II. L'AUDITION DE M. DOMINIQUE PERBEN, MINISTRE DE LA FONCTION PUBLIQUE, DE LA RÉFORME DE L'ÉTAT ET DE LA DÉCENTRALISATION PAR LA COMMISSION DES FINANCES.
Réunie le mardi 19 novembre 1996, sous la présidence de M. Christian Poncelet, président, la commission a procédé à l'audition de M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de la décentralisation, sur les crédits de son département ministériel.
Abordant le volet décentralisation de son action, le ministre a fait valoir qu'en 1997, le gouvernement respecterait les termes du pacte de stabilité prévu par l'article 32 de la loi de finances pour 1996, et donc l'indexation sur le taux prévisionnel d'évolution des prix de l'enveloppe normée comprenant les dotations concernées par ce pacte.
Il a rappelé que, dans ce cadre, les modalités de calcul du taux de progression de la dotation globale de fonctionnement avaient été préservées et que cet indice atteignait, en 1997 par rapport à 1996, 1,95 %. Les dotations d'équipement bénéficieraient d'une progression de 4 % environ, cependant que les dotations de décentralisation seraient maintenues en volume. Enfin, la dotation de compensation de la taxe professionnelle augmenterait de 280 millions de francs, traduisant ainsi l'effet protecteur du pacte.
M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de la décentralisation, a souligné le fait que le Gouvernement avait décidé de ne pas relever en 1997 le taux de la cotisation à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), faisant observer que le besoin de financement de la caisse, de l'ordre de 4,5 milliards de francs, serait couvert l'année prochaine par prélèvement sur les ressources structurellement excédentaires du fond de l'allocation temporaire d'invalidité.
Il a enfin mentionné, pour mémoire, la suppression par l'Assemblée nationale du dispositif de l'article 20 du projet de loi de finances pour 1997 qui, s'il avait été mis en oeuvre, aurait réduit de 1,6 milliard de francs le montant de la compensation versée par l'État aux collectivités locales au titre de la réduction de taxe professionnelle pour embauche et investissement. À ce sujet, il a assuré les membres de la commission qu'ils n'auraient pas à se préoccuper de ce sujet dans le cadre de l'examen du budget.
M. Michel Mercier, rapporteur spécial des crédits de la décentralisation, a tout d'abord souhaité donner acte au Gouvernement du respect de ses engagements concernant le pacte de stabilité. Il a toutefois tenu à faire observer que si la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP) bénéficiait enfin en 1997 d'une progression de son montant, cette situation plus favorable faisait suite à plusieurs années caractérisées par d'importantes ponctions sur les ressources de la DCTP.
S'agissant de la compensation aux départements et aux régions de l'abattement de 35 % sur les droits de mutation à titre onéreux décidé dans le cadre de la première loi de finances rectificative pour 1995, il a demandé au ministre si certaines des collectivités concernées n'étaient pas susceptibles de devoir reverser un trop-perçu, le montant des acomptes accordés en 1995 et 1996 dépassant le montant final de la compensation. Il a souhaité savoir si, dans ce cas, l'étalement sur trois ans de la régularisation à opérer bénéficierait également à ces collectivités.
Puis, M. Michel Mercier, rapporteur spécial, a souligné l'absence de revalorisation des valeurs locatives servant de base aux impôts directs locaux dans la deuxième partie du projet de loi de finances pour 1997.
Il s'est fait l'écho de l'inquiétude manifestée par les élus qui, en dépit d'une amélioration globale de leur épargne de gestion, hésitent à programmer de nouveaux investissements. Il a plaidé pour l'envoi par le Gouvernement de signes tangibles de son désir d'aider les collectivités territoriales et de leur redonner confiance.
Le rapporteur spécial a ainsi estimé qu'en premier lieu l'État pourrait étendre le pacte de stabilité financière aux charges imposées aux collectivités locales, en arrêtant la prolifération des normes législatives et réglementaires particulièrement contraignantes qui pèsent sur la gestion des collectivités territoriales et en repoussant les délais qui leur sont imposés pour la réalisation de certains investissements, notamment en matière d'environnement.
Approuvant l'esprit de l'amendement adopté par la commission étendant aux groupements de communes le remboursement du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) pour les investissements réalisés en matière de voirie, M. Michel Mercier, rapporteur spécial, a en second lieu, regretté que ce dispositif ne s'applique qu'en 1997 et a suggéré au ministre que le Gouvernement veuille bien le mettre en oeuvre dès 1996. Il a fait observer qu'en effet les communautés de communes avaient voté leur budget au début de l'année en cours en inscrivant en recettes les remboursements au titre du FCTVA, sans que les préfets défèrent ces documents aux chambres régionales des comptes pour insincérité. Dès lors, en refusant d'appliquer dès 1996 le dispositif adopté par la commission, le Gouvernement risque de mettre ses fonctionnaires en porte-à-faux.
M. Christian Poncelet, président, rappelant que les lois de décentralisation avaient prévu, pour tout transfert de compétence, le transfert des ressources correspondantes, a regretté que ce principe n'ait pas toujours été respecté.
M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de la décentralisation, a estimé que si certaines collectivités devaient subir une régularisation négative de leurs compensations pour réduction des droits de mutation à titre onéreux, les remboursements correspondants ne devraient pas être excessifs.
Il a fait valoir qu'au bout du compte, le mécanisme mis en place dans la première loi de finances rectificative pour 1995 conduirait vraisemblablement l'État à verser à titre de compensation, aux collectivités locales, des sommes supérieures aux pertes effectivement enregistrées.
Prenant la défense du dispositif d'étalement sur trois ans du paiement du solde de la compensation, prévu par l'article 17 du projet de loi de finances pour 1997, il a ajouté que celui-ci lui paraissait acceptable à partir du moment où les départements et les régions bénéficieront à nouveau, à compter du 1er janvier prochain, de recettes calculées à taux plein. Rappelant la compétence du ministre délégué au budget sur cette question, il a cependant souligné le fait que les perspectives du budget de 1998 étaient difficilement compatibles avec le souhait de la commission de concentrer sur cet exercice la fin du paiement du solde de la compensation correspondant à la réduction de 35 % des droits de mutation à titre onéreux.
S'agissant de la progression des valeurs locatives, le ministre a indiqué que l'Assemblée nationale avait adopté un amendement les majorant de 1 %en 1997.
Réagissant aux propos du rapporteur spécial sur la mise en place d'un pacte de stabilité des charges assumées par les collectivités territoriales, M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de la décentralisation, a rappelé que le Premier ministre avait imposé que tout projet de loi ou de décret soit à l'avenir accompagné d'une étude d'impact.
Convenant du fait qu'il fallait certainement apporter des restrictions à l'imagination réglementaire de l'administration, il a cependant fait valoir au rapporteur spécial qu'il existait des exigences minimales en matière de santé publique qui s'imposaient à tous et pas seulement aux collectivités territoriales.
Évoquant le souhait du même intervenant de voir éventuellement repoussés les délais fixés pour le respect des normes environnementales, le ministre a indiqué prendre note de ce souci de plus en plus fréquemment évoqué par les parlementaires, précisant qu'il n'était toutefois pas à même d'apporter dans l'immédiat une réponse sur ce sujet. Rappelant que nombre de ces contraintes techniques procédaient de décisions prises au niveau européen, il s'est cependant déclaré ouvert à la création de groupes de travail.
Le ministre a enfin assuré M. Mercier, rapporteur spécial, qu'il transmettrait à son collègue de l'économie et des finances ses remarques concernant l'application dès 1996 du dispositif permettant aux groupements de communes de bénéficier des remboursements du FCTVA au titre des investissements qu'ils réalisent sur la voirie.
M. Christian Poncelet, président, a demandé des précisions sur la situation financière de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales en 1997 et s'est inquiété des perspectives d'un relèvement du taux de cotisation des employeurs en 1998.
Il a souhaité en second lieu connaître l'avis du ministre sur un éventuel assouplissement des règles régissant l'évolution des taux des quatre taxes directes locales.
M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de la décentralisation, a certifié, en réponse à la première question, que le prélèvement de 4,5 milliards de francs opéré sur les réserves de l'allocation temporaire d'invalidité permettrait de couvrir intégralement l'an prochain le besoin de trésorerie de la CNRACL.
N'excluant aucune solution, hausse de la cotisation employeur ou diminution de la participation de la CNRACL aux mécanismes de surcompensation, le ministre a estimé qu'il restait un an pour dégager des perspectives à moyen et à long terme de manière à ce que les collectivités territoriales y voient clair dans l'évolution de leurs versements à la caisse.
Abordant ensuite la question du "déverrouillage" des taux, le ministre a indiqué qu'il proposerait lui-même, dans le cadre du projet de loi relatif à l'intercommunalité, des adaptations permettant aux groupements levant une taxe professionnelle d'agglomération de ne plus être dépendants, pour la fixation du taux de cet impôt, des décisions prises par les communes membres pour la fixation des taux des trois taxes ménages.
Il s'est en revanche montré nettement plus réservé à l'égard de tout autre projet d'assouplissement des dispositions régissant l'évolution coordonnée des taux des quatre impôts directs locaux, estimant qu'il convenait de faire attention à ne pas donner le sentiment aux contribuables qu'aucune limite ne sera plus imposée à la hausse de la pression fiscale.
Après cette audition, la commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de l'Intérieur et décentralisation (décentralisation) précédemment réservés.