II. LES EFFORTS DE RATIONALISATION PRÉVUS POUR 2025 DEVRONT ÊTRE POURSUIVIS SUR LE LONG TERME

A. ALORS QUE LA RÉNOVATION DES CITÉS ADMINISTRATIVES DEVRAIT ÊTRE FINALISÉE EN 2025, LA RATIONALISATION DES SURFACES OCCUPÉES DEVRAIT BÉNÉFICIER DE LA CRÉATION DE LA FONCIÈRE DE L'ÉTAT

1. L'année 2025 devrait enfin voir l'aboutissement du programme de rénovation des cités administratives, avec trois ans de retard sur l'échéancier de livraison initial

Alors qu'il a fallu attendre fin 2022, soit près de cinq ans après la création du programme 348, pour que l'ensemble des travaux de rénovation des cités administratives puisse débuter, l'année 2025 devrait voir l'achèvement des chantiers de rénovation des 36 cités concernées.

Avancement du programme de rénovation des cités administratives

État d'avancement

Au 31 décembre 2022

Au 30 août 2023

Au 30 août 2024

Marché global de performance ou marché de travaux notifié ou acquisition réalisée

874 millions d'euros
pour 33 projets

922 millions d'euros
pour 35 projets

992 millions d'euros pour 36 projets

Travaux en cours

24 projets

35 projets

21 projets

Opérations de réception

-

5 projets en cours de réception

15 projets réceptionnés

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Au 31 août 2024, 21 projets étaient en cours de travaux et 15 projets avaient déjà été réceptionnés.

Le tableau ci-après présente les chantiers achevés d'ici la fin de l'année 2024 et ceux faisant l'objet d'une réception en 2025.

Chantiers de rénovation de cités administratives achevés
d'ici la fin de l'année 2024 ou faisant l'objet d'une réception en 2025

Cité administrative

Date de sélection

Nature des travaux

Montant du projet
(en euros)

Date de réception effective (E) ou prévisionnelle (P)

Agen

06/12/2018

Rénovation

11 450 000

déc-24 (P)

Albi

18/12/2018

Rénovation

8 044 000

sept-23 (E)

Alençon

14/03/2019

Rénovation

9 532 000

juin-25 (P)

Amiens

02/02/2018

Construction neuve

75 229 000

déc-23 (E)

Aurillac

06/12/2018

Rénovation

452 523

août-23 (E)

Avignon

26/03/2019

Rénovation

14 771 000

juin-25 (P)

Bar-le-Duc

18/04/2019

Rénovation

7 980 000

déc-25 (P)

Besançon

27/11/2018

Rénovation

5 605 700

mai-23 (E)

Bordeaux

06/12/2018

Rénovation

46 508 760

mars-25 (P)

Bourges

14/05/2019

Rénovation

4 192 000

juil-25 (P)

Cergy-Pontoise

05/02/2019

Rénovation

16 290 000

déc-25 (P)

Charleville-Mézières

28/05/2019

Rénovation

2 710 000

juil-23 (E)

Clermont-Ferrand

10/04/2019

Rénovation

3 445 000

déc-23 (E)

Colmar

11/01/2019

Rénovation

31 456 778

déc-24 (P)

Dijon

28/05/2019

Rénovation

4 296 000

fév-25 (P)

Grenoble

10/04/2019

Rénovation

8 392 000

avr-25 (P)

Guéret

11/01/2019

Rénovation

5 485 000

juil-24 (E)

La Rochelle

10/04/2019

Rénovation

6 180 000

oct-24 (P)

Lille

11/01/2019

Construction neuve

149 400 000

déc-23 (E)

Limoges

05/02/2019

Rénovation

1 699 000

nov-23 (E)

Lyon

14/03/2019

Construction neuve

92 239 000

fév-24 (E)

Mâcon

26/03/2019

Rénovation

9 710 000

juin-25 (E)

Metz

18/12/2018

Rénovation

7 562 000

nov-24 (P)

Mulhouse

18/01/2019

Rénovation

19 147 000

juil-23 (E)

Nancy

14/05/2019

Rénovation

34 500 000

mars-25 (P)

Nantes

22/03/2018

Construction neuve

49 285 000

juil-24 (E)

Orléans

14/05/2019

Rénovation

37 659 000

juil-25 (P)

Périgueux

21/02/2019

Rénovation

7 226 000

août 24 (E)

Rouen

09/11/2017

Rénovation

101 277 310

juil-24 (E)

Saint-Lô

10/04/2019

Rénovation

3 816 340

nov-24 (P)

Soissons

18/04/2019

Rénovation

2 977 000

déc-24 (P)

Strasbourg

25/01/2019

Rénovation

54 700 000

juil-25 (P)

Tarbes

18/04/2019

Rénovation

5 021 000

août-24 (E)

Toulon

25/01/2019

Rénovation

37 086 000

juin-25 (P)

Toulouse

28/05/2019

Construction neuve

89 920 000

oct-24 (P)

Tulle

14/05/2019

Rénovation

8 105 000

janv-25 (P)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses de la DIE au questionnaire du rapporteur spécial

Sur les 39 projets prévus initialement, trois ont été arrêtés :

- Melun, sur décision du préfet d'Île-de-France ;

- Brest et Tours, sur décision de la direction de l'immobilier de l'État.

Projets de rénovation de cités administratives abandonnés

(en millions d'euros)

Projets

Montant

Brest

8,3

Melun

18,7

Tours

6,8

Total des montants labellisés

33,8

Total des montants dépensés

1,8

Total des crédits rendus disponibles

32,0

Note : les montants indiqués pour chaque projet correspondent aux montants labellisés en Conférence nationale de l'immobilier public (CNIP).

Source : commission des finances, d'après les réponses de la DIE au questionnaire du rapporteur spécial

Certes, le rapporteur spécial se félicite de la livraison prochaine des dernières cités administratives restantes d'ici la fin de l'année 2025.

Néanmoins, le retard pris sur la livraison des chantiers, initialement fixée à 2022, s'est accompagné d'une forte augmentation des coûts des travaux, notamment sous l'effet de l'inflation.

L'augmentation des coûts de construction dans le contexte inflationniste

La crise sanitaire liée à la Covid-19 et le contexte international lié à la guerre en Ukraine ont entraîné des hausses de prix bien supérieures au taux prévisionnel, hausses qui se sont poursuivies en 2023 à un rythme plus lent qu'en 2022.

Ainsi, l'augmentation de l'indice de référence BT01 pour les années 2022 et 2023 s'est établie à 5,9 % pour 2022 et 2,6 % pour 2023.

En 2024, le ralentissement de l'inflation des coûts de construction s'est confirmé, avec une hausse de 0,9 % depuis le début de l'année, proche des évolutions observées avant la période de la Covid-19.

Source : réponses de la DIE au questionnaire du rapporteur spécial

Selon les estimations de la direction de l'immobilier de l'État (DIE)35(*), l'impact budgétaire de cette hausse pourrait atteindre 75 millions d'euros sur l'ensemble du programme, soit 7,5 % de l'enveloppe totale affectée à la rénovation des cités administratives, fixée à 1 milliard d'euros.

Une provision financière, gérée par la DIE, avait été réservée initialement à hauteur de 40 millions d'euros au moment de l'affectation des enveloppes financières à chaque projet pour parer à d'éventuels imprévus. L'arrêt des projets de Melun, Brest et Tours a donné lieu à une réaffectation des enveloppes financières non consommées, soit un total d'environ 34 millions d'euros, en complément de la provision initiale. D'après la DIE, « cette nouvelle provision financière permet d'être globalement serein » sur la tenue de l'enveloppe de 1 milliard d'euros.

Par ailleurs, afin de maintenir l'enveloppe fermée de 1 milliard d'euros allouée au programme, la DIE a mis en place un suivi renforcé des projets associant l'ensemble des acteurs, pour toutes les opérations et plus particulièrement pour les plus importantes ou celles présentant un risque calendaire ou budgétaire identifié.

Ce suivi renforcé conduit régulièrement la DIE à prendre des arbitrages tels que :

- des réductions programmatiques de certains projets, en veillant à ne pas modifier significativement, autant que possible, les gains énergétiques attendus (diminution des aménagements intérieurs, etc.) pour maintenir les objectifs du programme ;

- l'arrêt du projet de la cité de Melun sur décision du préfet d'Île-de-France ;

- l'arrêt des projets des cités de Brest et Tours dont les budgets et calendriers dépassaient les engagements initiaux.

2. Les actions en matière de performance énergétique devraient désormais concentrer à moyen terme les investissements de la DIE

Dans la continuité de la mesure « Résilience I » financée sur le programme 723 du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État », une enveloppe de 150 millions d'euros avait été mise en place sur le programme 348 en 2023, au titre de l'investissement dans la sobriété énergétique des bâtiments publics de l'État et de ses établissements.

Cette nouvelle mesure de résilience, dite « Résilience II », s'est concrétisée notamment par :

- un nouvel appel à projets porté par la direction de l'immobilier de l'État et doté d'une enveloppe budgétaire de 130 millions d'euros. Les projets lauréats ont été sélectionnés, en mars 2023, notamment selon le gain en énergie attendu par rapport à la phase avant travaux et selon l'efficience du projet. L'objectif est une économie estimée à environ 200 GWhEF/an36(*) ;

- la mise en place d'une équipe dédiée (« task force »), située au sein de l'agence Agile37(*), chargée d'apporter un appui aux gestionnaires pour la maîtrise des équipements techniques, afin d'optimiser le fonctionnement et l'usage des bâtiments et de baisser les consommations énergétiques.

Dotation budgétaire de l'action « Résilience » du programme 348

(en millions d'euros)

 

LFI 2024

PLF 2025

AE

296,5

21,5

CP

249,6

54,7

Source : commission des finances, d'après les réponses de la DIE au questionnaire du rapporteur spécial

En 2025, la mesure Résilience II étant close, la dotation de 54,7 millions d'euros en CP prévue au titre du projet de loi de finances est essentiellement destinée au paiement :

- des restes à payer correspondant aux dernières opérations de l'appel à projets Résilience II, pour 18 millions d'euros en CP ;

- des restes à payer relatifs aux actions à gains rapides engagées en 2024, pour 22,3 millions d'euros en CP ;

- des actions financées par un nouvel appel à projets intégrant désormais des réductions de surface afin de contribuer, également par ce levier, aux économies d'énergie et à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, pour 7,5 millions d'euros en CP (15 millions d'euros en AE).

L'intégration des objectifs de transition environnementale
dans la politique immobilière de l'État

La politique immobilière de l'État contribue à la transition environnementale, pour laquelle la France s'est donné des objectifs ambitieux dans le cadre de l'accord de Paris sur le climat. L'utilisation des bâtiments est en effet responsable de près de 50 % des consommations d'énergie et d'environ le quart des émissions nationales de gaz à effet de serre.

Les objectifs de transition écologique, mais aussi en matière de numérique, se sont traduits notamment par la création en 2018 du programme 348 dédié à la rénovation des cités administratives et autres sites domaniaux multi-occupants. Compte tenu de l'ampleur mais aussi de l'ancienneté du parc immobilier de l'État, un enjeu majeur est effectivement son amélioration en matière de performance énergétique et de modernisation technologique. À ce titre, l'immobilier de l'État doit accompagner, voire anticiper, les nouvelles formes de travail (cotravail, télétravail...) et concevoir des espaces de travail modulables qui sauront s'adapter aux évolutions.

Sur la période récente, la DIE a ainsi engagé les actions suivantes :

- des actions de densification et notamment l'amélioration du ratio surface/postes de travail, grâce à plusieurs leviers : circulaire de la Première ministre du 8 février 2023 en matière d'occupation et d'optimisation du parc immobilier de l'État et contribuant ainsi à l'objectif de réduction de 25 % des surfaces de bureaux, élaboration des schémas stratégiques immobiliers permettant l'identification d'espaces sous-densifiés, conditionnalité dans les financements interministériels ;

- des travaux engagés dans le cadre du programme 348, dont la mesure « transition environnementale », lancée en octobre 2023, qui impliquent des progrès dans la performance énergétique des bâtiments concernés ;

- la poursuite des opérations immobilières du plan France relance, où le critère de l'économie d'énergie est un objectif obligatoire pour l'éligibilité d'un projet ;

- la mise en place en 2022 des plans de résilience visant à l'horizon des hivers 2022-2023 et 2023-2024 une économie substantielle en matière d'énergie fossile ;

- le déploiement de l'action pédagogique et explicative à destination des personnels en 2023 avec le lancement du Challenge d'économies d'énergie inter-administrations, avec ses trois volets : mobilisation, passage à l'action et le concours Cube, visant jusqu'à 10 % d'économies par l'usage ;

- la mise en place d'une équipe dédiée, dite « task force », située au sein de l'agence Agile, pour identifier les leviers d'économies liées à une exploitation optimisée.

Parallèlement, le renforcement des coordinateurs énergie s'est poursuivi au sein des administrations avec le recrutement de 40 emplois (équivalents temps plein). Leur action est coordonnée et animée par la DIE. En 2023, un séminaire organisé par la DIE a permis de présenter les résultats obtenus depuis la mise en place du réseau, de poursuivre la mobilisation autour des chantiers structurants.

Source : commission des finances, d'après les réponses de la DIE au questionnaire du rapporteur spécial

3. Un dispositif de suivi de la performance encore lacunaire

S'il convient de saluer les efforts de rationalisation de la dotation du programme 348, le rapporteur spécial relève que, en dépit de critiques réitérées chaque année, le dispositif de performance du programme apparaît toujours aussi incomplet.

Les indicateurs de performance du programme retranscrivent uniquement le niveau attendu des économies d'énergie et de surface, ainsi que du coût du kilowatt (kWhEP38(*)) économisé. Les trois cibles sont définies à partir des estimations transmises dans les dossiers présentés par les préfets de département. Selon la documentation budgétaire, les résultats réels ne seront mesurés qu'après la mise en service effective des cités rénovées ou construites.

Alors que les cibles ainsi définies présentent une pertinence très limitée, l'absence de mesure des indicateurs en cours de projets aboutit à une information parlementaire lacunaire. À ce titre, les indicateurs de performance du programme 348 ne répondent donc que très partiellement aux exigences organiques39(*), aux termes desquelles les indicateurs de performance doivent permettre, en sus des résultats attendus, de mesurer les coûts associés à chacune des actions ainsi que les résultats obtenus. À cet égard, le rapporteur spécial réitère à nouveau la recommandation formulée dans le cadre des travaux de contrôle sur cette mission40(*), en vue de la révision des indicateurs de performance du programme.

Concernant plus particulièrement l'action « Résilience », la mise en place d'indicateurs de performance distincts permettrait également de mieux suivre les projets financés. Ces indicateurs pourraient par exemple couvrir les éléments suivants : l'état d'avancement des projets, le coût moyen et médian des actions à gains rapides financées, le coût moyen du mégawatheure économisé, etc.

En effet, si l'effet de levier de la mise en oeuvre d'actions dites « à gains rapides »41(*) est très élevé42(*), seules les rénovations globales peuvent permettre à l'État d'atteindre les objectifs fixés par le décret tertiaire43(*).

4. Le projet de foncière de l'État devrait faire l'objet d'une mise en oeuvre « pilote » en 2025

Présentée par le ministre chargé des comptes publics à l'occasion du conseil de l'immobilier de l'État (CIE) du 29 février 202444(*), la réforme de la foncière d'État vise à répondre à plusieurs objectifs :

- accélérer la transition écologique et la sobriété immobilière, et notamment la réduction des surfaces tertiaires occupées de 25 % en dix ans ;

- optimiser la gestion et valoriser le patrimoine immobilier de l'État, qui constitue un élément structurant de la présence des services publics dans les territoires ;

- mieux adapter les espaces aux nouvelles modalités de travail et améliorer les conditions de travail des agents ;

- garantir la pertinence des investissements immobiliers de l'État et responsabiliser l'occupant sur le coût de son immobilier ;

- renforcer l'attractivité et accélérer la professionnalisation de la filière immobilière de l'État, en renforçant les identités des métiers concernés et en valorisant les parcours de carrière.

Cette nouvelle organisation, recommandée par un rapport conjoint de l'Inspection générale des finances et du Conseil général de l'environnement et du développement durable45(*), vise à assurer « une gestion immobilière responsable, durable et sobre », à travers notamment la réalisation d'un objectif de réduction des surfaces occupées de 25 % en dix ans. Dans ce cadre, l'incitation des ministères à la rationalisation, à la mutualisation et à la rénovation de leurs bâtiments passerait par le versement de loyers payés par les occupants.

Les recommandations du rapport IGF-CGEDD d'avril 2022

« Confier la mission de représenter l'État propriétaire et d'accompagner les occupants publics sur l'ensemble de la chaine des besoins immobiliers à une entité publique opérationnelle dédiée, placée sous la tutelle de la DIE et dotée d'antennes régionales. Cette agence, bras armé opérationnel de la politique immobilière de l'État, assurerait la gestion du propriétaire, la conduite de projet et la valorisation du patrimoine foncier et de l'immobilier de bureaux de l'ensemble des ministères (hors ministère des armées et biens situés à l'étranger) et, selon des règles à définir, celles des opérateurs de l'État, et elle apporterait son expertise en matière de maîtrise d'ouvrage pour l'ensemble du parc immobilier de l'État. Elle serait soit affectataire, soit propriétaire des biens dont elle assurerait la gestion. »

« Mettre en place des loyers versés par les administrations occupantes à l'agence représentant l'État propriétaire, qui financeraient les dépenses du propriétaire, en prévoyant un dispositif financier incitatif pour les administrations qui rationalisent leur organisation immobilière. »

Source : Inspection générale des finances, Conseil général de l'environnement et du développement durable, « Immobilier de l'État : une nouvelle architecture pour professionnaliser », avril 2022

Pilotée par la DIE, la mise en place du projet de foncière repose sur un « pilote » (c'est-à-dire une première expérimentation sur un champ territorial déterminé) qui sera déployé à compter de 2025.

Le périmètre du pilote porte sur les immeubles de bureaux occupés par les services du ministère des finances et du ministère de l'intérieur (hors police et gendarmerie) et les sites multi-occupants situés dans deux régions, Grand Est et Normandie46(*).

La mise en oeuvre de la foncière de l'État et la rationalisation
des occupations immobilières par le versement de loyers

Afin d'assurer une gestion immobilière responsable, durable et sobre, une foncière publique sera créée en 2025, support des fonctions immobilières opérationnelles de l'État.

Juridiquement propriétaire des biens, la foncière peut conclure des baux avec les services de l'État, des collectivités territoriales, des établissements publics de l'État ou de tout organisme public ou privé.

Pour matérialiser la distinction entre propriétaire et occupant, la foncière doit être une entité dotée d'une personnalité juridique distincte de l'État. Cette entité propriétaire opérationnelle doit pouvoir agir sur l'ensemble du parc transféré, domaine public ou domaine privé de l'État.

Le modèle économique de la foncière repose notamment sur la perception des loyers payés par les occupants et sur la dynamisation de toute la chaîne de valeur immobilière. La réforme contribuera ainsi à mettre en place une gouvernance vertueuse de l'immobilier de l'État qui distingue les rôles et responsabilités de chacun :

- les ministères et les services locataires doivent définir leur stratégie d'implantation immobilière et assumer le coût afférent : l'instauration de loyers réels matérialise le coût de l'occupation et est un signal-prix visant la sobriété et la réduction des surfaces ;

- la foncière, propriétaire des bâtiments, doit apporter le meilleur rapport qualité-prix à ses locataires. Par ailleurs, elle pourra générer de la valeur, via des cessions et opérations de valorisation du parc transféré.

Les bénéfices attendus de la mise en oeuvre de la foncière consistent en la mutualisation des fonctions supports de l'immobilier et en l'harmonisation des pratiques professionnelles, afin de moderniser, optimiser les coûts du patrimoine et valoriser l'immobilier de l'État.

Source : commission des finances, d'après les réponses de la DIE au questionnaire du rapporteur spécial

À terme, la foncière a vocation à se déployer sur l'ensemble du périmètre des immeubles de bureaux et locaux d'activités de l'État, à l'exception des logements isolés, des biens occupés par le ministère des armées et des biens situés à l'étranger ou des biens trop spécifiques (musées, cathédrales, barrages, etc.), soit environ 20 millions de mètres carrés sur un patrimoine immobilier total de 96 millions de mètres carrés.

Selon le directeur de l'immobilier de l'État47(*), les économies de surfaces occupées attendues représenteraient 5 millions de mètres carrés, composées pour moitié de libérations de baux et pour moitié de cessions de bâtiments domaniaux. Si la cession des biens domaniaux pourrait constituer une source de recettes, l'essentiel des gains financiers devrait résulter de la diminution du « mur » d'investissements nécessaires pour la mise aux normes des bâtiments.

Concernant la structuration juridique de la foncière de l'État, le directeur de l'immobilier de l'État a indiqué en audition que celle-ci faisait encore l'objet de discussions. Afin d'assurer le transfert des biens du domaine public et du domaine privé à la foncière, l'option privilégiée serait de transformer la société anonyme Agile, détenue entièrement par l'État, en un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC). Cette option permettrait également d'écarter les craintes d'une privatisation éventuelle qui pourraient être suscitées par le transfert des biens à une société anonyme, même détenue à 100 % par l'État.

Dans cette hypothèse, la transformation de la société Agile en établissement public n'emporterait ni création de personne morale nouvelle, ni cessation d'activité. Les biens, droits, obligations, contrats et autorisations de toute nature de l'établissement public seraient ceux de cette société au moment de la transformation de sa forme juridique.

Cependant, la création d'une nouvelle catégorie d'établissement public nécessiterait une disposition législative expresse. Aussi la décision est-elle en cours d'arbitrage par le Gouvernement.

Dans le cadre de la centralisation de la gestion immobilière de l'État au sein de la foncière, le rapporteur spécial estime que le programme 348 aurait vocation à s'éteindre progressivement, les dépenses correspondantes étant appelées à être inscrites dans le budget de l'établissement public, qui serait placé sous la tutelle de la DIE.


* 35 Réponses de la DIE au questionnaire du rapporteur spécial.

* 36 Gigawatt par heure d'énergie finale par an. L'énergie finale désigne la quantité d'énergie disponible pour l'utilisateur final.

* 37 Agence de gestion de l'immobilier de l'État, société anonyme détenue entièrement par l'État.

* 38 Kilowatt par heure d'énergie primaire. L'énergie primaire correspond à la consommation nécessaire à la production de l'énergie finale.

* 39 Article 51 de la loi organique n° 2001-692 du 1 août 2001 relative aux lois de finances.

* 40  Rapport n° 743, tome II, annexe 15, volume 1 (2020-2021) de MM. Albéric de MONTGOLFIER et Claude NOUGEIN, déposé le 7 juillet 2021 : Gestion des finances publiques et des ressources humaines - Crédits non répartis - Action et transformation publiques, dans le cadre de l'examen par la commission des finances de la loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2020.

* 41 Il s'agit d'actions se caractérisant par un fort retour sur investissement, avec d'importantes économies générées à moyen ou long terme. Parmi ces actions figurent par exemple le contrôle, le pilotage et la régulation des systèmes de chauffage ou encore la modernisation des systèmes d'éclairage ou de chauffage.

* 42 Interrogé en audition en 2022, le directeur de l'immobilier de l'État estimait que le coût du mégawatheure économisé par la mise en place d'une action à gains rapides s'élevait de 1 000 euros à 1 500 euros, alors que l'État achetait un mégawatheure pour environ 250 euros. Pour une rénovation globale, le coût serait de l'ordre de 7 000 euros le mégawatheure.

* 43  Décret n° 2019-771 du 23 juillet 2019 relatif aux obligations d'actions de réduction de la consommation d'énergie finale dans des bâtiments à usage tertiaire.

* 44 Communiqué de presse du 1er mars 2024, « Lancement des travaux du Conseil de l'immobilier de l'État sur le projet de foncière de l'État pour une gestion immobilière responsable, durable et sobre ».

* 45 Inspection générale des finances, Conseil général de l'environnement et du développement durable, « Immobilier de l'État : une nouvelle architecture pour professionnaliser », avril 2022.

* 46 De façon ponctuelle, certains biens en Auvergne Rhône-Alpes et en Île-de-France pourraient également être concernés pour concrétiser des opérations prioritaires.

* 47 Interrogé en audition par le rapporteur spécial.

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