AVANT-PROPOS

Les crédits de l'audiovisuel public pour 2025 sont stables à 4 029 M€ (+ 0,1 % par rapport au PLF 2024). Toutefois, le gouvernement a annoncé, après le dépôt du projet de loi de finances, qu'il souhaitait réduire les dépenses de l'État de 5 Md€ supplémentaires, dont 50 M€ prélevés sur l'audiovisuel public. Si un amendement est adopté en ce sens, les crédits de l'audiovisuel public s'établiront alors à 3 979 M€, en baisse de 1,2 % par rapport au PLF 2024 (mais stable à + 0,1 % par rapport aux ressources réellement versées en 2024).

Ces crédits sont inscrits, cette année, au sein d'une mission budgétaire. Le compte de concours financier, alimenté depuis 2022 par une fraction de TVA, a été supprimé, n'étant plus compatible avec l'article 2 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), du fait de l'absence de lien entre la nature de la ressource et la mission de service public des organismes de l'audiovisuel public. Le rétablissement du compte de concours financier suppose l'adoption définitive de la proposition de loi organique adoptée par le Sénat le 23 octobre 2024.

Dans le PLF, la mission « Audiovisuel public » comporte 30 M€ au titre du programme de transformation, créé l'an dernier pour inciter les opérateurs à engager des rapprochements. Ce programme n'a été que très partiellement exécuté par le gouvernement cette année. Les opérateurs n'ont pas pu bénéficier de la visibilité dont ils ont besoin, en termes financiers, pour mener leur action. Le rapporteur souhaite la suppression du programme de transformation. La ministre s'y est engagée lors de son audition par la commission.

Enfin, pour mener à bien la transformation de l'audiovisuel public « par le haut », le rapporteur appelle de ses voeux la poursuite de l'examen de la proposition de loi relative à la réforme de l'audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle, adoptée par le Sénat le 13 juin 2023, dont l'Assemblée nationale s'apprêtait à débattre avant sa dissolution le 9 juin 2024.

Sous le bénéfice de ces observations, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Audiovisuel public » du PLF pour 2025.

I. UN BUDGET EN RUPTURE AVEC LA TRAJECTOIRE PRÉSENTÉE L'AN DERNIER

A. UN MANQUE DE PRÉVISIBILITÉ DE L'EXÉCUTION BUDGÉTAIRE

En loi de finances initiale pour 2024, les crédits du programme de transformation s'élevaient à 69 M€. Or, au cours de l'année, seuls 19 M€ ont été perçus à ce titre par les entreprises de l'audiovisuel public. Il manque donc 50 M€. Le décret n° 2024-124 du 21 février 2024 a d'abord annulé 20 M€ de crédits. Puis le versement du solde a été interrompu à partir du mois de mai 2024 (30 M€ ont été « suspendus »). Le gouvernement invoque la réforme en cours de la gouvernance pour justifier le report de ces crédits dédiés à la transformation des entreprises. Cette annulation s'est toutefois aussi inscrite dans le plan de la réduction des dépenses de l'État. Le décret précité de février 2024 a, en effet, annulé au total 10 Md€ de crédits au sein de l'ensemble des missions budgétaires de l'État, sur le fondement de l'article 14 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) qui permet de telles annulations dans la limite de 1,5 % des crédits ouverts.

UNE EXÉCUTION BUDGÉTAIRE 2024 NON CONFORME AU VOTE DU PARLEMENT

Par conséquent, le programme de transformation a servi de support à des mécanismes de régulation budgétaire, ce qui appelle plusieurs remarques.

D'une part, l'existence de ce programme ne permet pas au Parlement d'avoir entièrement la main sur la répartition des crédits entre les entreprises. L'article 53 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication dispose que « chaque année, à l'occasion du vote de la loi de finances, le Parlement (...) approuve la répartition entre les organismes affectataires des ressources publiques retracées au compte de concours financiers ». Le programme est l'unité de l'autorisation parlementaire. La répartition par actions n'est indiquée que pour information. Cette répartition est, in fine, à la main du responsable de programme au sein du ministère.

D'autre part, le versement des crédits de transformation dépend d'un mécanisme de conditionnalité qui rend leur exécution incertaine. Le gouvernement a manifestement tiré parti de ce nouveau programme pour procéder à des régulations budgétaires, au-delà même du décret pris en février. Le versement de 30 M€ a été suspendu sans préavis. Le statut de ces crédits suspendus est incertain. Ils pourraient être reportés ou, plus vraisemblablement, annulés en loi de finances de fin de gestion.

Enfin, le financement par affectation d'un montant déterminé d'une imposition de toute nature, telle que la TVA, doit normalement assurer une prévisibilité des crédits tout au long de l'année. Le montant voté ne doit pouvoir être modifié que par une nouvelle loi de finances. Cette stabilité est la condition de l'indépendance de l'audiovisuel public et de la capacité des entreprises à engager des actions à moyen terme.

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