DEUXIÈME PARTIE -
LES CRÉDITS DE LA MISSION
« RELATIONS AVEC LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES »
ET DU COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « AVANCES AUX
COLLECTIVITÉS TERRITORIALES »
I. LES CRÉDITS DE LA MISSION « RELATIONS AVEC LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES »
La mission « Relations avec les collectivités territoriales » retrace certaines des dotations versées par l'État aux collectivités territoriales, notamment les dotations de soutien à l'investissement.
En 2018, les crédits de paiement (CP) prévus au titre de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » s'élèvent à 3,66 milliards d'euros, soit une progression de 225 millions d'euros (+ 6,5 %) par rapport à 2017. Les autorisations d'engagement (AE) s'élèvent à 3,8 milliards d'euros, en diminution de 523 millions d'euros (- 12 %).
L'augmentation des crédits de paiement et la forte diminution des autorisations d'engagement résultent de plusieurs mouvements de sens différents, et en particulier de la suppression de la réserve parlementaire, de la transformation de la dotation générale de décentralisation (DGD) de la Corse en fraction de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) ou de l'augmentation de la dotation politique de la ville (DPV) et de la dotation pour titres sécurisés.
Évolution (2017-2018) des crédits de la mission
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires
Une partie des dotations dont les crédits sont retracés dans la mission « Relations avec les collectivités territoriales » correspond à des compensations de transfert de compétences et sont donc stables dans le temps.
Au contraire, les dotations de soutien à l'investissement local peuvent varier d'une année sur l'autre.
S'agissant des autorisations d'engagement, la réduction des crédits résulte notamment du remplacement de la DGD de Corse par une fraction de TVA et surtout de la disparition du fonds exceptionnel de soutien aux régions créé pour la seule année 2017 3 ( * ) : doté de 450 millions d'euros en AE et de 200 millions d'euros en CP en 2017, il n'est doté, en 2018, d'aucun AE mais bénéficie des 250 millions d'euros prévus en CP.
Évolution (2017-2018) des autorisations d'engagement de la mission
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires
En ce qui concerne les crédits de paiement, l'augmentation de 225 millions d'euros entre 2017 et 2018 s'explique principalement par une hausse de 159 millions d'euros de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL).
Il convient à ce titre de préciser que 76,7 millions d'euros de crédits de paiement sont prévus au titre de la réserve parlementaire « afin de couvrir les opérations antérieures à 2018 ». C'est pour cette raison que la suppression de la réserve parlementaire n'entraîne pas de réduction des crédits de paiement sur l'ensemble de la mission.
Évolution (2017-2018) des crédits de paiement de la mission
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires
S'agissant des autorisations d'engagement, selon Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, chargée des collectivités territoriales, entendue par votre commission des finances le 25 octobre 2017, « les concours financiers de l'État aux collectivités territoriales traduisent des priorités claires, et notamment la volonté de soutenir l'investissement local. Le niveau atteint, en 2017, par les subventions d'investissement aux collectivités locales de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » est consolidé. Ces crédits correspondent à différentes dotations : la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) et la dotation politique de la ville (DPV). Celles-ci atteindront, en 2018, 1,8 milliard d'euros, soit une augmentation de 5,5 % à structure constante . »
Vos rapporteurs spéciaux ne partagent pas cet optimisme : cette présentation est en réalité biaisée car elle consiste à comparer la nouvelle DSIL avec l'ancienne alors même qu'elles ne recouvrent pas le même périmètre. En effet, à compter de 2018, la DSIL comprend :
- les crédits relatifs aux contrats de ruralité, jusqu'alors portés par la mission « Politique des territoires » ;
- une « seconde part » présentée, dans les documents budgétaires, comme un remplacement (partiel) de la réserve parlementaire . Plus précisément, selon le projet annuel de performances, « les contras de ruralité, financés en 2017 par le programme 112 (piloté par le commissariat général à l'égalité des territoires) à hauteur de 216 millions d'euros en AE, seront financés par la présente action en 2018, à hauteur de 45 millions d'euros en AE. Par ailleurs, le montant de la DSIL a tenu compte de la suppression de la réserve parlementaire, à hauteur de 50 millions d'euros en AE. Cette enveloppe est destinée à soutenir les projets de modernisation des communes et de leurs groupements ».
Il convient donc de comparer la nouvelle DSIL avec les crédits consacrés, en 2017, aux contrats de ruralité (216 millions d'euros en AE) mais aussi à la réserve parlementaire (86 millions d'euros en AE destinés aux collectivités territoriales).
Si les crédits de la DETR, de la DSIL et de la DPV s'élèvent bien à 1,8 milliard d'euros en 2018, il s'agit en réalité d'une diminution de 211 millions d'euros par rapport à 2017, soit une baisse de plus de 10 % , qui équivaut à supprimer 2,5 fois la réserve parlementaire.
Évolution (2017-2018) des autorisations d'engagement des principales dotations de soutien à l'investissement
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires
Afin de soutenir l'investissement des collectivités territoriales, vos rapporteurs spéciaux vous proposeront, lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances, un amendement visant à rétablir les crédits « manquants » de la réserve parlementaire destinés aux collectivités territoriales, soit 36 millions d'euros .
Il convient également de souligner qu'à l'initiative de l'Assemblée nationale, l'enveloppe de 50 millions d'euros correspondant à la seconde part de la nouvelle DSIL a été supprimée et devrait abonder les crédits de la DETR 4 ( * ) . Vos rapporteurs spéciaux y sont favorables.
Le remplacement de la réserve parlementaire par des dispositifs spécifiques Les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » ont été abondés de 25 millions d'euros pour compenser la suppression de la réserve parlementaire 5 ( * ) (qui représentait, en 2017, pour cette mission 16,4 millions d'euros). S'agissant de la mission « Action extérieure de l'État » qui prévoyait, en 2017, 3,3 millions d'euros de réserve parlementaire au bénéfice d'entités à l'étranger (organismes locaux d'entraide et de solidarité (OLES), écoles et lycées français, alliances françaises etc.), un projet de remplacement de la réserve parlementaire par une dotation budgétaire dotée d'environ 2 millions d'euros serait à l'étude. Contrairement à la mission « Sport, jeunesse et vie associative », les crédits de la mission « Action extérieure de l'État » ne sont pas diminués en 2017 du montant de la réserve : un redéploiement de crédits internes au ministère des affaires étrangères serait donc envisageable 6 ( * ) . En 2017, le total de la réserve parlementaire s'élevait à 147 millions d'euros. |
Par ailleurs et de façon plus anecdotique, vos rapporteurs spéciaux s'inquiètent de la dégradation des documents budgétaires et de la gestion des crédits de la mission : en particulier, des amendements du Gouvernement introduits au cours de l'examen du projet de loi de finances pour 2017 n'ont pas été correctement imputés 7 ( * ) sur les actions du programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements », aboutissant à une présentation opaque des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».
*
L'Assemblée nationale a adopté les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » sans modification.
* 3 Article 149 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.
* 4 Voir le commentaire de l'article 59.
* 5 Amendement n° II-545 du Gouvernement adopté par l'Assemblée nationale.
* 6 Voir les notes de présentation des rapporteurs spéciaux au nom de la commission des finances du Sénat, Éric Jeansannetas pour la mission « Sport, jeunesse et vie associative » ; Vincent Delahaye et Rémi Féraud pour la mission « Action extérieur de l'État ».
* 7 Par exemple, la majoration de la dotation politique de la ville a été imputée sur l'action 01 « Dotation générale de décentralisation des communes », tandis que le fonds de soutien exceptionnel aux régions est inscrit à l'action 07 « Soutien à l'investissement - Part métropoles ».