EXAMEN PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En première lecture, l'Assemblée nationale n'ayant pas adopté la première partie du projet de loi, celui-ci est considéré comme rejeté en application du troisième alinéa de l'article 119 du Règlement de l'Assemblée nationale.

En conséquence, sont considérés comme rejetés les crédits de la mission « Culture ».

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 13 novembre 2024, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a examiné le rapport de MM. Vincent Éblé et Didier Rambaud, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Culture ».

M. Claude Raynal, président. - Nous poursuivons avec l'examen des crédits de la mission « Culture » et accueillons, pour ce dernier point à l'ordre du jour, notre collègue Karine Daniel, rapporteure pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication et du sport.

M. Vincent Éblé, rapporteur spécial de la mission « Culture ». - Le montant global des crédits demandés en 2025 pour la mission « Culture » s'élève à 3,9 milliards d'euros. Cela correspond à une baisse des autorisations d'engagement (AE) de 6,8 % par rapport à 2024, qui s'accompagne d'une légère hausse, de 0,4 %, des crédits de paiement (CP). Ce budget s'inscrit dans une trajectoire de progression des crédits tracée au cours des années précédentes. Ainsi, entre 2023 et 2025, la mission a crû de 690 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 440 millions d'euros en crédits de paiement.

Il est probable que ces chiffres ne reflètent pas le budget qui nous parviendra en séance. En effet, un amendement a été déposé par la ministre de la culture, pour concrétiser l'annonce qu'elle a faite devant la commission de la culture du Sénat, la semaine dernière, d'une augmentation de 300 millions d'euros des crédits de la mission. L'amendement affiche, en réalité, 266 millions d'euros en autorisations d'engagement et 160 millions d'euros en crédits de paiement, ce qui change l'équilibre budgétaire sur lequel nous avons travaillé.

Je commencerai par revenir sur les conséquences sur la mission des annulations de crédits effectuées en février 2024. Le décret paru à cette date a annulé 204 millions d'euros, ce qui équivaut à 4,6 % des crédits accordés en loi de finances initiale (LFI). La moitié de ces crédits a été prise sur la réserve de précaution, mais le reste a été prélevé sur les dépenses de fonctionnement des opérateurs de la mission, notamment les opérateurs du spectacle vivant. Vous vous souvenez peut-être que la ministre de la culture, elle-même, avait semblé peu goûter ces annulations de crédits. L'ancien Premier ministre, M. Gabriel Attal, a rappelé la semaine dernière lors de son audition devant notre commission qu'elle avait exprimé en termes véhéments sa réticence.

De fait, le résultat de ces annulations de crédits nous interpelle. D'une part, elles ont eu un impact sur des opérateurs déjà fragiles et ont contraint à repousser des réformes attendues, notamment concernant le cadre de gestion des contractuels du ministère de la culture. D'autre part, il est nécessaire d'abonder par d'autres crédits en fin d'année pour financer des dépenses incompressibles.

J'en viens maintenant aux crédits du programme 175 dédié au patrimoine, auquel je porte, comme vous le savez, une attention particulière. Les 266 millions d'euros supplémentaires devraient en grande partie être fléchés vers ce programme, dont 55 millions d'euros vers les monuments ruraux et 23 millions d'euros vers les musées dans les territoires.

Les crédits dédiés aux grands projets continuent de constituer une part importante du budget, malgré la clôture de plusieurs chantiers de grande ampleur au cours des dernières années. Pas moins de 18 millions d'euros sont notamment prévus pour le site des Archives nationales à Pierrefitte-sur-Seine, dont vous savez qu'il a accueilli, par transfert, des collections jusqu'alors conservées à Fontainebleau dans un local qui menaçait péril. L'extension du site de Pierrefitte-sur-Seine, déjà prévue, s'en est trouvée accélérée.

Il faut également noter que 50 millions d'euros sont prévus sur le programme 131 pour financer des investissements structurants à destination des opérateurs du spectacle vivant. Une partie de ces financements contribuera également aux travaux du nouvel établissement public résultant de la fusion en 2025 du Mobilier national et de la Cité de la céramique Sèvres-Limoges.

Le cas de l'Opéra de Paris doit faire l'objet d'une attention particulière. L'établissement se trouvera face à un mur d'investissement au cours des prochaines années : le besoin de financement exceptionnel est estimé à au moins 200 millions d'euros d'ici à 2030. L'Opéra met en avant des besoins de travaux importants sur les deux sites de représentation, alors que l'établissement a annoncé la fermeture de l'Opéra Garnier entre 2028 et 2030, puis de l'Opéra Bastille entre 2030 et 2032.

Nous avons choisi cette année de mettre l'accent sur le centre Pompidou, qui devrait fermer l'été prochain pour travaux, jusqu'en 2029. Le chantier s'annonce titanesque. Les 150 000 oeuvres des collections du musée devront être déplacées dans le nouveau centre de Massy qui vient d'être terminé. L'ensemble des personnels du musée sera redéployé sur d'autres sites, une partie des oeuvres étant exposée jusqu'en 2029 au Grand Palais.

L'État a d'ores et déjà engagé 226 millions d'euros pour la rénovation technique de Beaubourg, notamment son désamiantage. En parallèle, le centre a pour objectif de réorganiser les différentes fonctions de manière plus rationnelle et plus lisible au sein du bâtiment, pour un montant estimé à 207 millions d'euros. Cette partie des travaux a vocation à être financée exclusivement sur fonds propres et notamment par le biais du mécénat.

Pour ce faire, le centre Pompidou ambitionne de disposer sous peu d'une centaine de millions d'euros. Il ne reste cependant que quelques mois avant de boucler ce budget, sans quoi les ambitions de l'établissement devront nécessairement être revues à la baisse.

Enfin, concernant le spectacle vivant, l'année 2024 confirme les bons résultats recensés en matière de retour du public. La fréquentation des opérateurs est en progression de 5,6 % par rapport à la saison dernière et retrouve, pour la plupart d'entre eux, les niveaux antérieurs à la crise sanitaire.

Je souligne cependant un point d'attention : la plupart des lieux de spectacle vivant ont été durement touchés par l'inflation, qui a limité leurs marges artistiques au cours des deux dernières années. Le nombre de levers de rideau a ainsi diminué pour l'essentiel des opérateurs du programme 131. Toutefois, il est nécessaire que l'offre de spectacles aille dans le sens d'une rationalisation de la production, alors que la Cour des comptes indique que le nombre moyen de représentations pour un spectacle était, en 2019, de 3,7 dans un centre dramatique national et de 2,3 pour une scène nationale. De telles statistiques ne sont plus tolérables, sur le plan environnemental comme sur le plan budgétaire.

Au-delà de ces remarques, je vous propose, au vu des moyens accordés à la culture dans ce budget, notamment de l'amendement d'abondement des crédits susmentionné, d'adopter les crédits de la mission.

M. Didier Rambaud, rapporteur spécial de la mission « Culture ». - Le programme 361 finance divers dispositifs en lien avec l'éducation artistique et culturelle, ainsi qu'avec l'enseignement supérieur culturel.

Les crédits à destination des établissements d'enseignement avaient connu une hausse importante en 2024, tournée notamment vers les écoles nationales d'architecture qui étaient dans une situation difficile. Ces crédits supplémentaires sont maintenus en 2025, ce dont nous pouvons nous féliciter. Par ailleurs, 30 millions d'euros complémentaires sont prévus en 2025 pour financer de nouveaux investissements structurants au sein des établissements nationaux de l'enseignement supérieur culturel.

La situation d'Universcience, établissement plus connu sous le nom de Cité des sciences et de l'industrie de la Villette et également financé par le programme 361, semble particulièrement inquiétante.

Le ministère estime le besoin annuel de travaux entre 30 millions d'euros et 40 millions d'euros jusqu'à 2030, très loin des 5 millions d'euros de la subvention d'investissement. La trésorerie de l'opérateur devrait être négative dès 2025 et l'établissement connaîtra un déficit dès 2026. Cette situation intervient alors que les ressources propres de la Cité sont limitées : elles s'élèvent à seulement 20 millions d'euros en 2024. L'établissement a notamment souffert de la proximité du parc des Nations pendant les jeux Olympiques.

La situation d'Universcience devra donc faire l'objet d'un suivi particulier au cours des prochains mois.

J'en viens maintenant au Pass Culture. Quelque 210,5 millions d'euros sont prévus en 2025 pour le financement de ce dispositif, soit une stabilité des crédits par rapport à l'année précédente. Il faut toutefois noter que les financements accordés par le ministère de l'éducation nationale pour le volet collectif du Pass Culture sont en hausse.

L'évaluation menée en 2024 par l'inspection générale des affaires culturelles (Igac) a livré une vision pour le moins mitigée du dispositif. Elle note que ses impacts sur les pratiques culturelles de ses bénéficiaires apparaissent « contrastés » et que la capacité du Pass Culture à transformer les pratiques culturelles est « incertaine ».

Vincent Éblé et moi avions consacré à ce sujet un travail de contrôle en 2023. Le ministère de la culture devrait notamment mettre en oeuvre notre recommandation sur la transformation de la société par actions simplifiée (SAS) Pass Culture en opérateur de l'État. Il s'agirait alors du deuxième opérateur du ministère de la Culture derrière la Bibliothèque nationale de France.

La ministre de la culture a annoncé qu'une réforme du dispositif serait lancée dès l'automne 2024 pour garantir la soutenabilité du montant de crédits inscrits en projet de loi de finances. Il est probable que le premier axe de cette réforme soit de réduire le montant de l'enveloppe accordée aux jeunes qui en bénéficient. Celle-ci s'élève actuellement à 300 euros pour les jeunes de plus de 18 ans. Le Gouvernement a déjà déposé à l'Assemblée nationale un amendement visant à réduire de 5 millions d'euros les crédits affectés au Pass Culture.

Si ce dispositif doit être ajusté et réformé, il a au moins eu le mérite de donner à des milliers de jeunes gens un accès à la culture, sous des formes variées. J'espère que nous continuerons à oeuvrer pour le renforcement de cet accès.

Le programme 224 « Soutien aux politiques culturelles du ministère de la culture » regroupe l'ensemble des dépenses de personnel des agents directement rémunérés par le ministère de la culture. Celles-ci s'élèvent à 756,5 millions d'euros en incluant la contribution au compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions ». Cela correspond à une croissance de 25,3 millions d'euros par rapport à 2024, essentiellement du fait de mesures catégorielles nouvelles.

Ces crédits financent en particulier la revalorisation de la rémunération des agents contractuels du ministère, qui représentent près de 16 000 équivalents temps plein. Ils devraient bénéficier en 2025 d'une prime exceptionnelle de 325 euros au titre du rattrapage par rapport aux autres ministères.

Je voudrais enfin consacrer quelques mots à un premier bilan des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 sur la fréquentation des opérateurs culturels.

De manière générale, si les jeux ont entraîné un afflux de visiteurs à Paris, les opérateurs ont souffert pour certains d'une fermeture complète ou d'importantes difficultés d'accès.

Le ministère estime la baisse de fréquentation pour l'ensemble des opérateurs pendant cette période à 20 % par rapport à 2023. Pour les opérateurs parisiens, la diminution est plus importante, puisqu'elle atteint 27 %. Les musées et monuments les plus connus - musée du Louvre, château de Versailles, musée d'Orsay - ont cependant été moins touchés. La diminution de la fréquentation est en revanche plus importante pour certains opérateurs : 67 % à la Cité de l'architecture et du patrimoine ou 40 % à Beaubourg.

Près de 98 % des festivals ont eu lieu comme prévu et 10 % ont indiqué avoir rencontré des perturbations liées aux jeux Olympiques. En revanche, les études du ministère font état d'une fragilisation économique : la moitié des festivals se déclarent déficitaires à l'issue de l'édition 2024.

Le public a cependant retrouvé, à la fin du mois d'août, des niveaux comparables à ceux d'une année normale. Le ministère espère en outre pouvoir convertir l'intérêt marqué du public pour les monuments mis en avant pendant les jeux Olympiques, notamment lors de la cérémonie d'inauguration.

Je termine en vous proposant, comme Vincent Éblé, d'adopter les crédits de la mission.

Mme Karine Daniel, rapporteure pour avis de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport sur la mission « Culture ». - Sur les deux dernières années, les structures culturelles ont subi les effets de l'inflation. Elles seront particulièrement touchées par la baisse des crédits des collectivités territoriales : notamment les départements, régions, villes et métropoles. On observe une forte inquiétude du secteur culturel sur ce point. Des mobilisations sont sans doute à attendre.

Des questions demeurent par ailleurs concernant la prise en compte dans le budget de la couverture par le ministère de la culture des frais d'inscription dans les écoles d'art pour les étudiants boursiers. La ministre a en effet annoncé son intention de renforcer la mixité sociale dans ces établissements, ce qui est souhaitable, mais nous attendons les moyens.

Le Pass Culture est également un point de vigilance. Nous avons entendu en audition les responsables de ce dispositif au sein du ministère de la culture. Une table ronde spéciale sera prochainement organisée par la commission de la culture, rassemblant des représentants de la SAS Pass Culture, des opérateurs culturels et des usagers. On nous a dit que l'enveloppe individuelle serait diminuée, mais assortie d'un « coup de pouce » sur critères sociaux, selon un mécanisme qui reste à identifier. Sachant que ledit coup de pouce serait donné aux jeunes qui sont déjà les moins utilisateurs de ce dispositif, on joue en réalité sur l'espérance de non-recours.

Nous ne faisons que commencer nos travaux. L'avis de la commission de la culture sera cependant sans doute assez convergent avec le vôtre, moyennant les points de vigilance que j'ai mentionnés et une attention particulière également pour le spectacle vivant.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - L'effet des jeux Olympiques sur le patrimoine a été particulièrement fort. Pendant cette période, le nombre de touristes a diminué dans le reste du pays, tant l'événement a été sous les feux des projecteurs. Il faudra y réfléchir pour nos communications territoriales à venir. Les efforts menés par la puissance publique ou les opérateurs privés pour la promotion de notre patrimoine, notamment du patrimoine bâti, sont une piste à privilégier.

Les remarques des rapporteurs concernant le Pass Culture s'ajoutent à plusieurs rapports et missions, notamment de la Cour des comptes, qui s'interrogent de la même façon sur les résultats du dispositif, et son impact sur l'accès à la culture pour nos concitoyens. La question du maintien de l'enveloppe budgétaire associée à ce dispositif doit être posée, alors que la culture ne peut échapper à l'introspection dans le contexte budgétaire que vous connaissez.

J'attends de voir ce qui sera définitivement proposé par le Gouvernement avant de déterminer mes propositions.

M. Jean-Raymond Hugonet. - Le groupe de travail de la commission de la culture sur le Pass Culture que j'ai présidé avait dénoncé en son temps un projet coûteux et fumeux, dont tout le monde a bien compris qu'il n'était qu'un fait du prince censé montrer ce qu'avait fait le Président de la République pour la culture pendant son premier mandat.

Tous les rapports montrent que la cible est loin d'être atteinte. Près de 80 % des actions réalisées pour la culture dans notre pays le sont par les collectivités territoriales ! L'État gagnerait à se concentrer davantage sur les dispositifs d'éducation artistique et culturelle existants. Les crédits du Pass Culture auraient pu être utilisés de façon bien plus pertinente. Chaque euro doit être utilisé le plus opportunément possible dans tous les territoires.

M. Laurent Somon. - Le soutien à la lecture publique constitue une compétence obligatoire des départements. Or la fréquentation des bibliothèques est en baisse depuis la crise du covid-19. Les 15 500 bibliothèques de notre territoire ont besoin d'être soutenues, notamment par les collectivités territoriales. Quelles sont les orientations du Gouvernement à cet égard ?

M. Thierry Cozic. - Quelle sera la position de la commission des finances sur l'amendement du Gouvernement porteur de 300 millions d'euros de crédits ?

Des évolutions de périmètre sont-elles prévues pour l'avenir ?

M. Albéric de Montgolfier. - La Cour des comptes s'inquiète des conséquences potentielles des projets de fermeture de plusieurs établissements, notamment l'Opéra de Paris et le centre Pompidou. Elle s'inquiète notamment des pertes de recettes associées et des risques de dérive budgétaire de ces chantiers, dont le montant potentiel lui paraît sous-évalué.

Qu'en est-il par ailleurs du dossier difficile de la restauration du grand cloître de l'abbaye de Clairvaux ? Des crédits de paiement sont-ils affectés à ce projet ? Quelle est l'utilisation envisagée pour ce bâtiment ?

M. Marc Laménie. - Comment les directions régionales des affaires culturelles (Drac) contribuent-elles au financement des travaux, notamment de restauration, du patrimoine propriété des collectivités territoriales ?

Combien d'opérateurs de l'État existent-ils et comment leurs personnels se répartissent-ils ?

Enfin, quel lien est-il fait dans le budget avec les dispositions fiscales existantes, notamment celles qui bénéficient à la Fondation du patrimoine ?

M. Michel Canévet. - Je remercie les rapporteurs pour leur éclairage. Certaines politiques doivent être remises en cause, car nous devons faire des économies. Il revient aux collectivités territoriales de déployer une politique culturelle de proximité. La décentralisation est organisée depuis 1982. Pourquoi l'État ferait-il, avec le Pass Culture, la même chose que les collectivités territoriales sur le terrain ? Il y a là un choix à effectuer.

M. Pierre Barros. - Le service historique de la Défense, qui rassemble au sein du château de Vincennes des archives d'un intérêt stratégique et militaire majeur, se trouve dans des bâtiments en cours d'effondrement. Est-il prévu d'y remédier ? Le château lui-même a fait l'objet de nombreux travaux, mais la partie consacrée aux archives demeure en mauvais état.

M. Vincent Éblé, rapporteur spécial. - Les bibliothèques relèvent de la mission « Médias, livre et industries culturelles », non de la mission « Culture ».

Si l'activité du centre Pompidou risque effectivement d'être affectée par sa fermeture, le site de Massy accueillera néanmoins des manifestations culturelles et du public. Une partie des collections sera surtout exposée au Grand Palais.

Je partage par ailleurs l'inquiétude qui a été exprimée concernant la restauration du grand cloître de l'abbaye de Clairvaux. Près de 60 millions d'euros ont été budgétés pour 2024, mais le montant de 200 millions d'euros prévu pour la remise en état complète du couvert me paraît sous-estimé, compte tenu de l'immensité des lieux. Il est question ici simplement de la conservation du bâti clos et couvert, sans envisager quelque utilisation que ce soit. L'appel à projets lancé par l'État pour tenter de trouver un opérateur n'aboutira pas. Aucune initiative ne se présente donc pour cet édifice, dont la localisation dans un territoire assez éloigné des dynamiques franciliennes pose quelques difficultés.

Les collectivités locales jouent effectivement un rôle central dans la gestion du patrimoine, comme porteurs de monuments. Il en va de même pour les détenteurs de monuments privés. Les Drac apportent leur concours à ces propriétaires territoriaux, privés ou publics, par le biais de subventions.

Plus de 70 opérateurs travaillent au sein de la mission « Culture ». Nombre de ces opérateurs ont des ressources propres ou disposent de recettes fiscales, qui n'apparaissent pas dans les documents budgétaires. La Fondation du patrimoine est ainsi financée par des dispositifs fiscaux et ne fait pas l'objet d'information budgétaire à proprement parler.

Les archives de l'armée ne font pas partie des Archives nationales. Elles dépendent de leur propre ministère et ne relèvent donc pas des crédits de la mission « Culture ». Cela n'enlève rien, cependant, à la pertinence de la question posée à leur sujet. Des solutions devront être trouvées.

La dépense territoriale est au coeur de nos inquiétudes. Le fait que nous affichions, en tant que rapporteurs spéciaux, une position d'approbation des crédits ministériels ne dit rien des répercussions potentielles de la baisse des crédits des collectivités territoriales sur le secteur de la culture. Celui-ci, malheureusement, est souvent une variable d'ajustement. Dans les Pays de la Loire, par exemple, la région a ainsi annoncé la fin du subventionnement des conservatoires de musique territoriaux ; l'inquiétude est donc de mise.

Enfin, sans préjuger de l'avis de la commission, j'aurais du mal à exprimer un avis réservé sur la somme de 266 millions d'euros supplémentaires annoncée par le Gouvernement au bénéfice de missions culturelles, même si son orientation est exclusivement patrimoniale.

M. Didier Rambaud, rapporteur spécial. - Jean-Raymond Hugonet a tenu des propos très politiques - je n'entrerai pas dans le débat. Certes, on ne peut considérer le Pass Culture comme la seule solution au problème de l'inégalité devant la culture. Son objectif initial, en tous cas, était d'accroître la diversité des pratiques culturelles. Ses insuffisances sont connues, et je les ai signalées aux deux dernières ministres de la culture. Dans les zones rurales ou périurbaines, notamment, l'offre culturelle est faible. Ainsi là où j'habite, on n'y trouve ni librairie, ni cinéma, ni salle de spectacle à moins de 20 ou 30 kilomètres. Cela nous renvoie aux problématiques de la mobilité des jeunes, comme pour l'insertion professionnelle. Je l'ai dit à la ministre lors de son audition devant la commission de la culture la semaine dernière : nous devons travailler sur la question des déplacements. On voit que, lorsque l'on crée une médiathèque, par exemple, cela suscite un élan.

La lecture publique relève effectivement de la mission « Médias, livre et industries culturelles ». Les collectivités territoriales y consacrent 1,4 milliard d'euros et l'État, 330 millions d'euros. D'ailleurs, les livres représentent 56 % des achats financés par le Pass Culture, contre 20 % pour le cinéma, dont la part est toutefois en hausse. Maintenant, nous devons renforcer les efforts collectifs de médiation culturelle.

La diminution des crédits consacrés à l'éducation artistique et culturelle par le premier est compensée par les montants que le second alloue au volet collectif du Pass Culture.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Culture ».

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Réunie à nouveau le jeudi 21 novembre 2024, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a procédé à l'examen définitif de l'équilibre, des missions, des budgets annexes, des comptes spéciaux et des articles rattachés de la seconde partie.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Réunie le 13 novembre, la commission des finances a adopté, sans modification, les crédits de la mission.

Je vous propose pour cette mission l'adoption d'un amendement de crédits qui vise à limiter l'accès au Pass Culture aux seuls élèves boursiers de l'éducation nationale, soit environ un quart des jeunes scolarisés dans le second cycle de l'enseignement secondaire.

Le Pass Culture a fait l'objet de nombreuses évaluations critiques au cours des dernières années, concluant que ce dispositif, du moins pour sa part individuelle, est coûteux et largement inefficace en termes d'ouverture sociale.

M. Jean-Baptiste Olivier. - Si le dispositif est très inefficace, pourquoi le conserver ?

M. Michel Canévet. - Ne faudra-t-il pas remettre en cause une série de politiques menées par l'État si nous voulons effectivement réaliser des économies ? Si la décentralisation a conduit à confier aux collectivités territoriales un certain nombre de compétences, l'État souhaite systématiquement reproduire les dispositifs mis en place par les collectivités territoriales : il faudra faire des choix.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - À ce stade, je ne préconise pas une coupe brutale, même si je propose une réduction très sensible du dispositif. Le Pass Culture avait vocation à permettre à des populations sociologiquement éloignées de la culture d'y accéder, et j'ai choisi de conserver cet objectif.

L'amendement II-30 (FINC.1) est adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Culture » tels que modifiés par son amendement.

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