PREMIÈRE
PARTIE
LE FINANCEMENT DU SYSTÈME DE RETRAITE FRANÇAIS DANS UN
CONTEXTE BUDGÉTAIRE CONTRAINT
I. LE SYSTÈME DE RETRAITE DEMEURE COMPLEXE MALGRÉ LA RÉFORME PARAMÉTRIQUE DE 2023 ET VA BIEN AU-DELÀ DU PÉRIMÈTRE DE LA MISSION DE LA RAPPORTEURE SPÉCIALE
La réforme du système des retraites que met en oeuvre la loi de financement rectificative de la Sécurité sociale3(*), a eu entre autres effets une incidence sur les régimes suivis par la rapporteure spéciale.
En effet, à compter du 1er septembre 2023, plusieurs régimes spéciaux ont été fermés. Depuis lors, les nouveaux agents de la Régie autonome des transports parisiens (RATP, de la Banque de France, des entreprises des industries électriques et gazières (IEG), ainsi que les clercs de notaire et nouveaux membres du Conseil économique, social et environnemental (CESE) sont affiliés au régime général pour la retraite.
Cette évolution a permis d'aller vers une plus grande simplicité et lisibilité du système des retraites en France. Néanmoins, plusieurs autres mouvements de grande envergure qui avaient été envisagés n'ont pas été menées à terme. Le système des retraites demeure ainsi aujourd'hui une réalité complexe et large, qui dépasse d'ailleurs largement le périmètre suivi par la rapporteure spéciale. En effet, seuls les régimes de pensions versées directement par l'État et les régimes équilibrés budgétairement par l'État en font partie.
Pour l'année 2024, l'ensemble des pensions brutes versées par les régimes de retraite de base se sont élevées à 287,9 milliards d'euros, en croissance de 6,8 % par rapport à 2023, où ce montant était de 269,7 milliards d'euros. La hausse devrait demeurer en 2025. Les pensions brutes versées par les régimes de base devraient atteindre 298,2 milliards d'euros, soit une hausse de 3,6 %.
Le taux de croissance des prestations en 2024 s'explique en grande partie par l'effet de la revalorisation des pensions, qui atteint 5,3 % en moyenne annuelle en 2023. Il est en outre possible de noter le fait qu'en 2023, le niveau de vie moyen des retraités correspond à 98,7 % de celui des actifs, contre à peine 90 % dans les années 19904(*). Ceci explique le projet de recul au 1er juillet 2025 de la revalorisation des pensions proposé par le gouvernement.
Les pensions retracées dans le compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions », c'est-à-dire celles relevant des régimes de retraite des ouvriers de l'État et des fonctionnaires civils et militaires représentent 22 % des prestations vieillesse des régimes de base. Les pensions versées par les régimes spéciaux, dont une partie seulement est soutenue par une subvention d'équilibre versée par la présente mission « Régime sociaux et de retraite », représentent 6 % de prestations vieillesse des régimes de base.
Répartition des prestations de retraite selon les régimes de base
(prévisions pour 2024)
Source : commission des finances, d'après le rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale d'octobre 2024
La rapporteure spéciale relève ainsi qu'au sein du système français des retraites, la mission budgétaire et le CAS « Pensions » qu'elle suit ne couvrent que 25% des prestations de base versées dans le pays. En outre, l'existence de régimes complémentaires vient ajouter à la complexité du système qui dépasse le champ couvert par la supervision de la rapporteure spéciale. Il apparait ainsi que le système de retraite demeure en effet encore fragmenté à ce jour malgré les fermetures de régimes induites par la réforme portée dans la loi de financement rectificative de la sécurité sociale du 14 avril 2023.
En 2024, les cotisations sociales brutes ainsi que celles prises en charge par l'État ont ainsi représenté 58,7 % du budget du système de retraite, soit 169,4 milliards d'euros. Cependant, 16,9 % des recettes proviennent d'impôts et taxes affectés (ITAF) qui représentent une contribution de 48,7 milliards d'euros. Le reste des recettes est issu de transferts externes et de la contribution d'équilibre de l'employeur.
En tenant compte de l'ensemble des régimes de retraite français légalement obligatoires, les dépenses de retraite représentent 23,6 % des dépenses publiques en 2023. Ce taux est stable depuis plusieurs années : il était de 23,5 % en 2022, de 24,8 % en 2020.
Enfin, les comparaisons avec les autres pays de l'Union européenne (UE), indiquées dans le rapport sur le vieillissement de la Commission, font apparaître que la part que représentent les dépenses de retraite dans le PIB est particulièrement élevée en France. Bien au-delà des systèmes suédois ou néerlandais qui maintiennent leurs dépenses sous les 10 % du PIB, la France se classe parmi les nations les plus dépensières pour ses retraites. Les projections jusqu'à 2070 indiquent néanmoins une maîtrise de la dépense.
Part des dépenses de retraite dans le PIB en 2022 et projection jusqu'en 2070
(en % du PIB)
Source : commission des finances, données Eurostat issues du Ageing Report 2024, Commission européenne
* 3 LOI n° 2023-270 du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023.
* 4 Rapport annuel, Conseil d'orientation des retraites, juin 2024.