B. - Données de la performance

ARTICLE 45

Objectifs et indicateurs de performance

Le présent article prévoit l'adoption de l'état G annexé au projet de loi de finances pour 2025.

Cette annexe recense, pour chaque mission du budget général, chaque budget annexe et chaque compte spécial, l'ensemble des objectifs et indicateurs de performance associés qui favorisent le suivi de l'efficacité de l'action budgétaire.

Cet article, qui existe depuis la loi de finances initiale pour 2023, permet le dépôt d'amendements modifiant les objectifs et indicateurs associés à l'occasion de l'examen du projet de loi.

Néanmoins, il n'est pas possible d'amender les cibles chiffrées de ces indicateurs, qui ne sont pas inscrites dans la loi.

La commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : POUR LA TROISIÈME ANNÉE, L'ÉTAT G EST ANNEXÉ À LA LOI DE FINANCES INITIALE ET ASSOCIE LE PARLEMENT AU PILOTAGE DE LA PERFORMANCE DE LA DÉPENSE PUBLIQUE

L'adoption de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) du 1er août 20014(*) a eu pour objectif de renouveler le prisme d'analyse de l'efficacité de la dépense publique. En effet, à la place d'une logique de moyens, la « nouvelle gouvernance financière »5(*) induite par le texte a cherché à mettre en oeuvre une logique de résultats.

Cette nouvelle gouvernance financière a accordé plus d'autonomie aux ordonnateurs publics dans le but de responsabiliser les gestionnaires publics. Ceci est notamment matérialisé par la globalisation des crédits à l'intérieur des programmes6(*).

Cependant, cette évolution a logiquement été accompagnée par un renforcement des moyens de mesure de la capacité des gestionnaires à atteindre leurs objectifs au regard des moyens qui leur sont alloués. Cette logique d'efficience de la dépense publique et de responsabilisation des ordonnateurs constitue le corollaire de leur plus grande liberté dans l'utilisation des crédits.

De façon très concrète, le 4° bis de l'article 34 de la LOLF dispose que « [dans la seconde partie, la loi de finances de l'année] définit, pour chaque mission du budget général, chaque budget annexe et chaque compte spécial, des objectifs de performance et des indicateurs associés à ces objectifs ».

L'ensemble de ces objectifs et indicateurs associés sont recensés dans une annexe nommée l'état G, qui récapitule, pour chaque programme, les objectifs et indicateurs associés.

Chaque année, depuis l'entrée en vigueur de la LOLF, ces indicateurs font l'objet d'un suivi. A priori, les projets annuels de performance (PAP) fixent des cibles chiffrées pour chacun des indicateurs associés aux objectifs identifiés. Les PAP décrivent ainsi, pour chaque programme, les ambitions afférentes. A posteriori, chaque programme fait l'objet d'un rapport annuel de performance (RAP), annexé au projet de loi de règlement. Il y est alors recensé, pour chaque indicateur le niveau atteint par rapport à la cible fixée en loi de finances initiale.

Cette logique de performance et de résultat qui correspond à l'esprit de la LOLF a été ainsi mise en oeuvre, mais sans que le Parlement puisse être associé à sa définition. En effet, jusqu'à l'exercice 2023, les objectifs de performance et indicateurs associés ne relevaient pas du domaine de la loi et ne pouvaient être ni débattus ni modifiés par le Parlement à l'occasion de l'examen des lois de finances.

La réforme de la LOLF portée par la loi organique du 28 décembre 20217(*) de modernisation de la gestion des finances publiques a finalement fait entrer la fixation des objectifs de performance et indicateurs associés dans le domaine obligatoire des lois de finances8(*).

La loi de finances initiale pour 2023, par conséquent, a inclus pour la première fois la publication d'un état G qui recense l'intégralité des objectifs de performance et indicateurs associés, classés par mission et par programme.

Les parlementaires, une fois cet état G créé et annexé à la loi de finances, ont eu la possibilité de l'amender lors de l'examen du texte. De même, le Gouvernement peut par ce biais faire évoluer la liste des objectifs ou des indicateurs en cours d'examen.

Le Parlement s'est saisi de cette nouvelle possibilité dès sa mise en oeuvre. En 2023, le Sénat a ainsi adopté en première lecture sept amendements modifiant l'état G. Un seul avait alors été retenu, qui était un amendement du Gouvernement, dans le texte adopté en lecture définitive par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution.

En 2024, un seul amendement avait été adopté par le Sénat, qui n'avait pas été retenu dans le texte adopté en lecture définitive par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution.

Il convient de noter que l'ouverture de l'état G aux amendements des parlementaires n'a que peu d'incidence sur l'évolution de ce dernier.

Néanmoins, l'Assemblée nationale a déposé en première lecture sur le projet de loi de finances pour 2025 pas moins de 243 amendements visant à modifier l'état G, ce qui indique la forte propension des parlementaires à se saisir du sujet de la performance de la dépense publique.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : LA MISE À JOUR DE L'ÉTAT G PERMET DE MODIFIER LES OBJECTIFS ET INDICATEURS MAIS INTERDIT D'AMENDER LES CIBLES

Le dispositif proposé pour l'état G annexé au projet de loi de finances pour 2025 suit la même méthode que celle utilisée pour les montants des autorisations d'engagement et des crédits de paiement des missions du budget général, qui sont retracés dans l'état B, lui aussi annexé au texte.

Par conséquent, les amendements qui induisent une évolution des objectifs de performance ou des indicateurs associés ne modifient pas l'article 45 en lui-même mais portent des modifications directement sur l'état G annexé.

En outre, et conformément à l'intention du législateur organique, seuls les objectifs et indicateurs associés sont du domaine de la loi. Il est par conséquent impossible pour les parlementaires d'avoir une incidence sur les cibles annuelles chiffrées pour chacun des indicateurs. En effet, leur détermination revient au Gouvernement qui pilote ainsi la gestion dans son aspect le plus concret. Ces cibles ne figurent pas dans l'état G annexé.

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En première lecture, l'Assemblée nationale n'ayant pas adopté la première partie du projet de loi, celui-ci est considéré comme rejeté en application du troisième alinéa de l'article 119 du Règlement de l'Assemblée nationale. En conséquence, le présent article est considéré comme ayant été rejeté.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : LE PARLEMENT DOIT DEMEURER UN ACTEUR DE LA CONSTRUCTION DE LA LOGIQUE DE RÉSULTAT DE LA DÉPENSE PUBLIQUE

La mise en oeuvre de la logique de résultat, qui permet de promouvoir un pilotage par la performance de la dépense publique, constitue l'un des aspects les moins aboutis de la réforme de la gestion des finances publiques engagée par la LOLF. Plusieurs alertes ont à ce titre été émises et ont amené le législateur organique à faire entrer les objectifs de performance et indicateurs associés dans le domaine obligatoire des lois de finances.

Ainsi, en 2011, la Cour des comptes estimait que « le dispositif de suivi de la performance mis en oeuvre depuis 2006 n'a pas permis de concilier les orientations stratégiques politiques soumises au Parlement et les objectifs assignés aux responsables d'administration »9(*). De même, cette dernière insistait en 2018 en constatant que « la démarche de performance n'a pas atteint les résultats attendus »10(*).

La réforme de la LOLF portée en 2021 avait permis au Sénat, et en particulier au rapporteur général, de promouvoir une vision partagée entre le Gouvernement et le Parlement de la définition des objectifs de performance de la dépense publique. Le rapporteur général, alors rapporteur du projet de loi organique, avait soutenu cet élargissement du domaine des lois de finances dès lors qu'il permettait de revaloriser les objectifs de performance en permettant au Parlement d'en débattre11(*).

Le suivi de la performance demeure aujourd'hui insatisfaisant à de nombreux égards, et son évolution ne saurait faire l'économie d'un travail qui associe le Parlement.

D'une part, plusieurs sous indicateurs ne sont pas pertinents pour évaluer l'efficacité de la dépense dès lors qu'ils mesurent des résultats sans lien direct avec le montant des crédits votés.

D'autre part, le nombre d'indicateurs et de sous-indicateurs tend à croître sans que les objectifs soient réellement maîtrisés. Ces derniers sont passés de 1 872 à 1 941 de 2021 à 2023, sans qu'une réflexion de fond sur leur raison d'être ou leur articulation soit engagée. Leur trop grand nombre et leur diversité tend plus à la dispersion de l'action publique qu'à son évaluation rationnelle.

Enfin, au niveau des sous-indicateurs, seuls 70 % en 2023 étaient dotés d'une cible quantitative exploitable, soit 1 354. En effet, près de 20 % des sous-indicateurs ne possédaient pas de cible chiffrée qui permette réellement d'évaluer la gestion. En outre, 10 % étaient dotés d'une cible inexploitable en temps voulu.

Le rapporteur général appelle à ce qu'un travail, en collaboration avec la direction du budget et avec la commission des finances de l'Assemblée nationale puisse être mis en oeuvre afin d'évaluer la qualité du suivi de la performance et de l'améliorer concrètement.

Le rapporteur général, cependant, propose d'adopter cet article qui renvoie à l'état G annexé au projet de loi la définition des objectifs et indicateurs associés pour chaque mission du budget général, chaque budget annexe et chaque compte spécial.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.


* 4  Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

* 5 A. Barilari, M. Bouvier, 2010, La LOLF et la nouvelle gouvernance financière de l'État.

* 6 Article 7 de la Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

* 7  Loi organique n° 2021-1836 du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques.

* 8 4° bis de l'article 34 de la Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

* 9 Cour des comptes, novembre 2011, La mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) : un bilan pour de nouvelles perspectives.

* 10 Cour des comptes, mai 2018, Le budget de l'État en 2017.

* 11 Sénat, commission des finances, 15 septembre 2021, n° 831 (2020-2021), Rapport sur la proposition de loi organique relative à la modernisation de la gestion des finances publiques, au rapport de MM. Jean-François Husson et Claude Raynal.

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