B. DES DÉSACCORDS SUR LES TRANSFERTS FINANCIERS ENTRE BRANCHES

1. La suppression du transfert par le Sénat de 2 milliards d'euros de recettes de la branche maladie vers la branche famille (article 10)

L'article 20 de la LFSS 2023 a réalisé un transfert de charges de 2 milliards d'euros de la branche maladie vers la branche famille. Ce transfert correspondait à 60 % de la charge des indemnités journalières (IJ) pour congé de maternité et à l'intégralité des IJ relatives à l'adoption et à l'accueil de l'enfant. Le Gouvernement n'avait pas transféré les ressources correspondantes.

Le Sénat avait alors adopté un amendement supprimant ce transfert de charges. Toutefois, il avait été rétabli dans la suite de la navette.

La commission a considéré l'année dernière qu'un tel transfert, loin de répondre à un souci de partage logique et équitable des charges entre chaque branche, ne répondait qu'à une logique comptable et masquait un manque d'ambition chronique en faveur d'une politique familiale. Dans son avis sur le PLFSS 2023, le conseil d'administration de la Cnaf avait d'ailleurs « vivement déploré le choix [...] de transférer à la branche famille de la sécurité sociale des charges reposant actuellement sur la branche maladie au titre des indemnités journalières des congés de maternité post naissance » et ajouté que « ce transfert de charges pose des questions de principe importantes quant à la capacité de la branche à répondre aux attentes majeures qui lui sont légitimement adressées ».

En cohérence avec la position qu'elle a défendue l'année dernière, la commission a souhaité, sinon revenir sur ce transfert de charges (ce qui n'aurait pas été possible, du fait de l'article 40 de la Constitution), du moins transférer à la branche famille les 2 milliards d'euros de recettes devant lui permettre de financer ce transfert.

La commission considère en effet, sur le fond, que ce transfert ne se justifiait pas et, d'autre part, qu'il symbolise l'absence d'ambition de la politique familiale du Gouvernement alors même que l'évolution du taux de natalité devait figurer au premier rang de ses préoccupations.

Cette disposition a été supprimée dans le texte considéré comme adopté par l'Assemblée nationale.

2. La suppression de l'amendement du Sénat ramenant de 1,2 milliard d'euros à un milliard d'euros le transfert de la branche AT-MP vers la branche maladie (article 44)

Dans sa rédaction initiale, l'article 44 proposait de fixer à 1,2 milliard d'euros le montant du transfert de la branche AT-MP à la branche maladie du régime général au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles pour 2024.

Le Sénat a ramené ce montant à un milliard d'euros. Ce faisant, il rendait au transfert la valeur qui était la sienne de 2015 à 2021, avant deux hausses consécutives en 2022 (1,1 milliard d'euros) puis en 2023 (1,2 milliard d'euros).

Considérant que la branche AT-MP n'a pas vocation, parce qu'elle est excédentaire, à financer les déficits structurels d'autres branches, cet amendement s'opposait à la croissance continue du montant de ce transfert depuis son instauration en 1997, qui revient en outre à nier l'implication des acteurs concernés et les efforts substantiels fournis par les employeurs et les caisses de sécurité sociale pour limiter la sous-déclaration.

Le phénomène de sous-déclaration, étayé statistiquement, résulte par ailleurs largement de décisions et de comportements qui ne dépendent pas de la branche AT-MP, et sur lesquels elle n'a pas de levier d'action.

Dans le texte considéré comme adopté par l'Assemblée nationale, ce transfert a été ramené au montant figurant dans le texte initial, soit 1,2 milliard d'euros.

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