TROISIÈME PARTIE
LA MISSION
« TRANSFORMATION
ET FONCTION PUBLIQUES »
La mission « Transformation et fonction publiques » porte les crédits destinés à accompagner la transformation de l'action de l'État et de ses opérateurs.
Créée en 2018 et initialement destinée à s'éteindre en 2022 avant d'être prolongée depuis, la mission se distingue :
- d'une part, par sa vocation interministérielle ;
- d'autre part, par l'importance des crédits fonctionnant par appels à projets : le programme 348 « Performance et résilience des bâtiments de l'État et de ses opérateurs » et le fonds de la transformation pour l'action publique (FTAP) du programme 349 « Fonds pour la transformation de l'action publique ».
I. UNE BAISSE MARQUÉE DES MOYENS DE LA MISSION POUR 2025
Sur les cinq programmes qui composaient la mission « Transformation et fonction publiques » depuis le 1er janvier 2022, un programme fait l'objet d'une suppression pour 2025, à savoir le programme 352 « Innovation et transformation numériques » qui est intégré au programme 129 « Coordination du travail gouvernemental » de la mission « Direction de l'action du Gouvernement ». Cette mesure de périmètre se traduit ainsi par un transfert en « base » de 22 millions d'euros de crédits (en AE et en CP) vers le programme 129.
Pour 2025, la mission « Transformation et fonction publiques » se compose ainsi des quatre programmes suivants :
- le programme 348 « Performance et résilience des bâtiments de l'État et de ses opérateurs » (« Rénovation des cités administratives et autres sites domaniaux multi-occupants » avant 2023) a été créé dans le cadre du grand plan d'investissement 2018-2022. Initialement destiné à financer la rénovation des sites occupés par plusieurs services de l'État et de ses opérateurs (les « cités administratives »), il a été doté depuis 2023 de financements complémentaires pour mener à bien les opérations du plan de sobriété énergétique, au titre de l'action « Résilience ». Ce programme d'investissement vise à moderniser les bâtiments publics en réhabilitant le parc existant, notamment pour diminuer les consommations d'énergies et en investissant sur des travaux ciblés sur la performance énergétique et sur l'évolution des modes de travail. L'État compte 56 cités administratives dans son réseau déconcentré dont 36 bénéficiaires33(*) du programme. Ce programme est placé sous la responsabilité de la direction de l'immobilier de l'État (DIE), rattachée au ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique (MEFSIN) ;
- le programme 148 « Fonction publique » porte les crédits alloués à l'action sociale interministérielle, à l'action d'appui et d'innovation des ressources humaines ainsi qu'à la formation initiale des fonctionnaires. Il retrace ainsi les subventions pour charges de service public versées aux instituts régionaux d'administration (IRA). Placé sous la responsabilité de la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP), ce programme intègre également, depuis 2022, les crédits hors dépenses de personnel du centre interministériel de services informatiques relatifs aux ressources humaines (CISIRH) ainsi que le Fonds d'accompagnement interministériel RH (FAIRH) ;
- le programme 349 « Transformation publique » (anciennement « Fonds pour la transformation de l'action publique » - FTAP - avant 2023) soutient les réformes porteuses d'économies à moyen terme en finançant le coût supplémentaire que peut représenter une réforme dans sa phase initiale. Placé sous la responsabilité de la direction interministérielle de la transformation publique (DITP), ce programme porte également, depuis le 1er janvier 2022, les crédits hors titre 2 de la DITP ;
- le programme 368 « Conduite et pilotage de la transformation et de la fonction publique » est dédié aux projets à dimension interministérielle. Placé sous la responsabilité du secrétariat général du MEFSIN, il porte les effectifs et les dépenses de personnel de la DGAFP, du CISIRH et de la DITP.
Évolution des crédits de la
mission
« Transformation et fonction publiques »,
à périmètre constant
(en millions d'euros et en %)
Exécution 2023 |
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution 2025/2024 |
||
[348] Performance et résilience des bâtiments de l'État et de ses opérateurs |
AE |
291,6 |
709,8 |
675,0 |
- 4,91 % |
CP |
287,0 |
527,9 |
360,3 |
- 31,74 % |
|
[349] Transformation publique |
AE |
260,5 |
145,5 |
77,5 |
- 46,74 % |
CP |
429,1 |
162,8 |
109,6 |
- 32,71 % |
|
[148] Fonction publique |
AE |
170,2 |
275,8 |
275,1 |
- 0,25 % |
CP |
217,5 |
282,6 |
276,8 |
- 2,05 % |
|
[368] Conduite et pilotage de la transformation et de la fonction publiques |
AE |
43,1 |
48,4 |
53,9 |
+ 11,50 % |
CP |
43,1 |
48,4 |
53,9 |
+ 11,50 % |
|
Total |
AE |
765,4 |
1 179,4 |
1 081,4 |
- 8,31 % |
CP |
976,8 |
1 021,6 |
800,6 |
- 21,64 % |
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires
Par ailleurs, le Gouvernement a déposé à l'Assemblée nationale un amendement visant à minorer de 20,8 millions d'euros les crédits de la mission en AE et en CP, dont 13,5 millions d'euros au titre du programme 348, 7,1 millions d'euros au titre du programme 148 et 0,2 million d'euros au titre du programme 368. Parmi ces annulations, une minoration de 0,3 million d'euros tire les conséquences des annonces gouvernementales relatives à l'indemnisation des arrêts maladie dans la fonction publique (diminution du taux des indemnités journalières de 100 % à 90 %, augmentation du délai de carence d'un à trois jours).
A. APRÈS UNE STABILISATION EN 2024, LES CRÉDITS DE PAIEMENT DE LA MISSION CONNAISSENT UNE FORTE RATIONALISATION, AVEC UNE BAISSE DE PLUS DE 20 % POUR 2025 À PÉRIMÈTRE CONSTANT
1. Une baisse massive des crédits de paiement, qui résulte pour partie du transfert des crédits dédiés à l'innovation et à la transformation numériques
Alors que les crédits de paiement (CP) de la mission « Transformation et fonction publiques » avaient connu une première diminution, relative, de - 5,6 % en loi de finances initiale pour 2024, le projet de loi de finances pour 2025 acte, dans le cadre de l'effort de redressement des finances publiques, une baisse significative des moyens de la mission, de - 26,9 % à périmètre courant, à 801 millions d'euros, contre 1,096 milliard d'euros en 2024 et 1,160 milliard d'euros en 2023.
Une partie de cette baisse procède de la suppression, par le présent projet de loi de finances, du programme 352 « Innovation et transformation numériques », portant une fraction des crédits de la direction interministérielle du numérique (DINUM), qui a été intégré au programme 129 « Coordination du travail gouvernemental » de la mission « Direction de l'action du Gouvernement ». Les crédits du programme 352 ont ainsi été fusionnés à ceux de l'action 16 « Coordination de la politique numérique » du programme 129, également gérés par la DINUM. Alors que ce programme avait été doté de 74,1 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en CP pour 202434(*), sa suppression se traduit par une baisse des moyens de la mission du même montant en AE et en CP pour 2025.
Si la mission affiche ainsi une baisse de - 26,9 % en CP à périmètre courant (soit - 295 millions d'euros), cette évolution représente, après correction de la mesure de périmètre correspondant à la suppression du programme 352, une diminution de - 21,6 % en CP à périmètre constant (soit - 221 millions d'euros).
En AE, la baisse est relativement moins marquée, à - 13,7 % à périmètre courant et - 8,3 % à périmètre constant, avec une dotation de 1,081 milliard d'euros pour 2025. Cette évolution représente également une forte inflexion en comparaison de la tendance des années précédentes, notamment la hausse enregistrée en loi de finances initiale pour 2024, de plus de 50 % par rapport à 2023. Néanmoins, la dotation en AE pour 2025 demeure nettement supérieure au niveau de 2023 (819,1 millions d'euros en loi de finances pour 2023).
2. Une rationalisation des moyens alloués aux deux programmes de la mission fonctionnant par appels à projets, consacrés à la rénovation des cités administratives et au fonds pour la transformation publique
La baisse à périmètre constant des moyens dédiés à la mission « Transformation et fonction publiques » s'explique par la rationalisation des crédits des deux programmes de la mission fonctionnant par appels à projets, qui affichent chacun une baisse d'environ un tiers en CP :
- d'une part, le programme 348 « Performance et résilience des bâtiments de l'État et de ses opérateurs », finançant la rénovation des cités administratives, qui présente une baisse de - 31,7 % en CP, à 360,3 millions d'euros en 2025, contre 527,9 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2024 ;
- d'autre part, le programme 349 « Transformation publique », constitué pour l'essentiel (environ 75 % des crédits) par le Fonds pour la transformation de l'action publique (FTAP), qui enregistre une diminution de - 32,7 % en CP, à 109,6 millions d'euros en 2025, contre 162,8 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2024. Cette évolution résulte principalement de la baisse de - 39,0 % des crédits du FTAP, à 85,6 millions d'euros en 2025, contre 140,4 millions d'euros en 2024.
Le Fonds pour la transformation de l'action publique Traduisant l'une des préconisations de Jean Pisani-Ferry dans le rapport de préfiguration du Grand plan d'investissement, le Fonds pour la transformation de l'action publique (FTAP) a été institué pour financer les investissements nécessaires à la mise en oeuvre de réformes structurelles à fort potentiel d'amélioration du service rendu et de réduction durable des dépenses publiques. Le fonds doit ainsi permettre un retour sur investissement élevé en termes d'économies pérennes, sur la base du principe suivant : un euro investi a vocation à conduire à un euro d'économies sur le budget de l'État. Bénéficiant d'une enveloppe prévisionnelle initiale de 700 millions d'euros, complétée en 2022 par une enveloppe de 80 millions d'euros, puis en 2023 avec une nouvelle enveloppe de 330 millions d'euros, le FTAP avait connu une première réduction de sa dotation en 2024, avec une diminution d'environ 120 millions d'euros en AE et de 50 millions d'euros en CP. Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires |
Ces baisses respectives, de l'ordre de 165 millions d'euros pour la rénovation des cités administratives et de 55 millions d'euros pour le FTAP, prennent acte de la sous-consommation chronique de ces programmes depuis leur création, avec d'importants retards constatés sur le décaissement des crédits.
Ainsi, au 20 octobre 2024, l'exécution des crédits de la mission était inférieure de près de 40 % à la prévision de la loi de finances pour 2024, avec un taux de consommation de 61,0 %. Les écarts étaient particulièrement élevés pour les programmes 348 et 349, avec des taux de consommation respectifs de 56,2 % et de 63,3 %.
Taux de consommation des crédits de la
mission
« Transformation et fonction publiques »,
à périmètre constant
(en millions d'euros et en pourcentage)
|
|
LFI 2024 |
Exécution constatée au 20 octobre 2024 |
Taux de consommation au 20 octobre 2024 |
Programme 348 |
CP |
527,9 |
296,9 |
56,2 % |
Programme 349 |
CP |
162,8 |
103,0 |
63,3 % |
Programme 148 |
CP |
282,6 |
188,1 |
66,6 % |
Programme 368 |
CP |
48,4 |
35,1 |
72,5 % |
Total |
CP |
1 021,6 |
623,1 |
61,0 % |
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires et Chorus
De fait, dans le cadre de ses précédents travaux, le rapporteur spécial avait souligné la nécessité urgente de réduire les écarts constatés entre la programmation et l'exécution budgétaires, six ans après la création de la mission.
Aussi, le rapporteur se félicite de la rationalisation opérée par le Gouvernement pour l'année 2025, qui contribue à la sincérisation des crédits de la mission autant qu'à l'effort de redressement des finances publiques.
* 33 Ils étaient 39 à l'origine : le projet de Melun a été arrêté sur décision du préfet, et dans le cadre d'une réflexion plus générale sur la gestion du patrimoine immobilier de l'État à Melun ; celui de Brest a été arrêté sur décision de la direction de l'immobilier de l'État, de même que celui de Tours, abandonné en 2023 du fait de retards trop importants.
* 34 Dont 29 millions d'euros avaient été annulés par le décret n° 2024-124 du 21 février 2024 portant annulation de crédits.