II. PERMETTRE UNE DIMINUTION DU NIVEAU GLOBAL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Votre rapporteur pour avis avait, en tant que rapporteur de cette mission, dressé dans le rapport précité de la mission d'information commune précitée, le constat suivant :
« La décentralisation a atteint ses buts. Les collectivités locales se sont pleinement investies dans les compétences qui leur ont été dévolues, plus rapidement, plus efficacement et à moindre coût que l'Etat n'aurait pu le faire ».
A la lecture de cet extrait, on pourrait considérer que la nouvelle étape de la décentralisation souhaitée par le gouvernement, et que votre rapporteur pour avis appelle depuis longtemps de ses voeux, réduira, toutes choses égales par ailleurs, le taux de prélèvements obligatoires global. En effet, les collectivités territoriales exerceront vraisemblablement, comme par le passé, de manière plus efficace et plus efficiente les compétences auparavant prises en charge par l'Etat . Toutefois, plusieurs conditions doivent être remplies pour qu'il en résulte une diminution de la charge fiscale globale pesant sur nos concitoyens.
A. LA NÉCESSAIRE ADAPTATION DES SERVICES DE L'ETAT
La première condition veut que les services de l'Etat , et plus particulièrement, ceux qui sont affectés par les transferts de compétences prévus par le présent projet de loi, s'adaptent à la nouvelle donne issue de la décentralisation et engagent les réformes structurelles appropriées .
La circulaire du Premier ministre du 25 juin 2003 relative aux stratégies ministérielles de réforme rappelle que la décentralisation est un des chantiers de la réforme de l'Etat. Le Premier ministre, M. Jean-Pierre Raffarin, y insiste tout particulièrement pour que les ministres s'attachent à « tirer toutes les conséquences pour [leur] administration de la décentralisation et de la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances ».
Ainsi que le Président de la République, M. Jacques Chirac, le rappelait le 1 er octobre dernier, à l'occasion de la présentation du présent projet de loi en Conseil des ministres, la décentralisation « n'a de sens que si elle améliore les services et les infrastructures mis à la disposition de nos compatriotes, si elle apporte souplesse, adaptation et maîtrise des coûts dans l'action publique ». Elle doit donc « impérativement s'accompagner d'une réorganisation de l'Etat, au niveau national comme au niveau local ».
Il s'agit d'éviter que la décentralisation ne se traduise par des doublons, parce que les services de l'Etat n'auraient pas suffisamment pris en compte l'ensemble des conséquences des transferts opérés.
Le rapport précité de la mission sénatoriale d'information chargée de dresser le bilan de la décentralisation soulignait ce problème, comme l'indique l'extrait figurant dans l'encadré ci-après.
Le partage non réalisé : des services en parallèle sinon en " doublon " La faiblesse des réalisations en matière de partition des services contraste avec l'ampleur et la diversité des compétences transférées. En effet, les services de l'État après la décentralisation ont davantage été « amputés » de leurs prérogatives que recomposés dans un objectif d'efficacité... L'État a conservé les fonctionnaires affectés à des compétences pourtant transférées aux collectivités territoriales. Aucune partition de services ne semble actuellement envisagée, alors que certaines compétences transférées n'ont à ce jour donné lieu à aucune réorganisation des services de l'État : - la mise en oeuvre des lois de décentralisation n'a entraîné aucun partage de services entre les communes et l'État ; - la répartition des compétences en matière scolaire ne s'est accompagnée d'aucun partage de services. Les rectorats, les inspections académiques et les services techniques et administratifs chargés du fonctionnement et de l'équipement des collèges et des lycées sont demeurés des services d'Etat ; le personnel qui y est affecté est resté d'Etat ; - de même, les services dépendant du ministère de la Culture n'ont pas été partagés avec la région pourtant compétente en matière culturelle ; - les directions départementales de l'Agriculture et de la forêt (DDAF) n'ont donné lieu qu'à un partage très limité, l'État conservant dans les DDAF d'État les services chargés de l'équipement rural et de l'aménagement foncier dotés des agents les plus compétents, tandis que les conseils généraux peuvent estimer n'avoir reçu que des attributions et des moyens illusoires ; - si la partition de la délégation régionale à la formation professionnelle (DRFP) s'est correctement déroulée, elle est toutefois peu significative, dans la mesure où les conseils régionaux se sont quant même trouvés dans l'obligation, pour assurer leur nouvelle compétence, de constituer des services propres en recrutant le personnel nécessaire. L'incertitude a été entretenue par la prorogation des dispositions transitoires. En particulier, le délai dans lequel devait être achevée la procédure de réorganisation des services extérieurs de l'État a été prorogé d'un an, de même que la période au cours de laquelle les fonctionnaires exerçant leurs fonctions dans un service transféré pouvaient opter pour le maintien de leur statut ou demander à relever du statut de la fonction publique territoriale. Les collectivités locales ont ainsi dû créer leurs propres services, parallèlement à ceux de l'État, dont les effectifs n'ont pas été diminués pour autant. Le coût de ce double système d'administration a pu être présenté par le journal Le Monde par la formule : « un moins un égale deux ». En définitive, la politique de partition des services est à la fois inefficace et inachevée. Les découpages opérés se sont rarement révélés fonctionnels ; l'enchevêtrement des compétences entre l'État et les collectivités territoriales est déroutant pour les citoyens qui ne savent plus à quelle direction administrative s'adresser. Source : « Pour une république territoriale - l'unité dans la diversité » Jean-Paul Delevoye, président, Michel Mercier, rapporteur, rapport n° 447, 1999-2000, pages 106-107. |