B. LA CONVENTION N° 155 MET EN PLACE UN SOCLE NORMATIF FONDAMENTAL POUR LE TRAVAIL DÉCENT ET COMPLÈTE OU RENFORCE CERTAINES DISPOSITIONS DU CADRE JURIDIQUE FRANÇAIS.

La convention n° 155 constitue une réponse globale aux besoins de protection des travailleurs face aux risques professionnels. Elle se distingue par son approche systémique, exigeant des États membres qu'ils adoptent une politique nationale de santé et de sécurité au travail (SST) fondée sur la consultation tripartite. L'objectif principal de la convention est de garantir un environnement de travail sûr et salubre, tout en promouvant une culture de prévention. Elle établit également des responsabilités claires pour les employeurs et les travailleurs, tout en engageant les États à évaluer régulièrement leurs politiques pour s'adapter aux nouveaux défis.

En France, ces principes trouvent un écho dans le Code du travail, qui impose aux employeurs une obligation générale de sécurité (article L. 4121-1). Cependant, la convention n° 155 va plus loin en offrant un cadre international pour harmoniser les pratiques et renforcer les droits des travailleurs face à des risques souvent complexes ou mal pris en compte.

L'un des principaux apports de la convention n° 155 réside dans son exigence de coordonner les actions des différents acteurs impliqués dans la santé et la sécurité au travail. En France, ces responsabilités sont partagées entre plusieurs entités, notamment les DREETS, les CROCT, et les SPST. Le PST4 pour 2021-2025 a déjà amorcé une harmonisation de ces initiatives. Cependant, la convention n° 155 renforce cette dynamique en exigeant une articulation plus fluide entre les politiques régionales, nationales et européennes, tout en fixant des objectifs clairs pour une évaluation régulière des résultats.

La convention n° 155 met aussi un accent particulier sur la prévention des risques professionnels. Elle exige des États membres qu'ils adoptent des mesures pour évaluer et éliminer les risques à la source. En France, le Code du travail prévoit des dispositions similaires, mais leur mise en oeuvre reste hétérogène, notamment dans les PME. La convention contribue à uniformiser ces pratiques, en intégrant la prévention dans une approche systématique et participative. Elle encourage le développement d'une culture de prévention, en impliquant directement les travailleurs dans l'identification des risques et la mise en oeuvre des mesures.

En outre, les exigences de la convention n° 155 en matière de gestion des risques émergents sont particulièrement pertinentes dans le contexte actuel. La pandémie de COVID-19 a mis en lumière l'importance de politiques flexibles et réactives pour protéger les travailleurs face à des crises inattendues. En France, le PST4 inclut déjà des mesures pour répondre à des enjeux tels que les impacts du changement climatique sur la santé au travail ou les crises environnementales. La convention n° 155 offre un cadre international pour renforcer ces initiatives et garantir une anticipation efficace des défis futurs.

Enfin, la convention n° 155 établit des principes universels pour garantir la sécurité de tous les travailleurs, tout en permettant des exclusions spécifiques pour certains secteurs. En France, ces exclusions concernent notamment les personnels militaires, les marins, et certains agents publics, mais elles sont compensées par des mécanismes alternatifs. Dans le secteur maritime, par exemple, le droit de retrait est limité en raison des exigences de sécurité liées à la navigation. Cependant, des garanties strictes, comme la traçabilité des suspensions du droit de retrait et des protocoles adaptés, assurent une protection équivalente. Pour se conformer pleinement aux exigences de la convention, la France devra probablement renforcer les garanties existantes pour les marins, les personnels militaires et les agents publics.

Partager cette page