N° 148

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025

Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 novembre 2024

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (1) sur le projet de loi de finances, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale, pour 2025,

TOME III

ENVIRONNEMENT

Par MM. Guillaume CHEVROLLIER, Fabien GENET
et Pascal MARTIN,

Sénateurs

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-François Longeot, président ; M. Philippe Tabarot, premier vice-président ; Mmes Nicole Bonnefoy, Marta de Cidrac, MM. Hervé Gillé, Rémy Pointereau, Mme Nadège Havet, M. Guillaume Chevrollier, Mme Marie-Claude Varaillas, MM. Jean-Yves Roux, Cédric Chevalier, Ronan Dantec, vice-présidents ; M. Cyril Pellevat, Mme Audrey Bélim, MM. Pascal Martin, Jean-Claude Anglars, secrétaires ; M. Didier Mandelli, Mme Jocelyne Antoine, MM. Jean Bacci, Alexandre Basquin, Jean-Pierre Corbisez, Stéphane Demilly, Gilbert-Luc Devinaz, Franck Dhersin, Alain Duffourg, Sébastien Fagnen, Jacques Fernique, Fabien Genet, Éric Gold, Daniel Gueret, Mme Christine Herzog, MM. Joshua Hochart, Olivier Jacquin, Damien Michallet, Louis-Jean de Nicolaÿ, Saïd Omar Oili, Alexandre Ouizille, Clément Pernot, Mme Marie-Laure Phinera-Horth, M. Bernard Pillefer, Mme Kristina Pluchet, MM. Pierre Jean Rochette, Bruno Rojouan, Mme Denise Saint-Pé, M. Simon Uzenat, Mme Sylvie Valente Le Hir, MM. Paul Vidal, Michaël Weber.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (17ème législ.) : 324, 459, 462, 468, 471, 472, 486, 524, 527, 540 et T.A. 8

Sénat : 143 et 144 à 150 (2024-2025)

CHAPITRE IER -
LES CRÉDITS CONSACRÉS
AUX PAYSAGES, À L'EAU ET À LA BIODIVERSITÉ
ET À L'EXPERTISE, À L'INFORMATION GÉOGRAPHIQUE
ET À LA MÉTÉOROLOGIE

Réunie le 20 novembre 2024, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, suivant son rapporteur Guillaume Chevrollier, a émis un avis favorable aux crédits relatifs aux paysages, à l'eau et à la biodiversité et à l'expertise, à l'information géographique et à la météorologie inscrits au projet de loi de finances pour 2025 (PLF).

Constatant que les moyens budgétaires sans précédent alloués en 2024 aux opérateurs de l'eau et de la biodiversité et à la stratégie nationale pour la biodiversité n'ont été versés qu'à hauteur de 75 %, la réduction des moyens budgétaires prévus par le PLF pour 2025 présente un caractère moins significatif que le suggèrent les montants inscrits au programme 113. La rigueur budgétaire a en réalité commencé dès février 2024.

Le prochain exercice marquera en effet une pause dans la trajectoire de relèvement continue des moyens consacrés à l'environnement, avec également le report du relèvement du « plafond mordant » des agences de l'eau et un prélèvement probable de 130 M€ sur leur trésorerie. Les opérateurs devront faire preuve d'agilité budgétaire pour remplir leurs missions-socles et déployer avec succès les stratégies environnementales.

Les opérateurs de la donnée et de l'expertise auront quant à eux la tâche de produire toujours plus de connaissances, d'anticipation et de scénarios pour éclairer la décision publique, alors que leur modèle reste percuté par l'ouverture des données publiques - dont le coût de production continue de croître. La commission appelle à la vigilance pour que le nécessaire redressement des comptes publics ne conduise pas à un déclassement de notre capacité à anticiper les effets du changement climatique.

Enfin, la commission déplore vivement qu'une proportion significative de ses questions budgétaires soit restée sans réponse de la part du Gouvernement. Les demandes d'éclairage du rapporteur pour avis ont reçu des réponses incomplètes et imparfaites. Elle rappelle à cet égard que l'information du Parlement constitue une impérieuse exigence démocratique, surtout au moment décisif de l'examen d'un texte qui esquisse les grandes orientations de la Nation pour l'année à venir.

I. DES OPÉRATEURS DE LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE MOBILISÉS DÈS 2024 POUR CONTRIBUER AU REDRESSEMENT DES COMPTES PUBLICS

A. UNE ANNÉE 2024 QUI N'A PAS CONCRÉTISÉ LA MONTÉE EN PUISSANCE INÉDITE DES MOYENS CONSACRÉS AUX POLITIQUES DE L'EAU ET DE LA BIODIVERSITÉ INSCRITS EN LOI DE FINANCES INITIALE

1. Une érosion continue des crédits budgétaires en cours de gestion

L'an dernier, la commission avait salué le doublement des crédits consacrés à la biodiversité et l'ambition budgétaire nouvelle pour enrayer le déclin des espèces, préserver les espaces naturels, améliorer la résilience hydrique et relever les défis environnementaux.

Cette évolution sans précédent des moyens portés par le programme « Paysages, eau et biodiversité » correspondait à la trajectoire esquissée par un rapport inter-inspections1(*) concernant les financements nouveaux nécessaires à l'atteinte des objectifs de la stratégie nationale pour la biodiversité. À l'automne 2023, la France a en effet redéfini 40 mesures en faveur de la biodiversité au sein de la SNB, afin de renforcer la cohérence des actions avec le nouveau cadre mondial adopté à la COP15 Biodiversité en décembre 20222(*).

Source : commission, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

(PLFG : projet de loi de finances de fin de gestion)

Malgré ces intentions louables, ces moyens nouveaux n'ont cependant pas été versés aux opérateurs à la hauteur de l'approbation parlementaire. Dès le début de l'exercice budgétaire, des gels et des annulations de crédits sont intervenus, affectant substantiellement les crédits de paiement du programme 1133(*). Du fait de ces mouvements de crédits, les dotations versées aux opérateurs de la biodiversité ont donc été largement virtuelles.

Au lieu des 512 M€ de crédits prévus, la dotation du programme 113 après déduction de la mise en réserve initiale, des surgels et des annulations de crédits, s'est en définitive élevée à 385 M€, soit seulement 75 % des crédits ouverts par la loi de finances initiale.

2. Une prévisibilité budgétaire préférable à des évolutions erratiques et non anticipées

Si la commission souscrit à l'impératif de limiter le déficit public et de garder un cap budgétaire cohérent avec la trajectoire de réduction et de maîtrise des dépenses publiques, elle estime en revanche impératif de garder un cap cohérent et lisible en faveur de la préservation de la biodiversité, avec des évolutions budgétaires qui puissent être anticipées par les opérateurs.

Après une décennie 2010 marquée par une forte diminution des schémas d'emplois, le maintien des capacités humaines des opérateurs est à souligner. L'atteinte de nos objectifs environnementaux nécessite en effet une inscription dans le temps long, à l'abri des à-coups budgétaires et des variations des schémas d'emplois : plutôt que des doublements de crédits ensuite annulés à bas bruit, il est préférable que les moyens alloués à la mise en oeuvre de la stratégie nationale biodiversité et à la gestion résiliente de l'eau progressent de façon régulière et de manière soutenable pour les finances publiques.


* 1 V. Dumoulin et M. Gravier-Bardet (IGEDD), J-P. de Saint Martin, S. Repetti-Deiana, B. Kerhuel et G. Bianquis (IGF), Le financement de la stratégie nationale pour la biodiversité (SNB) pour 2030, novembre 2022.

* 2 Pour en savoir plus, consulter le rapport d'information L'accord de Kunming-Montréal : une partition que les États doivent dès à présent mettre en musique, déposé le 15 février 2023, sous le numéro 357 (2022-2023).

* 3 Décret n° 2024-124 du 21 février 2024 portant annulation de crédits.

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