel alors que ce pays, avec 62 000 élèves, est notre premier contingent mondial. Aux États-Unis, la baisse est importante, de 9 %, alors que les effectifs sont stables dans le Canada voisin. L'analyse par nationalités montre que la diminution est la plus importante chez les élèves français (- 5%). L'effectif des étrangers de pays tiers baisse de 3,3 %. L'effectif des nationaux augmente (+ 1,4 %) notamment grâce à l'extension du réseau. L'analyse par catégories d'établissements, enfin, montre que les établissements en gestion directe (EGD) perdent peu d'effectifs (-1,3 %). Les difficultés sont concentrées sur quelques établissements. En revanche, les conventionnés perdent davantage d'élèves (- 3,8 %), ce qui fait mécaniquement perdre des recettes à l'Agence. Nous estimons la perte de recettes à environ 11 millions d'euros. Les établissements partenaires connaissent une croissance de leurs effectifs de 1,4 %, portés par les nouvelles homologations.
L'Agence n'a pas ménagé ses efforts au plus près du terrain pour soutenir la mise en place d'un enseignement à distance de qualité. Nous avons lancé, début septembre, une enquête pour évaluer l'enseignement à distance mis en oeuvre de janvier à juin 2020, préparée avec les enseignants et les parents d'élèves : les quelque 70 000 réponses que nous avons reçues établissent une bonne réception par les familles des dispositifs mis en place et indiquent des points à améliorer. Nous communiquerons très prochainement sur le sujet.
Nous avons mis en place le plan d'urgence demandé par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères et voté par le parlement pour aider les familles en difficulté. Sur les 50 millions d'euros qui ont été ouverts au programme 151 pour l'aide aux familles françaises, nous en aurons consommés 16 millions environ et Bercy accepte le report des sommes non dépensées sur l'année prochaine. Je suis donc confiant sur l'aide aux familles françaises. Pour l'aide aux familles étrangères en difficulté, 13,43 millions d'euros ont été mobilisés sur le programme 185, sous forme de subventions aux établissements pour qu'ils les répercutent aux familles ; une enveloppe spécifique, de 7 millions d'euros, a été prévue pour la trentaine d'établissements touchés par l'explosion du 4 août sur le port de Beyrouth, au Liban, une somme qui s'ajoute aux crédits qui ont été fléchés sur la Mission laïque française au Liban.
Nous entrons dans la deuxième phase du plan d'urgence, consistant à aider tous les établissements pour des dépenses qu'ils ont faites dans crise sanitaire, en protection, en équipement informatique, en prêts, en formation. Nous avons reçu 350 dossiers d'établissements, nous y consacrerons 25 millions d'euros, avec une attention particulière à ceux qui ont perdu plus de 5 % d'élèves. S'agissant des avances de trésorerie, nous avons accordé 38 avances, à hauteur de 4,7 millions d'euros, principalement à destination des établissements partenaires. Nous avons également utilisé notre trésorerie pour aider les établissements conventionnés, avec des échéanciers décalés pour le paiement de la participation à la rémunération des résidents (PRR) : au total, nous avons mobilisé 19,7 millions d'euros.
Quelles leçons tirer de cette crise sans précédent ? D'abord, la force et la résilience de notre modèle, celui d'un réseau soutenu fortement par l'État, ce qui le distingue par exemple des réseaux anglo-saxons. Nous constatons l'intérêt pour ce modèle, qui se traduit par une hausse des demandes d'homologation. L'Agence a aidé tous les établissements, quels que soient leurs statuts, nous nous sommes adaptés pour soutenir tout le réseau. La crise a démontré aussi que la solidarité dans notre réseau valait à l'égard des Français mais aussi des étrangers, au-delà, donc, du simple critère de la nationalité, je crois que c'est très important. Nous avons également démontré notre capacité à mettre sur pied, en partant de presque rien, un enseignement à distance qui soit de qualité, mais aussi de la formation à distance pour les enseignants - entre mars et juin, nous avons mené quelque 90 000 actions de formation des équipes dans les établissements.
Du côté des points de vigilance, il y a une inquiétude forte pour une trentaine d'établissements, qui se trouvent en grande difficulté et pour lesquels nous devons regarder jusqu'où nous pouvons les aider, et, plus généralement, une inquiétude sur les conséquences financières de la crise pour l'Agence.
Le plan de développement qu'a souhaité le Président de la République s'est trouvé perturbé par la crise, mais nous ne le perdons pas de vue. Nous avons homologué 14 établissements représentant 5 000 élèves de plus, nous en attendons de nouvelles avant la fin de l'année, ce qui témoigne de notre attractivité. J'espère que nous pourrons poursuivre nos actions en 2021, notamment dans le domaine de la formation et dans le sens d'une augmentation de nos capacités informatiques.
M. Ronan Le Gleut, co-rapporteur du programme 185 « Diplomatie culturelle et d'influence » . - Le lycée français de Lomé, au Togo, a perdu un cinquième de ses effectifs en quelques années, passant de 1 000 élèves à 812 élèves ; or, l'établissement, qui demande à rééchelonner un emprunt pour disposer de ressources, bute sur le blocage entre la Direction du Trésor et l'Association nationale des écoles françaises de l'étranger (Anefe) : comment en sortir - pensez-vous que l'article 49 du projet de loi de finances apporte une solution rapide ?
Autre problème, la sécurité et la question des recrutements. On le voit cette année à Ouagadougou, au Burkina-Faso, avec l'embuscade qui, le 11 novembre, vient de tuer quatorze soldats burkinabés. Le lycée Saint-Exupéry avait six postes vacants, il n'y a pas eu de candidats... il faut dire que la carte de conseils aux voyageurs publiée par le Quai d'Orsay s'est détériorée deux fois cette année pour ce pays. Comment, dans ces conditions, assurer le recrutement des enseignants ?
M. André Vallini, co-rapporteur pour avis du programme 185 « Diplomatie culturelle et d'influence ». - Votre exposé ayant répondu à bien des questions que j'avais préparées, je ne vous poserai que celle-ci : le soutien que vous apportez au Liban est-il coordonné avec le Fonds pour les écoles chrétiennes francophones au Moyen-Orient ?
M. Bruno Sido, co-rapporteur pour avis du programme 151 « Français à l'étranger et affaires consulaires » . - Les frais de scolarité augmentent régulièrement, ce qui rend plus sensible la question des bourses dont l'acuité devient encore plus forte dans le contexte de crise sanitaire. Les 14 et 15 décembre prochains, l'AEFE va tenir sa commission des bourses scolaires : allez-vous adapter les critères à la situation, en particulier pour les familles ayant souscrit un emprunt pour régler les frais de scolarité ? Dans quelle proportion pensez-vous utiliser les 50 millions d'euros qui sont ouverts pour l'an prochain ?
M. Guillaume Gontard, co-rapporteur pour avis du programme 151 « Français à l'étranger et affaires consulaires » .. - Les critères actuels utilisés pour l'octroi des bourses se fondent sur les revenus, le patrimoine immobilier et le patrimoine mobilier ; le système a des défauts, il ne tient en particulier pas compte du caractère de résidence principale, ou secondaire, pour le calcul du patrimoine immobilier. Il serait possible de se caler sur le patrimoine net de la famille : qu'en pensez-vous ?
Mme Hélène Conway-Mouret . - Les crédits pour les bourses sont-ils constants, ou bien allez-vous pouvoir utiliser ceux qui n'auront pas été consommés cette année ? Seront-ils suffisants dès lors que le nombre d'élèves va augmenter, de même que le nombre de familles en difficulté ? Allez-vous adapter les critères d'attribution ?
Une nouvelle organisation administrative et financière du réseau est mise en place en Allemagne, avec une seule agence comptable à Munich : pourquoi ce choix et quel impact sur les emplois ? D'autres regroupements de ce type sont-ils prévus ? Quel impact cela aura-t-il sur les ETPT ?
M. Philippe Folliot . - Lors d'un déplacement au Salvador il y a quelques années, j'avais été frappé de voir que si les élèves du lycée français n'y représentaient qu'une infime minorité des lycéens, nos interlocuteurs parlaient très souvent le français parce que, nous avait-on dit, l'élite du pays était passée par ce lycée français. Nous avions là un outil de rayonnement pour notre pays, avec des conséquences économiques puisque la compagnie aérienne régionale s'équipait en Airbus... Cependant, alors que l'Union européenne soutenait les écoles salvadoriennes, le lycée français n'avait pas accès aux crédits européens, ce qui était un frein à son développement : la situation a-t-elle changé sur ce point ?
M. Richard Yung . - Vous nous annoncez de bonnes nouvelles, et nous aurions été peu nombreux, en mai, à penser que la fermeture complète se traduirait par une baisse d'1% seulement du nombre des élèves. Je me réjouis, également, que Bercy autorise un report des reliquats des trois tranches de 50 millions d'euros prévus par le plan de relance - l'une pour les bourses aux élèves français, la deuxième pour les élèves étrangers et la troisième pour les établissements eux-mêmes.
L'objectif de doubler le nombre d'élèves d'ici 2030 paraît cependant bien ambitieux, parce qu'il demande de gagner, en moyenne, quelque 45 000 élèves chaque année ; vous nous annoncez 14 homologations et 5 000 nouveaux élèves, nous sommes loin de l'objectif : qu'en pensez-vous ?
M. Olivier Cadic . - Depuis vingt ans, nous avons gagné 2 % d'élèves chaque année, mais, mais dans la même période, le nombre d'élèves qui apprennent l'anglais est passé de trois, à vingt fois celui des élèves qui apprennent le français : c'est dire le terrain que nous avons perdu et c'est ce qui motive l'objectif de doubler le nombre d'élèves en dix ans. L'an passé, je vous ai demandé quel était votre objectif chiffré pour l'année, vous avez bien voulu me répondre par écrit mais sans me dire de chiffre précis. Or, si l'on veut tenir le rythme, il faudrait que les effectifs augmentent chaque année de 8%, soit 100 000 élèves de plus dans les trois prochaines années : où envisagez-vous ces progressions ? Quel est votre objectif à l'horizon 2023 ? De combien comptez-vous augmenter les effectifs des 71 établissements en gestion directe ? Vous avez mis en place un service d'appui au développement du réseau (SADR), qui fournit des prestations de services pour aider l'installation d'établissement ; quel est son chiffre d'affaires ? Je vois dans son organigramme qu'il est constitué pour beaucoup d'anciens enseignants et membres de l'inspection académique : des profils d'ingénieurs et de commerciaux n'y seraient-ils pas plus à même de développer l'activité et de convaincre de nouveaux investisseurs ?
Mme Joëlle Garriaud-Maylam . - L'Anefe a été créée il y a 45 ans par notre ancien collègue Jacques Habert pour aider à garantir les emprunts des établissements français d'enseignement à l'étranger. Elle est remise en question depuis un rapport de 2018 et l'article 49 du projet de loi de finances la dessaisit de sa compétence au profit de l'État. Je le regrette car cette association fonctionnait très bien, sous la présidence de notre ancien collègue André Ferrand à qui je veux rendre hommage. J'en profite d'ailleurs pour rendre hommage à tous les personnels de l'enseignement français à l'étranger.
La sécurité, ensuite, nous inquiète vivement. Nos établissements ont besoin de recruter. J'ai déposé une proposition de loi pour instituer un volontariat national d'enseignement en français, le Président de la République a fait figurer l'idée dans son discours de la Sorbonne, mais il semble que rien n'ait avancé depuis : pourquoi ? L'insécurité pour les enseignants est un fléau, on l'a vu au Cameroun, anglophone, où les assassinats d'enseignants camerounais se sont traduits par une déscolarisation des enfants.
M. Bernard Fournier . - Comment expliquez-vous que les effectifs aient diminué autant aux États-Unis - de 9% nous avez-vous dit ?
M. Olivier Brochet . - L'établissement de Lomé, au Burkina-Faso, s'est effectivement réorganisé et il rencontre des difficultés financières, j'espère qu'il pourra les surmonter dans un avenir proche. Nous l'accompagnons, en y détachant six enseignants formateurs, qui feront chacun un enseignement à mi-temps qui ne coutera rien à l'établissement puisque l'Agence prend en charge ces postes. Une renégociation de son emprunt redonnerait des marges de manoeuvres à l'établissement, il n'est d'ailleurs pas le seul à être dans cette situation, les banques peuvent être tout à fait disposées à renégocier, mais elles s'interrogent sur la reconduction de la garantie de l'État dès lors que l'Anefe sort du jeu. J'espère qu'une solution rapide et claire sera trouvée.
Les difficultés de recrutement à Ouagadougou illustrent le problème de la faible attractivité dans certains pays - qui a été aggravé par la crise sanitaire : l'an passé, il y avait huit postes à pourvoir à Ouagadougou et ils l'ont tous été. Cette année, aucun des cinq postes vacants n'a été pourvu. La covid vient s'ajouter au contexte sécuritaire. Le problème est général : alors que nous avons habituellement une soixantaine de postes non pourvus en septembre, nous en enregistrons plus de deux cents cette année, car des enseignants ont préféré rester en France, et pas seulement pour des raisons de sécurité, mais de crainte d'être bloqués pendant plusieurs mois loin de leurs familles. Les difficultés sont les plus grandes quand le contexte est difficile et que l'indemnité spécifique de vie locale (ISVL) n'est pas élevée. Une piste est aussi de créer des postes d'expatriés formateurs, qui ont pour mission de former des personnels locaux, et reçoivent des primes d'expatriation plus élevées.
Au Liban, nos apports sont bien entendu articulés avec ceux du Fonds de soutien aux écoles chrétiennes francophones, qui est géré par le Quai d'Orsay ; ses quelque 2 millions d'euros iront principalement à des établissements non homologués. Nous soutenons pour notre part les établissements homologués, dont un grand nombre sont d'ailleurs des établissements chrétiens : nous avons soutenu les familles libanaises en difficulté à hauteur de 5 millions d'euros, nous disposons de 7 millions d'euros pour la reconstruction suite à l'explosion du 4 août. L'Agence est à disposition des établissements bénéficiant du Fonds, pour engager ensuite des actions de formation pour leur compte avec l'aide de ces financements.
Le report des crédits pour les bourses - nous en aurons consommés 15 à 16 millions d'euros, sur une enveloppe de 50 millions d'euros - va nous aider l'an prochain. L'augmentation du nombre d'élèves n'est pas tellement due à des élèves français, à qui vont ces bourses. Nous tâchons bien sûr de tenir compte des circonstances, tout en respectant les critères réglementaires : nous avons par exemple calculé le montant de référence sur une année glissante, de juillet à juillet, pour prendre en compte la crise. Nous devons aussi appliquer les seuils de patrimoine immobilier, mais nous faisons preuve de souplesse et nous tâchons de tenir compte des revenus, quand la famille est proche du seuil. Nous devions former un groupe de travail pour examiner ces critères, la crise ne nous l'a pas permis, nous allons le réunir dès que possible avec des représentants qui sont à la Commission nationale des bourses (CNB).
En Allemagne, nous regroupons les fonctions comptables, pour mieux séparer ordonnateur et comptable, comme nous l'a demandé la Cour des comptes et comme nous le faisons aussi en Tunisie, au Maroc et en Italie, avec un seul agent comptable pour un réseau d'établissements et un secrétaire général dans chacun d'eux. Nous regroupons ainsi un réseau dans l'agence comptable de Munich, nous ne savons pas encore si Berlin y sera rattaché ou bien s'il le sera à Francfort. Une réflexion est en cours pour savoir si nous n'aurions pas intérêt à regrouper, en France, une agence comptable pour toute la zone euro. Quoiqu'il en soit, nous faisons toujours ces regroupements en tenant compte de leurs conséquences sociales.
L'enseignement français est un formidable outil d'influence, dans ce que le ministre appelle un terrain d'affrontement de l'influence. Les crédits européens soutiennent la coopération et l'aide au développement, les établissements français n'en relèvent pas puisque l'éducation reste une compétence nationale, je ne crois pas qu'il y ait d'évolution sur ce point.
Sur les chiffres et le développement du réseau, je serais d'un optimisme raisonnable, car si nous enregistrons effectivement une baisse, nous pouvons compter sur le retour des expatriés, qui a déjà lieu par exemple en Asie quand les parents ont compris que les établissements scolaires rouvraient. Les familles devraient continuer à revenir dans les prochains mois.
Nous aurons un reliquat reporté sur le programme 151. Sur le 185, les 50 M€ seront consommés cette année. S'agissant des avances France Trésor, nous n'allons pas consommer les 25 M€ ouverts. La Mission laïque française est revenue sur un besoin estimé en juin à 10 M€ de trésorerie, qui ne s'est pas concrétisé. Nous avons donc revu nos calculs initiaux.
Au-delà des chiffres récents, il faut aussi retenir notre méthode d'accompagnement du réseau - et le plan de développement annoncé le 3 octobre 2019 reste notre feuille de route, même si la crise sanitaire l'a perturbé. Nous avons installé le Service d'appui au développement du réseau, il suit 47 dossiers d'établissements, prépare des conventions d'accompagnement vers l'homologation, en lien avec les ambassades qui repèrent les investisseurs. Ce soutien porte tant sur le besoin en personnel que sur le besoin immobilier, la réglementation... La croissance est difficile à prédire : 5 000 nouveaux élèves à l'été, d'autres arrivent, nous pourrions dépasser les 10 000 nouveaux élèves cette année. Nous ne serons certes pas à 45 000 nouveaux élèves, d'autant qu'il faudra décompter ceux qui partent, mais nous faisons au mieux et renforçons notre méthode.
Le développement des établissements se heurte effectivement à des problèmes de financement, donc à la question de la garantie de l'État, l'Agence est prête à opérer dès que le nouveau système sera opérationnel. Des besoins importants existent aussi dans les EGD. Or notre mode de fonctionnement ne nous permet pas de recourir à l'emprunt. Je suis un peu inquiet car il sera très difficile d'augmenter les frais de scolarité. Or nous avons des besoins tant pour l'extension que pour l'amélioration de la qualité des bâtiments. L'extension des EGD et des conventionnés est indispensable à la croissance des partenaires car ce sont eux qui, bien souvent, permettront d'assurer la continuité éducative au collège et au lycée.
Le recrutement de nouveaux enseignants est nécessaire, le ministère de l'Éducation nationale a mis en place dans le master d'enseignement du français, un certificat d'aptitude à l'enseignement français à l'étranger. Des étudiants l'ont déjà validé, le travail se poursuit et nous coopérons avec le ministère de l'Éducation nationale sur ce point.
La sécurité est un sujet important de préoccupation. Nous souhaitons développer la culture de la sécurité. Nous avons aussi pris mesures et des instructions très précises pour rendre hommage à Samuel Paty tout en tenant compte des contextes locaux : nous voulons être fermes sur les valeurs - la quatrième édition de la Semaine des Lycées français du monde sera l'occasion de les mettre en exergue - tout en étant sobres dans l'expression, en tenant compte des publics et de l'environnement.
La baisse des effectifs aux États-Unis tient pour beaucoup aux familles expatriées, qui sont revenues en France et ont ensuite rencontré des problèmes de visas pour revenir outre-Atlantique. La crise sanitaire a eu des impacts directs aux États-Unis beaucoup plus qu'en Europe - où les familles bénéficient d'amortisseurs sociaux.
M. Christian Cambon, président . - Merci, nous sommes à vos côtés, pour le rayonnement du français et je rends hommage aux équipes qui font un travail extraordinaire. Les enseignants font honneur à la France. Nous serons particulièrement vigilants sur le Liban, un pays cher à notre coeur mais qui est dans un état d'implosion, et sur les questions de sécurité en général, face à la menace terroriste.