N° 144

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2025-2026

Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 novembre 2025

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport (1) sur le projet de loi de finances, considéré comme rejeté
par l'Assemblée nationale, pour
2026,

TOME IV

Fascicule 1

MÉDIAS, LIVRE ET INDUSTRIES CULTURELLES

Audiovisuel et avances à l'audiovisuel public

Par M. Cédric VIAL,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Laurent Lafon, président ; MM. Max Brisson, Michel Savin, Jacques Grosperrin, Mme Marie-Pierre Monier, M. Yan Chantrel, Mme Samantha Cazebonne, M. Jérémy Bacchi, Mmes Laure Darcos, Monique de Marco, M. Bernard Fialaire, vice-présidents ; Mmes Anne Ventalon, Else Joseph, Colombe Brossel, M. Pierre-Antoine Levi, secrétaires ; Mmes Marie-Jeanne Bellamy, Catherine Belrhiti, Annick Billon, Alexandra Borchio Fontimp, M. Christian Bruyen, Mmes Evelyne Corbière Naminzo, Karine Daniel, Nathalie Delattre, Sabine Drexler, M. Aymeric Durox, Mmes Agnès Evren, Laurence Garnier, Béatrice Gosselin, MM. Jean Hingray, Claude Kern, Mikaele Kulimoetoke, Mme Sonia de La Provôté, MM. Ahmed Laouedj, Michel Laugier, Jean-Jacques Lozach, Mmes Paulette Matray, Catherine Morin-Desailly, M. Georges Naturel, Mme Mathilde Ollivier, MM. Pierre Ouzoulias, François Patriat, Jean-Gérard Paumier, Stéphane Piednoir, Bruno Retailleau, Mme Sylvie Robert, MM. David Ros, Pierre-Jean Verzelen, Cédric Vial, Adel Ziane.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (17ème législ.) : 1906, 1990, 1996, 2006, 2043, 2047, 2048, 2060, 2063 et T.A. 180

Sénat : 138 et 139 à 145 (2025-2026)

AVANT-PROPOS

Les crédits de l'audiovisuel public s'élèvent à 3,878 Md€ dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2026, en baisse de 71 M€ (- 1,79 %), après avoir déjà baissé de 78 M€ l'an dernier. Tandis que les médias internationaux (Arte, France Médias Monde et TV5 Monde) ne sont pas impactés par cette baisse, leurs dotations demeurant stables, les trois autres sociétés de l'audiovisuel public contribuent à l'effort de réduction des dépenses publiques avec des dotations en baisse de 65,3 M€ pour France Télévisions (- 2,6 %), de 4,1 M€ pour Radio France (- 0,6 %) et de 1,5 M€ pour l'INA (- 1,4 %).

L'essentiel de cette diminution des crédits porte donc sur le principal opérateur, France Télévisions, auquel il est demandé de réaliser un effort de 146 M€ l'an prochain, chiffre qui inclut non seulement la baisse de la dotation mais aussi la résorption du déficit enregistré cette année et l'évolution tendancielle des charges de l'entreprise. Après avoir annoncé en 2024 une trajectoire financière orientée à la hausse, le gouvernement a finalement opéré un revirement il y a un an lors de l'examen de la loi de finances initiale (LFI) pour 2025.

Faute pour l'État comme pour les entreprises d'avoir suffisamment anticipé la nécessité de réformes structurelles, l'effort exigé se reportera en grande partie et inévitablement sur le financement de la création.

Le rapporteur appelle à une accélération des réformes structurelles afin d'éviter, autant que possible, que l'effort demandé ne se répercute sur le financement de la création avec des effets multiplicateurs sur le plan économique. Cela suppose de mener enfin à bien la réforme de la gouvernance de l'audiovisuel public et de conclure avec les entreprises des contrats d'objectifs et de moyens (COM) leur garantissant une visibilité pluriannuelle. Ces réformes structurelles sont indispensables. Il serait anormal que l'audiovisuel public ne contribue pas à l'effort de réduction de la dépense publique. Cet effort doit l'inciter à une gestion plus rigoureuse, selon les orientations données tant par la Cour des comptes que par l'Inspection générale des finances.

Suivant l'avis de son rapporteur, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés au sport dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2026.

I. UN AJUSTEMENT BUDGÉTAIRE QUI TOUCHE PARTICULIÈREMENT FRANCE TÉLÉVISIONS

À l'initiative du rapporteur, la loi organique n° 2024-1177 du 13 décembre 2024 portant réforme du financement de l'audiovisuel public prévoit qu' « un montant déterminé d'une imposition de toute nature » peut être « directement affecté aux organismes du secteur public de la communication audiovisuelle ». Cette disposition a permis d'éviter que la suppression, en 2022, de la contribution à l'audiovisuel public ne se traduise par une budgétisation des crédits préjudiciable à l'indépendance du service public de l'audiovisuel. En conséquence, celui-ci continuera à être financé par l'affectation à un compte de concours financier d'une fraction du produit de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) destinée à financer la mission « Avances à l'audiovisuel public ». Ce montant s'élève, en PLF 2026, à 3,878 Md€, en baisse de 71 M€ dont 65,3 M€ prélevés sur la dotation de France Télévisions.

A. UNE BAISSE SIGNIFICATIVE DE LA DOTATION DE FRANCE TÉLÉVISIONS

1. Une diminution de 65,3 M€ en 2026

L'essentiel de l'effort budgétaire demandé à l'audiovisuel public porte sur le plus gros opérateur, France Télévisions, qui est par ailleurs le premier média de télévision au plan national au regard de son audience, tant linéaire que numérique, et la première source d'information des Français.

Le PLF 2026 prévoit une dotation de 2440,6 M€ pour France Télévisions, en baisse de 65 M€, soit - 2,6 %.

Le projet annuel de performance (PAP), annexé au PLF, prévoit que cette diminution se poursuivra en 2027 et 2028, pour atteindre une baisse cumulée de 167,8 M€ (- 6,7 %).

Source des données : PAP 2026

Lors de son audition au Sénat, Mme Rachida Dati, ministre de la culture, a précisé que l'effort demandé à France Télévisions s'élevait, en réalité, à 146 millions d'euros. Cet effort réel prend en compte, non seulement la baisse de la dotation, mais aussi le glissement tendanciel des charges de la société ainsi que la nécessaire résorption du déficit enregistré en 2025.

2. Une situation financière préoccupante

Dans le rapport1(*) qu'elle a publié en septembre dernier, la Cour des comptes a souligné la lenteur du processus de transformation de France Télévisions et la difficulté à aller plus loin dans l'approfondissement des synergies au sein de l'audiovisuel public.

La Cour alerte sur la fragilité du modèle économique de France Télévisions, qualifié d'impasse et jugé non soutenable dans la durée, dans la mesure où les capitaux propres sont inférieurs à la moitié du capital social. Les recettes publicitaires de l'année 2024, portée par les jeux Olympiques et Paralympiques de Paris, ne reflètent pas l'évolution réelle du marché publicitaire. Dans un contexte de diminution des concours publics, le groupe prévoit une perte d'exploitation d'environ 44 M€ en 2025.

Dans un rapport2(*) de 2024, l'Inspection générale des finances (IGF) soulignait, elle aussi, la situation critique de France Télévisions, face aux défis de la transformation numérique, qui nécessitent la mise en oeuvre de moyens importants. Comme la Cour des comptes, l'IGF préconisait notamment de faire évoluer l'accord collectif de 2013 « pour plus de polyvalence, l'automatisation de certaines tâches, et la révision de la rémunération et du temps de travail des nouveaux employés ».

« La culture de l'efficience doit devenir centrale chez France Télévisions. Une absence d'économies substantielles serait d'autant plus dommageable que les coupes budgétaires pour équilibrer les comptes porteront alors sur les coûts les plus variables, dont le programme national et le numérique font partie » (Rapport de l'IGF).


* 1 Rapport de la Cour des comptes sur France Télévisions, portant sur les exercices 2017 à 2024, publié le 23 septembre 2025.

* 2 Accompagnement à la transformation de France Télévisions et Radio France, Inspection générale des finances, mars 2024.

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