II. LES PRINCIPALES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR LE SÉNAT ET REPRISES TOTALEMENT OU PARTIELLEMENT PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Comme cela a été souligné dans l'avant-propos, le Sénat a adopté sans modification 31 des 97 articles du projet de loi que lui a transmis l'Assemblée nationale.

En outre, un certain nombre de dispositions d'origine sénatoriale ont, à leur tour, été reprises dans le texte considéré comme adopté par l'Assemblée nationale.

La reprise des amendements du Sénat, bien que plus satisfaisante que dans le cas du PLFSS 202315(*), demeure toutefois insuffisante.

Un tableau récapitulatif figure infra dans le présent rapport pour l'ensemble des amendements adoptés par le Sénat en première lecture.

A. LES PRINCIPALES MESURES « POLITIQUES » CONSERVÉES PAR LE GOUVERNEMENT

1. Le maintien (sous une forme différente) de la suppression des dispositions prévoyant une contribution des régimes complémentaires de retraite au titre de la solidarité financière du système de retraite (article 9)

Dans sa rédaction initiale, l'article 9 prévoyait qu'une contribution des régimes complémentaires de retraite était déterminée par une convention entre ces régimes et le régime général, approuvée par arrêté, « au titre de la solidarité financière au sein du système de retraite ». À compter du 1er janvier 2025, en l'absence de telle convention au 30 juin de l'exercice en cours, le Gouvernement pouvait fixer par décret le montant de cette contribution, mais seulement « pour tenir compte des conséquences financières [...] de la fermeture des régimes spéciaux ».

À l'initiative de sa commission des affaires sociales, le Sénat a adopté un amendement prévoyant que la convention avait pour objet de « compens[er] les pertes de ressources résultant de la fermeture des régimes ». Par ailleurs, il n'était plus question de conventions annuelles fixant chacune le montant de la contribution, mais d'une convention conclue avant le 1er juillet 2025, déterminant les modalités de calcul et de versement de la contribution. À défaut de telle convention, le Gouvernement pouvait déterminer par décret les modalités de calcul et de versement de la contribution.

Le texte considéré comme adopté en nouvelle lecture par l'Assemblée nationale reprend un amendement de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale tendant à rétablir le texte initial.

Toutefois le Gouvernement a également repris un sous-amendement du groupe Les Républicains, prévoyant que la convention avait pour objet de « participer à l'équilibre des régimes spéciaux mis en extinction » (la référence à la « solidarité financière au sein du système de retraite » étant donc supprimée).

Bien que ce système de convention annuelle soit moins opérationnel que la convention unique proposée par le Sénat, l'objectif essentiel du Sénat, qui était de limiter la contribution à l'équilibre des régimes spéciaux mis en extinction, est donc atteint.

Une telle ponction sur les excédents dégagés au prix des efforts consentis par les salariés du privé, dans le but de combler les déficits massifs du régime général, aurait constitué une atteinte inacceptable au paritarisme et une violation du droit de propriété des affiliés du régime de retraite complémentaire.

2. Le maintien de la consultation des commissions des affaires sociales des deux chambres du Parlement sur toute modification des montants de la participation forfaitaire ou de la franchise annuelle (article 27 A)

À l'initiative de sa commission des affaires sociales, le Sénat a inséré un article 27 A, prévoyant la consultation des commissions des affaires sociales des deux chambres du Parlement sur toute modification des montants de la participation forfaitaire ou de la franchise annuelle.

Il s'agissait pour la commission des affaires sociales du Sénat non d'exprimer une opposition à une éventuelle augmentation de ces montants, mais de fixer les conditions démocratiques de la mise en oeuvre effective de leur projet de doublement par le Gouvernement.

En effet, le doublement de la franchise médicale et de la participation forfaitaire, évoqué par le Gouvernement, relevait du domaine réglementaire et ne figurait donc pas dans le présent PLFSS. Elle était toutefois, de fait, incluse implicitement dans le chiffrage des 3,5 milliards d'euros de mesures d'économies prévues sur l'Ondam 2024 (cf. encadré).

Le maintien de cette disposition dans le texte considéré comme adopté en nouvelle lecture par l'Assemblée nationale est d'autant plus remarquable que le Gouvernement avait émis un avis défavorable à l'amendement adopté au Sénat.

Une mesure de facto déjà prévue pour assurer le respect de l'Ondam 2024 : le doublement des franchises médicales

Le doublement des franchises médicales, jugé « probable » par le ministre de la santé et de la prévention, Aurélien Rousseau, le 8 septembre 2023, ne figure pas dans le PLFSS. De fait, il relève du domaine réglementaire. Le ministre a toutefois déclaré le 28 septembre sur France Info que « le sujet “franchise médicale” est toujours à l'expertise, sur la table », et n'est « pas abandonné ».

Le rendement d'un doublement des franchises et des participations forfaitaires serait de 0,8 milliard d'euros16(*).

Cette mesure ne figure pas explicitement dans la décomposition des 3,5 milliards d'euros d'économies sur l'Ondam figurant dans le PLFSS et ses annexes. Toutefois l'annexe 5 au PLFSS indique que « des mesures de transfert de dépenses et de responsabilisation des assurés seront également menées, avec un rendement attendu de 1,3 milliard d'euros qui comprennent notamment l'effet année pleine de la modification du ticket modérateur sur les soins dentaires déjà annoncée ». Dans son avis du 13 octobre 2023, le comité d'alerte sur l'Ondam (retenant quant à lui un montant légèrement inférieur des mesures de transfert et de responsabilisation) mentionne « - 1,2 milliard d'euros de mesures de transfert et de responsabilisation, dont 0,8 milliard d'euros restent à définir au-delà de l'effet (- 0,4 milliard d'euros) de la modification du ticket modérateur sur les soins dentaires mis en oeuvre au dernier trimestre 2023 ». Ce montant de 0,8 milliard d'euros correspond précisément au rendement attendu d'un doublement des franchises et des participations forfaitaires.

3. Le maintien de la transformation en expérimentation de la fusion optionnelle des sections « soins » et « dépendance » des Ehpad et unités de soins de longue durée (article 37)

Dans le texte initial, l'article 37 prévoyait que les départements puissent opter de manière définitive pour la fusion des sections « soins » et « dépendance » pour le financement des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et des unités de soins de longue durée (USLD).

À l'initiative de sa commission des affaires sociales, le Sénat a transformé cette fusion optionnelle en expérimentation, la pérennisation et la généralisation éventuelle de la mesure à l'ensemble des départements devant être décidée au vu des résultats de celle-ci.

Cette modification a été maintenue dans le texte considéré comme adopté par l'Assemblée nationale, avec quelques adaptations. Ainsi, le nombre maximum de départements concernés par l'expérimentation, de 10 dans le texte du Sénat, a été porté à 20 ; un second créneau d'entrée dans l'expérimentation a été institué (les deux créneaux étant désormais le 1er janvier 2025 et le 1er janvier 2026) ; et la durée d'expérimentation a été portée à quatre ans (au lieu de trois).


* 15 D'un point de vue qualitatif, dans le cas de la LFSS 2023, les apports du Sénat ont été particulièrement modestes. On peut retenir, pour l'essentiel : dans la partie recettes, l'alignement du régime social des rachats de jours de réduction du temps de travail (RTT) et des heures supplémentaires pour les entreprises de 20 à 249 salariés ; sur le volet autonomie, un amendement de Bernard Bonne qui traduisait l'une des recommandations du rapport d'information sur le contrôle des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), à savoir le plafonnement du montant des excédents pouvant être mis en réserve ; et, enfin, sur le volet maladie, le maintien de la prolongation de la garantie de financement des établissements de santé, l'encadrement du développement de la biologie médicale dite « délocalisée » et le report au 1er juillet 2023 de l'entrée en vigueur de la réforme du financement des activités de soins de suite et de réadaptation.

* 16 Source : direction de la sécurité sociale.

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