II. LA DOTATION POUR DÉPENSES ACCIDENTELLES ET IMPRÉVISIBLES EST ENFIN RAMENÉE À UN MONTANT RAISONNABLE APRÈS PLUSIEURS ANNÉES DE BUDGÉTISATION EXCESSIVE
Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit cette année un total de 425 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 125 millions d'euros en crédits de paiement (CP) sur le programme 55228(*), soit une baisse de 63,9 % en AE et 80,5 % en CP par rapport aux crédits inscrits en LFI pour 2024.
A. UNE BUDGÉTISATION EXCESSIVE DEPUIS LA CRISE SANITAIRE
Le montant conventionnel de la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles (DDAI) était fixé, entre 2018 et 2022, à 424 millions d'euros en AE et 124 millions d'euros en CP.
Les dépenses imprévues liées à la crise sanitaire ont en effet justifié, pour l'année 2020, un abondement exceptionnel de 1,62 milliard d'euros en AE et en CP sur le programme 552 par la loi de finances rectificative du 25 avril 2020. Cet abondement n'avait pas été contesté par la commission des finances dans la mesure où les conséquences budgétaires immédiates de cette crise sur les différents programmes du budget général étaient avérées.
Depuis cet épisode, le Gouvernement avait pris l'habitude de constituer des réserves de budgétisation massives sur le programme 552, en s'appuyant sur des justifications lacunaires. La commission des finances s'est systématiquement opposée à ces ouvertures excessives de crédits, et cette position a été confirmée par les exécutions des différents exercices budgétaires.
En 2021, le programme 552, initialement doté de 124 millions d'euros en CP, a ainsi fait l'objet d'un abondement d'1,5 milliard d'euros par la loi du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 2021, qui avait également vocation à financer des dépenses imprévues résultant de la persistance de la crise sanitaire. La commission des finances s'y était opposée, réduisant de 1 milliard d'euros cette enveloppe, finalement rétablis par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture. Cette ouverture exceptionnelle de crédits avait en effet suscité le scepticisme du rapporteur général de la commission des finances, car elle avait été adoptée, contrairement à 2020, dans un contexte où les restrictions touchant les activités économiques étaient en grande partie levées. L'exécution de la dotation sur l'année 2021 avait finalement donné raison au rapporteur général, puisque qu'aucun crédit de cette enveloppe n'a été consommé.
En 2022, la DDAI était également dotée de 124 millions d'euros en CP en LFI, conformément à la budgétisation conventionnelle. Le premier projet de loi de finances rectificative pour 2022 avait toutefois sollicité l'ouverture de 2 milliards d'euros supplémentaires sur cette dotation, avec pour seule justification que ces crédits permettraient au Gouvernement de faire face à d'éventuelles dépenses imprévues, compte tenu des incertitudes pesant sur la gestion 2022. Un amendement de la commission des finances avait proposé de réduire de 1,5 milliard d'euros le montant de cette enveloppe. Finalement, 500 millions d'euros avaient été rétablis dans le texte issu de la commission mixte paritaire, portant l'enveloppe totale supplémentaire sur ce programme à 1 milliard d'euros en AE et en CP. La faible exécution des crédits de la dotation sur l'année 2022, à hauteur de 18 millions d'euros (soit 2 % des crédits finalement ouverts), a une nouvelle fois confirmé la pertinence de la position adoptée par la commission des finances du Sénat.
En ce qui concerne l'année 2023, le montant des crédits inscrits sur ce programme par le Gouvernement était, dès la budgétisation initiale, particulièrement excessif, puisque 2,074 milliards d'euros en AE et 1,774 milliard d'euros en CP avaient été demandés, avec pour seule justification « la forte incertitude liée au contexte international et macroéconomique29(*) ». La commission des finances avait donc proposé, à l'initiative de ses rapporteurs spéciaux, de minorer le montant des crédits budgétés sur ce programme d'1 milliard d'euros en AE et en CP, portant ainsi les crédits de la DDAI à 1,074 milliard d'euros en AE et 774 millions d'euros en CP. Le Gouvernement a finalement rétabli en nouvelle lecture, dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, 300 millions d'euros, portant ainsi le montant des crédits inscrits en LFI à 1,374 milliard d'euros en AE et 1,074 milliard d'euros en CP. Là encore, la faible exécution des crédits du programme, qui s'est élevée à seulement 33 millions d'euros (soit à peine 3,1 % des crédits ouverts en LFI) a donné raison à la commission des finances.
Lors du PLF 2024, le Gouvernement avait fait une demande d'ouverture de crédits de 525 millions d'euros en AE et 225 millions d'euros en CP. Si le montant demandé apparaissait beaucoup plus raisonnable que les années précédentes, la commission avait toutefois proposé, à l'initiative du rapporteur spécial, de ramener ces crédits au montant conventionnel fixé de 124 millions d'euros en CP fixé entre 2018 et 2022. Toutefois, le Gouvernement a une nouvelle fois rétabli le texte initial en nouvelle lecture. Au 31 octobre 2024, seulement 58,2 millions d'euros de crédits ont été consommés sur cette enveloppe, soit 26 % des crédits ouverts.
* 28 L'écart de 300 millions d'euros entre les AE et les CP est fixé à titre conventionnel depuis 2012. Il s'explique par la nécessité de couvrir les éventuelles prises à bail privées.
* 29 Projet annuel de performances pour l'année 2023 de la mission « Crédits non répartis ».