F. LA POURSUITE DE L'AMÉLIORATION DE LA PERFORMANCE

La particularité du programme « Conseil d'Etat et autres juridictions administratives » réside, d'une part, dans l'impératif de maîtrise des délais de jugement et, d'autre part, dans la difficulté à évaluer la fonction consultative du Conseil d'Etat, des CAA et des TA.

La loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice (LOPJ) fixait aux juridictions l'objectif de ramener leur délai de jugement à un an . Ce délai peut être désormais considéré comme globalement atteint. Le délai prévisible moyen de jugement des affaires (indicateur 1.1) est en effet de :

- 9 mois devant le Conseil d'Etat en 2011, avec une prévision identique pour 2012 ;

- 11 mois dans les CAA en 2011, avec une prévision de 10 mois et 15 jours pour 2012 ;

- 10 mois et 15 jours dans les TA en 2011, avec une prévision de 10 mois pour 2012.

Pour autant, le délai moyen pour les affaires ordinaires (indicateur 1.2) apporte un éclairage utile et complémentaire sur cette performance d'ensemble. En effet, l'indicateur 1.1 « Délai prévisible moyen de jugement des affaires en stock » sous-estime largement le délai de jugement des affaires « ordinaires » et peut masquer des délais en réalité très élevés dans certaines matières, telles que les affaires au fond en matière de contentieux fiscal ou de contentieux des marchés publics. Il mêle des affaires réglées par simple ordonnance ou des affaires dont le jugement est enserré dans des délais particuliers 13 ( * ) avec les autres affaires.

Le délai moyen pour les affaires ordinaires prévu en 2012 est de deux ans et quinze jours dans les TA , de un an deux mois et quinze jours dans les CAA et de un an et quatre mois au Conseil d'Etat.

Si les résultats des juridictions administratives confirment ainsi la progression enregistrée au cours des précédentes années, votre rapporteur spécial estime néanmoins qu'ils ne peuvent être considérés comme pleinement satisfaisants du point de vue du justiciable .

S'agissant du Conseil d'Etat, il convient de souligner que la réduction du délai de jugement des affaires se vérifie malgré la charge de travail.supplémentaire importante induite par le traitement des questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) introduite par la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 14 ( * ) .

Les progrès accomplis en termes de délais de jugement ne se sont pas effectués au détriment de la qualité des décisions rendues . Ainsi, les taux d'annulation des décisions juridictionnelles sont restés, au cours des dernières années, relativement stables : moins de 16 % des jugements rendus par les TA sont annulés par les CAA par exemple (prévision actualisée pour 2011).

En revanche, la réduction des délais de jugement tient pour une part non négligeable à l'amélioration de la productivité des magistrats de l'ordre administratif . Ainsi, le nombre d'affaires réglées par magistrat dans les TA était de 262 en 2007, tandis que la prévision actualisée pour 2011 est de 269, ce niveau devant être encore amélioré en 2012 et passer à 272 selon la prévision. Cette augmentation de la productivité peut tout autant être mise en lumière concernant les magistrats des CAA (109 affaires réglées en 2008, 116 en 2011 et une prévision de 120 pour 2012), tandis que le Conseil d'Etat stabilise sa performance (83 affaires réglées en 2011 et une prévision identique pour 2012).

Concernant la fonction consultative du Conseil d'Etat , la proportion en 2011 des textes examinés en moins de deux mois demeure supérieure à 90 % pour les lois et les ordonnances et à 70 % pour les décrets.

Dans ce tableau d'ensemble, la performance de la CNDA constitue un réel motif de satisfaction qu'il faut souligner . Alors qu'en 2009 le délai prévisible moyen de jugement devant cette Cour s'élevait à un an trois mois et neuf jours, il se situe selon la prévision actualisée pour 2011 à neuf mois. Ce résultat dépasse même la prévision établie par le projet annuel de performances (PAP) pour 2011 qui envisageait un délai de onze mois. La prévision pour 2012 s'inscrit également dans la voie du rétablissement de cet indicateur puisqu'elle fixe un délai de six mois pour cible.

Votre rapporteur spécial se félicite du redressement notable de la performance de la CNDA. Il estime qu'il faut y voir la première récompense des choix stratégiques opérés depuis le rattachement de cette cour au présent programme ( cf. supra ).

Par ailleurs, votre rapporteur spécial apprécie que le responsable du programme 165 ait entendu la demande de votre commission des finances 15 ( * ) de voir désormais apparaître au titre de l'indicateur 3.1 « Nombre d'affaires réglées par membre du Conseil d'Etat ou par magistrat des tribunaux administratifs et des cours d'appel, ou par rapporteur de la Cour nationale du droit d'asile » le nombre moyen d'affaires traitées par chaque rapporteur de la CNDA. Cet ajout permettra ainsi à l'avenir un suivi efficace de l'efficience au sein de cette Cour.


* 13 Parmi ces affaires, on retrouve notamment les référés, les contentieux des reconduites à la frontière ou les contentieux des refus de titres de séjour accompagnés d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF).

* 14 Le système de la QPC est organisé selon une logique de spécialisation et de coopération entre les juges. Lorsqu'une telle question est soulevée, le Conseil constitutionnel n'est pas directement saisi. Le juge devant lequel le procès se déroule doit procéder à un premier « filtrage » en vérifiant que la disposition législative critiquée est bien applicable au litige, que le Conseil constitutionnel ne l'a pas déjà jugée conforme à la Constitution et qu'elle n'est pas dénuée de tout caractère sérieux. Si ces conditions sont remplies, il transmet la question au juge suprême de l'ordre juridictionnel dont il relève (Conseil d'Etat pour les juridictions administratives, Cour de cassation pour les juridictions judiciaires). Celui-ci examine, en outre, si la question est nouvelle ou présente un caractère sérieux. Il s'agit donc d'un second « filtrage », plus strict que le premier. Si tel est le cas, la question doit être renvoyée au Conseil constitutionnel, qui juge si la loi est conforme ou non aux droits et libertés garantis par la Constitution. A charge ensuite, pour le juge à l'origine de la QPC, de tirer les conséquences de cette décision sur le litige dont il est saisi. Cette procédure est rapide : en ce qui concerne le Conseil d'Etat, le juge dispose de trois mois seulement pour se prononcer sur la QPC.

* 15 Cf . Sénat, rapport spécial n° 111 - tome III - annexe 6.

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