IV. QUEL FINANCEMENT POUR LE « SÉGUR POUR TOUS » ?
La rapporteure souhaite, en dernier lieu, évoquer un point spécifique aux personnels du secteur associatif habilité (SAH) : les primes dites « Ségur pour tous ».
Ces primes correspondent à une extension aux salariés du secteur privé médico-social de certaines primes consenties au secteur public en avril 2022 (dans le cadre, là aussi, d'une extension des mesures de revalorisation salariale des soignants à la suite du « Ségur de la santé » qui avait fait suite à la crise sanitaire de 2020).
Plus en détail, à la suite d'accord intervenus en juin 2024 et par des arrêtés du 24 juin12(*) puis du 5 août 202413(*), le Gouvernement a étendu les primes « Ségur » aux intervenants du secteur sanitaire, social et médico-social privé à but non lucratif. En pratique, ces arrêtés accordent aux salariés à temps plein du secteur une prime mensuelle de 183 € net (soit un montant de 248 € brut pour les employeurs, hors charges patronales), avec application rétroactive au 1er janvier 2024 dans certains cas.
Alors que le versement de ces primes devait s'accompagner d'une compensation financière de l'État, les associations s'alarment de constater que la circulaire de tarification du 16 juillet 202414(*) ne tient pas compte de leur versement et qu'elle ne leur donne aucun levier supplémentaire pour payer à leurs salariés les sommes supplémentaires auxquelles ils ont pourtant droit.
Au cours de la table ronde des représentants du SAH organisée par la rapporteure, il est apparu que nombre d'associations étaient en grande difficulté financière : sans trésorerie et sans possibilité juridique de débloquer les budgets dédiés aux primes exceptionnelles ou formations, celles-ci ne parviennent pas à payer la prime « Ségur » à leur personnel, notamment pour celles qui doivent garantir un « rattrapage » depuis le 1er janvier 2024.
La rapporteure se réjouit que, selon les indications données par le secrétariat général du ministère en audition, une partie des crédits complémentaires qui devraient être alloués au ministère de la justice à l'issue de l'examen du PLF pour 2025 soient « fléchés » pour combler cette lacune et permettre le versement de la prime « Ségur » aux personnels du SAH.
Toutefois, et de manière plus large, ce « flottement » soulève des interrogations quant à la place du SAH dans l'architecture globale de la PJJ. En dépit du rôle essentiel des associations dans la prise en charge des mineurs délinquants, celles-ci ne se sentent pas toujours reconnues à leur juste mesure. À cet égard, il est frappant de constater que la part du SAH dans les crédits de la PJJ est en baisse depuis 2021 (avec une diminution de 2,2 % entre 2024 et 2025, comme l'illustre le graphique ci-dessous), cette évolution étant par ailleurs hétérogène selon les types de mesures : là encore, le poids des CEF - qui représentent selon les associations environ la moitié des sommes allouées au SAH - peut sembler disproportionné, et donc contestable.
Source : Citoyens et Justice.
Il est essentiel, dans une logique de meilleure gestion de la diversité des acteurs de la PJJ, que le rôle du SAH puisse être à l'avenir affirmé et conforté. Le versement effectif de la prime « Ségur » contribuera à atteindre cet objectif. La rapporteure sera particulièrement attentive à cet enjeu et appellera le gouvernement à préciser ses intentions au cours de la discussion parlementaire en indiquant clairement le montant alloué au paiement de cette prime.
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La commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Protection judiciaire de la jeunesse » inscrits au projet de loi de finances pour 2025.
* 12 Arrêté du 25 juin 2024 relatif à l'agrément de certains accords de travail applicables dans les établissements et services du secteur social et médico-social privé à but non lucratif
* 13 Arrêté du 5 août 2024 portant extension d'un accord conclu dans le secteur sanitaire, social et médico-social privé à but non lucratif.
* 14 Circulaire relative à la campagne budgétaire 2024 des établissements et services concourant à la mission de protection judiciaire de la jeunesse.