B. AU REGARD DE L'INTERPRÉTATION DE LA MAJORITÉ DE LA DOCTRINE, LA PROPOSITION DE LOI NE PRODUIT PAS D'EFFET JURIDIQUE PARTICULIER
Perçu comme une stratégie de contournement du Parlement, le recours à l'article 11 par le général de Gaulle en 1962 avait suscité une forte opposition tant au Sénat, sous la présidence de Gaston Monnerville, qu'à l'Assemblée nationale, avec l'adoption d'une motion de censure entraînant la démission du premier gouvernement Pompidou. Au plan juridique, le Conseil d'État avait rendu un avis défavorable sur le recours à cette procédure.
Dans sa grande majorité, la doctrine considère aujourd'hui que l'article 89 constitue déjà la seule voie de révision régulière de la Constitution. Parmi les arguments les plus souvent mobilisés à l'appui de cette thèse, peut être mentionné le fait que la Constitution comporte un titre spécial dédié à sa révision (titre XVI), dont les dispositions ne visent à aucun moment l'article 11. En outre, il résulte logiquement de l'économie générale des deux articles 11 et 89, qui prévoient tous deux une adoption par référendum, que seul le second, plus restrictif, permet de réviser la Constitution.
La proposition de loi constitutionnelle tend à modifier les articles 11 et 89 de façon à expliciter que seul l'article 89 peut être utilisé pour réviser la Constitution. Ce faisant, elle se borne à consacrer ce qui est déjà l'interprétation de la majorité de la doctrine.