B. DES CRÉDITS LIÉS À LA LUTTE CONTRE L'IMMIGRATION IRRÉGULIÈRE QUI RESTENT BEAUCOUP TROP MODESTES, EN DÉPIT D'UNE LÉGÈRE SUR-EXÉCUTION
L'action n° 03 « Lutte contre l'immigration irrégulière » du programme 303 « Immigration et asile » finance trois principaux postes :
- les dépenses de fonctionnement et d'investissement dans les centres (CRA) et locaux de rétention administrative (LRA) et zones d'attente (ZAPI) ;
- les frais d'éloignement des migrants en situation irrégulière ;
- diverses subventions aux associations chargées du suivi sanitaire, social et juridique des étrangers retenus.
Cette action avait connu en 2022 une sous-exécution de 15,4 % en CP. À l'inverse, en 2023, elle a été sur-exécutée, de façon plus modeste, à hauteur de 5,13 % en CP12(*). Les CP de l'action exécutés représentent ainsi moins de 8 % des crédits exécutés à l'échelle de la mission, ce qui est notablement insuffisant.
Exécution des crédits de l'action 03 « Lutte contre l'immigration irrégulière » en 2022 et en 2023
(en CP, en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat
(d'après les documents budgétaires)
Au sein de l'action n° 03, les frais d'éloignement des migrants en situation irrégulière s'établissent à 42,4 millions d'euros en 2023 en CP en exécution, soit environ 2 millions d'euros de moins que ce qui était prévu en loi de finances initiale (44,1 millions d'euros). Le rapporteur constate que le niveau d'exécution demeure ainsi très faible, alors même que la légère hausse budgétaire constatée depuis 2019 est largement attribuable au coût du transport.
En 2023, les dépenses exécutées directement liées à l'éloignement des migrants en situation irrégulière représentent ainsi seulement 1,9 % des CP exécutés de la mission.
Part des CP exécutés directement dédiés à l'éloignement des migrants en situation irrégulière en 2023 au sein de la mission
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires
Le volume de la dépense affectée aux reconduites à la frontière et sa dynamique apparaissent largement insuffisants dans un contexte de hausse de l'immigration irrégulière et d'une efficacité déclinante de la politique de renvoi.
Les retours forcés exécutés n'ont ainsi augmenté que de 2,7 % en 2023 (pour s'établir à 11 722 retours) par rapport à 2022. Ils restent inférieurs de 38 % au nombre de retours forcés constatés en 2019.
Nombre de retours forcés exécutés
Source : commission des finances du Sénat, d'après le ministère de l'intérieur
L'augmentation des frais d'éloignement des migrants en situation irrégulière prévue pour l'année 2024 est certes bienvenue : ils atteignent 63,8 millions d'euros en CP et en AE. Si l'augmentation affiche un pourcentage de 44,4 % par rapport à 2023, elle reste néanmoins trop faible, d'autant qu'elle répond pour partie, cette année encore, aux conséquences de l'augmentation du prix des carburants sur le coût de l'éloignement.
Par ailleurs, s'agissant des dépenses d'investissement dans les CRA, LRA et ZAPI, le compte n'y est pas. Alors qu'étaient prévues des dépenses de 92,97 millions d'euros en AE et de 26,17 millions d'euros en CP, seuls 60,94 millions d'euros en AE (- 34,5 %) et 17,41 millions d'euros en CP (- 33,5 %) ont été exécutés. Un tel écart interroge notamment quant à la faisabilité du plan de renforcement des capacités de rétention administrative en LRA (fixé à au moins un tiers), d'une part, et de porter le nombre de places en CRA à 3 000 d'ici 2027. Selon les informations disponibles, en 2023, seules 12 places supplémentaires auraient été créées (au sein du CRA de Perpignan), tandis que les AE n'ont notamment pas pu être engagées pour le financement du nouveau CRA de Périchet.
* 12 La prévision en LFI 2023 est toujours calculée hors fonds de concours et attribution de produits.