II. UNE PRÉPARATION SUFFISANTE ?

Toutes les prévisions portant sur l'impact budgétaire de l'élargissement sont affectées de tant d'incertitudes que l'exercice consistant à rechercher précisément si la dotation budgétée en ce sens correspond aux besoins qu'il faudra satisfaire est illusoire. Les commentaires ci-après relèvent donc davantage d'une intuition raisonnée que d'une appréciation scientifiquement rigoureuse.

La montée en charge des crédits de préparation à l'adhésion dans la nouvelle programmation ainsi que la réforme du programme PHARE intervenue en 1998 ne laissent pas d'inquiéter.

Tout se passe comme si, à mesure que les perspectives d'élargissement approchaient, la prise de conscience d'un retard de préparation des pays candidats à l'élargissement avait grandi chez les 15.

Le tableau ci-dessous justifie largement cette inquiétude.

Retard de certains pays anciennement communistes
de l'Europe orientale

 

PIB par tête 1992 (réel)

Taux de croissance annuel en % (méthode Barro)

Nombre d'années de retard

Taux de croissance annuel en % (méthode Levine Renelt)

Nombre d'années de retard

Bulgarie

4.054

5,06

25

5,31

24

Rép. Tchèque

6.845

5,66

15

4,73

18

Hongrie

5.638

5,19

20

4,74

22

Pologne

4.726

5,54

21

5,06

23

Roumanie

2.565

5,61

30

5,85

29

Yougoslavie

3.887

5,62

23

5,42

24

Source : Fischer, Sahay et Veth (1998)

Le tableau ci-après comporte quelques comparaisons entre les pays candidats à l'élargissement et à l'Europe des 15.

Il confirme des retards de développement très accusés.

Comparaison Candidats - Union européenne


Pays

PIB en % de l'UE à 15 1997

Population en % population UE 1997

PIB PPA (1) en % de l'UE 15 1997

PIB PPA (1) /tête en % de l'UE 15 1997

PIB PPA (1)/tête en % de l'UE 15
Evolution 1997/1993

Pologne

1,7

10,3

4,1

40

21,2

Estonie

0,06

0,4

0,1

37

15,6

Slovénie

0,2

0,5

0,4

68

9,7

Rép. Tchèque

0,6

2,7

1,7

63

5,0*

Hongrie

0,6

2,7

1,3

47

4,4

Total 5 PECO

3,2

16,7

7,6

48

 

Slovaquie

0,2

7,0

0,7

47

17,5

Roumanie

0,4

1,8

1,9

34

13,3

Lettonie

0,07

0,2

0,3

27

8,0

Lituanie

0,1

1,9

0,2

30

7,1**

Bulgarie

0,1

0,1

0,5

23

- 17,9

Total 10 PECO

4,1

28,0

11,1

40

 

* L'évolution est donnée à partir de 1994

** L'évolution est donnée à partir de 1995

Sources : calculs DP et CGP sur données Eurostat (1998)

(1) PPA : Parités de pouvoir d'achat.


Le PIB de l'ensemble des candidats représente à peu près la moitié du PIB français. Le PIB par habitant y est nettement plus faible qu'en moyenne dans l'Union à 15 ce qui est essentiel pour apprécier l'incidence de l'élargissement sur la politique structurelle et les politiques internes.

L'impact instantané de l'élargissement sur l'Union européenne est rappelé dans le tableau ci-dessous pour quelques grandeurs significatives et dans une perspective de comparaison avec les élargissements précédents.

 

Augmentation de la superficie (%)

Augmentation de la population (%)

Augmentation du PIB PPA total (%)

Evolution du PIB/Hab
(%)

Moyenne PIB/Hab Eur.6=100

EUR. 9/EUR. 6

31

32

29

-3

97

EUR. 12/EUR. 9

48

22

15

- 6

91

EUR. 15/EUR. 12

43

11

8

- 3

89

EUR. 26/EUR. 15

34

29

9

- 16

75

Source : Commission européenne, " Agenda 2000 "

La population de l'Union européenne serait accrue de 30 % mais la richesse par habitant serait réduite de 16 %.

Les pays candidats se caractérisent d'abord par un important retard de développement par rapport aux 15.

A. LA QUESTION AGRICOLE

Ces pays sont également des pays où la place relative de l'agriculture est nettement plus importante que dans l'Europe des 15 du point de vue de sa part dans le PIB mais aussi de celui de sa place dans l'emploi total.

Indicateurs macro-économiques dans les PECO en 1996

 

Démographie et superficie

Place de l'Agriculture

 

Superficie (en millions d'ha)

Population (en millions d'habitants)

Superficie arable (en millions d'ha)

Secteur agricole dans l'emploi total (en %)

Secteur agricole dans le PIB (en %)

Bulgarie

11,1

8,3

4

24,2

11,1

Estonie

4,5

1,5

1

7,0

6,0

Lettonie

6,5

2,5

1,7

17,8

7,6

Lituanie

6,5

3,7

2,3

22,5

11,8

R. slovaque

4,9

5,4

1,5

7,0

5,2

Slovénie

2,0

2,0

0,2

6,3

4,5

Roumanie

23,8

22,6

9,3

37,3

18,7

République. tchèque

7,9

10,3

3,1

4,3

3,0

Hongrie

9,3

10,2

4,7

8,2

7,0

Pologne

31,3

38,6

14,3

25,7

6,0

Total PECO-4

 
 
 
 
 

ou moyenne

72,3

81,7

31,4

24,0

 

% P4/P10

67 %

78 %

75 %

 
 

Total PECO-10

 
 
 
 
 

ou moyenne

107,8

105,1

42,1

22,4

 

Total UE

323,6

372,81

76,1

4,8

2,3

% PECO/UE

33 %

28 %

55 %

 
 

Les productions agricoles des PECO peuvent être appréciées compte tenu de leurs poids relatifs par rapport à celles réalisées ans l'Europe des 15.

Part de la production des PECO dans la production communautaire

 

Production PECO (1986-1989)

Production Union européenne 1992

%

Céréales

79,1 Mt

168,4 Mt

47

Lait

32,0 Mt

112,5 Mt

28

Viande porcine

5,0 Mt

14,4 Mt

34

Oléagineux

4,5 Mt

14,0 Mt

32

Sucre

3,7 Mt

15,8 Mt

23

Viande bovine

1,7 Mt

8,4 Mt

21

Volaille

1,6 Mt

6,9 Mt

23

Source : OCDE

Elles atteignent un pourcentage toujours important qui l'est tout particulièrement s'agissant des céréales. Toutefois, le solde agro-alimentaire des pays candidats n'est positif qu'à raison de leurs exportations de produits de basse qualité vers les pays extérieurs à l'Union européenne.

Plusieurs simulations ont été réalisées pour évaluer l'impact budgétaire de l'extension de la politique agricole commune aux pays candidats.

Elles varient, selon le type d'extension imaginée et le scénario d'élargissement privilégié, entre 2,4 et 37,6 milliards d'euros.

Le scénario de la Commission présenté dans Agenda 2000 débouchait quant à lui sur un coût de 11 milliards d'euros dont 7 milliards d'aides directes, 2,8 d'aides de marché et 1,5 milliard au titre des mesures d'accompagnement.

Le tableau ci-après présente les résultats de différents scénarios.

(en milliards d'euros par an)

 
 

PAC sans aides directes

PAC avec aides directes

PAC non réformée

Cinq premiers PECO

2,8

7

 

Ensemble

3,7

11

PAC version Agenda 2000

Cinq premiers PECO

1,7

8

 

Ensemble

2,6

12

Source : Pinel (1998)

Il en ressort clairement que le coût budgétaire de l'extension de la PAC dépend de façon cruciale du statut des nouveaux entrants au regard des aides directes.

Il n'est pas envisagé de leur accorder le même régime qu'aux 15, les arguments produits en ce sens faisant valoir que les nouveaux Etats membres ne connaîtraient pas les baisses de prix qui ont justifié le versement des aides directes pour les 15 et que transférer à l'Est les même primes qu'à l'Ouest serait incompatible avec les traités l'Organisation mondiale du commerce.

Mais, les projets implicites à la programmation de Berlin paraissent difficilement soutenables.

Ils reviendraient à octroyer quelque 8 % des dépenses de la PAC aux cinq nouveaux adhérents, après quatre années de transition, alors que ces Etats représenteront près de la moitié de la population active agricole de l'Union élargie. Au regard du niveau moyen d'aide par agriculteur, ces pays recevraient, à l'issue de la transition, une aide 12 fois inférieure à celle des 15.

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