C. LES DIFFICULTÉS À VENIR SUR LA PORTABILITÉ DES DROITS DU RÉGIME DE LA RATP VOTÉE DANS LA RÉFORME DE 2023
Si le régime de la RATP est fermé depuis le 1er septembre 2023, il n'en demeure pas moins qu'il continue de gérer des affiliés qui cotisent selon les règles spécifiques applicables au régime et qui seront amenés à liquider leur pension au regard des règles de ces régimes à la date de leur liquidation.
Le gouvernement a fait le choix de reporter au 1er janvier 2025 la date d'entrée en vigueur, pour ce régime et celui de la RATP, la transposition des décalages paramétriques progressifs prévus par la réforme en matière d'âge d'ouverture des droits (AOD) et de durée d'assurance requise (DAR).
Ainsi, la rapporteure spéciale réaffirme que le choix du Gouvernement de repousser l'échéance de l'entrée en vigueur de sa réforme paramétrique est à la charge du budget général, qui devra intégralement compenser le maintien en vigueur pendant une plus longue durée des règles dérogatoires des régimes spéciaux de la RATP et de la SNCF.
Pour le régime de la RATP, l'effet financier de la fermeture restera limité pendant les premières années, du fait du stock des pensionnés et des affiliés qui resteront gérés par la caisse de retraite du personnel de la RATP. Les coûts induits par la fermeture, qui correspondent aux cotisations des nouveaux agents qui seront versées au régime général, sont estimés à 12 millions d'euros en 2024 et à 34 millions d'euros en 2025 par la caisse. Ces derniers tendront à croître pour atteindre près de 700 millions d'euros en projection en 2050.
Cependant, la difficulté la plus grande concernant les années à venir concerne l'ouverture à la concurrence du secteur des transports en communs en Île-de-France, issu des obligations de la loi d'orientation des mobilités (LOM) de 201919(*). En effet, la caisse de retraites du personnel de la RATP (CRPRATP) devra continuer à recouvrer les cotisations des près de 15 000 de ses employés qui iront travailler pour les entreprises privées qui entreront en concurrence avec la RATP. En effet, ces personnels, en vertu des effets de la réforme, auront la possibilité de conserver l'intégralité de leurs droits spéciaux, même en n'étant plus employés par la RATP.
Par conséquent, les entreprises qui embaucheront d'anciens agents de la RATP devront composer avec, pour chacune, un niveau de rémunération et un niveau de cotisation qu'il faudra adapter pour s'assurer de la portabilité à l'euro près des droits issus de l'appartenance au régime spécial de la RATP.
Les décrets de mise en oeuvre des articles L. 3111-16-9 et L. 3111-16-11 du code des transports qui organisent la portabilité du régime doivent ainsi mettre en oeuvre une mobilité des agents induisant une très grande complexité de gestion. La CRPRATP, désignée pour continuer à prélever les cotisations de ces agents qui seront partis, devra donc coopérer étroitement avec l'ensemble des employeurs de la concurrence, qui seront aussi affectés par la difficulté de cette portabilité totale des droits.
La rapporteure spéciale dénonce ainsi la mise en oeuvre d'une sorte de « troisième régime » à l'occasion de l'ouverture à la concurrence des activités de la RATP. En sus des agents de la RATP encore affiliés au régime spécial et des agents affiliés au régime général, qu'ils soient embauchés par la RATP à partir du 1er septembre 2023 ou qu'ils soient employés d'une entreprise de la concurrence, les agents de la RATP qui changeront d'employeurs pour travailler dans les entreprises de la concurrence viennent former une troisième cohorte, dont le calcul des droits imposera une quasi-personnalisation pour chacun.
Cela engendre une complexité de gestion disproportionnée.
* 19 Loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités.