EXAMEN DE L'ARTICLE
Article unique
Recours des collectivités
territoriales au modèle de la société portuaire
Cet article vise à élargir la possibilité pour les collectivités territoriales et leurs groupements d'avoir recours au modèle de la société portuaire.
À cette fin, il permet à toutes les collectivités territoriales et leurs groupements, de prendre des participations dans une société portuaire dont l'activité est d'assurer l'exploitation commerciale d'un ou plusieurs ports se trouvant dans leur ressort géographique.
Il met également à jour des références à des articles abrogés.
La commission a adopté l'article unique modifié par un amendement tendant à assurer la conformité de la proposition de loi au droit européen de la commande publique.
I. La société portuaire : un modèle de gestion opportun, mais qui ne bénéficie pas à toutes les autorités portuaires
A. Le modèle de société portuaire recèle de nombreux avantages comparatifs...
S'inspirant du modèle des sociétés aéroportuaires défini à l'article 7 de la loi du 20 avril 2005 relative aux aéroports, l'article 35 de la loi n° 2006-10 du 5 janvier 2006 relative à la sécurité et au développement des transports1(*) a donné la possibilité aux collectivités territoriales et leurs groupements de prendre des participations dans des sociétés portuaires dont l'activité principale est d'assurer l'exploitation commerciale d'un ou plusieurs ports situés dans leur ressort géographique.
En effet, les collectivités territoriales ont interdiction, sauf cas dérogatoires, de créer et exercer des prises de participations dans des sociétés commerciales de droit commun (articles L. 2253-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) pour les communes, L. 3231-6 pour les départements, L. 4211-1 pour les régions et L. 5111-4 pour les groupements de collectivités territoriales et autres établissements publics locaux).
Deux collectivités : la région Bretagne et la région Nouvelle-Aquitaine, autorités portuaires et propriétaires de leurs ports, ont créé, respectivement en 2021 et 2024, la société portuaire « BrestPort » (anciennement Société Portuaire Brest Bretagne (SPBB)) et la société portuaire « Port de Bayonne ».
Ces sociétés portuaires sont ainsi dotées d'une assise financière large qui permet le financement des investissements d'infrastructures, de modernisation ou de transition que les CCI n'étaient pas ou plus en mesure de porter seules. Par ailleurs, cette structure renforce l'implication des collectivités territoriales concédantes et leur participation dans la stratégie de développement de leurs ports.
Les sociétés portuaires en France
Depuis la loi de 2006 ayant institué le dispositif, deux sociétés portuaires ont été mises en place2(*).
1) « BrestPort »
En 2021, la CCI métropolitaine Bretagne occidentale (CCIMBO) a fait l'apport de ses concessions commerce et réparation navale du port de Brest pour créer la « société portuaire du port de Brest (SPPB) ». Cette dernière est une société anonyme, créée et détenue par la Région Bretagne (51 %), la CCIMBO (39 %) et Brest métropole (10 %). Sa mission est de gérer le port dans le cadre d'une concession de 40 ans accordée par la Région Bretagne, propriétaire et autorité concédante du port ;
1) « Société portuaire Port de Bayonne »
SAS à capitaux publics, cette société portuaire a des actionnaires multiples : la Région Nouvelle Aquitaine, actionnaire majoritaire avec 70,27 % du capital de la société, la CCI Bayonne Pays basque (CCI BPB), actionnaire prioritaire avec 27,03 % des parts, et la CCI des Landes, actionnaire à hauteur de 2,70 %. La société portuaire a tout d'abord repris la concession en cours sous forme de quasi régie jusqu'au 31 décembre 2024 et gère la prochaine concession pour une durée de 40 ans. Historiquement, la CCI BPB gérait le port depuis 1887.
Source : CCI France et Société portuaire Port de Bayonne
Le modèle de la société portuaire se différencie par ailleurs des deux autres « modèles » qui auraient pu être choisis par ces collectivités pour la gestion de leurs ports :
- la société publique locale (SPL), en application des articles L. 1531-1 et suivants du CGCT3(*),
- la société d'économie mixte (SEM), en application des articles L. 1521-1 et suivants du CGCT4(*).
La SPL est une société anonyme de droit privé dont le capital associe au moins deux personnes publiques et est détenu en totalité par ces personnes publiques. Cet actionnariat exclusivement public permettrait aux autorités portuaires de concéder l'exploitation de leurs ports sans publicité ni mise en concurrence, conformément aux articles L. 2511-1 et suivants (pour les marchés publics) et L. 3211-1 et suivants (pour les concessions) du code de la commande publique relatifs aux contrats de quasi-régie (ou contrats in house)5(*). Toutefois, ces contrats devront remplir trois conditions cumulatives pour que cette relation de quasi-régie soit retenue :
- le contrôle exercé par le ou les pouvoirs adjudicateurs sur le ou leur cocontractant doit être analogue à celui qu'ils exercent respectivement sur leurs propres services ;
- l'activité du cocontractant doit être principalement consacrée à ce(s) pouvoir(s) adjudicateur(s) ;
- la personne morale contrôlée ne comporte, en principe, pas de participation directe de capitaux privés, à l'exception des formes de participation de capitaux privés, sans capacité de contrôle ou de blocage requise par la loi, qui ne permettent pas d'exercer une influence décisive sur cette personne.
Seules les collectivités locales et leurs groupements (communauté urbaine, d'agglomération, de communes, syndicat intercommunal...) peuvent être actionnaires d'une SPL. Les établissements publics et autres organismes publics ou parapublics, eux, ne peuvent pas participer au capital d'une SPL, ce qui exclut la prise de participation des chambres de commerce et d'industrie (CCI), contrairement à ce que permet la société portuaire.
Pourtant, les CCI jouent un rôle important dans la gestion des infrastructures (575 sur le territoire national) et plus particulièrement des infrastructures portuaires. Les CCI ont souvent créé et géré ces ports depuis leur origine (comme le port de Roscoff-Bloscon dont les investissements ont été réalisés depuis sa création en 1969 par la CCI). Elles ont la compétence technique, la connaissance économique du territoire, la proximité des entreprises locales de divers secteurs (commerce, industrie, pêche...), ainsi qu'une capacité de projection à l'international, par le biais du réseau des CCI à l'étranger. À ces titres, elles ont toute la légitimité et l'expertise pour être actionnaires des sociétés portuaires.
La participation des CCI à la gestion des ports français
En France métropolitaine et en outre-mer, ce sont 116 ports qui sont gérés par le réseau des CCI, dans 14 régions sur 17 concernées. Certaines régions sont particulièrement représentées : 27 ports sont gérés en Bretagne, 19 en Normandie, 14 en Pays de la Loire ou encore 10 dans les Hauts de France.
Les modèles de gestion sont très variés et se répartissent comme suit :
- gestion déléguée par un tiers à la CCI : 50 % ;
- actionnariat minoritaire ou majoritaire : 19 % ;
- participation de la CCI à une structure mixte : 17 % ;
- gestion directe : 11 % ;
- gestion déléguée par la CCI à un tiers : 3 %.
S'agissant plus précisément des ports possédés par les collectivités ou d'organismes qui en dépendent, le réseau des CCI en gère 93, dont la gestion est répartie comme suit :
- gestion déléguée par un tiers à la CCI : 49 % ;
- actionnariat minoritaire ou majoritaire : 22 % ;
- participation de la CCI à une structure mixte : 20 % ;
- gestion directe : 9 %.
Source : CCI France
À l'inverse de la SPL, la SEM permet la prise de participation des CCI mais en raison de la participation de sociétés privées à son capital ne peut bénéficier des dérogations liées aux contrats de quasi-régie. Le contrat de concession devra donc faire l'objet d'une procédure d'attribution avec mesures de publicité et mise en concurrence.
B. ...Qui ne profite qu'à un nombre limité d'autorités portuaires
Plusieurs projets de création de ce type de structure sont à l'étude, notamment en Bretagne, en raison, d'une part, de l'arrivée à échéance de plusieurs délégations de service public et, d'autre part, du souhait de créer des entités regroupant plusieurs ports de pêche pour en accroître la compétitivité et améliorer la résilience de leur gestionnaire.
Les auditions préparatoires de la rapporteure ont appelé à une vigilance particulière sur la situation des ports de pêche du pays de Cornouaille.
En effet, le département du Finistère a conclu un accord portuaire avec la Région Bretagne pour créer un Syndicat mixte permettant une gestion mutualisée de 7 ports de pêche à l'échelle de la Cornouaille. La compétence portuaire lui étant transférée par le département et la région pour les ports de Douarnenez, Audierne, Saint-Guénolé-Penmarc'h, Le Guilvinec, Lesconil, Loctudy et Concarneau (partie pêche plaisance). Ces ports représentent la première place de pêche fraîche française avec 20 % de la pêche nationale et la moitié de la pêche bretonne. Ils rassemblent 1 600 marins et près de 10 000 emplois dans les principaux domaines maritimes.
Ces ports de pêche, comme beaucoup de leurs homologues français, ont dû gérer plusieurs chocs exogènes : Brexit, Covid, flambée du prix des carburants, plan de sortie de flotte et dernièrement fermeture spatio-temporelle du golfe de Gascogne pour protéger les dauphins communs des captures accidentelles.
La hausse des coûts et la baisse des volumes pèsent sur les concessionnaires qui exercent leurs activités « à leurs risques et périls » alors que leurs ressources financières baissent et que les besoins en investissements augmentent. Si une indemnisation du concessionnaire est envisageable au titre de la théorie de l'imprévision6(*), la fixation du montant de cette indemnisation donne lieu à des négociations fastidieuses entre le concessionnaire et son concédant et ne compense pas l'intégralité des pertes enregistrées par le concessionnaire.
La participation des collectivités, aux côtés de la CCI, permettrait ainsi une mutualisation des risques, une simplification des relations et des négociations entre concédant et concessionnaire et permettrait de renouveler les contrats de concessions sans que l'équilibre financier soit trouvé aux dépens du concédant ou de l'effort d'investissement. Toutefois, le droit en vigueur ne permet pas la création d'une société portuaire pour gérer de façon mutualisée ces 7 ports.
En effet, le champ d'application de l'article 35 de la loi de 2006 qui crée le modèle de société portuaire ne s'applique qu'aux 18 ports7(*) (17 métropolitains et 1 situé outre-mer) expressément visés à l'article 30 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales (dite « acte II de la décentralisation »). Il s'agit des anciens ports non autonomes de l'État ou ports d'intérêt national dont les compétences et la propriété ont été transférées aux collectivités territoriales, principalement les régions, en 2004.
Dans le cas des ports de pêche du Pays de Cornouaille, seul celui de Concarneau aurait pu être géré par une société portuaire, les 6 autres ports étant exclus alors qu'ils font partie du même bassin de pêche.
Pourtant, hormis les 11 grands ports maritimes et fluviomaritimes8(*) et les ports maritimes autonomes qui relèvent de l'État, tous les autres ports relèvent des collectivités territoriales et de leurs groupements9(*), comme suite à un processus successif de décentralisation.
En effet, jusqu'au 31 décembre 1983, tous les ports français relevaient de la seule compétence de l'État. Les articles 5 et 6 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 complétant la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État ont confié la gestion de certains d'entre eux aux collectivités territoriales.
Ainsi, les régions ont pu demander à exercer la compétence pour l'aménagement des ports et canaux fluviaux10(*). Les départements ont reçu compétence pour créer, aménager et exploiter 304 ports maritimes de commerce et de pêche. Enfin, les communes ont la responsabilité des quelques 228 ports « affectés exclusivement » à la plaisance. La loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale a autorisé le transfert de cette compétence aux établissements publics de coopération intercommunale. Restèrent de la compétence de l'État les ports autonomes, les ports d'intérêt national, ainsi que les ports maritimes contigus aux ports militaires.
L'article 104 de la loi 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité a clarifié le transfert aux communes de tous les ports « dont l'activité dominante est la plaisance » et a autorisé les régions qui le demandaient à bénéficier, à titre expérimental, du transfert de la compétence sur les ports d'intérêt national.
L'article 30 de la loi de 2004 susmentionnée a transféré la propriété et la compétence de ces ports d'intérêt national aux collectivités territoriales ou à leurs groupements de leur ressort géographique.
Enfin, l'article 22 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (dite « loi NOTRe ») a défini le cadre procédural d'un possible transfert de la propriété, de l'aménagement, de l'entretien et de la gestion des ports relevant des départements ou de groupements dont les départements sont membres aux autres collectivités territoriales ou groupements. Tous les ports départementaux étaient concernés par le dispositif et ce quel que soit leur type d'activité (commerce, pêche, plaisance).
Par exemple, avant cette loi, le département du Finistère avait la compétence sur 15 ports ayant une activité de pêche, de commerce ou de desserte des îles. Comme suite à la loi NOTRe, il a transféré à la Région Bretagne les ports de desserte des îles (Roscoff Vieux Port, Batz, Molène, Ouessant, Audierne-Sainte-Evette, Le Conquet, Sein) et les ports à dominante commerciale (Roscoff-Bloson et Concarneau)
On peut ainsi dénombrer plus de 600 ports décentralisés ou « territoriaux11(*) » : 470 ports de plaisance, 100 ports de pêche et halles à marée et 50 ports de commerce. Ces ports décentralisés représentent en 2024, 22 % du tonnage total de marchandises. Si ces ports sont peu présents sur le secteur du vrac liquide (4 %) et du conteneur (1 %), ils dominent le secteur roulier (75 % du transport de véhicules) et le transport de passagers (75 %). Certaines régions ne sont dotées que de ports décentralisés comme la Corse, la Bretagne et l'Occitanie. Une étude réalisée en 2022 par le cabinet Mensia pour le compte de l'Union des Ports de France portant sur les principaux ports décentralisés a indiqué que ce secteur génère une valeur ajoutée de 600 M€, uniquement en prenant en compte les activités directes, et emploie 11 000 personnes et 27 000 en ajoutant les emplois indirects. Ces ports ont rassemblé près de 2,1 milliards d'euros d'investissements entre 2015 et 2023.
Il serait opportun que les autorités portuaires, quel que soit le propriétaire du port12(*), puissent bénéficier de la possibilité de créer des sociétés portuaires alors que leur situation n'est guère différente des ports éligibles au dispositif de l'article 30 de la loi de 2004 précitée.
II. Un assouplissement du modèle de société portuaire pour en élargir le bénéfice
L'article unique propose d'élargir la possibilité pour les collectivités territoriales et leurs groupements d'avoir recours au modèle de la société portuaire pour l'exploitation de leurs ports en modifiant l'article 35 de la loi n° 2006-10 du 5 janvier 2006 relative à la sécurité et au développement des transports qui réglemente la création et le champ d'action de ces sociétés.
A. Permettre à toutes les autorités portuaires de ports décentralisés de recourir au modèle de société portuaire
L'article unique modifie le paragraphe I de l'article 35 de la loi n° 2006-10 du 5 janvier 2006 relative à la sécurité et au développement des transports (1° du paragraphe I).
Il en clarifie tout d'abord la rédaction en permettant aux collectivités locales et à leurs groupements de créer des sociétés dont l'activité principale serait d'assurer l'exploitation commerciale d'un ou plusieurs ports. Il qualifie également ces sociétés de « portuaires ». La rédaction actuelle mentionne seulement la possibilité de prendre des participations dans ces sociétés sans donner de qualification particulière à ces sociétés.
Il supprime ensuite le renvoi à l'article 30 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales de façon à ce qu'une société puisse être créée pour assurer l'exploitation commerciale de n'importe quel type de port (commercial, de pêche ou de plaisance). Ainsi, ne seraient plus seulement visés les 18 ports non autonomes transférés par l'État aux collectivités territoriales par la loi de 2004 : l'ensemble des ports décentralisés bénéficierait donc de la possibilité de recourir au modèle de la société portuaire.
Il permet enfin aux chambres de commerce et d'industrie, dans le ressort géographique desquelles les ports exploités se situent, de participer au capital de ces sociétés portuaires.
L'article unique procède à des coordinations au paragraphe II de l'article 35 de la loi susmentionnée, relatives aux possibilités de cession ou d'apport d'une concession à une société portuaire (2° du paragraphe I). La rédaction proposée supprime les références à la loi de 2004, compte tenu de l'élargissement du dispositif, et la mention des CCI, celle-ci n'étant plus utile compte tenu des modifications prévues au I (inscription du principe selon lequel les CCI peuvent participer au capital des sociétés portuaires).
Il précise enfin que les dispositions de l'article L. 3135-1 du code de la commande publique relatif aux modalités de modification des contrats de concession sans nouvelle procédure de mise en concurrence ne s'appliquent pas lors de la cession ou de l'apport de la concession à la société portuaire.
B. Mettre à jour des références obsolètes
1) L'article unique met à jour les références du paragraphe III de l'article 35 de la loi de 2006 susmentionnée (3° du paragraphe I)
En effet, ce paragraphe exclut l'application de certains articles de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques (dite loi « Sapin ») aux opérations d'attribution, de cession ou d'apport de concession réalisées. Il s'agit :
- des deuxième à cinquième alinéas de l'article 38 de cette loi, relatifs aux obligations de procédures de publicité et de mise en concurrence auxquelles sont soumises les délégations de service public
- des deuxième à quatrième alinéas de l'article 40 de cette loi, relatifs aux conditions de prolongation de ces délégations de service public.
Cependant, ces deux articles ont été abrogés par l'ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession, elle-même abrogée par l'ordonnance n° 2018-1074 du 26 novembre 2018 portant partie législative du code de la commande publique qui a codifié ces dispositions.
En conséquence, il est proposé de mentionner les dispositions codifiées qui sont en vigueur :
- le titre II du livre Ier de la troisième partie du code de la commande publique relatif à la procédure de passation des contrats de concession (articles L. 3120-1 à L. 3126-3 du code de la commande publique)
- le chapitre préliminaire et le chapitre Ier du titre Ier du livre IV de la première partie du code général des collectivités territoriales relatifs aux règles générales applicables aux contrats de concession et aux délégations de service public (articles L. 1410-1 à L. 1410-3 et L. 1411 1 à L. 1411-19 du code général des collectivités territoriales)
2) L'article unique précise également la rédaction et met à jour certaines références du IV de l'article 35 de la loi de 2006 susmentionnée, qui fixe les modalités de mise à disposition des agents publics affectés à la concession (4° du paragraphe I)
D'une part, le dispositif précise que ces modalités ne s'appliquent qu'aux agents publics transférés lors de la cession ou de l'apport de la concession et non à l'ensemble des agents publics affectés à la concession.
D'autre part, il met à jour la référence au code du travail s'agissant du transfert des contrats de travail en cours des salariés de droit privé entre l'ancien concessionnaire-employeur et la société portuaire. En effet, la rédaction actuelle de l'article 35 mentionne les dispositions de l'article L. 122-12 du code du travail qui ont été abrogées par l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail depuis le 1er mars 2008. Le dispositif remplace donc cette référence par celle de l'article L. 1224-1 du code du travail qui reprend ces dispositions.
C. Gages financiers
Les deux derniers paragraphes de l'article unique (II et III) constituent des gages financiers pour tenir compte des conséquences financières pour les collectivités territoriales et pour l'État du I.
Le premier compense les éventuelles conséquences financières pour les collectivités territoriales par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
Le second compense les éventuelles conséquences financières pour l'État par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs.
III. La position de la commission : assurer la conformité du dispositif au droit européen de la commande publique
La commission souscrit pleinement à l'objectif et aux modalités pour y parvenir définies à l'article unique de la proposition de loi afin de permettre aux collectivités territoriales et à leurs groupements de recourir au modèle de société portuaire pour exploiter leurs ports.
L'article unique prévoit une mise à jour, à droit constant des références au droit de la commande publique. Pour autant, il est apparu nécessaire que cette mise en cohérence respecte les exigences imposées par le droit européen de la commande publique et notamment les dispositions de l'article 4313(*) de la directive 2014/23/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur l'attribution de contrats de concession. En effet, les opérations d'attribution et de modification des contrats de concession ne peuvent pas être dispensées des procédures de mise en concurrence sans une appréciation au cas par cas.
À l'initiative de la rapporteure, la commission a adopté un amendement (COM-1) pour supprimer les dérogations aux obligations de publicité et de mise en concurrence figurant aux alinéas 614(*) et 715(*) de l'article unique de cette proposition de loi.
La commission a adopté l'article unique ainsi modifié.
* 1 Introduit par un amendement des sénateurs Jean-François Le Grand et Charles Guéné. Le premier avait d'ailleurs déposé une proposition de loi (n° 383, 2024-2025) relative à la création de sociétés portuaires le 8 juin 2005.
* 2 La région Occitanie est actionnaire (34 %) avec la Banque des territoires (15 %) à 49 % du capital de la société d'économie mixte à opération unique portuaire qui opère le port de Port-la-Nouvelle depuis le 1er mai 2021. Les 51 % restant sont détenus par Nou Vela, un groupement d'actionnaires privés. La création de ces sociétés mixtes à opération unique (SEMOP) est régie par les articles L. 1541-1 et suivants du CGCT.
* 3 Articles créés par la loi n° 2010-559 du 28 mai 2010 pour le développement des sociétés publiques locales.
* 4 Dispositions créées par la loi n° 83-597 du 7 juillet 1983 relative aux sociétés d'économie mixte locales et codifiées par la loi n° 96-142 du 21 février 1996 relative à la partie législative du code général des collectivités territoriales.
* 5 La Cour de Justice de l'Union européenne (CJUE) avait reconnu en 1999 l'existence de ces contrats : considérant 50 de l'arrêt de la CJCE du 18 novembre 1999, Teckal, Aff. C-107/98. Cette jurisprudence avait été reprise et précisée à l'article 12 de la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE.
* 6 Théorie créée par le juge administratif dans sa décision du Conseil d'État du 30 mars 1916 Compagnie Générale d'Éclairage de Bordeaux et codifiée au 3° de l'article L. 6 du code de la commande publique qui en précise les conditions : « Lorsque survient un évènement extérieur aux parties, imprévisible et bouleversant temporairement l'équilibre du contrat, le cocontractant, qui en poursuit l'exécution, a droit à une indemnité ».
* 7 Il s'agit des ports de Calais, Boulogne-sur-Mer, Dieppe, Caen-Ouistreham, Cherbourg, Saint-Malo, Brest, Le Fret, Roscanvel, Concarneau, Lorient, La Rochelle (le port de pêche), Bayonne, Port-la-Nouvelle, Sète, Toulon, Nice et Le Larivot (en Guyane). Les ports d'Ajaccio et de Bastia avaient déjà été décentralisés par la loi n° 2002-92 du 22 janvier 2002 relative à la Corse. D'ailleurs, le Sénat a adopté le 2 juin 2025, un projet de loi portant création de l'établissement public de commerce et de l'industrie de la collectivité de Corse doté d'un statut particulier permettant la gestion en quasi-régie des ports et aéroports de la collectivité.
* 8 Il s'agit de Dunkerque, Nantes-Saint-Nazaire, La Rochelle, Bordeaux, Marseille, Haropa Port, les grands ports de Guyane, de Martinique, de Guadeloupe et Port-Réunion. On peut également prendre en compte le port d'intérêt national relevant de l'État de Saint-Pierre-et-Miquelon.
* 9 Articles L. 5311-1 du code des transports. Le port de Port-Cros relève pour son aménagement, son entretien et sa gestion de l'Établissement public du parc national de Port-Cros.
* 10 Seules trois régions avaient décidé d'exercer cette compétence : la Bretagne, les Pays de la Loire et la Picardie.
* 11 Selon les mots d'Alain Bazille, Président de l'Association nationale des ports maritimes territoriaux (ANPMT) et Vice-Président de la Seine-Maritime.
* 12 Soit l'État soit la collectivité territoriale selon l'infrastructure visée.
* 13 Les dispositions de cet article sont notamment transposées en droit français à l'article L. 3135-1 du code de la commande publique auxquelles la proposition de loi souhaite déroger.
* 14 Dérogation aux dispositions de l'article L. 3135-1 du code de la commande publique.
* 15 Dérogation aux dispositions du titre II du livre Ier de la troisième partie du code de la commande publique ainsi que du chapitre préliminaire et du chapitre Ier du titre Ier du livre IV de la première partie du code général des collectivités territoriales.