EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er A -
Conditions d'intervention des collectivités
locales
dans le secteur des
télécommunications
La
question des contours de l'intervention des collectivités locales en
matière de télécommunications n'est pas nouvelle pour le
législateur et la lourdeur des engagements financiers publics qui y sont
attachés commande de l'aborder avec la plus grande précaution
La légitimité de l'intervention des collectivités locales,
dans un domaine qui est devenu un facteur de compétitivité
économique des territoires, ne fait pas de doute. L'accès aux
communications à haut débit est une nécessité pour
nombre d'entreprises. Les élus le savent: certaines entreprises sont
prêtes à se délocaliser pour en disposer. Or, dans les
zones les moins denses, où ni les réseaux câblés, ni
la technologie ADSL, ni la boucle locale radio ne sont encore disponibles, il
n'y a pas ou peu d'offre en haut débit et les pistes qu'ouvrent les
technologies satellitaires ainsi que la technologie Wifi (réseau local
haut débit sans fil) sont encore incertaines.
Le Sénat, fer de lance de l'intervention des
collectivités locales au service de l'intérêt
général que constitue l'aménagement numérique du
territoire
Soulignons que c'est à l'initiative du Sénat, lors de la
discussion du projet de loi d'aménagement du territoire (loi du 25 juin
1999), qu'un article L. 1511-6 avait été introduit dans le
code général des collectivités territoriales (CGCT) pour
reconnaître à ces dernières des compétences, dans le
respect de l'initiative privée, en matière d'installation
d'infrastructures passives de télécommunications (amendement
« fibre noire »), dont l'exploitation était
prévue pour être confiée à des opérateurs.
Cet article visait à rendre licites des initiatives de certaines
collectivités en matière d'aménagement du territoire ou de
développement de la concurrence sur le haut débit. Depuis
plusieurs années, de nombreuses collectivités territoriales se
trouvent confrontées à une absence d'offres permettant, pour les
entreprises désireuses de s'implanter ou existantes, voire pour
elles-mêmes, soit de réduire le prix des communications, soit de
répondre, dans des conditions raisonnables, aux besoins d'accès
à des services de télécommunications à haut
débit.
Aussi ont-elles pris des initiatives en matière d'équipement de
leur territoire en infrastructures de télécommunications
« passives » -infrastructures dites de « fibres
noires »- installées par elles mais destinées à
être exploitées par des opérateurs de
télécommunications.
Le texte -restrictif- adopté en dernier mot par l'Assemblée
nationale en 1999 fixait des conditions d'intervention juridiquement
contraignantes (constatation de la « carence » des
opérateurs de marché) et économiquement difficiles
à mettre en oeuvre (limitation à une période de huit ans
de la durée d'amortissement des investissements prise en compte pour
évaluer le prix de la location, contre plus du double en
général dans le secteur privé). Il a été
assoupli par la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant
diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel
(art. 19). Cette nouvelle rédaction a supprimé les
conditions de carence de l'initiative privée et d'amortissement en huit
ans afin de favoriser l'implantation de réseaux à haut
débit, revenant ainsi au dispositif préconisé depuis 1999
par votre commission.
En assouplissant ce texte, l'intention du législateur, clairement
démontrée par les débats au Sénat, n'était
pas de substituer les collectivités locales aux opérateurs de
télécommunications pour le déploiement des réseaux,
mais de leur donner un rôle d'impulsion, d'accompagnement, de
coordination. En particulier, l'article L. 1511-6 modifié par la
loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 précise que « ces
collectivités et établissements ne peuvent pas exercer les
activités d'opérateur au sens du 15° de l'article L. 32
du code des postes et télécommunications. ».
Cependant, les
comités interministériels
pour l'aménagement et le développement du territoire (CIADT) ont
accéléré le mouvement : celui de Limoges, le
9 juillet 2001
, a renversé la perspective. D'acteurs
complémentaires pour le développement des réseaux à
haut débit, les collectivités locales sont apparues en passe de
devenir les principaux acteurs -et « financeurs »- du
chantier de « l'accès pour tous à Internet à
haut débit d'ici 2005 ». L'Union européenne a
affiché une ambition équivalente à Séville, en juin
2002, en adoptant le plan e-Europe 2005.
Le CIADT du 13 décembre 2002 a été encore plus loin,
puisque le Gouvernement y a annoncé qu'il proposerait un texte
autorisant les collectivités locales à devenir opérateurs
de télécommunications, selon un champ et des modalités
à préciser. C'est ce qu'il fit à l'Assemblée
nationale lors de la première lecture du présent projet de loi en
février 2003 : le Gouvernement a déposé
in
extremis
un amendement reprenant une initiative parlementaire et
« mettant en musique » les promesses du CIADT. L'article
additionnel avant l'article 1
er
, voté par les
députés sans débat approfondi en raison du délai
très court dont a disposé l'Assemblée pour examiner
l'amendement gouvernemental, ouvre donc aux collectivités locales la
possibilité de devenir opérateurs de
télécommunications et précise les modalités et le
champ d'exercice de cette faculté.
Un objectif unanimement reconnu : le haut débit pour
tous
Quel est l'objectif poursuivi par cet article 1
er
A ?
C'est d'élargir le cadre, ressenti aujourd'hui comme incertain
9(
*
)
et très contraignant, de
l'article L. 1511-6 du CGCT afin que les collectivités locales
puissent se mobiliser vite et en priorité dans les zones où
aucune offre d'accès à l'Internet haut débit n'est
disponible à brève échéance. En cela, on peut dire
que le Gouvernement se fait l'écho d'une revendication très large
de nombreuses collectivités locales. Vos rapporteurs se
réjouissent que cette revendication ait été entendue. La
Commission supérieure des postes et télécommunications
avait d'ailleurs appelé le Gouvernement, dans son avis sur
l'avant-projet de loi économie numérique, à apporter une
réponse rapide à ce besoin pressant des élus. Cette
avancée est en marche.
La proposition du Gouvernement : des collectivités
opérateurs de télécommunications, mais ne pouvant offrir
de services au public qu'en cas d'insuffisance d'initiatives
privées
Le texte proposé par le Gouvernement et adopté par
l'Assemblée nationale répond à la demande des
collectivités locales par deux leviers très puissants :
d'une part, il crée, sans le dire, un « service public
local » des télécommunications en abrogeant l'article
L. 1511-6 qui figurait au chapitre des aides économiques du code
général des collectivités territoriales et en
intégrant le nouveau texte dans la première partie dudit code,
consacrée aux modes de gestion des services publics locaux ;
d'autre part, il permet aux collectivités locales de devenir
opérateurs de télécommunications dans les conditions
ci-dessous :
- octroi, à toute collectivité locale, de la liberté
d'établissement (ou d'acquisition) et d'exploitation de réseaux
de télécommunications après « consultation
publique » destinée à recenser les projets et les
besoins des opérateurs, des entreprises et de la population, ainsi que
les infrastructures et acteurs présents sur son territoire ;
l'exercice de cette fonction « d'opérateurs
d'opérateurs » doit « encourager les investissements
économiques efficaces » et « promouvoir
l'utilisation partagée des infrastructures » ;
- octroi, à toute collectivité locale, de la liberté
d'être opérateur de télécommunications proposant la
fourniture de services de télécommunications au public
après « consultation » révélant une
insuffisance d'initiatives privées propres à satisfaire les
besoins des populations et des entreprises ;
- transmission obligatoire du projet à l'ART, qui peut rendre un
avis dans le mois, notamment au regard de l'exercice d'une concurrence saine et
loyale sur le marché local des télécommunications.
Le texte prévoit aussi que les collectivités locales
opératrices ont les mêmes droits et obligations que tout
opérateur de télécommunications, que leur activité
d'opérateur doit faire l'objet d'une comptabilité distincte et
qu'elle doit être séparée juridiquement de la
« fonction » responsable de l'octroi des droits de passage.
Il prévoit également que l'ART est compétente pour
arbitrer tout différend, entre les collectivités locales et les
opérateurs exploitant les réseaux qu'elles ont établis ou
acquis, relatif aux conditions techniques et tarifaires d'établissement,
de mise à disposition et de partage des infrastructures. A cette fin,
elle peut obtenir des parties les conditions litigieuses et la
comptabilité afférente.
Concernant la téléphonie mobile, le texte prévoit qu'un
décret en Conseil d'Etat fixe les conditions techniques et tarifaires de
mise à disposition des infrastructures de réseau
créées en zone blanche par les collectivités locales.
Enfin, le texte prohibe la fourniture de services de communication
audiovisuelle et de télécommunications offerts au public sur les
réseaux câblés, établis ou exploités en
application de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative
à la liberté de communication.
Les risques d'une telle implication publique locale
Vos rapporteurs ne reviennent pas sur la nécessité,
confirmée par l'engagement du Premier ministre au dernier CIADT, de
faire souffler un vent de liberté locale sur les collectivités
locales impatientes de concrétiser leurs projets d'aménagement
numérique.
Toutefois, ils jugent important de ne pas occulter qu'une telle mobilisation
publique locale, sous la forme de la création tacite d'un
« service public » local des
télécommunications et d'une entrée des
collectivités locales dans le statut d'opérateur de
télécommunications, n'est pas sans risque : l'octroi de
telles facultés aux collectivités territoriales risque en effet
d'affecter le jeu de la concurrence (à la fois entre le secteur
privé et le secteur public et entre les opérateurs privés)
sur le marché des réseaux et services de
télécommunications. Elle risque aussi, voire surtout, de mettre
en péril les finances de certaines collectivités publiques,
notamment les plus fragiles... Nul n'a oublié l'impasse à
laquelle a mené le Plan câble.
C'est pourquoi on peut estimer qu'un équilibre doit être
trouvé afin que l'élan public local aiguillonne mais ne perturbe
pas la concurrence sur le marché des télécommunications,
lequel est fondamentalement en développement, notamment sur le haut
débit (la problématique se distingue en cela du marché de
la téléphonie mobile, qui est arrivé à
maturité et dont l'intervention publique peut combler les insuffisances
sans risquer de déstabiliser en profondeur l'équilibre
concurrentiel).
D'ailleurs, la France n'est pas en retard en matière de haut
débit. Bien au contraire
10(
*
)
: 38 % des internautes
français avaient un accès haut-débit en
avril 2003
11(
*
)
, contre
seulement 30 % des internautes suédois, 27 % des internautes
allemands, 22 % des internautes britanniques. Notre pays est même
placé, sur ce terrain, devant les Etats-Unis, où 35 % des
internautes « seulement » ont un accès
haut-débit. De tels chiffres doivent amener à relativiser
l'argument selon lequel la réglementation française est
« en retard » par rapport à celle de nombreux autres
pays européens, argument souvent invoqué pour ouvrir sans entrave
aux collectivités locales la faculté de devenir opérateurs
de télécommunications... Aussi, peut on considérer que
l'objectif à atteindre n'est pas d'ordre réglementaire mais bien
d'ordre opérationnel : offrir au plus grand nombre l'accès
au haut débit.
Pour vos rapporteurs, plusieurs points semblent mériter attention dans
la démarche initiée par le Gouvernement:
1. Est-il opportun, alors que la libéralisation du secteur des
télécommunications progresse depuis 1996, de créer un
service public local des télécommunications, au même rang
que les musées, les bibliothèques ou les archives ? Inciter
à des interventions publiques massives dans un secteur économique
dont le développement a été confié à
l'initiative privée, n'est-ce pas remettre en cause les fondements de la
libéralisation des télécommunications et de leur
régulation ?
Il ne faudrait pas qu'une louable volonté d'ouverture conduise à
favoriser une forme de collectivisation locale de l'offre de
télécommunications, alors même que ce secteur connaît
depuis 1996 une libéralisation continue dont chacun peut
apprécier les fruits
12(
*
)
.
A cet égard, l'exemple de l'Allemagne est édifiant : la
collectivisation du service local de télécommunications dans
certaines grandes villes allemandes conduit aujourd'hui les opérateurs
privés à s'en retirer... Ne serait-il pas contre-productif
d'aboutir à un tel résultat et de se priver de l'enrichissement
des services, de l'innovation technologique et de la responsabilité dans
la prise de risque dont sont porteurs, par essence, les acteurs privés.
2. A supposer que la création d'une compétence publique locale en
matière de télécommunications soit un passage
obligé afin de donner aux collectivités locales le moyen de peser
face aux opérateurs, en brandissant la menace d'une intervention
publique en lieu et place de l'offre privée, est-il nécessaire de
faire basculer une collectivité dans le statut d'opérateur de
télécommunications dès l'instant où elle
achète ou établit un réseau sans même l'exploiter ni
a fortiori
l'utiliser pour fournir des services aux utilisateurs
finaux ?
Il convient en effet de souligner que le statut d'opérateur emporte des
droits (droits de passage à tarifs privilégiés, droit
à l'interconnexion, bénéfice du recours possible au
mécanisme de règlement des différends de l'ART) mais aussi
des devoirs.
Parmi les devoirs qui incomberaient à la
collectivité locale
opérateur, on peut citer celui de faire
droit aux demandes d'interconnexion, mais également celui de se
soumettre à la régulation de l'ART -rupture juridique non
négligeable, qui ferait entrer les collectivités publiques
locales dans le champ du droit privé pour une partie de leurs
activités...- et surtout celui de
contribuer au fonds de service
universel des télécommunications
... Les collectivités
locales ignorent, pour la plupart, que cette charge financière viendra
s'ajouter à celles, déjà considérables, qui
découleraient de leur activité d'opérateur ! Votre
rapporteur pense notamment aux collectivités locales les plus modestes,
qui pourraient se trouver ainsi piégées sans avoir vu le danger.
3. Est-ce vraiment servir l'aménagement du territoire que d'inviter les
collectivités à payer « l'accès à haut
débit pour tous » ? N'est-ce pas favoriser un cumul des
charges sur les zones les moins riches -les zones denses étant
déjà couvertes par l'initiative privée-, à
l'inverse de la logique péréquatrice de l'aménagement du
territoire ? Faire financer les réseaux de communication par les
collectivités publiques et, qui plus est, les amener à s'engager
dans la voie dangereuse de l'exploitation de ces réseaux, n'est-ce pas,
aujourd'hui, créer un formidable effet d'aubaine pour les
opérateurs, et générer, pour les collectivités, un
risque économique démesuré ? D'ores et
déjà, la mobilisation de fonds propres (230 millions
d'euros) et de prêts à taux préférentiels sur
30 ans (1,5 milliard d'euros) de la Caisse des dépôts et
Consignations n'intervient qu'en complément des engagements des
collectivités locales, estimés entre 1 et 1,7 milliard
d'euros au total.
Si l'accès de tous au haut débit représente une grande
ambition et que sa réalisation passe, assurément, par une plus
grande liberté d'initiative pour les collectivités locales, cela
devrait parallèlement passer aussi par un renforcement des
mécanismes de solidarité entre elles. Les collectivités
locales les plus fragiles ne peuvent être laissées seules devant
le vide numérique. Le réexamen du périmètre du
« service universel » est prévu pour 2005 dans la
nouvelle directive européenne adoptée en mars 2002 : le haut
débit n'aura-t-il pas naturellement sa place dans le nouveau
périmètre du service universel
13(
*
)
? N'a-t-il pas vocation à
être un instrument de cohésion nationale ? Votre Commission
des Affaires économiques estime que c'est, au fond, le véritable
enjeu de l'aménagement numérique du territoire.
La proposition de la commission : les collectivités
locales, aiguillon des opérateurs privés, sans perturber le jeu
du marché
Sans attendre le débat communautaire qui pourrait conduire à
l'inclusion du haut débit dans le service universel en 2005, et
résoudre ainsi en profondeur cette question, le Sénat ne peut
ignorer l'impatience des collectivités locales ni la promesse qui leur a
été faite par le Gouvernement au CIADT de décembre dernier.
Toutefois, dans un esprit de prudence dicté par les réflexions
évoquées ci-dessus, votre commission, sur proposition de ses
rapporteurs, a adopté un dispositif qui vise à faire des
collectivités locales un aiguillon de la concurrence mais non pas des
perturbateurs de celle-ci. Il est donc proposé une grande marge de
manoeuvre pour les collectivités locales dans l'établissement des
réseaux, ce qui doit permettre de répondre aux insuffisances
manifestes du précédent article L. 1511-6 qui ne permettait
que de créer des infrastructures passives, c'est-à-dire
destinées à supporter des réseaux. En revanche, l'exercice
par la collectivité locale de la fonction d'opérateur
(exploitation de réseau et fourniture de service) se trouve mieux
encadrée.
En effet, l'économie générale de l'amendement repose sur
la distinction entre l'établissement de réseau et
l'activité d'opérateur proprement dite, laquelle consiste en
l'exploitation d'un réseau ouvert au public ou en la fourniture de
services de communication, selon le 15° de l'article L.32 du code des
postes et télécommunications.
Le dispositif s'articule ainsi :
- la collectivité locale est libre d'établir un
réseau de communication ou d'acheter un réseau existant si elle a
publié le projet adopté par son organe délibérant
dans un journal d'annonces légales pendant deux mois (ceci afin que se
manifestent les détenteurs de réseaux existants, ce qui devrait
éviter les doublons et les gaspillages importants d'argent public) et si
elle l'a transmis à l'Autorité de régulation des
télécommunications (ART). Elle doit simplement veiller à
la cohérence des réseaux présents sur son territoire,
garantir l'utilisation partagée des infrastructures et ne pas entraver
le développement de la concurrence. Cette grande liberté dans
l'établissement de réseaux représente une avancée
considérable pour les collectivités locales par rapport au
système en vigueur jusque là ;
- pour exercer une activité d'opérateur (exploiter un
réseau ou fournir des services, selon la définition du code des
postes et télécommunications), la collectivité locale doit
respecter les mêmes conditions de forme et de fond que pour
établir un réseau. Mais elle doit, en plus, avoir constaté
une insuffisance d'initiatives privées propres à satisfaire les
besoins des utilisateurs (ce constat apparaissant juridiquement plus
précis que la notion de « consultation révélant
l'insuffisance ») et en avoir informé l'ART. Ce
rétablissement du constat de carence, mais uniquement pour
l'exploitation et la fourniture de services, vise à protéger les
collectivités locales d'investissements excessifs -risque
économique- et l'équilibre du marché des
télécoms.
Le dispositif proposé vise donc à mieux encadrer le basculement
d'une collectivité locale vers le statut d'opérateur de
communication avec les droits et obligations qui s'y attachent. Par contraste
avec le texte initial du Gouvernement, il exonère également l'ART
de tout avis en amont sur le projet d'une collectivité locale, lui
évitant ainsi de se déjuger lors d'un éventuel
règlement des différends en aval relatif au même projet une
fois réalisé, règlement des différends pour lequel
elle est exclusivement compétente. L'ART doit simplement être
informée systématiquement en amont des projets des
collectivités locales.
L'amendement tend également à expliciter la séparation
juridique qu'exige la Commission européenne entre l'activité
d'opérateur de télécommunications et la fonction d'octroi
des droits de passage permettant l'établissement de réseaux :
pour cela, il est proposé d'interdire qu'une même personne morale
cumule ces deux fonctions.
Il tend aussi à systématiser la tenue d'une comptabilité
séparée pour les activités d'établissement ou
d'exploitation de réseaux de télécommunications, ou de
fournitures de services par les collectivités locales. Ceci doit
permettre à la fois d'assurer un suivi budgétaire des
activités de la collectivité locale en matière de
télécommunications et d'éviter toute distorsion de
concurrence par subvention croisée.
Il vise, par ailleurs, à supprimer les dispositions relatives à
la téléphonie mobile, qui ont leur place dans l'article
1
er
B dans le présent projet de loi.
L'amendement propose, enfin, quand l'établissement de réseaux ou
l'activité d'opérateur n'est pas rentable, de maintenir, pour les
collectivités locales, la possibilité, que leur ouvrait l'ancien
article L. 1511-6, de mettre leurs réseaux à disposition des
opérateurs à des tarifs inférieurs aux coûts ou de
compenser par des subventions, dans le cadre d'une délégation de
service public ou d'un marché public, les obligations de service public.
Le dernier paragraphe de l'amendement tend enfin à valider les
interventions que les collectivités locales ont déjà
menées dans le domaine du câble et à ne pas les soumettre
au présent article.
Votre Commission des Affaires économiques espère que, dans les
termes qu'elle propose pour la rédaction du nouvel article
L. 1425-1 du CGCT, les collectivités locales puissent être un
catalyseur utile pour attirer des opérateurs plutôt que de s'y
substituer.
Les autres amendements au texte transmis par
l'Assemblée
Trois autres amendements ont été adoptés par la Commission
des Affaires économiques :
- un amendement tirant la conséquence de l'abrogation de l'article
L. 1511-6 pour une autre disposition du CGCT : l'article L. 4424-6-1
du code général des collectivités territoriales
prévoyait que le territoire de la collectivité territoriale de
Corse était inclus dans les zones géographiques pour lesquelles
l'article 1511-6 prévoyait la possibilité d'octroyer des
subventions publiques venant en déduction des loyers de mises à
disposition des infrastructures de télécommunications aux
opérateurs. L'abrogation du 1511-6 du code général des
collectivités territoriales et l'absence de référence
à tout « zonage » dans l'article L. 1425-1
exigent donc de supprimer l'article L. 4424-6-1 du même code ;
- un amendement ayant pour objet d'assurer la sécurité
juridique des infrastructures destinées à supporter des
réseaux de télécommunications créées par les
collectivités territoriales en application de l'article L. 1511-6
du code général des collectivités territoriales que le
présent projet de loi tend à abroger ;
- un amendement de coordination, prévoyant de compléter
l'article L. 36-8 du code des postes et
télécommunications qui définit le périmètre
des différends dont le règlement relève de l'ART afin d'y
inclure les conditions techniques et tarifaires d'exercice d'une
activité d'opérateur de télécommunications ou
d'établissement, de mise à disposition ou de partage des
réseaux et infrastructures de télécommunications
visés à l'article L. 1425-1 du code général
des collectivités territoriales.
Votre commission vous demande d'adopter les quatre amendements qu'elle
présente, et l'article 1
er
A ainsi
modifié.
Article 1er B -
Couverture du territoire en
téléphonie mobile par la mise en oeuvre prioritaire de
prestations d'itinérance
locale
L'article 1
er
B, ajouté au projet de
loi par
un amendement parlementaire adopté en première lecture par
l'Assemblée nationale, reprend la proposition de loi adoptée par
le Sénat le 24 octobre 2002 et relative à la couverture
territoriale en téléphonie mobile de deuxième
génération par la mise en oeuvre prioritaire de prestations
d'itinérance locale entre opérateurs.
Cet article se place dans le cadre de l'application par les
collectivités territoriales de l'article L. 1425-1 du code
général des collectivités territoriales instauré
dans le présent projet de loi. Il prévoit, dans ce cadre,
l'obligation pour les opérateurs de couvrir les zones incluant des
centres-bourgs ou des axes de transports prioritaires identifiées par
les collectivités locales comme n'étant couvertes par aucun
opérateur (« zone blanche ») sur la base du principe
d'itinérance locale, sauf dans les cas où, par dérogation,
tous les opérateurs conviennent de recourir à la mutualisation.
Le texte prévoit également, dans ses paragraphes IV à VIII
la conclusion de conventions de mise à disposition d'infrastructure ou
d'équipements entre l'opérateur et la collectivité
territoriale et d'accords d'itinérance locale entre les
opérateurs, sur lesquels l'Autorité est rendue explicitement
compétente pour régler des différends sur le fondement de
l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications.
Votre rapporteur a proposé un amendement à cet article, visant,
pour une large part, à rapprocher le texte de la proposition de loi
sénatoriale reprise par l'Assemblée nationale en première
lecture du présent projet de loi, du nouveau contexte législatif
ouvert par l'article L. 1425-1 du code général des
collectivités territoriales ainsi que de l'approche contractuelle en
cours entre le Gouvernement, l'Autorité de régulation des
télécommunications, les associations d'élus et les
opérateurs.
Modalités financières
Le projet d'article 1
er
B ne précise pas les
modalités financières associées au processus. Seule existe
une référence à l'article L. 1425-1. Afin de prendre
en compte la concertation menée actuellement pour aboutir à la
convention qui devrait être prochainement signée avec les
opérateurs, il est proposé d'introduire un paragraphe relatif
à la question du financement, qui renvoie à une concertation
entre le Gouvernement, les collectivités territoriales, l'ART et les
opérateurs.
Succession des étapes du programme et rôle de
l'ART
Le texte initial prévoyait un calendrier global pour l'ensemble du
processus.
Il semble aujourd'hui que le calendrier initialement proposé
était très contraignant, et que le rôle qui avait
été confié à l'Autorité était
considérable. Ce scénario ne semble pas pleinement compatible
avec la démarche contractuelle engagée, avec la participation de
l'Autorité, entre le Gouvernement et les opérateurs. De plus, il
semble en pratique difficilement réalisable en l'état.
C'est pourquoi une mise à jour de cette procédure est
proposée, visant à la faire correspondre à la
démarche contractuelle engagée. Le fait qu'ait déjà
été réalisée l'étape de transmission des
besoins de couverture régionaux par les préfets au comité
de pilotage national peut être pris en compte a posteriori dans la loi,
au prix de modifications rédactionnelles limitées : introduction
des mots « au plus tard » dans l'échéance de
la première étape de remontée des cartographies
réalisées au niveau régional ; mention que la
réalisation d'une campagne de mesure sur le terrain n'est
nécessaire qu'en cas de différend sur la définition des
zones.
La limite contraignante de deux ans pour la réalisation du
déploiement paraît, à l'expérience, trop
sévère puisqu'en l'état actuel du projet de convention, le
déploiement de la phase 2 ne devrait intervenir qu'en 2005-2006.
Toutefois, cet encadrement calendaire paraît indispensable. Il est donc
proposé de prévoir 3 ans pour réaliser le
déploiement à partir de la promulgation de la loi. En
contrepartie, il est proposé que le ministre de l'aménagement du
territoire fasse un rapport au Parlement chaque année sur la progression
du plan de déploiement dans les zones blanches.
Concernant le rôle confié à l'ART, si l'Autorité
doit rester un point de référence quant aux aspects techniques et
concurrentiels du projet, il ne lui appartient pas d'effectuer seule des choix
stratégiques en termes d'aménagement du territoire. L'amendement
confie, en conséquence, au Gouvernement un rôle de validation du
dispositif, dans le cadre du comité de pilotage national prévu
par le projet de convention.
Différends relatifs aux conventions de mise à
disposition des infrastructures
Il est proposé que l'Autorité ne soit pas rendue
compétente pour le règlement de différends relatifs aux
conventions de mise à disposition des infrastructures, dans le cadre de
cet article. En effet, les dispositions générales prévues
à l'article L. 1425-1 s'appliqueront naturellement à ces
conventions. Donc, la compétence de règlement des
différends relatifs aux conventions de mise à disposition des
infrastructures par les collectivités territoriales confiée
à l'Autorité paraît superflue et sa suppression est
proposée.
Votre Commission des Affaires économiques vous demande d'adopter
l'amendement qu'elle présente, et l'article ainsi modifié.
Article 1er -
(Article 2 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986
relative à la
liberté de communication)
-
Définition de la communication publique en
ligne
L'actuelle rédaction de l'article 1
er
, telle
que
proposée par le Gouvernement et finalement adoptée par
l'Assemblée nationale, définit la communication publique en ligne
comme un sous-ensemble de l'audiovisuel. La caractéristique de ce type
particulier de communication audiovisuelle tient, selon le texte
examiné, au fait qu'elle est transmise sur demande individuelle
formulée par un procédé de
télécommunications. Cette caractéristique paraît
juste, et votre rapporteur salue la neutralité technologique de
l'expression « en ligne »
14(
*
)
, qui évite toute
référence précise à un support de diffusion et
recouvre donc tous les accès existants ou à venir aux
données disponibles sur l'Internet. Il n'en demeure pas moins que
l'inclusion de la communication publique en ligne dans l'audiovisuel se
révèle, par maints aspects, contestable.
Sans nier toute parenté entre la communication audiovisuelle et la
communication publique en ligne, qui ont en commun de ne pas relever de la
correspondance privée, c'est-à-dire de ne pas adapter leur
contenu en fonction de la personne qui en est destinataire, chacun
reconnaît, même intuitivement, qu'Internet n'est pas de
l'audiovisuel. Un exemple probant est fourni par les sites de commerce en
ligne, qui permettent de consulter un catalogue puis de passer commande, toutes
opérations fort éloignées de services audiovisuels. Dans
son rapport de juillet 1998 « Internet et les réseaux
numériques », le Conseil d'Etat indiquait d'ailleurs que
« des services tels que les forums de discussion, l'accueil de sites
Web, la vente à distance, l'accès à des bases de
données, la télé-médecine, la
télé-formation, comportent une composante communication au
public, mais ne nécessitent pas le même traitement que la radio ou
la télévision, qui demeurent des média de masse
spécifiques. »
La distinction fondamentale réside effectivement dans le
caractère de média de masse, ce caractère justifiant un
contrôle étroit, par le CSA, des contenus audiovisuels ainsi
diffusés à grande échelle. La communication audiovisuelle
est une communication point/multipoint, tandis que la communication publique en
ligne est une communication point à point, fournie sur demande
individuelle.
Personne ne le nie et quasiment tous ceux que votre rapporteur a
auditionnés reconnaissent que, rationnellement, la communication
publique ne peut être considérée comme incluse dans
l'audiovisuel. Tant l'ART que le CSA ou la Commission supérieure du
service public des postes et télécommunications (CSSPPT) ont
relevé, dans leurs avis sur le projet de loi « économie
numérique », l'ambiguïté de cette inclusion
résultant du texte de l'article L. 1. A l'Assemblée
nationale, la Commission des Affaires économiques et celle des Lois s'en
sont également émues en première lecture, même si le
texte a finalement été voté en l'état en
séance publique.
Si cette rédaction a pourtant été retenue, c'est dans
l'idée de faire bénéficier les industries culturelles en
ligne des système de protection nationale et internationale (notamment
à l'Organisation Mondiale du Commerce) dont jouit aujourd'hui la
création audiovisuelle, à travers les dispositions de la loi
n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté
de communication ou à travers la défense du principe de la
« diversité culturelle » dans les
négociations commerciales internationales.
Après de nombreux débats parlementaires manifestant
l'insatisfaction du législateur -déjà !- à
l'égard de la solution retenue, la loi n° 2000-719 du
1
er
août 2000 réformant celle de 1986 sur la
communication publique avait déjà posé les
premières briques de cet édifice quelque peu bancal, où
l'Internet fait partie de l'audiovisuel. En effet, la loi de 1986
modifiée en 2000 mentionne
a contrario
la communication
publique en ligne même s'il ne la définit pas : ainsi, un
nouveau chapitre VI relatif aux « services de communication en ligne
autres que de correspondance privée » a été
inséré par la loi de 2000, dans le titre II de la loi de
1986.
Votre rapporteur considère que l'architecture juridique de l'Internet
dont les fondements ont ainsi été posés en 2000 et qui se
trouve confortée par l'article 1
er
du projet de loi
« économie numérique » n'est pas
satisfaisante. S'il est légitime de vouloir protéger nos
industries culturelles, cet objectif ne saurait justifier une distorsion
juridique artificielle, c'est-à-dire une fausse définition de la
communication publique en ligne. D'autres moyens existent assurément
pour protéger la création culturelle française.
Il semblerait plus logique de reprendre l'ensemble de la loi de 1986, qui
s'intitule d'ailleurs « loi sur la liberté de
communication » et n'a donc pas vocation à ne concerner que le
champ audiovisuel, et de la restructurer, en maintenant un
« linteau » relatif aux principes (la liberté et ses
conditions d'exercice) régissant l'ensemble de la communication au
public, par opposition à la correspondance privée, puis de
créer deux piliers sous ce « linteau » : l'un
relatif à la « communication audiovisuelle » (dont
le coeur est constitué par la radio et la télévision) qui
reprendrait l'ensemble des dispositions actuelles de la loi de 1986 et
reposerait sur la régulation du CSA ; l'autre concernant la
« communication publique en ligne » (à savoir
Internet hors les services de radio et de télévision), qui
comprendrait les dispositions énoncées dans le texte
« économie numérique » et, si besoin,
pourrait prévoir une forme de régulation souple adaptée au
mode de fonctionnement particulier d'Internet (cyberespace ignorant les
frontières nationales).
En effet, il apparaîtrait inopportun de prévoir que les services
en ligne soient régulés par une autorité administrative
indépendante. Les autorités de ce type mises en place depuis le
début des années 1970 répondaient à trois cas de
figure : l'ouverture à la concurrence d'un marché (ART,
Commission des Opérations de Bourse) ; la protection contre l'Etat,
souvent pris dans un conflit d'intérêt (ART encore ou CNIL) ;
la nécessité d'une police spécialisée et
sectorielle (COB par exemple...).
Or l'Internet n'entre dans aucune de ces trois configurations, ce qui confirme
le principe avancé par le rapport du Conseil d'Etat « Internet
et les réseaux numériques » de juillet 1998 selon
lequel Internet ne représente pas un champ juridique spécifique,
et que les différentes législations sectorielles trouvent
à s'y appliquer, sous réserve de quelques aménagements. De
même, il semble à votre rapporteur que la police naturelle de
l'Internet est le juge et qu'il convient en conséquence d'écarter
le schéma de l'Autorité administrative indépendante, qui
ne correspond pas à un espace international et
décentralisé où les acteurs de l'Internet peuvent
pratiquer tout type d'activité.
Quant à la détermination du régulateur d'Internet, la
question reste pendante ; sans doute faudrait-il concevoir la
régulation d'Internet sur un mode très informel, certainement
inédit, qui reposerait, en raison des caractéristiques propres
d'Internet évoquées ci-dessus, sur une large concertation entre
les acteurs d'Internet et les autorités existantes chargées de la
régulation des secteurs traditionnels concernés. Ce concept
original s'apparenterait à celui de
« corégulation » préconisé par le
Forum des droits de l'Internet, association créée en mai 2001,
avec le soutien des pouvoirs publics, pour contribuer à
l'élaboration des règles et usages de l'Internet.
En tout état de cause, votre rapporteur considère qu'il serait
risqué de voter le texte en l'état : le risque serait que,
sur un tel fondement, le Conseil supérieur de l'Audiovisuel (CSA) se
retrouve régulateur de l'Internet, ce dont personne ne veut, à
commencer par le CSA lui-même.
Ce risque pourrait toutefois être minimisé en restreignant
à la radio et à la télévision (sur tout support,
donc y compris sur Internet) le champ de compétences du CSA. Une telle
restriction est annoncée par le Gouvernement comme devant figurer dans
la transposition à venir des directives communautaires du
« paquet télécoms ». Or ce texte n'a pas
encore été présenté en Conseil des ministres ni
donc déposé sur le Bureau de l'une des assemblées. La date
de sa discussion au Parlement, par voie de conséquence, reste largement
hypothétique.
Comment le Sénat pourrait-il voter l'article 1 dans sa
rédaction actuelle, sous réserve qu'un article du projet de loi
transposant le « paquet télécoms » vienne le
compléter d'ici quelques mois ?
C'est pourquoi votre Commission des Affaires économiques vous propose un
amendement au présent article.
Cet amendement tend à soustraire de l'article 1
er
de la loi
de 1986 la mention de la régulation par le CSA de l'ensemble de la
communication audiovisuelle pour la renvoyer logiquement à
l'article 4 de la loi de 1986, lequel ouvre le titre Ier
précisément intitulé « Du CSA ».
L'article 1
er
de la loi de 1986 comprendra donc désormais la
seule affirmation du principe de la liberté de communication
audiovisuelle et des limites opposables à ce principe.
Par ailleurs, il propose de cantonner le pouvoir du CSA au coeur de sa
compétence, à savoir les services de télévision et
de radio sur tout support technologique, y compris l'Internet : en effet,
le conseil n'a ni la légitimité, ni les moyens, ni l'envie de
réguler l'ensemble du secteur de la communication audiovisuelle, secteur
extrêmement vaste puisque, en vertu de la définition de la
communication en ligne retenue à l'alinéa 1 du présent
article, il comprend, outre les services de radio et de
télévision, l'ensemble des services de communication en ligne.
Par cohérence avec cette délimitation du champ de
compétences du Conseil Supérieur de l'Audiovisuel (CSA) à
la télévision et à la radio, l'amendement propose enfin de
définir, pour la première fois dans notre législation, les
services de radio et de télévision. Il paraît en effet
indispensable de clarifier le droit en la matière et de lever une
incertitude juridique qui serait préjudiciable aux différents
acteurs du paysage audiovisuel français.
Votre commission vous demande d'adopter l'amendement qu'elle
présente, ainsi que l'article ainsi modifié.
Article additionnel après l'article 1er -
Substitution du mot
« radio » à celui de
« radiodiffusion »
Votre
commission vous propose, à cet article, un amendement tendant à
insérer un article additionnel après
l'article 1
er
. Il vise à faire respecter dans notre
législation le principe de neutralité technologique et propose,
à cette fin, de substituer dans l'ensemble de notre législation
le terme de « radio » à celui de
« radiodiffusion sonore ».
En effet, le terme de « radiodiffusion sonore » est ambigu
car il se réfère non seulement au service diffusé mais
également à un mode de diffusion particulier, celui par ondes
hertziennes, qui n'est plus le seul utilisé, notamment du fait du
développement de l'Internet.
Votre commission vous demande d'adopter cet amendement créant un
article additionnel après l'article 1
er
.
Article 2 -
Responsabilité des prestataires
techniques
Elément essentiel de la sécurité
juridique des
prestataires techniques de l'Internet et donc facteur d'essor des
activités en ligne, cet article précise les conditions dans
lesquelles est engagée la responsabilité de ces prestataires et
transpose à cette fin les articles 14 et 15 de la directive 2000/31/CE
du 8 juin 2000 sur le commerce électronique, qui
prévoient le dispositif suivant, les règles applicables
étant fonction de la nature de l'activité technique
exercée
15(
*
)
:
- les hébergeurs (ceux qui louent un espace-disque pour
« héberger » des données produites par des
éditeurs et les acheminent vers le terminal de l'utilisateur des
réseaux qui en fait la demande), comme les fournisseurs d'accès
à l'Internet (ceux qui mettent leur serveur, toujours connecté
aux réseaux électroniques, à la disposition de ses
abonnés pour accéder au réseau Internet), ne sont
responsables de la diffusion de contenus illicites sur l'Internet que s'ils
n'ignorent pas l'existence de ces contenus illicites ; toutefois, ils
n'ont pas d'obligation générale de surveillance des
contenus ;
- en revanche, les éditeurs de contenus sont responsables de
l'illicéité des contenus, ce qui est logique puisqu'ils en sont
la source ;
- enfin, les opérateurs de télécoms ne sont pas
responsables de l'illicéité des contenus qu'ils transmettent
à moins d'avoir manipulé le contenu transporté et de ne
pas avoir seulement transmis le signal sur le réseau.
Cette transposition prend la forme d'une modification de plusieurs articles de
la loi du 30 septembre 1986 : les articles 43-7 à 43-11 et 43-14,
qui avaient été adoptés dans le cadre de la loi du
1
er
août 2000 mais avaient été partiellement
censurés par le Conseil Constitutionnel dans sa décision 2000-433
du 27 juillet 2000, au motif que les caractéristiques du comportement
fautif de nature à engager la responsabilité des
intéressés étaient insuffisamment déterminés.
-
Premier paragraphe
Ce paragraphe exclut les services de communication publique en ligne du champ
d'application de l'article 17 de la loi de 1986, c'est-à-dire qu'il
empêche le CSA d'exercer à l'égard de ces services de
communication publique en ligne les compétences spécifiques qu'il
détient en matière de préservation de la concurrence dans
le secteur de la communication audiovisuelle. Ce paragraphe, que
l'Assemblée nationale a substitué au projet initial du
Gouvernement qui prévoyait l'inverse, satisfait entièrement votre
rapporteur, puisqu'il concourt à retirer du champ de la
régulation du CSA la communication publique en ligne, et se trouve donc
en conformité avec l'esprit de l'amendement proposé à
l'article 1
er
du présent projet de loi.
-
Deuxième paragraphe
Ce paragraphe opère une renumérotation des articles du II de la
loi du 30 septembre 1986 du fait de la création d'articles nouveaux dans
cette loi par le III du présent article et par l'article 10.
-
Article 43-7
Cet article, qui n'est pas foncièrement différent de l'article
43-7 existant depuis la loi de 2000, impose aux fournisseurs d'accès
d'informer et de proposer à leurs abonnés des logiciels de
filtrage des contenus illicites. Même si cette obligation n'est assortie
d'aucune sanction juridique, on peut compter qu'elle sera spontanément
satisfaite par les fournisseurs d'accès en raison de la valeur
ajoutée commerciale qui y est attachée (de nombreux parents
cherchant ainsi à protéger leurs enfants
« surfant » sur l'Internet). En outre, face à
l'alternative filtrage à la source / filtrage à
l'arrivée, la dénonciation par les fournisseurs d'accès du
manque de fiabilité et de la faible faisabilité technique d'un
filtrage à la source (reposant sur le fournisseur d'accès
lui-même) les conduit nécessairement à plaider pour l'autre
membre de l'alternative que représente le filtrage reposant sur
l'utilisateur final qui aura doté son terminal d'un logiciel
approprié (permettant de sélectionner par mos-clefs les sites
dont on veut interdire l'accès).
-
Article 43-8
Cet article définit les hébergeurs comme des prestataires
assurant un stockage « direct et permanent » d'informations
destinées au public.
A cet égard, votre rapporteur estime cette définition trop
restrictive : elle ne prend pas en compte les exploitants de services
interactifs qui n'hébergent pas eux-mêmes les contenus
échangés ni ceux qui stockent des informations fournies par les
utilisateurs finaux. Elle pourrait notamment exclure les hébergeurs
offrant aux utilisateurs des forums de discussion.
En outre, l'idée d'un stockage permanent est assez illusoire, un
effacement des données étant toujours possible.
C'est pourquoi votre commission vous propose un amendement tendant à la
fois à supprimer la notion de stockage direct et à substituer la
notion plus large de « stockage durable » à celle de
stockage permanent. Il paraît en effet utile de préciser que le
stockage a un caractère durable pour exclure de la définition des
hébergeurs les activités de « cache », qui se
définissent comme le stockage automatique et temporaire de
données, activités qui sont soumises à un régime de
responsabilité différent, défini à l'article
L. 32-3-4 du code des postes et télécommunications,
introduit par l'article 4 du présent projet de loi.
L'article 43-8 définit aussi la responsabilité des
hébergeurs. La censure du Conseil constitutionnel de certaines
dispositions introduites par la loi de 2000 avait conduit à un
dispositif ne prévoyant plus que l'engagement de la
responsabilité des hébergeurs en cas de non-diligence à la
suite d'une saisine par le juge. Les dispositions ayant échappé
à l'annulation qui ont été promulguées ne rendent
donc que très partiellement compte de l'équilibre souhaité
par le législateur et, en tout état de cause, sont en retrait par
rapport à la directive 2000/31/CE.
Les modifications proposées par le Gouvernement visent à limiter
la mise en cause de la responsabilité civile des hébergeurs au
seul cas dans lequel, ayant la connaissance effective d'une activité ou
d'une information illicite, ou la connaissance de faits ou de circonstances
faisant apparaître ce caractère illicite, ils s'abstiennent d'agir
promptement pour retirer les données en cause ou rendre l'accès
à celle-ci impossible.
Ainsi rédigé, l'article 43-8 modifié de la loi
n° 86-1067 du 30 septembre 1986 institue une
responsabilité des hébergeurs qui, ayant connaissance de faits et
circonstances faisant apparaître l'illicéité d'une
donnée stockée, n'agissent pas avec promptitude pour la retirer
ou en rendre l'accès impossible. Il donne donc, conformément
à la directive, une marge d'appréciation à
l'hébergeur pour déterminer si l'information a ou non un
caractère illicite.
Il convient néanmoins de réduire au maximum cette marge
d'appréciation, car l'on ne saurait ériger l'hébergeur en
juge. Seul le juge peut dire si une donnée a un caractère
réellement illicite. Cependant, dans certaines hypothèses, le
doute quant au caractère illicite d'un fait est ténu, voire
inexistant, même pour un profane. On pense notamment aux données
à caractère pédo-pornographique, par exemple.
Dès lors, il apparaît nécessaire de préciser que la
responsabilité de l'hébergeur ne pourra être engagée
que si, en présence de faits ou de circonstances qui témoignent,
à l'évidence, d'une illicéité, il s'est abstenu
d'agir. Votre commission vous propose donc un amendement tendant à
introduire cette idée d'évidence dans la présente
disposition. Ceci revient à diminuer la charge d'appréciation que
le texte fait aujourd'hui reposer sur les hébergeurs, sans pour autant
les exonérer de constater l'illicéité quand elle est
évidente.
L'Assemblée avait introduit ici un alinéa destiné à
rassurer les opérateurs en prévoyant que les personnes qui
dénonceraient abusivement l'illicéité d'un contenu afin
d'en obtenir le retrait par l'hébergeur engagent leur
responsabilité pénale.
Votre rapporteur souscrit à cette initiative, mais il a proposé
de rectifier l'incrimination pénale actuelle, qui n'apparaît pas
satisfaisante.
D'une part, elle s'avère trop largement définie, l'intention de
nuire n'étant pas définie. D'autre part, le renvoi à
l'article 431-1 du code pénal est inopérant. Pour que cette
disposition s'applique, il faut qu'il existe des menaces destinées
à entraver l'exercice de la liberté d'expression. On voit mal
comment cet élément constitutif de l'infraction pourra être
rempli dans le cadre d'activités de communication publique en ligne.
En outre, puisque cette disposition vise à prémunir les
hébergeurs contre toute tentative de pression ou d'intimidation pour
qu'un contenu soit coupé, elle doit s'appliquer tant dans la situation
où la responsabilité civile des hébergeurs peut être
engagée que dans celle où leur responsabilité
pénale peut l'être.
C'est pourquoi votre rapporteur a proposé à la commission, qui
l'a accepté, un amendement afin, d'une part, de remplacer ce
deuxième alinéa de l'article 43-8 modifié de la loi du 30
septembre 1986 par une rédaction ne faisant pas référence
à l'article 431-1 du code pénal mais sanctionnant l'abus par la
même peine et faisant apparaître la nécessité d'une
intention de nuire ; et, d'autre part, de placer ce nouvel article
après l'article 43-9 relatif à la responsabilité
pénale afin qu'il s'applique en toute logique aux deux cas (civil et
pénal) d'engagement de la responsabilité des hébergeurs.
-
Article 43-9
En matière de responsabilité pénale, les hébergeurs
ne pourront voir leur responsabilité engagée que si, en
connaissance de cause, ils n'ont pas agi promptement pour faire cesser la
diffusion d'une information ou d'une activité dont ils ne pouvaient
ignorer le caractère illicite.
On peut estimer que les contours du comportement fautif déclenchant
cette mise en cause de la responsabilité pénale des personnes
assurant l'hébergement de contenus sont plus précis que dans la
rédaction retenue par la loi du 1
er
août 2000, dont
l'imprécision avait emporté la censure par le Conseil
constitutionnel. La loi de 2000 évoquait seulement la situation
où « ayant été saisies par un tiers estimant que
le contenu qu'elles hébergent est illicite ou lui cause un
préjudice, elles n'ont pas procédé aux diligences
appropriées ». Transposant fidèlement la directive, le
texte du présent projet de loi se réfère, lui, à la
passivité de l'hébergeur malgré la connaissance, qu'il ne
peut manquer d'avoir, du caractère illicite du contenu, ce qui
circonscrit opportunément le périmètre de la faute de
nature à engager sa responsabilité.
L'Assemblée nationale a introduit un article 43-9-1 dans la loi
n° 86-1067 du 30 septembre 1986, afin d'instituer une
procédure de notification destinée à porter l'existence de
faits litigieux à la connaissance des hébergeurs. L'instauration
d'une telle procédure répond au légitime souci d'encadrer
les éventuels signalements de contenus illicites qui seraient
effectués par les utilisateurs auprès des hébergeurs.
Néanmoins, votre rapporteur estime que l'institution d'une telle
procédure, aux effets juridiques au demeurant limités, puisqu'il
s'agit seulement d'instituer une présomption de connaissance de
l'existence de données, présentées comme
illicites
16(
*
)
, crée
davantage de difficultés qu'elle n'en résout. Il convient
notamment d'éviter que le formalisme assez lourd ainsi imposé aux
utilisateurs des services de communication publique en ligne ne les dissuade,
en fait, de signaler les contenus présentant un caractère
illicite.
Il serait souhaitable de préserver l'état actuel du droit
: en cas de litige, il appartient à toute personne s'estimant
lésée par l'inaction d'un hébergeur, de prouver que
l'existence d'un contenu, présenté comme illicite, a bien
été signalée à cet hébergeur. Rien
n'empêcherait cependant que les hébergeurs mettent
d'eux-mêmes à la disposition des internautes des formulaires en
ligne qui permettraient de guider leur démarche. C'est pourquoi votre
rapporteur a proposé à la commission, qui l'a accepté, un
amendement de suppression de l'article 43-9-1.
-
Article 43-10
Cet article exclut les prestataires techniques de la responsabilité
éditoriale au titre de producteurs de services de communication publique
en ligne. Cette précision atteste bien que le schéma qui
régit actuellement la chaîne des responsabilités dans le
secteur audiovisuel (responsabilité, en premier lieu, du directeur de la
publication, puis de l'auteur, puis, à défaut, du producteur)
n'est pas adapté aux services de communication publique enligne, ce qui
corrobore les réserves exprimées sur l'article 1
er
du
présent projet de loi.
L'article 43-10 est logique, dans la mesure où les prestataires
techniques sur Internet, s'abstenant de toucher aux contenus, ne peuvent
être tenus pour responsables de ces derniers : le fournisseur de
contenu sur Internet n'en est pas l'auteur, qui est lui seul responsable du
contenu.
-
Article 43-11
Le nouvel article 43-11 de la loi du 30 septembre 1986 transpose
fidèlement l'article 15 de la directive « commerce
électronique » qui pose un principe de non
responsabilité générale et
a priori
des
prestataires techniques de l'Internet du fait des contenus qu'ils
hébergent ou diffusent : ils n'ont aucune obligation
générale de surveiller le contenu des informations qu'ils
transmettent ou qu'ils stockent et ne sont pas tenus de rechercher des faits ou
circonstances révélant des activités illicites.
Il s'agit d'une rupture avec la jurisprudence qui mettait à la charge de
l'hébergeur une triple obligation générale d'information,
de vigilance et d'action.
Or les députés ont introduit une exception à ce principe
d'absence d'obligation de surveillance des contenus par les prestataires
techniques. Sans pour autant créer d'obligation générale
de surveillance
a priori
des contenus qu'ils stockent, les
députés, à l'invitation de M. Jean Dionis du
Séjour, rapporteur pour la Commission des Affaires économiques de
l'Assemblée nationale ont souhaité imposer aux hébergeurs
une obligation de surveiller que ne soit diffusée sur Internet aucune
information faisant l'apologie des crimes de guerre ou des crimes contre
l'humanité ou incitant à la haine raciale ou promouvant la
pornographie enfantine. Pour le filtrage de ce type de contenus illicites, les
hébergeurs seraient tenus à une obligation de moyens, sur le
fondement des considérants 47 et 48 de la directive qui semblent
autoriser d'imposer aux prestataires techniques la surveillance de certains
contenus spécifiques afin de détecter certaines activités
illicites.
Sans remettre en cause l'objectif légitime poursuivi par
l'Assemblée nationale de lutte contre la « délinquance
sociétale » identifiée par M. Dionis du Séjour,
votre rapporteur juge qu'il serait doublement inopportun de maintenir cet
alinéa :
- juridiquement, cet alinéa contredit l'article 15 de la
directive 2000/31/CE ici transposée, qui l'emporte sur les
considérants de la directive et qui interdit explicitement d'imposer aux
hébergeurs une « obligation générale de
surveiller les informations qu'ils stockent ou de rechercher activement des
faits ou des circonstances révélant des activités
illicites ».
Les services compétents de la Commission européenne ont
déjà attiré l'attention de la France sur cette
incompatibilité ;
- politiquement ensuite, l'instauration d'une censure de certains contenus
par les hébergeurs en amont risquerait de priver la justice d'indices
permettant de retrouver les éditeurs de tels contenus illicites et de
les sanctionner.
Votre commission vous propose un amendement de suppression du
deuxième alinéa de l'article 43-11.
-
Article 43-12
Afin de donner tous les moyens utiles aux autorités judiciaires
d'intervenir, dans les délais les plus rapides, pour faire cesser un
dommage occasionné par le contenu d'un service de communication en ligne
et assurer ainsi la mise en oeuvre des dispositions de l'article 43-8 de la loi
de 1986, les pouvoirs du juge des référés sont
précisés, comme l'autorise l'article 14 de la directive, par
l'insertion d'un article 43-12 dans la loi de 1986
17(
*
)
. Cet article a pour objet d'inciter
les autorités judiciaires à ordonner prioritairement des mesures
visant les hébergeurs. Le juge ne serait conduit à prescrire aux
fournisseurs d'accès d'empêcher la consultation d'un contenu mis
en ligne qu'en l'absence d'autre solution permettant de faire cesser le dommage
-« à défaut »-, c'est-à-dire,
concrètement, lorsque le site illicite est hébergé
à l'étranger et qu'il est donc impossible de faire
comparaître l'hébergeur.
Votre rapporteur n'ignore pas les difficultés techniques du filtrage.
Les fournisseurs d'accès à Internet (FAI) expliquent que sa mise
en oeuvre est coûteuse et complexe, que son efficacité est
contestable (les contournements étant toujours possibles) d'autant plus
que le filtrage par un fournisseur d'accès n'empêche pas tout
accès, par le biais d'un autre fournisseur d'accès, au site
illicite qui continuera d'être hébergé à
l'étranger. En effet, la décision du juge ne vaut que dans le cas
d'espèce et ne peut s'appliquer à tous les FAI. On peut toutefois
compter sur les règles de bonne conduite ou d'autorégulation en
usage entre les FAI nationaux pour qu'une décision du juge à
l'adresse de l'un d'entre eux soit considérée par les autres
comme étant de portée générale.
Il convient aussi que la mise en oeuvre du filtrage peut occasionner des effets
pervers, ou dommages collatéraux, et conduire, faute de précision
suffisante dans le dispositif de ciblage des contenus filtrés, à
filtrer des contenus légaux.
Toutefois, il estime qu'il convient de maintenir le recours au filtrage comme
une solution « par défaut » proposée au juge
afin d'obtenir que le contenu, lorsqu'il est impossible de le faire couper par
l'hébergeur, soit rendu d'accès impossible par tous moyens :
il s'agit donc bien d'une obligation de moyens pour les fournisseurs
d'accès, mobilisant l'état de l'art en matière de
filtrage. La procédure du référé, qui est
contradictoire, permettra d'ailleurs au FAI de faire valoir ses arguments sur
la difficulté concrète de mettre en oeuvre un système de
filtrage.
En tout état de cause, votre rapporteur souligne que l'article 43-12 ne
fait que tracer des pistes d'action au juge des référés,
chargé de prendre, par définition et conformément aux
articles 808 et 809 du nouveau code de procédure civile, toute mesure
propre à faire cesser le dommage, « telles que celles visant
à cesser de stocker ce contenu ou, à défaut, à
cesser d'en permettre l'accès ». L'article 43-12 n'a donc pas
lieu d'inquiéter les fournisseurs d'accès, puisqu'il explicite
seulement une disposition existante, intrinsèque à la
procédure de référé.
-
Article 43-13
Cet article impose aux fournisseurs d'accès et aux hébergeurs de
détenir et conserver -et de communiquer, si besoin, à
l'autorité judiciaire- les données concourant à
l'identification des auteurs du contenu ou de l'un des contenus des services
dont ils sont prestataires. En conséquence, les intermédiaires
techniques doivent fournir aux éditeurs de contenus les moyens
techniques de s'identifier.
Il s'agit donc, afin de faciliter l'action de la police et de la justice dans
la poursuite des infractions pénales commises par Internet, de pouvoir
repérer tout éditeur mais aussi tout utilisateur qui enrichit le
contenu d'un site (forum de discussion ou petites annonces).
Les députés ont souhaité rajouter une obligation de
vérification des données ainsi recueillies.
Votre rapporteur a préféré, dans un amendement seulement
partiellement rédactionnel, proposé de supprimer cette obligation
de vérification des données d'identification des auteurs de
contenus détenues par les fournisseurs d'accès et les
hébergeurs.
Une telle obligation de vérification de l'identité relève
en effet de pouvoirs de police et ne peut donc, à ses yeux, reposer sur
les prestataires techniques du commerce en ligne.
Elle peut ensuite sembler contraire à la directive du 8 juin 2000 qui
n'impose pas une telle obligation.
Votre commission vous propose donc de supprimer cette obligation de
vérification.
- Article 43-14
Cet article reprend et précise les dispositions de l'actuel
article 43-10 de la loi du 30 septembre 1986 : il impose aux
éditeurs de services en ligne de fournir les éléments
permettant de les identifier, ce qui est cohérent avec le champ
étendu donné à leur responsabilité par ce projet de
loi. Seuls les éditeurs non professionnels (par exemple tout internaute
créant un site personnel) peuvent choisir de conserver leur anonymat
mais sont alors tenus de communiquer à leur hébergeur les
éléments d'identification requis des éditeurs
professionnels et de « mettre »
-préféré par les députés au mot
« tenir » du projet de loi initial, pour plus de
clarté quant à l'accessibilité des informations
visées- à disposition du public les coordonnées de leur
hébergeur.
Votre rapporteur a proposé à votre commission, qui les a
acceptés, deux amendements à cet article : le premier
précise, afin d'éviter toute ambiguïté, que les
prestataires tenus, en vertu de cette disposition, au secret professionnel sont
les hébergeurs.
Le second vise à supprimer une partie du dernier alinéa du texte
proposé pour l'article 43-14 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre
1986 : en effet, la fin de cet alinéa prévoit que des
clauses contractuelles peuvent limiter l'étendue de l'obligation
légale faite aux hébergeurs de ne pas divulguer les
éléments d'identification personnelle des éditeurs
souhaitant conserver leur anonymat. Or cette réserve est absurde
puisqu'il est juridiquement impossible qu'un contrat déroge à une
obligation légale.
-
Article 43-14-1
A l'initiative des députés, cet article instaure un droit de
réponse pour les services de communication publique en ligne recourant
à un « mode écrit de diffusion de la
pensée ». Ce droit de réponse s'inspire de celui
existant en droit de la presse.
En conséquence, il est prévu, au paragraphe VI de
l'article 2, également introduit par les députés, de
supprimer le dernier alinéa du I de l'article 6 de la loi
n° 82-652 du 29 juillet 1982 de la loi de 1982. La suppression
de ces dispositions, relatives au droit de réponse existant pour les
services de vidéographie, s'impose en effet, afin d'éviter que
les services de vidéographie, dont certains sont assimilables aux
services de communication publique en ligne, ne soient soumis à deux
régimes juridiques différents en matière de droit de
réponse.
-
Article 79-7
Cet article, introduit par les députés, vise à assortir de
sanctions pénales le non-respect par les intermédiaires
techniques de l'obligation de conservation et de communication des
données qui leur incombe au titre de l'article 43-13.
Votre rapporteur considère également nécessaire d'assortir
l'obligation d'une sanction, mais il estime que celle-ci doit être
fixée en cohérence avec d'autres sanctionnant le non-respect
d'obligations similaires.
L'article L. 39-3 du code des Postes et télécommunications
prévoit que le fait, pour les opérateurs de
télécommunications, personnes physiques, de ne pas conserver les
données relatives à une communication est puni d'un an
d'emprisonnement et de 75.000 euros d'amende. Il prévoit
également que les peines applicables aux personnes morales sont celles
définies par l'article 131-38 et les 2° et 9° de
l'article 131-39.
Cette disposition, expressément applicable aux fournisseurs
d'accès, recouvre partiellement celle résultant de l'article 79-7
nouveau de la loi du 30 septembre 1986.
Afin de clarifier les peines applicables, il convient d'harmoniser le
régime des peines prévu par ces deux dispositions. Votre
rapporteur a proposé un amendement en ce sens à la commission,
qui l'a adopté.
-
Article 79-8
Cet article, introduit également par les députés, vise
à assortir de sanctions pénales le non-respect par les
éditeurs de l'obligation d'identification qui leur incombe au titre de
l'article 43-14.
Par cohérence, et afin de simplifier l'état du droit, votre
rapporteur a proposé à la commission, qui l'a accepté,
d'harmoniser le régime des peines défini par le texte
prévu pour l'article 79-8 de la loi du 30 septembre 1986 en
matière de responsabilité des éditeurs de contenus, avec
celui défini à l'article 79-7, dans sa rédaction
résultant de l'amendement précédemment adopté par
la commission.
Votre commission vous demande d'adopter cet article avec l'ensemble des
modifications qu'elle a présentées.
Article 3 -
(Article L. 332-1 et 335-6 du code de la
propriété intellectuelle) -
Protection de la
propriété
intellectuelle
L'article 3 précise, dans l'univers juridique de la
protection des droits de la propriété intellectuelle, les
dispositions générales de l'article 2 visant à donner au
juge les moyens de faire rapidement cesser un dommage occasionné par le
contenu d'un service de communication en ligne (coupure du contenu par
l'hébergeur ou, à défaut, c'est-à-dire si le
contenu illicite est hébergé à l'étranger, coupure
de l'accès18(
*
), malgré la
complexité et à l'efficacité discutable d'une telle
solution déjà évoquées plus haut au sujet de
l'article 2) : il étend, ainsi, les pouvoirs du président du
tribunal de grande instance, statuant par ordonnance sur requête19(
*
), pour faire cesser toute atteinte aux droits
d'auteur et aux droits voisins, selon la procédure spécifique de
la saisie-contrefaçon prévue par le code de la
propriété intellectuelle.
En cela, il transpose l'article 8 de la directive européenne
2001/29/CE
20(
*
)
relative aux
droits d'auteur et droits voisins : « Les Etats membres
veillent à ce que les titulaires de droits puissent demander qu'une
ordonnance sur requête soit rendue à l'encontre des
intermédiaires dont les services sont utilisés par un tiers pour
porter atteinte à un droit d'auteur ou à un droit
voisin. ».
La procédure de saisie-contrefaçon est une procédure
destinée à apporter la preuve des actes de contrefaçon et
à les suspendre provisoirement en attendant l'instance au fond, en
matière de propriété littéraire, artistique et
industrielle. Cette procédure doit être rapide et, à cette
fin, l'ordonnance sur requête a été
préférée à la procédure contradictoire du
référé (retenue par l'article 43-12 de la loi de 86 aux
termes de l'article 2 du présent projet de loi), dans la mesure
où l'effet de surprise facilite la saisie des éléments de
preuve de la contrefaçon. L'importance du facteur temps est telle en
matière d'infractions numériques aux droits d'auteur que
l'article 23 prévoit aussi, en cas d'intervention in fine
injustifiée du juge, de rétablir au plus vite les droits de
l'hébergeur ou du fournisseur d'accès : à cette fin,
l'article prévoit que, dans ce cas précis d'application de la
procédure de saisie-contrefaçon, le délai de
mainlevée prévu à l'article L. 332-2 du code de la
propriété intellectuelle soit réduit de trente à
quinze jours.
En outre, le I de l'article permet aux titulaires de droits voisins (et non
seulement de droits d'auteur) de bénéficier de la
procédure de saisie-contrefaçon et non plus seulement de la
procédure pénale; cette extension est conforme à l'article
8 précité de la directive « droits d'auteur et droits
voisins » et répond à l'attente des titulaires de
droits voisins (artistes-interprètes, producteurs de phonogrammes ou de
vidéogrammes, entreprises de communication audiovisuelle ...) qui sont
particulièrement touchés par le piratage et la contrefaçon
en ligne. Ainsi, 10 % de la consommation de musique en France serait
illicite selon la Société civile de production de phonogrammes.
Le cinéma est également de plus en plus touché par la
contrefaçon en ligne, avec le développement de l'accès
à Internet à haut débit. Il en va de même avec le
secteur de l'édition littéraire, des ouvrages
protégés s'échangeant de plus en plus souvent (notamment
dans le domaine de la bande dessinée).
Le II de cet article prévoit par ailleurs que le tribunal peut ordonner,
en cas de condamnation pour contrefaçon
21(
*
)
, la publication du jugement sur un
service de communication en ligne (au lieu d'une publication dans la presse).
Il complète à cette fin l'article L. 335-6 du code de la
propriété intellectuelle.
Comme le souligne Mme Michèle Tabarot, rapporteur pour avis au nom de la
Commission des Lois de l'Assemblée nationale
22(
*
)
, les deux volets de cet article
illustrent la relation paradoxale qu'entretiennent Internet et le droit :
à la fois, Internet soumet la règle de droit à des
défis considérables, et celle-ci peut aussi trouver le moyen
d'utiliser à son service les nouvelles technologies.
Pour conclure, cet article répond à la nécessité de
renforcer la lutte contre la contrefaçon sur les supports
numériques, lutte à laquelle sont légitimement
attachés les titulaires de droits de propriété
intellectuelle (auteurs, éditeurs, producteurs...). En effet, Internet
se prête particulièrement à la contrefaçon
numérique, à la fois par le caractère immatériel
des actes de contrefaçon, par la rapidité de leur diffusion et
par la dimension internationale d'une telle diffusion.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.
Article 4 -
Responsabilité des prestataires techniques
intermédiaires
Les
articles 2 et 3 précisent les conditions dans lesquelles est
engagée la responsabilité des prestataires techniques à
l'origine de la diffusion des services de communication publique en ligne
(éditeurs de contenus ; hébergeurs ; fournisseurs
d'accès à Internet).
L'article 4, pour sa part, définit les contours de la
responsabilité des prestataires
« intermédiaires », c'est-à-dire
chargés de la transmission de l'information : il s'agit des
opérateurs de télécommunications, c'est-à-dire les
exploitants de réseaux au sens des articles L. 33-1 et L. 33-2 du code
des postes et télécommunications. Il consacre, pour ces
prestataires intermédiaires, une absence de responsabilité
à raison des contenus qu'ils stockent, dès lors qu'ils ont
satisfait au respect de leur obligation de neutralité à
l'égard desdits contenus. En cela, il ne fait qu'expliciter les
dispositions déjà existantes à l'article L. 32-1 du code
des postes et télécommunications, qui impose aux
opérateurs de respecter le « secret des
correspondances » et « le principe de neutralité au
regard du contenu des messages transmis. ».
L'article 4 transpose les articles 12 et 13 de la directive 2000/31/CE :
- l'article 12 concerne les opérateurs chargés du
« simple transport » des informations sur le réseau
ou de la fourniture d'accès à ce réseau. Il les
exonère de toute responsabilité à condition qu'ils ne
soient pas à l'origine de la transmission, n'en sélectionnent pas
le destinataire et ne sélectionnent ni ne modifient les informations
transmises. Il autorise toutefois le juge national à exiger de ces
opérateurs de prévenir ou mettre fin à une violation ;
- l'article 13 concerne l'activité de « cache »
(stockage automatique, intermédiaire et transitoire des informations
transmises visant exclusivement à accélérer leur
transmission ultérieure à un autre destinataire
23(
*
)
) des opérateurs
désignés à l'article 12. Là encore, il les
exonère de toute responsabilité à condition qu'ils ne
modifient pas l'information, mais aussi qu'ils se conforment aux conditions
d'accès à l'information ainsi qu'aux règles usuelles de sa
mise à jour, qu'ils n'entravent pas l'utilisation licite et usuelle de
la technologie du « cache » afin d'obtenir des
données sur l'utilisation de l'information et qu'enfin ils retirent ou
empêchent l'accès à une information dès qu'ils ont
eu connaissance du fait qu'elle était retirée du réseau ou
que son accès était empêché ou qu'une
autorité administrative ou judiciaire avait demandé qu'il en soit
ainsi. De même, l'article autorise toutefois le juge national à
exiger de ces opérateurs de prévenir ou mettre fin à une
violation.
En pratique, on peut imaginer que les exploitants de dispositifs de
« cache » compteront, dans la plupart des cas, sur les
mécanismes internes de nettoyage automatique pour que s'éliminent
les données litigieuses et que ces dispositions législatives
trouveront rarement à s'appliquer.
L'article 4 transpose les articles 12 et 13 de la directive en introduisant
dans le code des postes et télécommunications, après
l'article L. 32-3-2, deux articles L. 32-3-3 (transposition
fidèle de l'article 12) et L. 32-3-4 (transposition
intégrale de l'article 13, présentant comme deux cas de figure
les cas d'engagement de la responsabilité des exploitants de
« cache »: détournement
délibéré, à des fins illicites, de l'usage usuel de
la technologie de « cache » ou passivité
malgré la connaissance de l'illicéité d'un contenu
relayé par le « cache »). Ces dispositions se
trouvent ainsi regroupées avec celles contenues aux articles L. 32-3-1
et L. 32-3-2 du même code, qui traitent des possibilités de
traitement des données par les opérateurs qui les transmettent
à des fins d'enquête judiciaire ou de facturation.
Par ailleurs, l'ancien article L. 32-3-3 du code des postes et
télécommunications devient l'article L. 32-5 du même
code dont il constitue le I.
Si une telle réorganisation pouvait s'entendre à la date de
rédaction du projet de loi, l'adoption depuis de la loi
n° 2003-239 du 18 mars 2003 sur la sécurité
intérieure amène à la revoir.
En effet, l'article 126 de cette loi abroge l'article L. 32-3-3 du code
des postes et télécommunications. Il est donc inutile de
prévoir son déplacement au L. 32-5 du même code.
En outre, l'article 72 de ce texte prévoit que les opérateurs
empêchent l'accès à leur réseau ou à leurs
service à partir de téléphones mobiles volés et
insère à cette fin un article L. 32-5 dans le code des
postes et télécommunications. Il est donc nécessaire de
remplacer dans le projet de loi « économie
numérique » la référence à l'article
L. 32-5 par une autre. Aussi, votre commission vous propose-t-elle de
porter le II nouvellement créé au sein du L. 32-3-3 et
prévu pour devenir le II du L. 32-5 dans un nouvel article du code,
à la suite des deux autres créés par le projet de loi,
à savoir l'article L. 32-3-5.
Cet amendement
effectue donc des modifications formelles afin de rendre
compatible l'article 4 avec la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour
la sécurité intérieure, notamment avec son article 72 qui
introduit déjà un article L. 32-5 dans le code des postes et
télécommunications et son article 126 qui abroge l'article
L. 32-3-3 du même code.
Votre commission vous demande d'adopter cet amendement, et l'article ainsi
modifié.
Article 5 -
(Article L. 34-11 du code des postes et
télécommunications) -
Attribution et gestion des noms de
domaine
Cet
article organise les règles d'attribution et de gestion des noms de
domaines sur l'Internet (partie de l'adresse Internet entre www. et .fr ou
.com, par exemple) : ces règles sont déterminantes
puisqu'elles assurent une identification simple et claire des services de
communication en ligne. A cette fin, il consolide le cadre juridique de la
gestion des domaines nationaux correspondant au territoire métropolitain
et aux départements et collectivités d'outre-mer, ces domaines
étant des ressources publiques limitées, voire rares : en
effet, les noms de domaine, comme toute appellation, ne sont pas en nombre
infini
24(
*
)
. L'enjeu du
« nommage » sur Internet est donc d'éviter que
certains déposent des noms de domaine reprenant les noms de grandes
marques n'ayant pas encore réservé cette appellation. Cet enjeu
est d'envergure internationale, mais les tribunaux nationaux demeurent
compétents pour trancher les litiges en matière d'attribution des
noms de domaine nationaux.
L'attribution des noms de domaine, historiquement assurée par un
organisme de droit américain, l'Internet corporation for assigned names
and numbers (ICANN), relève désormais d'organismes nationaux
délégués à cet effet par l'ICANN. Ainsi, en France,
l'Association française pour le nommage Internet en coopération
assume de facto, depuis le 1
er
janvier 1998, la charge exclusive de
l'attribution et de la gestion
25(
*
)
du « fr ». L'objet
du présent article est notamment de donner une base légale
à cette mission et à cet organisme et d'éviter que le
défaut de base légale ne puisse être invoqué comme
moyen à l'appui d'une plainte consécutive au refus
d'enregistrement d'un nom de domaine. Ce dispositif apporte donc une
sécurité juridique essentielle pour le droit des réseaux
numériques.
Il prévoit en outre la délégation de la gestion des noms
de domaines à un organisme désigné par le ministre
chargé des télécommunications. Il dispose aussi que
l'attribution d'un nom de domaine est assurée par ces
organismes
26(
*
)
dans
l'intérêt général, selon des règles non
discriminatoires rendues publiques et qui veillent au respect, par le
demandeur
27(
*
)
, des droits de la
propriété intellectuelle. Ceci donne valeur législative
aux principes qui fondent l'action de l'AFNIC et sont formulés en des
termes apparentés dans sa charte.
L'Assemblée nationale a en outre adopté deux amendements :
l'un prévoit que cette décision du ministre chargé des
télécommunications tendant à la désignation, ou au
retrait de la désignation, d'un organisme peut faire l'objet d'un
recours devant le Conseil d'Etat (ce qui se justifie au regard de l'enjeu que
représente la désignation d'un organisme détenant un
monopole en matière de nommage), l'autre précise que
l'attribution et la gestion des adresses rattachées à chaque
domaine de premier niveau sont centralisées par un organisme unique.
L'article 5 confie enfin au gestionnaire du domaine le soin de définir,
en concertation avec les acteurs intéressés, les modalités
pratiques de gestion de ces domaines, notamment la définition de
domaines partagés de deuxième niveau, les modalités de
contrôle des demandes d'enregistrement, l'interdiction d'enregistrer
certains noms de domaines.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.
Article 5 bis -
Cas d'infraction
pénale
Votre commission renvoie l'examen de cet article à la Commission des Affaires culturelles saisie pour avis.
Article 5 ter -
Insertion d'un communiqué au CSA dans la
procédure prévue par l'article L. 42-4 de la loi n° 86-1067
du 30 septembre 1986
Votre commission renvoie l'examen de cet article à la Commission des Affaires culturelles saisie pour avis.
Article 5 quater
-
Coordination
Votre commission renvoie l'examen de cet article à la Commission des Affaires culturelles saisie pour avis.
Article 6 -
Définition du commerce électronique et de
l'établissement
Cet
article a été profondément remanié par
l'Assemblée nationale. Le rapporteur de la Commission des Affaires
économiques de l'Assemblée nationale avait souhaité
notamment définir de façon plus précise, au premier
alinéa, le commerce électronique. Votre commission partage ce
souci louable. Toutefois, la rédaction actuelle du premier alinéa
soulève une difficulté : elle restreint la définition
à l'activité donnant lieu à un paiement, ce qui
présente l'inconvénient d'exclure toute la part de
l'activité consistant à offrir le bien ou le service, avant son
achat. Une telle limitation serait regrettable sur le plan pratique, et
vraisemblablement contraire à la directive 2000/31/CE sur le plan
juridique
28(
*
)
.
Votre commission vous propose donc de
reformuler cette définition
dans un sens qui englobe bien à la fois l'offre et l'acte d'achat.
Votre commission estime en outre que le deuxième alinéa comporte
un risque juridique, dans la mesure où il vise à engager la
responsabilité des intermédiaires, et ce dans des conditions mal
définies. En effet, la référence à
« toutes les opérations intermédiaires concourant
à la satisfaction finale de la commande » apparaît
excessivement large, et de nature à remettre potentiellement en cause
tout l'équilibre juridique actuel de la relation commerciale. Votre
rapporteur considère que la régulation de nouveaux secteurs de
l'activité économique n'implique pas de remettre à plat
tout l'édifice juridique antérieur, point de vue du reste
également exprimé par les commissions saisies au fond et pour
avis à l'Assemblée nationale.
Dans ces conditions, il apparaît inopportun de créer ici une
nouvelle situation juridique, aux conséquences difficiles à
évaluer en l'état. C'est pourquoi
l'amendement de votre
commission supprime ce deuxième alinéa, ainsi que le
troisième qui lui est lié
.
Enfin, le quatrième alinéa de l'article rappelle la
définition de l'établissement, au regard de la jurisprudence de
droit communautaire. Votre rapporteur remarque qu'il demeurera une marge
d'appréciation prétorienne quant à la durée
nécessaire à l'établissement, dans la mesure où la
définition actuelle
29(
*
)
est peu précise. Il paraît cependant difficile de parvenir
à une solution plus satisfaisante, dans la mesure où la directive
2000/31/CE est elle-même pour le moins floue sur cette question
30(
*
)
.
Votre commission vous demande d'adopter l'amendement qu'elle
présente, et l'article ainsi modifié.
Article 7 -
Principe de liberté du commerce électronique,
exceptions et
détermination de la loi
applicable
Cet article pose un principe général de liberté du commerce électronique, avant d'assortir ce principe d'exceptions visant les personnes établies en France (I A nouveau ), les personnes établies dans un autre Etat membre de l'Union européenne (I), et de préciser la loi applicable aux contrats conclus dans ce cadre (II).
a) Principe de liberté du commerce électronique et exceptions pour les entreprises établies en France
Le I A
nouveau
ajouté par l'Assemblée nationale faisait partie de
l'article 6, dans le texte initial du projet de loi. Les exceptions au principe
de liberté du commerce électronique, posées aux
troisième, quatrième et cinquième alinéas du I A
nouveau,
résultent d'une transposition fidèle du d) du 5
de l'article 1
er
de la directive 2000/31/CE.
Les matières visées par ces exceptions sont les jeux d'argent,
les activités de représentation et d'assistance en justice et les
activités des notaires « dans la mesure où elles
comportent une participation directe et spécifique à l'exercice
de l'autorité publique »
31(
*
)
, comme défini en droit
français par l'article 1
er
de l'ordonnance relative au
statut du notariat
32(
*
)
.
b) Principe de liberté du commerce électronique et exceptions pour les entreprises établies dans un autre Etat membre
Les
exceptions du I de l'article visent les entreprises établies dans un
Etat membre de l'Union européenne autre que la France. Elles portent
sur :
- le domaine des assurances, qui est déjà couvert par deux
directives de 1992
33(
*
)
,
transposées par la loi n° 94-5 du 4 janvier 1994 modifiant le code
des assurances ;
- la publicité et le démarchage des organismes de placement
collectif en valeurs mobilières, dans la mesure où l'article L.
214-12 du code monétaire et financier dispose qu'il appartient à
la Commission des opérations de bourse (COB) de définir les
conditions dans lesquelles ces organismes peuvent faire l'objet de
publicité ;
- les dispositions relatives aux pratiques anticoncurrentielles et aux
concentrations d'entreprises, qui sont régies par les titres II et III
du code du commerce ;
- les dispositions de lutte contre le
spamming
, qui sont du reste
portées par l'article 12 du projet de loi ;
- les dispositions portées par le code général des
impôts ;
- les droits protégés par le code de la
propriété intellectuelle.
La directive justifie ces exceptions au libre exercice du commerce
électronique en indiquant, dans son douzième considérant,
qu'« il est nécessaire d'exclure du champ d'application (...)
certaines activités compte tenu du fait que la libre prestation des
services dans ces domaines ne peut être, à ce stade, garantie au
regard du traité ou du droit communautaire dérivé
existant ».
c) Loi applicable aux contrats conclus par voie électronique
Le
paragraphe II de l'article détermine enfin la loi applicable aux
contrats conclus par voie électronique. La solution classique est
appliquée : ces contrats sont soumis aux lois de l'Etat membre dans
lequel le prestataire est établi. Cette disposition satisfait
également l'exigence du 1 de l'article 3 de la directive 2000/31/CE,
selon lequel « chaque Etat membre veille à ce que les services
de la société de l'information fournis par un prestataire
établi sur son territoire respectent les dispositions nationales
applicables dans cet Etat membre ».
Trois précisions sont ensuite apportées à ce principe. En
premier lieu, il ne peut avoir pour effet de remettre en cause la
législation nationale de protection du consommateur, et ce
« conformément aux engagements internationaux souscrits par la
France ». Ce dernier élément est un
référence implicite à la convention de Rome du 19 juin
1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles
34(
*
)
. L'annexe à l'article 3 de la
directive précise explicitement que ce principe ne s'applique pas aux
« obligations contractuelles concernant les contrats conclus par les
consommateurs ».
En second lieu, le principe d'application de la loi de l'Etat du prestataire
n'autorise pas à déroger aux règles de forme
impératives prévues par la loi française pour les contrats
créant ou transférant des droits sur un bien immobilier
situé sur le territoire national.
Enfin, ce principe n'autorise pas à déroger aux règles
spécifiques de détermination de la loi applicable aux contrats
d'assurance pour les risques situés sur le territoire d'un Etat partie
à l'accord sur l'Espace économique européen, qui sont
portées en droit français par les articles L. 181-1 à
L. 183-2 du code des assurances
35(
*
)
.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.
Article 8 -
Clause de
sauvegarde
Cet
article dispose qu'un décret en Conseil d'Etat définit les
conditions dans lesquelles l'autorité administrative peut restreindre le
libre exercice du commerce électronique, au vu des exigences de
l'intérêt général, et en particulier du maintien de
l'ordre et de la sécurités publics, de la protection des mineurs
et de la protection des personnes physiques, consommateurs ou
investisseurs
36(
*
)
.
Cette clause de sauvegarde est prévue par la directive 2000/31/CE
au 4 de son article 3.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.
Article 9 -
Éléments d'information
obligatoires
permettant l'identification du
prestataire
La
confiance des consommateurs dans l'économie numérique commande
que ceux-ci puissent facilement identifier les prestataires de services de la
société de l'information. Cet article transpose donc l'article 5
de la directive 2000/31/CE.
Votre commission partage pleinement le souci d'information du consommateur qui
a présidé à l'élaboration cet article. Toutefois,
la rédaction actuelle du texte apparaît tout à la fois
lacunaire et excessive. Elle est lacunaire en ce qu'elle supprime trois des
éléments d'informations prévus par la directive, et qui
figuraient dans le texte initial du Gouvernement :
- le numéro individuel d'identification établi dans le cadre
de la perception de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) ;
- le nom et l'adresse de l'autorité ayant délivré
l'autorisation, dans le cas d'une activité soumise à
autorisation ;
- les informations relatives aux règles professionnelles, à
l'ordre professionnel et à son Etat membre, dans le cas des profession
réglementées.
En revanche, l'Assemblée nationale a ajouté une obligation
d'information concernant les noms et versions des logiciels utilisés
pour effectuer les transactions et garantir leur sécurité, et une
« indication sur la disponibilité de leur code
source ».
La démarche apparaît donc contradictoire : la suppression de
certaines informations, pour ne pas noyer le consommateur, s'accompagne de
l'ajout d'autres informations, de caractère essentiellement technique,
dont il est permis de penser que peu de consommateurs seront à
même d'en apprécier la signification réelle.
Il est certain que le texte même de la directive 2000/31/CE, en son
article 5, soulève des difficultés : l'abondance et le
détail des informations exigées n'aboutissent-ils pas à
l'effet inverse de celui escompté ? Votre rapporteur en est, pour
sa part, convaincu.
S'ajoute en outre la question technique de la lisibilité de ces
informations, selon les différents supports de consultation. Dès
lors que celle-ci s'effectue au moyen d'un ordinateur, le problème est
sans doute moindre. Mais il apparaît considérable dans le cas
d'une consultation par téléphone mobile. Or, selon le
principe
de neutralité technologique
du cadre normatif, les règles
devraient valoir pour tous les supports.
Toutefois, le législateur est tenu par le cadre préalable
fixé par la directive. Dans ces conditions, aucune solution
n'apparaît pleinement satisfaisante. Votre commission estime donc que la
rédaction actuelle, sans résoudre la difficulté de fond,
découlant d'une rédaction contestable de la directive, ajoute une
difficulté supplémentaire.
Elle estime donc qu'il convient de s'en tenir aux termes de la directive, afin
de garantir du moins la neutralité économique de la transposition
pour les entreprises établies en France et soumises à la
concurrence de celles des autres Etats membres. C'est pourquoi, elle vous
propose
un amendement
en ce sens.
Votre commission vous demande d'adopter l'amendement qu'elle
présente, et l'article ainsi modifié.
Article 10 -
Identification du diffuseur de
publicité
Cet
article insère dans la loi du 30 septembre 1986
37(
*
)
un article 43-15 nouveau imposant que
toute publicité diffusée sur un service de communication publique
en ligne soit clairement identifiée comme telle. Son auteur doit
également pouvoir être identifié.
Ces dispositions s'inspirent du principe général du droit de la
communication qui veut que les contenus publicitaires soient toujours distincts
des contenus informationnels.
Une référence à l'article L. 121-1 du code de la
consommation étend à la publicité sur les services de
communication publique en ligne l'interdiction de la publicité
« de nature à induire en erreur » le consommateur,
ou « publicité trompeuse », aux termes du projet de
loi.
Cette référence à l'article L. 121-1 du code de la
consommation conduit à ce que la sanction de l'article 43-15 nouveau de
la loi du 30 septembre 1986 soit celle portée par les articles L.
213-1 et L. 213-6 du code de la consommation
38(
*
)
, auxquels renvoie l'article L. 121-6
du code de la consommation pour la sanction de l'article L. 121-1.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.
Article 11 -
Transparence de la publicité et de la promotion des
ventes
Cet
article vise le même objectif que le précédent :
promouvoir la confiance du consommateur en l'économie numérique
en garantissant un niveau de transparence des messages publicitaires. Il ajoute
trois articles à la section 1 du chapitre 1
er
du titre II du
livre 1
er
du code de la consommation, consacrée à la
publicité.
L'article L. 121-15-1 dispose que les publicités et offres
promotionnelles doivent pouvoir être facilement identifiées comme
telles.
L'article L. 121-15-2 nouveau dispose que les conditions entourant les
actions de promotion des ventes doivent être clairement
précisées et aisément accessibles. Ces dispositions
s'inscrivent par ailleurs dans le cadre plus général de
l'interdiction de la publicité trompeuse, défini à
l'article L. 121-1 du même code
39(
*
)
.
L'article L. 121-15-3 nouveau précise que les dispositions des
articles L. 121-15-1 et L. 121-15-2 nouveaux s'appliquent
également aux publicités et offres à destination des
professionnels. Il porte également la sanction des manquements aux
articles L. 121-15-1 et L. 121-15-2 nouveaux, en renvoyant à
l'article L. 121-6 du même code, qui renvoie lui-même aux
articles L. 213-1 et L. 213-6.
Si ces renvois indirects ne contribuent pas à la lisibilité du
texte pour le profane, votre rapporteur note cependant qu'ils permettent
d'inscrire la publicité par les services de communication publique en
ligne dans le cadre normatif existant, qui apparaît pleinement
satisfaisant en la matière.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.
Article additionnel avant l'article 12 -
Définition du courrier
électronique
Votre
commission vous propose d'extraire la définition du courrier
électronique, introduite par l'Assemblée nationale, de l'article
12 dont elle formait le III
nouveau
, pour en faire un article disjoint.
Cette définition est une transposition exacte du h) de l'article 2 de la
directive 2002/58/CE
40(
*
)
. Elle
est fort bienvenue, mais elle gagnerait sans doute à ne pas se retrouver
insérée au milieu de l'article 12 traitant plus
précisément du
spam
.
Votre rapporteur estime qu'une telle modification est de nature à
faciliter la lecture du projet de loi.
Cet article additionnel
crée
donc un 10°
bis
à l'article
L. 32 du code des postes et télécommunications, portant la
définition du courrier électronique.
Votre commission vous demande d'adopter cet amendement créant un
article additionnel avant l'article 12.
Article 12 -
Lutte contre le
spamming
Cet article comporte quatre paragraphes. Le paragraphe I porte l'essentiel du dispositif de lutte contre le spamming (prospection par automates d'appel et télécopieurs), en modifiant l'article L. 33-4-1 du code des postes et télécommunications. Le paragraphe II modifie l'article L. 121-20-5 du code de la consommation pour en faire un article suiveur de l'article L. 33-4-1 du code des postes et télécommunications. Le paragraphe III nouveau porte la définition du courrier électronique. Dès lors qu'aura été adopté l'amendement créant un article additionnel avant l'article 12 pour porter cette définition, il conviendra de supprimer le paragraphe III nouveau . Enfin, le IV nouveau , introduit par l'Assemblée nationale, prévoit une période transitoire avant que ne s'applique le nouveau régime de prospection publicitaire.
a) La lutte contre le spamming (paragraphe I)
L'article L. 33-4-1 du code des postes et
télécommunications, dans sa nouvelle rédaction, interdit
la prospection directe par automates d'appel et télécopieurs
utilisant les coordonnées de toute personne qui n'y a pas donné
son consentement préalable.
Le deuxième alinéa de cet article prévoit la même
interdiction pour la prospection par courrier électronique, à
l'exception notable de celle menée à destination des personnes
physiques ou morales non inscrites au registre du commerce et des
sociétés (RCS). La question se pose dès lors de savoir ce
qui justifie cette distinction entre la prospection par
télécopieur et celle par courrier électronique, introduite
à l'Assemblée nationale par le Gouvernement, avec le soutien de
la commission au fond. Le rapporteur de la Commission des Affaires
économiques de l'Assemblée nationale l'a justifié par
le caractère plus gênant du message par télécopieur,
qui mobilise de façon plus importante les ressources en bureautique des
entreprises
41(
*
)
. Votre
rapporteur n'est pas insensible à la finesse de cet argument.
Le troisième alinéa, introduit par amendement du rapporteur de la
Commission des Affaires économiques de l'Assemblée nationale,
donne une définition du consentement préalable
évoqué aux deux premiers alinéas. Votre rapporteur partage
pleinement le souci pédagogique qui anime M. Jean Dionis du
Séjour. La référence faite dans l'alinéa aux
données personnelles restreint cette définition au cadre du
présent article. Toutefois, votre rapporteur estime que, dans le
même souci de pédagogie et de clarté, il conviendrait de
préciser de façon explicite que cette définition s'entend
pour l'application des deux premiers alinéas de cet article. Cela
permettrait d'écarter tout risque de voir cette définition
dépasser le cadre pour lequel elle a été conçue et
affecter l'acception traditionnelle du consentement en droit civil. Votre
commission vous propose donc
un amendement en ce sens
.
Le quatrième alinéa précise que la transmission
d'informations par des moyens de diffusion automatisée n'est pas soumise
à ces restrictions dans le cadre des opérations de police et de
sécurité civile. On ne peut que souscrire à l'objectif de
cet alinéa. Toutefois, il apparaît peu nécessaire, dans la
mesure où le fait d'informer la population dans l'urgence et en cas de
menace envers la protection des personnes ou la sécurité du
territoire ne constitue en rien de la prospection directe, et encore moins de
la publicité, à laquelle est consacré le chapitre II du
titre II du projet de loi. Au contraire, une telle mention laisserait supposer
que ce domaine de l'action publique rentre dans ce cadre, ce qui aboutirait au
résultat inverse de celui visé. Votre commission estime donc
qu'il convient de supprimer cet alinéa, dont l'apport est pour le moins
incertain, et qui pourrait en réalité fragiliser ce qu'il entend
protéger. Tel est le sens du
deuxième
amendement
qu'elle vous présente à cet article.
Le cinquième alinéa prévu pour l'article L. 33-4-1 du
code des postes et télécommunications introduit une
dérogation à l'interdiction de la prospection directe sans
consentement préalable dès lors que cette prospection est le fait
« de la même entité analogue » que celle qui a
déjà fourni au consommateur visé des produits ou services
« analogues ». Votre rapporteur souscrit à l'analyse
conduisant à cette dérogation : il ne paraît pas
choquant qu'un prestataire puisse informer un ancien client de ses offres
actuelles, d'autant plus que cette dérogation ne dispense en rien le
prospecteur d'offrir en permanence au consommateur la possibilité
d'exprimer son refus de recevoir d'autres prospectus
42(
*
)
. En revanche, il souhaite affiner le
dispositif, dont certains termes apparaissent juridiquement mal définis.
Ainsi, l'adjectif « analogue » lui semble risquer
d'être source de nombreux contentieux, par son imprécision. Par
cette rédaction, le Gouvernement souhaitait assurer que les prestataires
limiteraient leurs prospectus électroniques aux produits ou services
pour lesquels l'intérêt du client était
avéré, puisqu'il en avait déjà consommé.
Toutefois, il sera difficile de définir concrètement l'analogie
entre les produits et services vendus et ceux offerts : le client ayant
acheté un téléviseur recevrait-il, si ce concept
d'analogie était retenu, de la publicité pour les seuls
téléviseurs, ou également pour les accessoires de
télévision, ou pour les produits de haute-fidélité,
ou même pour tous les produits bruns ? C'est pourquoi le
troisième amendement
de votre commission supprime ce concept peu
opératoire.
Cet amendement remplace également les termes de « même
entité commerciale » par ceux de « même
personne morale physique ou morale ». Là encore, la notion
d'entité commerciale ne renvoie pas à une définition
juridique bien connue, et est comme telle source potentielle de contentieux
inutiles. Cette rédaction visait à englober toutes les personnes
morales formant un même groupe commercial. La solution proposée,
pour créatrice qu'elle soit, ne semble pas trancher la question, dans la
mesure où l'on saurait difficilement apporter de réponse
précise avec une notion floue. L'amendement précité de
votre commission revient donc à la rédaction initiale du projet
de loi.
Le sixième alinéa de l'article L. 33-4-1 du code des postes
et télécommunications impose que tous les prospectus visés
aux deux premiers alinéas de l'article fassent apparaître
l'adresse par laquelle le destinataire puisse obtenir la cessation de la
prospection, ainsi que l'identité de la personne pour le compte de
laquelle la communication est émise et un objet pertinent du message.
Votre commission vous propose un amendement faisant plus clairement
apparaître ce dernier point, la rédaction actuelle introduisant
une confusion.
Le septième alinéa donne compétence à la Commission
nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) pour recueillir les
plaintes relatives au non-respect des dispositions de l'article L. 33-4-1
du code des postes et télécommunications. Cette disposition
s'inscrit dans le cadre de la loi du 6 janvier 1978 relative à
l'informatique, aux fichiers et aux libertés
43(
*
)
.
Le huitième alinéa dispose des conditions dans lesquelles les
infractions à l'article L. 33-4-1 sont recherchées et
constatées : l'article L. 450-1 du code du commerce
précise ainsi que ces infractions sont recherchées par des
fonctionnaires habilités à cet effet par le ministre
chargé de l'économie, qui peuvent, dans le cadre des
enquêtes demandées par le ministre de l'économie,
« accéder à tous locaux, terrains ou moyens de
transport à usage professionnel » et demander la communication
de tout document professionnel, au terme de l'article L. 450-3 du
même code. L'article L. 450-2 du même code dispose que les
enquêtes de ces fonctionnaires habilités donnent lieu à des
procès-verbaux et des rapports. L'article L. 450-8 du même
code dispose qu'« est puni d'un emprisonnement de six mois et d'une
amende de 7.500 euros le fait pour quiconque de s'opposer, de quelque
façon que ce soit, à l'exercice des fonctions » des
agents désignés à l'article L. 450-1.
Le neuvième alinéa prévoie qu'un décret en Conseil
d'Etat précise les conditions d'application de l'article L. 33-4-1
du code des postes et télécommunications, en tenant compte des
différentes technologies utilisées. Il importe en effet de
veiller à la neutralité technologique du cadre normatif. Votre
rapporteur estime du reste que ce principe de neutralité pourra
s'appliquer de manière plus effective dans le cadre de cet article que
pour d'autres dispositions du projet de loi, à l'image de celles de son
article 9.
b) Suppression du paragraphe III, devenu sans objet
Votre commission vous propose un amendement de suppression de ce paragraphe, en cohérence avec l'amendement créant un article additionnel avant l'article 12.
c) Prolongation de la période transitoire crée par la paragraphe IV nouveau
L'interdiction immédiate d'utilisation des informations
relatives aux clients collectées dans le respect des normes
législatives et réglementaires actuelles, quoique possible d'un
point de vue juridique
44(
*
)
,
serait porteuse de conséquences économiques lourdes. Afin de
limiter celles-ci, l'Assemblée nationale a introduit une période
transitoire pendant laquelle les détenteurs des informations pourront
solliciter le consentement des personnes concernées. Votre rapporteur
souscrit pleinement à cette démarche. Toutefois, il note que le
terme de cette période transitoire a été fixé au 31
octobre 2003, date d'expiration du délai de transposition de la
directive 2000/31/CE. Cette date ne paraît guère réaliste,
car elle correspondrait à un délai réel de quelques jours,
dans la mesure où l'adoption définitive du présent texte
n'est pas prévue avant, au mieux, le mois d'octobre.
Votre commission vous propose donc
un amendement substituant
à
cette date fixe un délai mesuré à compter de
l'entré en vigueur de la loi pour la confiance dans l'économie
numérique.
Votre commission vous demande d'adopter les six amendements qu'elle
présente, et l'article ainsi modifié.
Article 13 -
Régime des contrats
électroniques
Cet
article complète l'article L. 121-20-4 du code de la consommation.
En effet, cet article exonère « la prestation de services
d'hébergement, de transport, de restauration, de loisirs qui doivent
être fournis à une date ou selon une périodicité
déterminée » des prescriptions des articles
L. 121-18 et L. 121-19 du même code, qui imposent des
obligations spécifiques d'information du consommateur dans le cas de
ventes de bien ou de prestations de services à distance. En effet, ces
obligations apparaissaient difficiles à tenir en l'espèce.
Toutefois, dans le cadre de l'effort pour promouvoir la confiance dans
l'économie numérique, il importe qu'une exigence accrue porte sur
les contrats conclus par voie électronique et visant à la
prestation de ces services, ce à quoi tend cet article du projet de loi.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.
Article additionnel après l'article 13 -
Rectification d'une
incohérence dans le code de la consommation
Cet
article a pour objet de rectifier une incohérence juridique apparue
à la suite de modifications du code de la consommation par l'ordonnance
n° 2001/741 du 23 août 2001. En effet, celle-ci à
modifié l'article L. 121-16 auquel il était fait
référence à l'article L. 121-27 du même code, qui
traite du démarchage par téléphone. Afin de
rétablir dans ce domaine une protection du consommateur efficace, il
importait de corriger cet incohérence, en étendant la
référence présente à l'article L. 121-27 aux
articles L. 121-18 et L. 121-19 précités, ainsi qu'aux articles
L. 121-20 et L. 121-20-1, qui portent sur le droit de rétractation, et
L. 121-20-3, qui dispose des conditions d'exécution de la commande par
le prestataire. C'est ce à quoi s'est attachée, à juste
titre, l'Assemblée nationale.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.
Article 14 -
Régime des actes et contrats souscrits et
conservés
sous forme
électronique
Votre commission renvoie l'examen de cet article à la Commission des Lois saisie pour avis.
Article 15 -
Adaptation par ordonnance des formalités requises
pour les contrats passés par voie
électronique
Votre commission renvoie l'examen de cet article à la Commission des Lois saisie pour avis.
Article 16 -
Conservation de la preuve du contrat conclu par voie
électronique
Votre commission renvoie l'examen de cet article à la Commission des Lois saisie pour avis.
Article 17 -
Définition des moyens et des prestations de
cryptologie
Cet
article donne une nouvelle définition des moyens et prestations de
cryptologie. La définition actuelle figure à l'article 28 de la
loi du 29 décembre 1990
45(
*
)
, abrogé par l'article 29 du
présent projet de loi. La nouvelle définition est marquée
par une inversion de la logique : alors que l'article 28 de la loi du 29
décembre 1990 définissait en premier lieu la prestation de
cryptologie, pour y adjoindre des moyens de cryptologie non définis
outre mesure, les définitions de l'article 17 cernent avec
précision les moyens de cryptologie, les prestations étant
dès lors « toute opération visant à la mise en
oeuvre, pour le compte d'autrui, de moyens de cryptologie ».
Cette définition s'attache en outre à préciser les trois
objectifs de la cryptologie : préserver la confidentialité
des communications, permettre leur authentification et la vérification
de leur intégrité.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.
Article 18 -
Utilisation, fourniture, transfert, importation et
exportation
de moyens de
cryptologie
Cet
article renverse complètement le régime d'encadrement de la
cryptologie, en posant au paragraphe I le principe général de
liberté des moyens de cryptologie.
Le paragraphe II applique ce principe général à
l'espèce des moyens de cryptologie dont la seule fonction est
l'authentification ou le contrôle de l'intégrité des
messages.
Logiquement, les paragraphes III et IV s'attachent à la dernière
des trois fonctions de la cryptologie définies à
l'article 17 : l'utilisation traditionnelle à des fins de
confidentialité des messages. Cette utilisation traditionnelle est aussi
celle qui reste la plus encadrée. Le paragraphe III traite du transfert
depuis un Etat membre de la Communauté européenne ou
l'importation de ces moyens ; le paragraphe IV traite de leur transfert
vers un Etat membre ou de leur exportation.
La fourniture, le transfert depuis un Etat membre de la Communauté
européenne ou l'importation depuis un Etat tiers des moyens visant
à assurer la confidentialité des communications sont soumis, en
vertu du paragraphe III de cet article, à une déclaration
préalable auprès du Premier ministre, qui peut demander
communication des caractéristiques techniques du moyen de cryptologie
ainsi que le code source des logiciels utilisés pour le mettre en
oeuvre, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat.
Le même décret dispose toutefois des conditions dans lesquelles le
transfert depuis un autre Etat membre de la Communauté européenne
ou l'importation d'un moyen de cryptologie peuvent être dispensés
de toute formalité préalable, dès lors que ce moyen n'est
pas de nature à affecter les intérêts de la défense
nationale et de la sécurité de l'Etat. Concrètement, cette
disposition permet un régime de liberté pour les moyens de
cryptologie à fin de confidentialité mais peu
sophistiqués, qui ne présente pas de danger pour l'ordre public.
Aux termes du paragraphe IV, le transfert vers un autre Etat membre ou
l'exportation vers un Etat tiers sont soumis à autorisation du Premier
ministre, avec la même dérogation pour les moyens peu
sophistiqués.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.
Article 19 -
Régime de la prestation de services de
cryptologie
Le
paragraphe I de cet article prévoit un régime déclaratoire
pour la prestation de services de cryptologie. Toutefois, comme dans le cas des
moyens de cryptologie, des dérogations sont possibles pour les
prestations élémentaires, qui ne sont pas de nature à
menacer l'ordre public ou la sécurité de l'Etat.
Le paragraphe II dispose que les prestataires sont assujettis au secret
professionnel, le manquement à celui-ci étant puni d'un an de
prison et de 15.000 euros d'amende, aux termes de l'article 226-13 du code
pénal. Votre rapporteur estime que ce point est particulièrement
important pour développer la confiance des acteurs en l'économie
numérique.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.
Article 20 -
Responsabilité des prestataires de services de
cryptologie
à des fins de
confidentialité
Cet
article établit une présomption de responsabilité des
prestataires de services de cryptologie à des fins de
confidentialité, dès lors que celle-ci n'a pas été
respectée. Comme le second paragraphe de l'article 19, cet article
revêt une forte charge symbolique, à-même de promouvoir la
confiance des consommateurs de services de cryptologie.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.
Article 21 -
Responsabilité des prestataires de services de
cryptologie
à des fins de
certification
Cet
article poursuit la transposition de la directive 1999/93/CE
46(
*
)
, entamée par la loi du 13 mars
2000
47(
*
)
et ses deux
décrets d'application
48(
*
)
. Il en transpose en effet l'article 6.
Les six premiers alinéas de l'article 21 transposent le 1 de cet
article, qui stipule que :
« les États membres veillent au moins à ce qu'un
prestataire de service de certification qui délivre à l'intention
du public un certificat présenté comme qualifié ou qui
garantit au public un tel certificat soit responsable du préjudice
causé à toute entité ou personne physique ou morale qui se
fie raisonnablement à ce certificat pour ce qui est de :
a) l'exactitude de toutes les informations contenues dans le certificat
qualifié à la date où il a été
délivré et la présence, dans ce certificat, de toutes les
données prescrites pour un certificat qualifié ;
b) l'assurance que, au moment de la délivrance du certificat, le
signataire identifié dans le certificat qualifié détenait
les données afférentes à la création de signature
correspondant aux données afférentes à la
vérification de signature fournies ou identifiées dans le
certificat ;
c) l'assurance que les données afférentes à la
création de signature et celles afférentes à la
vérification de signature puissent être utilisées de
façon complémentaire, dans le cas où le prestataire de
service de certification génère ces deux types de données,
sauf si le prestataire de service de certification prouve qu'il n'a commis
aucune négligence ».
Le texte même de l'article 21 du projet de loi, tout comme celui de
l'article 6 de la directive, appellent certaines explications : il
convient de préciser qu'un certificat est « une attestation
électronique qui lie des données afférentes à la
vérification de signature à une personne et confirme
l'identité de cette personne »
49(
*
)
. Un prestataire de services de
certification (PSC), terme repris tel quel par le projet de loi, est
« toute entité ou personne physique ou morale qui
délivre des certificats ou fournit d'autres services liés aux
signatures électroniques »
50(
*
)
. Un certificat qualifié est un
certificat qui comporte :
« a) Une mention indiquant que ce certificat est
délivré à titre de certificat électronique
qualifié ;
b) L'identité du prestataire de services de certification
électronique ainsi que l'Etat dans lequel il est établi ;
c) Le nom du signataire ou un pseudonyme, celui-ci devant alors être
identifié comme tel ;
d) Le cas échéant, l'indication de la qualité du
signataire en fonction de l'usage auquel le certificat électronique est
destiné ;
e) Les données de vérification de signature électronique
qui correspondent aux données de création de signature
électronique ;
f) L'indication du début et de la fin de la période de
validité du certificat électronique ;
g) Le code d'identité du certificat électronique ;
h) La signature électronique sécurisée du prestataire de
services de certification électronique qui délivre le certificat
électronique ;
i) Le cas échéant, les conditions d'utilisation du certificat
électronique, notamment le montant maximum des transactions pour
lesquelles ce certificat peut être utilisé »
51(
*
)
.
La rédaction de l'article 21 en rend la compréhension assez
difficile si l'on ne se reporte pas simultanément aux articles 2 et 6 de
la directive, ainsi qu'aux articles 1316-1 à 1316-4 du code civil et
à l'article 6 du décret du 30 mars 2001 cité
ci-dessus. Votre rapporteur ne méconnaît pas les contraintes
encadrant l'exercice de transposition des directives communautaires, dont les
termes sont en général le fruit incertain d'une longue
négociation entre tous les Etats membres. Il estime toutefois que cette
rédaction, en particulier le 3° de l'article, n'est pas compatible
avec l'objectif affiché de définir un cadre juridique clair et
efficace, fondement de la confiance des consommateurs.
Votre rapporteur est pleinement convaincu du fort élément de
confiance dans la signature électronique que constitue l'engagement de
la responsabilité de ceux qui sont chargés d'en garantir la
qualité. C'est pourquoi votre commission vous propose de
supprimer la
rédaction actuelle du 3°
de cet article. Au vu de l'intrication
des normes en la matière, votre rapporteur estime qu'il appartient au
Gouvernement de proposer une rédaction plus accessible de
l'élément important que constitue la validation, par le
prestataire du service de certification, de l'instrument de certification. Il
estime que ce point devrait être éclairci lors de l'examen du
texte par votre Haute Assemblée, et à défaut, au cours du
processus de deuxième lecture par le Parlement.
Le 4° de l'article 21 transpose le 2 de l'article 6 de la directive
1999/93/CE, en établissant une présomption de
responsabilité du prestataire de services de certification qui aura omis
de faire enregistrer la révocation du certificat et n'aura pas tenu
cette information à disposition des tiers.
Le huitième alinéa de l'article 21 transpose en les fusionnant
les 3 et 4 de l'article 6 de la directive 1999/93/CE ; ceux-ci autorisent
le PSC à indiquer les limites, techniques et en valeur, de son
certificat, et à voir sa responsabilité dégagée,
dès lors que ces limites sont franchies.
Enfin, le dernier alinéa de l'article 21 impose aux PSC de disposer
d'une garantie financière ou d'une assurance pour faire face aux
conséquences pécuniaires de l'engagement de leur
responsabilité.
Votre commission vous demande d'adopter l'amendement qu'elle
présente, et l'article ainsi modifié.
Article 22 -
Sanctions
administratives
Le
premier alinéa de cet article prévoit la possibilité pour
le Premier ministre de prononcer l'interdiction de mise en circulation d'un
moyen de cryptologie dont le fournisseur n'aurait pas respecté les
dispositions de l'article 18.
Le second alinéa détaille la portée de cette interdiction.
Votre commission vous propose un amendement rédactionnel à ce
second alinéa.
Votre commission vous demande d'adopter l'amendement qu'elle
présente, et l'article ainsi modifié.
Article 23 -
Sanctions
pénales
Cet
article porte les sanctions pénales du manquement aux dispositions des
articles 18, 19 et 22 du présent projet de loi.
Le premier paragraphe prévoit qu'est puni d'un an de prison et de 15.000
euros d'amende le fait de se soustraire à l'obligation de
déclaration prévue à l'article 18. Cette peine est
doublée en cas de manquement à l'obligation d'autorisation
prévue au même article. S'ajoutent en outre, pour l'application de
l'article 18, les dispositions portées par le code des douanes.
Le paragraphe II sanctionne de deux ans de prison et 30.000 euros d'amende le
fait de ne pas respecter l'interdiction de mise en circulation d'un moyen de
cryptologie prévue à l'article 22.
Le paragraphe III dispose qu'est puni de la même peine le fait de fournir
des prestations de cryptologie à des fins de confidentialité sans
avoir satisfait à l'obligation de déclaration prévue
à l'article 19.
Le paragraphe IV prévoit en outre des peines complémentaires pour
les personnes physiques : l'interdiction d'émettre des
chèques, la confiscation de l'outil de l'infraction, l'interdiction
d'exercer une fonction publique ou l'activité dans le cadre de laquelle
l'infraction a été commise, la fermeture de
l'établissement de l'entreprise ayant servi à commettre
l'infraction et l'exclusion des marchés publics, ces trois
dernières peines ne pouvant excéder une durée de cinq ans.
Le paragraphe V dispose classiquement des conditions de la
responsabilité des personnes morales, dans le cadre des articles 121-2
et 131-38 du code pénal.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.
Article 24 -
Pouvoirs d'investigation et agents habilités
à rechercher et
constater les
infractions
Cet
article n'apporte guère de modifications à l'état du
droit, dans la mesure où il reprend les dispositions de l'article 28 de
la loi de 1990 sur la réglementation des
télécommunications
52(
*
)
. Cette reprise est rendue
indispensable par l'abrogation de l'article 28 de la loi de 1990 par
l'article 29 du projet de loi.
L'Assemblée nationale a cependant introduit une différence, sur
la proposition du rapporteur de sa Commission des Lois saisie pour avis :
le président du tribunal de grande instance ou le magistrat du
siège désigné par lui ne peuvent autoriser les agents
habilités à procéder à la saisie des moyens de
cryptologie qu'après avoir été saisis par le procureur de
la République. Cette modification rajoute donc l'étape du parquet
dans la procédure de saisie.
Votre commission vous propose un amendement rédactionnel à cet
article.
Votre commission vous demande d'adopter l'amendement qu'elle
présente, et l'article ainsi modifié.
Article 25 -
Aggravation des sanctions pénales en cas
d'utilisation d'un moyen de cryptologie pour préparer ou commettre une
infraction
Votre commission renvoie l'examen de cet article à la Commission des Lois saisie pour avis.
Article 26 -
Obligation pour les personnes fournissant des prestations
de cryptologie de remettre leurs conventions de
déchiffrement
Votre commission renvoie l'examen de cet article à la Commission des Lois saisie pour avis.
Article 27 -
Réquisition des moyens de
décryptage
Votre commission renvoie l'examen de cet article à la Commission des Lois saisie pour avis.
Article 28 -
Réserve du domaine
militaire
Les
dispositions libérales du projet de loi en matière de cryptologie
ne remettent pas en cause le régime spécifique au domaine
militaire, tel qu'il ressort de l'application du décret du 18 avril 1939
fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions.
L'article 28 précise que ce dernier trouve à s'appliquer aux
moyens de cryptologie spécialement conçus ou modifiés pour
porter, utiliser ou mettre en oeuvre les armes, soutenir les forces
armées et protéger les secrets de la défense nationale.
Cette disposition se justifie pleinement par les exigences de la défense
et de la sûreté nationales.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.
Article 29 -
Pouvoirs d'investigation et agents habilités
à rechercher
et constater les
infractions
Le
paragraphe I de cet article abroge l'article 28 de la loi du
29 décembre 1990 précitée, dont les dispositions sont
complètement refondues dans le présent chapitre.
Le paragraphe II prévoit toutefois une période transitoire. Les
autorisations et déclarations délivrées ou
effectuées sous le régime de cet article 28 de la loi de 1990
restent en effet valables jusqu'à leur expiration. Cette réserve
permet de ne pas remettre en cause les situations acquises, le nouveau
régime ne valant que pour l'avenir. Votre rapporteur approuve pleinement
cette attitude mesurée et pragmatique.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.
Article 30 -
Perquisitions en flagrant
délit
Votre commission renvoie l'examen de cet article à la Commission des Lois saisie pour avis.
Article 31 -
Perquisition au cours d'une instruction -
Coordination
Votre commission renvoie l'examen de cet article à la Commission des Lois saisie pour avis.
Article 32 -
Perquisition au cours d'une instruction - Modification de
la liste des pièces susceptibles d'être saisies et des
modalités de leur
conservation
Votre commission renvoie l'examen de cet article à la Commission des Lois saisie pour avis.
Article 33 -
Aggravation des peines encourues par les auteurs
d'atteintes aux systèmes de traitement automatisé de
données
Votre commission renvoie l'examen de cet article à la Commission des Lois saisie pour avis.
Article 34 -
Création d'une nouvelle incrimination en
matière de
droit de
l'informatique
Votre commission renvoie l'examen de cet article à la Commission des Lois saisie pour avis.
Article 35 -
Définition des systèmes
satellitaires
Cet
article complète l'article L. 32 du code des postes et
télécommunications par une définition des systèmes
satellitaires : « on entend par système satellitaire tout
ensemble de stations terriennes et spatiales ayant pour objet d'assurer des
radiocommunications spatiales et comportant un ou plusieurs satellites
artificiels de la Terre ».
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.
Article 36 -
Régime d'attribution des fréquences
satellitaires
Cet
article crée, à son paragraphe I, un nouveau titre VIII au livre
II du code des postes et télécommunications, intitulé
« assignations de fréquences relatives au systèmes
satellitaires ». Ce titre regroupe trois nouveaux articles
L. 97-2, L. 97-3 et L. 97-4.
Le 1 de l'article L. 97-2 confie à l'Agence nationale des
fréquences (ANF) la charge de recueillir les demandes de
fréquences satellitaires, et de représenter la France dans le
cadre des procédures d'attribution par l'Union internationale des
télécommunications (UIT). A cette fin, l'ANF déclare
à l'UIT les assignations de fréquences délivrées en
France et engage la procédure de validation au niveau international de
ces assignations.
L'ANF est un établissement public de l'Etat à caractère
administratif. Il a été créé au 1
er
janvier 1997 par la loi du 26 juillet 1996, dont l'article 14 a
été codifié dans le code des postes et
télécommunications sous l'article L. 97-1. Aux termes
de cet article, l'ANF « a pour mission d'assurer la planification, la
gestion et le contrôle del'utilisation (...) du domaine public des
fréquences radioélectriques ».
Le 2 de l'article L. 97-2 précise que le ministre chargé des
télécommunications est l'autorité administrative
délivrant les autorisations d'exploiter une fréquence
satellitaire, après avis des autorités affectataires des
fréquences concernées. Le demandeur doit faire la preuve de sa
capacité à contrôler l'émission de l'ensemble des
stations radioélectriques utilisant la fréquence, et verser une
redevance à l'ANF.
L'autorisation peut être refusée pour des raisons d'ordre
public ; du fait des engagements de la France dans le cadre de
l'UIT ; au vu des autorisations déjà
délivrées ; si le pétitionnaire a déjà
fait l'objet d'une sanction prévue au 2° de l'article L. 36-11
du même code. Ces sanctions sont :
« a) Soit, en fonction de la gravité du manquement, la
suspension totale ou partielle, pour un mois au plus, la réduction de la
durée, dans la limite d'une année, ou le retrait de
l'autorisation ».
« b) Soit, si le manquement n'est pas constitutif d'une
infraction pénale, une sanction pécuniaire, dont le montant est
proportionné à la gravité du manquement et aux avantages
qui en sont tirés, sans pouvoir excéder 3 p. 100 du
chiffre d'affaires hors taxes du dernier exercice clos, taux porté
à 5 p. 100 en cas de nouvelle violation de la même
obligation. A défaut d'activité permettant de déterminer
ce plafond, le montant de la sanction ne peut excéder
150.000 euros, porté à 375.000 euros en cas de nouvelle
violation de la même obligation ».
Le deuxième paragraphe de l'article L. 97-2
nouveau
impose
des obligations techniques au titulaire d'une autorisation d'exploitation de
fréquence. Il faut noter que ces obligations pèsent sur toutes
les stations radioélectriques faisant l'objet de l'autorisation. Enfin,
l'autorisation est accordée à titre personnel, et ne peut
être cédée à un tiers.
Le troisième paragraphe prévoit une procédure de mise en
demeure, puis de sanction, par le ministre chargé des
télécommunications, du titulaire ne se conformant pas à
ses obligations. Les sanctions sont celles du 2° de l'article L. 36-11
précité.
Le paragraphe IV précise que l'autorisation d'exploiter une
fréquence ne dispense pas des autres formalités administratives,
au nombre desquelles celles portées par le titre 1
er
du
livre II de code des postes et télécommunications. Sont
visés à travers cette référence les articles
R. 9-5 à R. 11 du code.
Le paragraphe V réserve deux cas où les dispositions de l'article
L. 97-2 ne s'appliquent pas : lorsqu'une administration utilise
l'assignation de fréquence pour ses propres besoins dans une bande de
fréquence dont elle est déjà affectataire ; et
lorsque la demande transmise par la France à l'UIT est faite au nom d'un
groupe d'Etats membres.
Le paragraphe VI prévoit un décret en Conseil d'Etat pour
l'application de cet article. Votre commission vous propose
un amendement
rédactionnel
à ce paragraphe.
L'article L. 97-3
nouveau
porte la sanction du non-respect de
l'article L. 97-2. Celle-ci est de six mois de prison et de 75.000 euros
d'amende.
En outre, les personnes morales peuvent être déclarées
pénalement responsables des mêmes infractions, dans les conditions
prévues par les articles 121-2, 131-38 et 131-39 du code pénal.
L'article 121-2 dispose que les personnes morales sont responsables
pénalement des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes
ou représentants. L'article 131-38 dispose que les peines d'amende sont
égales au quintuple de celles prévues pour les personnes
physiques, soit en l'espèce 375.000 euros. L'article 131-39, dans ses
dispositions visées par le présent article, prévoit la
fermeture de l'établissement, l'exclusion des marchés publics, la
confiscation de la chose ayant servi à commettre l'infraction et la
publicité de la condamnation.
Le dernier alinéa de l'article L. 97-3 dispose enfin que sont
habilités à rechercher et constater ces infractions
« outre les officiers et agents de police judiciaire agissant
conformément aux dispositions du code de procédure pénale,
les fonctionnaires et agents de l'administration des
télécommunications, de l'Autorité de régulation des
télécommunications et de l'Agence nationale des
fréquences », aux termes de l'article L. 40 du code des postes
et télécommunications.
L'article L. 97-4
nouveau
étend l'application des articles
L. 97-2 et L. 97-3 à la Nouvelle-Calédonie, la
Polynésie française, à Wallis-et-Futuna et aux Terres
australes et antarctiques françaises (TAAF).
Le paragraphe II de l'article 36 du projet de loi complète les
attributions de l'ANF, qui figurent à l'article L. 97-1 du code des
postes et télécommunications, en précisant qu'elle
instruit pour le compte de l'Etat les demandes d'autorisation
présentées en application de l'article L. 97-2 du même
code.
Votre commission vous demande d'adopter l'amendement qu'elle
présente, et l'article ainsi modifié.
Article 37 -
Régularisation des situations
existantes
Cet
article prévoit les conditions dans lesquelles les personnes ayant
demandé et obtenu une assignation de fréquence auprès de
l'Etat ou de l'Agence nationale des Fréquences pourront obtenir le
maintien de leurs droits. A cette fin, elles devront se conformer à
l'article L. 97-2
nouveau
du code des postes et
télécommunications, en sollicitant une autorisation dans les
formes prescrites par cet article.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.
Article 37 bis -
Contribution au fonds de financement du service
universel
des
télécommunications
Puisqu'il y invitait le Gouvernement dans son avis sur le
projet de
loi de finances pour 2003, votre rapporteur se félicite de l'initiative
prise par les députés d'insérer un nouvel article
après l'article 37 pour remettre à plat les clefs de
répartition du financement du service universel,
régulièrement contestées par les contributeurs du fonds de
service universel. La répartition du coût du service universel
entre opérateurs se faisant au prorata de leur volume de trafic, la
charge de la contribution au service universel est relativement plus lourde
pour les opérateurs qui facturent à bas prix la minute de
communications. Ainsi, il est évident que le service universel
pèse considérablement sur les fournisseurs d'accès
à Internet (à hauteur de 10,5 % de leur chiffre
d'affaires contre 0,4 % pour les opérateurs mobiles et 1 %
pour les opérateurs fixes); l'adoption d'une nouvelle base de calcul,
à savoir le chiffre d'affaires de détail -net des prestations
d'interconnexion entre opérateurs-, est donc nécessaire. Ce
système serait plus équitable, car chaque acteur contribuerait
à la hauteur de la valeur ajoutée qu'il retire de son
activité dans les télécommunications : la
répartition entre opérateurs selon une clé au chiffre
d'affaires représenterait pour chaque contributeur une charge de
1 % de son chiffre d'affaires, ce qui représenterait un effort
financier faible et équitablement réparti, comme le souligne M.
Jean Dionis du Séjour, rapporteur du projet de loi au nom de la
Commission des Affaires économiques de l'Assemblée nationale.
En allégeant la charge des fournisseurs d'accès à
Internet, ce système autoriserait en outre le développement
rapide de forfaits Internet illimités à bas débit, ce qui
constitue un impératif politique dans la perspective d'une REpublique
numérique dans la SOciété de l'information, appelée
de ses voeux par le Premier ministre lui-même, lors de la
présentation, le 12 novembre 2002, du plan RE/SO 2007 devant
l'Electronic Business Group.
Votre rapporteur ne remet donc absolument pas en cause le principe d'un
changement de la clé de répartition des contributions des
opérateurs au fonds de service universel (du volume de trafic
téléphonique vers le chiffre d'affaires réalisé).
Il a toutefois proposé à la commission, qui l'a accepté,
un
amendement tendant à préciser
le texte voté par
l'Assemblée nationale.
En effet, le texte adopté par les députés souffre d'une
légère imprécision : la notion de
« marché de télécommunications » n'est
pas une notion définie dans le Code des postes et
télécommunications et il paraît donc
préférable de se référer directement à la
notion de services de télécommunications, définis ainsi
dans l'article L. 32 du Code : « toutes prestations incluant la
transmission ou l'acheminement de signaux ou une combinaison de ces fonctions
par des procédés de télécommunication. Ne sont pas
visés les services de communication audiovisuelle ».
Par ailleurs, l'amendement adopté par votre commission propose de
retenir l'exclusion de l'assiette « des autres prestations
réalisées pour le compte d'opérateurs tiers »,
mais en précisant que ces opérateurs concernés sont
« les exploitants de réseaux ouverts au public et les
fournisseurs de services téléphoniques au public »
(opérateurs L. 33-1 et L. 34-1). La notion d'opérateurs
telle que retenue dans l'article est en effet trop large et comprend notamment
des opérateurs qui ne relèvent ni de l'article L. 34-1 ni de
l'article L. 33-1 et donc qui ne sont pas aujourd'hui contributeurs au service
universel.
La proposition de modification tend à éviter avant tout les
doubles comptes entre contributeurs au service universel (à savoir les
opérateurs L. 33-1 et L. 34-1). Elle éviterait par
ailleurs certaines discriminations injustifiées: à titre
d'exemple, une minute Internet facturée sur le marché de
détail par AOL ou Wanadoo (opérateurs qui ne relèvent ni
de l'article L. 33-1 ni de l'article L. 34-1) ne contribuerait pas au
service universel, alors qu'une minute facturée par un fournisseur
d'accès Internet relevant des articles L. 33-1 ou L. 34-1 (comme
Free) y contribuerait.
Votre commission vous demande d'adopter l'amendement qu'elle
présente, et l'article ainsi modifié.
Article 38 -
Application aux TOM et à la
Nouvelle-Calédonie
Cet
article précise ceux des articles du projet de loi qui sont applicables
aux territoires d'Outre-Mer (TOM) et à la collectivité à
statut particulier que constitue la Nouvelle-Calédonie.
Votre commission vous propose un amendement rédactionnel à cet
article.
Votre commission vous demande d'adopter l'amendement qu'elle
présente, et l'article ainsi modifié.
*
* *
Sous le bénéfice des observations qui précèdent et sous réserve de l'adoption des amendements qu'elle vous soumet, la Commission des Affaires économiques vous demande d'adopter ce projet de loi ainsi modifié.