COMPTE RENDU DE
L'AUDITION
DE MME FRANÇOISE GATEL,
MINISTRE DE
L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE
ET DE LA DÉCENTRALISATION
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Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous procédons aujourd'hui à l'audition de Mme Françoise Gatel, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, dans le cadre de l'examen des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » (RCT) inscrits dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2026.
Traditionnellement, cette audition est aussi le moment d'aborder plus généralement le soutien financier de l'État aux collectivités territoriales qui ne se limite pas, chacun le sait, à cette mission.
L'examen du budget s'inscrit, pour la deuxième année consécutive, dans un contexte marqué par l'impératif de redressement de nos finances publiques. Au travers de l'examen de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » se pose nécessairement la question de la participation des collectivités à l'effort budgétaire collectif - une question qui, vous vous en doutez, nous intéresse tout particulièrement.
Nous y serons d'autant plus attentifs que, conformément aux annonces du président du Sénat, Gérard Larcher, l'examen du PLF par notre assemblée sera l'occasion de réexaminer l'effort budgétaire demandé aux collectivités en 2026.
Nous vous invitons, Madame la ministre, à nous présenter les évolutions des crédits de cette mission, ainsi que les dispositifs portés par les articles qui y sont rattachés. Nous aurons l'occasion, après vous avoir cédé la parole pour une présentation d'une quinzaine de minutes, de débattre sur la base des questions qui vous seront adressées.
Mme Françoise Gatel, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation. - Je vous remercie de votre invitation à m'exprimer devant votre commission sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».
Mon premier point portera sur les relations entre l'État et les collectivités territoriales : celles-ci doivent s'appuyer sur plus de confiance et de décentralisation.
Le Premier ministre a annoncé qu'un projet de loi relatif à la décentralisation devrait être présenté un peu avant la fin de l'année, pour être examiné à compter du mois de mars au Sénat. Il ne s'agit pas du Grand Soir, mais notamment de clarifier les compétences et de définir les responsabilités, car ces règles sont devenues illisibles pour nos concitoyens. Les élus eux-mêmes sont parfois un peu perdus, en raison du grand nombre d'interlocuteurs avec lesquels ils sont amenés à interagir. Cela ralentit l'action publique, occasionne très souvent un surcoût et est source de fatigue démocratique, ce qui n'est pas la moindre de nos préoccupations.
Pour élaborer ce texte, nous avons invité l'ensemble des maires, des présidents de département, des présidents de région, les présidents des deux chambres du Parlement ainsi que les présidents des délégations à faire des propositions. Les préfets ont, quant à eux, transmis leurs propositions au Gouvernement le 15 novembre dernier. Depuis lors, nous analysons l'ensemble de ces propositions. Très prochainement, nous organiserons, au ministère de la décentralisation, une réunion de restitution avec les représentants des élus et un certain nombre de parlementaires. Je proposerai aux groupes qui le souhaitent de prendre part à ces discussions.
Avec ce futur projet de loi, nous souhaitons identifier clairement un pilote pour chaque action publique, qu'il s'agisse de l'État, sous la forme d'une responsabilité ministérielle, d'un préfet, ou d'une collectivité. Ce travail de clarification des prérogatives de l'État a, jusqu'à présent, été absent des réformes territoriales. L'État, nous le savons, ne s'occupe pas que du régalien. La sécurité intérieure, par exemple, est une compétence régalienne, mais elle suppose aussi une articulation avec les polices municipales.
Décentraliser ne signifie pas que l'État se retire. C'est affirmer un État fort et puissant dans les territoires au travers du préfet, chef d'orchestre de l'ensemble des services et des agences de l'État, chargé par ailleurs d'un pouvoir d'appréciation et de contrôle de la norme.
Vous avez ouvert, en complément de nos travaux de concertation, une consultation en ligne des élus locaux - je serai très heureuse d'en recevoir les conclusions.
L'État doit rester un État stratège, régalien, mais aussi péréquateur. Nous devons, quoi qu'il en soit, promouvoir une forme de circuit court en matière de décision, avec un principe de subsidiarité et une exigence d'efficacité, ce qui suppose également de procéder à un travail d'évaluation des normes.
Mon deuxième point portera sur la simplification.
Le Premier ministre a annoncé lors du Congrès des maires une première série de mesures de simplification, qui seront présentées autour de la période de Noël. Il y a quelques années, le Sénat avait signé avec le Gouvernement une charte de simplification ; il s'agit de nous inscrire dans cette même démarche exigeante et d'obtenir une norme adaptée, plus précise et évaluée.
Nous organiserons ainsi un
« Roquelaure 2 » de la simplification, mon
prédécesseur François Rebsamen étant à
l'initiative du premier. Le chantier de simplification des normes sera
mené à partir du travail de Boris Ravignon,
en lien le
conseil national d'évaluation des normes (CNEN) présidé
par Gilles Carrez. Nous devrons également nous préoccuper du
flux des normes, en favorisant l'expérimentation et l'évaluation,
domaine dans lesquels nous sommes défaillants. Permettez-moi d'illustrer
mon propos avec la loi « zéro artificialisation
nette » (ZAN) : le Sénat est déjà
intervenu deux fois pour corriger des dispositions pour lesquelles il y a sans
doute eu un défaut d'étude d'options et d'impact.
Le travail considérable mené par le Sénat en matière de décentralisation et de simplification nourrit nos travaux. Nous avons toute la matière nécessaire, mais nous devons désormais transformer notre façon de fabriquer la loi et la norme. Qu'elle procède du pouvoir réglementaire ou des parlementaires, la norme doit être pertinente et juste. Portalis, dont la statue veille sur l'hémicycle du Sénat, écrivait que « les lois sont faites pour les hommes, et non les hommes pour les lois » : ce rappel nous invite à davantage de sobriété et de simplicité. Sept décrets de simplification portant sur les ressources humaines des collectivités ont d'ores et déjà été lancés, dont quatre ont été publiés.
La proposition de loi portant création d'un statut
de l'élu local est inscrite à l'ordre du jour de
l'Assemblée nationale le 8 décembre prochain. Nous oeuvrons pour
qu'elle y soit adoptée dans les mêmes termes qu'au Sénat en
deuxième lecture, afin de faire aboutir ce texte dans les plus brefs
délais.
Je rappelle, en effet, que près de 450 maires
démissionnent chaque année.
Nous inscrirons dans le PLF les dispositions prévues par la proposition de loi précitée, c'est-à-dire les mesures financières visant à tenir compte de la revalorisation des indemnités de mandat et l'extension du champ de la dotation particulière relative aux conditions d'exercice des mandats locaux, dite dotation particulière « élu local » (DPEL), mais aussi la mesure, annoncée par le Premier ministre au Congrès des maires, dite « d'indemnité régalienne ». Son principe consiste à verser à chaque maire une indemnisation à hauteur de 500 euros annuels au titre de la reconnaissance des actes qu'il assume de manière obligatoire au nom de l'État, quelle que soit la taille de la commune.
S'agissant de la protection des élus, nous avons clarifié les dispositions relatives à l'extension et à l'automaticité de la protection fonctionnelle. Je ne reviendrai pas sur les dispositions de la proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local, puisque le Sénat a conduit un travail très constructif sur ce sujet, notamment en ce qui concerne la prise illégale d'intérêts.
J'en viens désormais aux questions financières.
Chacun d'entre nous connaît le sérieux et la gravité de la situation. Notre pays présente une dette de 3 400 milliards d'euros et n'a pas connu de budget équilibré depuis plus de cinquante ans. La dette s'aggrave de 12 millions d'euros par heure, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, 365 jours par an.
Avant d'entrer dans le détail, je rappellerai l'ordre de grandeur des transferts de l'État aux collectivités : 155 milliards d'euros, sous forme de dotations, de fiscalité transférée ou d'accompagnement ciblé. L'essentiel des interrogations porte sur les dotations de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » qui représente 3,9 milliards d'euros.
Le budget pour les collectivités a été élaboré dans le contexte d'obligation de redressement budgétaire que j'ai évoqué. Si nous laissons dériver nos finances, nous ne parlerons même plus de baisse de dotation aux collectivités ; nous rencontrerons des problèmes pour financer les services publics et les fonctionnaires. D'autres pays y ont fait face.
Nous devons donc restreindre nos dépenses. La mission de simplification des normes y contribue. Permettez-moi d'illustrer mon propos par un exemple donné par le Premier ministre. Obligation est faite aux collectivités de vidanger les piscines tous les ans, bien que la qualité de l'eau soit constamment mesurée. Le coût annuel de cette mesure inutile représente 30 millions d'euros. Vous le voyez, nous pouvons aussi optimiser les budgets grâce à des normes plus raisonnables.
Budget de responsabilité et de solidarité, le PLF présenté par le Premier ministre appelle effectivement à une contribution des collectivités.
Le Gouvernement n'a jamais indiqué que les collectivités seraient dépensières ou déraisonnables. Les collectivités subissent un certain nombre d'obligations, qui induisent des dépenses contraintes et des dépenses obligatoires. Elles sont tenues d'avoir un budget de fonctionnement équilibré ; nous pouvons donc affirmer qu'elles ne sont pas responsables de la dette, cela est très clair.
Simultanément, nous ne pouvons pas imputer à l'État l'entière responsabilité de la situation. En effet, lorsque le Premier ministre demande de porter le fonds de sauvegarde des départements de 300 millions à 600 millions d'euros dans le PLF pour 2026, c'est une aggravation de la dépense de l'État, mais celle-ci est destinée aux départements, et donc à nos concitoyens.
Nous avons souhaité préserver les dotations de fonctionnement. Dans un effort de solidarité important, la dotation de solidarité rurale (DSR) a été augmentée de 150 millions d'euros, et la dotation de solidarité urbaine (DSU) de 140 millions d'euros.
Nous avons donc choisi de concentrer l'effort de redressement budgétaire sur les crédits consacrés à l'investissement des collectivités territoriales. D'aucuns critiquent ce choix, arguant que les collectivités représentent 70 % de l'investissement public, et que des emplois seront menacés. Nous ne le contestons pas ; il est cependant nécessaire de redresser nos finances et donc d'être plus frugal. Par ailleurs, chacun ici le sait : l'investissement des collectivités est moindre en année de cycle électoral. J'ajoute que, malgré tout, la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), s'élèvera à 1 milliard d'euros.
Quant au fonds pour l'investissement dans les territoires (FIT), il répond tout d'abord à une demande de simplification. Il existe une certaine porosité entre les différentes dotations, à l'instar de la DETR et de la dotation de soutien à l'investissement local, qui sont parfois employées indifféremment par le préfet, en fonction des crédits restants en fin d'exercice.
Nous avions estimé que le fait de regrouper ces dotations au sein d'une enveloppe unique faciliterait la gestion de ces crédits et leur lisibilité pour les élus. Nous avons toutefois entendu l'inquiétude et les arguments des élus locaux et des sénateurs. En tout état de cause, je ne peux pas laisser dire que le Gouvernement supprime la DETR, qui est financée, je le rappelle, à hauteur de 1 milliard d'euros.
Nous soutenons les territoires ruraux. Je rappelle qu'il existe une dotation de soutien aux communes pour les aménités rurales, destinée à valoriser les atouts de nos territoires en matière de biodiversité, de paysages, mais aussi d'énergies renouvelables. En 2026, la dotation « aménités rurales » s'élèvera à 110 millions d'euros, contre 41,6 millions d'euros en 2023. Il n'est donc pas exact de dire que tous les crédits disparaissent.
La dotation globale de fonctionnement (DGF) restera stable, après une hausse de 790 millions d'euros sur ces trois dernières années
En cas de catastrophes climatiques, la dotation de solidarité en faveur de l'équipement des collectivités territoriales et de leurs groupements touchés par des évènements climatiques ou géologiques (DSEC) permet d'accompagner les collectivités ayant subi des dégâts matériels. Nous en avons vu l'utilité dans trois départements, dont les Hautes-Alpes l'année dernière. L'enveloppe allouée à la DSEC sera donc augmentée de 40 millions d'euros en 2026.
Enfin, conformément à la promesse faite au Sénat, nous renforçons les services publics de proximité en augmentant les moyens dédiés aux maisons France Services (MFS). Nous finançons chaque MFS à hauteur de 45 000 euros ; 61 MFS supplémentaires ont été labellisées lors du Congrès des maires ; en 2026, nous en compterons 2 900 et 3 000 en 2027.
Permettez-moi d'aborder maintenant le dispositif des maisons France Santé.
Le premier souci de nos concitoyens, à la campagne comme à la ville, est l'accès aux soins. Toutes les collectivités, avec les professionnels de santé, ont engagé des efforts conséquents pour créer des maisons de santé et des centres de santé. En Haute-Saône, par exemple, où n'exerce en moyenne qu'un dentiste pour 9 000 habitants, la mutualité sociale agricole (MSA) a installé un dispositif de « bus bucco-dentaire » (dit « bucco bus »).
Le Gouvernement ne peut pas rester insensible à ce besoin de nos concitoyens. Dans l'esprit des maisons France Services, le Premier ministre a procédé, il y a trois semaines environ, à la labellisation de la première maison France Santé, dans la Manche, à Carentan-les-Marais. Ces maisons reposent sur un principe très simple : pouvoir obtenir dans les quarante-huit heures, du lundi au vendredi, un rendez-vous avec une infirmière ou un médecin aux tarifs conventionnés et qui assureront la continuité des soins.
Afin de sécuriser, de pérenniser et d'améliorer l'offre de soins dans les territoires, le Gouvernement a promis de labelliser entre quinze et vingt maisons France Santé par département d'ici à la fin de l'année, avec l'objectif de 2 000 structures en 2026, en leur attribuant une dotation de 50 000 euros. Ce montant équivaut à la contribution accordée aux maisons France Services.
Par ailleurs, nous honorons la promesse faite par Jean Castex aux régions au sujet des instituts de formation en soins infirmiers (Ifsi) dans le PLF.
Le fonds de sauvegarde des départements, dont les crédits s'établissaient à 100 millions d'euros il y a deux ans, mais qui n'avait pas été alimenté l'année dernière, sera abondé à hauteur de 300 millions d'euros dans le PLF. Le Gouvernement entend le porter à 600 millions d'euros, considérant que les départements sont les collectivités les plus touchées et que 72 % de leurs dépenses sont des dépenses obligatoires ou contraintes, définies par l'État ou par la loi, et qu'elles ne cessent d'augmenter.
Le Premier ministre François Bayrou avait demandé aux collectivités de contribuer aux efforts d'économies budgétaires à hauteur de 5,3 milliards d'euros. La version présentée par le Premier ministre Sébastien Lecornu prévoit une contribution de 4,6 milliards d'euros. Il vous revient maintenant d'examiner le PLF pour 2026. Je suis à votre disposition pour répondre à toutes vos questions.
M. Jean-Michel Arnaud, rapporteur pour avis de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » - Madame la ministre, j'aimerais avoir des précisions sur le volume global des efforts demandés aux collectivités locales dans le PLF porté par le Gouvernement. Il était question au départ de 5,3 milliards d'euros, puis de 4,6 milliards d'euros aujourd'hui. Pourriez-vous nous détailler la ventilation de ces économies par nature et par niveau de collectivité locale ?
Le deuxième sujet concerne la situation financière délicate des départements, qui a été soulignée à plusieurs reprises, notamment par la commission des finances. Comment entendez-vous accompagner les départements en difficulté ?
J'ai ensuite deux questions concernant les 200 millions d'euros d'économies sur l'investissement demandées aux collectivités. Vous la décrivez comme une contribution conjoncturelle, correspondant à la baisse de l'investissement lors du cycle des élections municipales. Pouvez-vous nous donner les chiffres d'autres années de référence sur des cycles électoraux semblables, par exemple 2020 ? Pouvez-vous nous indiquer avec précision la manière dont le Gouvernement entend réintroduire ces montants à partir de 2027, une fois que nous aurons passé la première année du cycle électoral ?
Par ailleurs, pouvez-vous préciser la manière dont seront intégrés au PLF les nouveaux dispositifs introduits dans le cadre de la proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local ? Leur prise en compte n'est pas encore actée dans le PLF qui nous est présenté. La direction générale des collectivités locales (DGCL) a indiqué qu'un crédit de 23 millions d'euros sera nécessaire pour financer ces nouveaux dispositifs. Qu'en est-il précisément ? Serviront-ils à financer intégralement l'abondement des indemnités prévues dans le texte, dont le montant évolue en fonction de la strate démographique des collectivités locales ?
Le plafond de l'indemnité des maires des communes de France de moins de 500 habitants est augmenté de 10 %, soit une valorisation de 66 euros en moyenne par mois, multipliée par douze. En multipliant ce montant par 17 000 - le nombre de communes de moins de 500 habitants -, cela représente environ 13 millions d'euros, si je ne me suis pas trompé. Déduits des vingt-trois millions d'euros de crédit, les 10 millions d'euros suffiront-ils à financer les dispositifs en matière d'accompagnement et de valorisation du statut de l'élu local, tels que vous les avez rappelés ? Il est important de clarifier ce point pour que les élus n'aient pas le sentiment d'être mal accompagnés financièrement, eu égard aux engagements pris dans le cadre de cette loi.
Enfin, nous avons été surpris de l'annonce du Premier ministre relative à l'attribution d'un crédit de 500 euros pour charge d'État en faveur des maires. De quelle manière sera-t-il intégré au budget ? N'aurait-il pas été plus simple de valoriser de 500 euros supplémentaires l'indemnité de tous les maires dans le cadre de la proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local, dans un souci de clarification et pour éviter la perception parfois négative qu'en ont eue les élus locaux ? Ces derniers demandent non pas l'aumône, mais simplement à être accompagnés dans l'exercice de leur mission en tant que responsables de collectivité locale, mais aussi en tant que représentants de l'État.
Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale de la commission des finances sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales » - Nous allons intervenir conjointement avec Stéphane Sautarel sur ce projet de budget qui ne ménage pas, c'est le moins que l'on puisse dire, les collectivités, qu'il s'agisse de la DGF, des « variables d'ajustement », de l'écrêtement de la TVA ou encore, en ce qui concerne la mission « Relations avec les collectivités territoriales », du sort particulier réservé au fameux FIT.
Le doublement des crédits du fonds de sauvegarde
des départements est un motif de satisfaction - quoiqu'il serait
nettement plus satisfaisant que les départements n'aient pas besoin de
fonds de sauvegarde. Néanmoins,
cette mesure est
particulièrement nécessaire. Nous sommes aujourd'hui, je le
rappelle, dans l'attente d'un nouveau dispositif de financement pour les
départements, puisque le gouvernement de l'époque, lors de la
conférence financière des territoires, avait
suggéré que les départements soient traités de
manière distincte au regard de leurs compétences propres.
Nous appelons tous de nos voeux de nouvelles relations entre l'État et les collectivités ; elles doivent néanmoins tenir compte des compétences de chaque strate, redéfinir leurs paniers de ressources respectifs, sans oublier le volet fiscal. Je ne dirai pas que tous les malheurs du monde proviennent de la suppression de la taxe d'habitation, mais celle-ci a provoqué beaucoup de dégâts. Les choses seraient différentes si elle avait été maintenue.
Permettez-moi d'évoquer une compensation sérieusement amputée : le prélèvement sur recettes des valeurs locatives des établissements industriels (PSR-VLEI), qui compense l'abattement de 50 % sur les valeurs locatives des locaux industriels institué par la loi de finance pour 2021. Le PLF propose une baisse de 25 % de ce prélèvement sur recette, ce qui toucherait de nombreuses collectivités et intercommunalités, singulièrement celles qui ont des industries plutôt lourdes et une population plutôt fragile. Cette réduction peut avoir des effets plus néfastes que ceux du dispositif de lissage conjoncturel des recettes fiscales des collectivités territoriales (Dilico) dans de nombreux territoires.
Aussi, je m'interroge : cette compensation n'est-elle pas traitée comme une nouvelle variable d'ajustement budgétaire ?
M. Stéphane Sautarel, rapporteur spécial de la commission des finances sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales » - Nous avons bien sûr échangé avec le rapporteur pour avis de la commission des lois, Jean-Michel Arnaud, et avons déjà examiné en commission des finances les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». Nous avons réservé le vote de la commission sur deux articles rattachés, les articles 76 (Dilico 2) et 77 (fonds de sauvegarde des départements).
Nous avons effectivement cherché à rendre soutenable et équitable la contribution des collectivités à l'effort budgétaire en privilégiant les mesures qui concernent ce que j'appelle l'« épargne forcée », c'est-à-dire le Dilico, d'une part, et les mesures de trésorerie, d'autre part, notamment le fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA). Nous avons, à l'inverse, tenté de minorer les autres mesures ; l'intérêt du Dilico et du FCTVA étant de n'être ni confiscatoires ni crantés dans le temps, mais conjoncturels.
La diminution du PSR-VLEI est, en effet, un point très sensible, bien qu'il ne fasse pas partie du périmètre de la mission RCT. Le rapporteur général du budget, Jean-François Husson, propose un certain nombre d'ajustements ; elle reste malgré cela un des points d'achoppement du texte qui nous est présenté, et ce à deux titres au moins.
D'une part, le Premier ministre a évoqué sa volonté de renouer un dialogue de confiance entre l'État et les collectivités. Dans ce contexte, remettre en cause une compensation qui date de moins de cinq ans apparaît regrettable.
D'autre part, toucher à cette mesure pourrait compromettre l'effort des collectivités en faveur de la réindustrialisation du territoire, ce qui constitue pourtant un objectif partagé par l'État.
Enfin, le dispositif présenté sous le nom de « Dilico 2 », transforme ce qui était un dispositif de lissage en une mesure de punition collective que nous contestons. Nous proposerons en commission des finances une révision du quantum et de la proportion du Dilico 2, notamment en excluant les communes de la contribution et en revenant aux modalités du Dilico 1, mis au point l'année dernière au Sénat.
Mme Françoise Gatel, ministre. - Permettez-moi de répondre en une seule fois à plusieurs de vos questions sur la justification de la contribution des collectivités à l'effort de redressement budgétaire.
Premièrement, le Sénat, je le sais, a l'intention de faire évoluer le Dilico 2, dont les crédits sont inscrits à hauteur de 2 milliards d'euros dans le PLF.
L'année dernière, une contribution significative a, certes, été demandée aux collectivités sur le Dilico 1, mais cet argent a été rendu aux collectivités. Il s'agit en quelque sorte d'une « épargne forcée ». L'État a tenu sa promesse en restituant en 2026 30 % du Dilico 1, je tiens à le souligner.
Deuxièmement, le PSR-VLEI devient une dépense très dynamique. L'État a versé près de 4,5 milliards d'euros ; il cherche donc à maîtriser cette contribution.
J'entends la contradiction que vous soulevez entre ce souhait de maîtrise et la politique de réindustrialisation de la France, mais nous devons trouver des économies pour redresser nos comptes. Si nous pouvions retirer allègrement des lignes budgétaires, cela se saurait. L'effort proposé repose sur des sujets qui conviennent plus ou moins aux uns et aux autres.
Troisièmement, vous évoquez l'alignement du versement du FCTVA des intercommunalités sur le droit commun : il s'agit non pas d'un vrai prélèvement, mais d'un décalage de trésorerie. J'entends que cela ne vous convienne pas, mais il ne s'agit pas d'une perte. L'État garantit son reversement - il a tenu sa parole sur le Dilico 1.
Enfin, je souhaite évoquer la poursuite du programme Action coeur de ville.
L'année dernière, nous avons accueilli plus de 450 projets des programmes Villages d'avenir et Petites Villes de demain. Ces programmes d'accompagnement en ingénierie sur un projet donné à la commune sont extrêmement efficaces et recueillent l'assentiment des élus. L'année dernière, le Sénat avait maintenu l'enveloppe du programme dédié au programme Villages d'avenir. J'ai interrogé chaque préfet pour connaître le nombre de communes qui avaient achevé leur programme. Nous avons ainsi pu optimiser le programme et financer 450 nouveaux projets.
Il est bien évident que nous intégrerons dans le PLF pour 2026, qui pourrait être voté avant même l'adoption de la proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local, le montant des engagements qui figurent dans cette proposition de loi.
Il s'agit en particulier de la revalorisation des indemnités des maires et des adjoints des communes jusqu'à 20 000 habitants, avec une progression lissée en fonction de la taille de ces communes. De la même manière, nous prenons en compte l'éligibilité des communes jusqu'à 3 500 habitants au titre de la DPEL ainsi que celle des communes jusqu'à 10 000 habitants pour un certain nombre de frais, notamment liés à la protection fonctionnelle.
Quant à l'« indemnité régalienne » annuelle de 500 euros, tant son montant que les conditions de son versement peuvent donner lieu à débat. Nous avons souhaité créer une indemnité uniforme et simple à mettre en oeuvre, qui reconnaisse et traite à part entière la fonction de maire en tant qu'agent de l'État. Le montant n'en paraît pas négligeable, si nous le multiplions par le nombre de maires en France. Nous n'avons pas souhaité l'intégrer au texte de loi portant statut de l'élu afin de préserver les chances d'obtenir avant la fin de l'année un vote de l'Assemblée nationale qui serait conforme à celui du Sénat.
Au sujet des départements, dont les dépenses sont d'ordre structurel, le recours systématique à des mécanismes d'urgence montre qu'il faut agir plus en profondeur. Le Premier ministre l'a rappelé lors des assises des départements de France qui se sont tenues à Albi il y a deux semaines, en s'inspirant des termes d'une motion déjà prise par ce même congrès dix ans plus tôt, en 2015 : les départements sont confrontés à une augmentation considérable de leurs dépenses obligatoires et cela ne peut pas durer.
En 2026, au titre de l'intervention d'urgence pour les départements les plus en difficulté, les critères d'accès aux 300 millions d'euros du fonds de sauvegarde demeurent les mêmes qu'en 2023 ; le Gouvernement proposera quelques aménagements de ces critères ainsi que l'abondement de 300 millions d'euros supplémentaires.
Cependant, le Premier ministre l'a évoqué en s'adressant aux présidents des conseils départementaux : nous connaissons un problème structurel de financement de toutes les collectivités territoriales, et particulièrement des départements. Ceux-ci ne peuvent avoir la charge de la compétence sociale, dont les dépenses structurelles ne cessent d'augmenter, avec, en face, des recettes volatiles et sans rapport avec la compétence qui leur échoit.
Les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) ont, par exemple, été un temps dynamiques et ont profité aux départements ; l'évolution, au cours des dernières années, du marché de la construction et des ventes immobilières ne permet cependant plus de voir cette source de recettes sous un jour aussi favorable - un frémissement est néanmoins de nouveau perceptible dans certains départements.
Avec la volonté qu'il y ait en contrepoint d'une compétence une responsabilité et une ressource cohérente, le Premier ministre propose que les départements perçoivent une part de la contribution sociale généralisée (CSG). La question se posera ensuite de savoir si les collectivités, quelles qu'elles soient, auront un pouvoir de taux.
Le prochain projet de loi de décentralisation aura à préciser l'organisation des compétences ; puis il sera nécessaire d'entreprendre une véritable révision des ressources des collectivités, devenues aujourd'hui incompréhensibles.
Les valeurs locatives constituent-elles une variable d'ajustement ? Ce n'est pas le cas, mais essayer de redresser un budget grevé d'une dette de quelque 3 400 milliards d'euros suppose d'identifier de possibles économies. Nous sommes d'ailleurs à l'écoute de toutes vos suggestions concernant d'autres postes où nous pourrions aller les chercher ; et le budget peut sans aucun doute être coconstruit.
Mme Lauriane Josende. - La dotation « aménités rurales » concerne la question centrale des charges liées à la préservation des espaces naturels, avec les enjeux de la gestion des flux touristiques et de la coexistence de ces espaces, souvent classés et potentiellement sensibles, avec les activités agricoles. Les collectivités sont en première ligne pour les protéger, y entretenir les sentiers, encadrer les usages et prévenir les conflits d'usages.
Son enveloppe a considérablement augmenté depuis quelques années, ce qui constitue un signal tout à fait positif. Néanmoins, sur le terrain, des problèmes demeurent, notamment sous l'angle de sa répartition, et son adéquation avec les charges réellement supportées, souvent par des communes faiblement peuplées, mais dotées de vastes espaces naturels, reste très imparfaite au regard des enjeux de préservation.
Des pôles plus urbains bénéficient
d'une dotation « aménités rurales »
élevée, alors même que leur population utilise et
fréquente largement
- au titre d'activités de loisir ou
de la résidence secondaire - les espaces naturels entretenus et
protégés par ces petites communes.
Dans certains territoires, ce sont désormais les communautés de communes qui, bien qu'elles ne soient pas éligibles à la dotation, exercent effectivement la compétence de gestion des espaces naturels sensibles, structurent la médiation, financent les équipes de terrain et organisent l'accueil du public, ce qui permet un développement cohérent du territoire, tout en assurant sa protection.
Au regard de ces évolutions, entendez-vous modifier dès 2026 les critères de répartition de la dotation « aménités rurales » et élargir les critères d'éligibilité aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ?
M. Olivier Bitz. - Je vous inviterai tout d'abord, dans le contexte politique que nous connaissons, à faire oeuvre de pédagogie. Les maires du département de l'Orne m'interpellent en effet tous les jours sur ce qui se passerait si le PLF n'était pas adopté et s'il fallait s'en remettre en fin d'année à l'expédient d'une loi spéciale. Il serait utile que vous le leur précisiez.
Par ailleurs, les collectivités locales contribuent financièrement à hauteur de près de 70 % au programme France Services, plébiscité par nos concitoyens, alors même qu'elles agissent principalement dans ce domaine à la demande et comme opératrices de l'État. La clé de répartition du financement des maisons France Services fait chaque année l'objet d'évolutions. Le 23 avril 2024, le Gouvernement, répondant à l'Assemblée nationale à une question écrite, avait indiqué que le financement de l'État atteindrait 50 000 euros par structure en 2026. Cet engagement sera-t-il tenu ? En outre, comment ce financement supplémentaire se répartit-il entre le fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT) et le fonds national France Services (FNFS) - anciennement le fonds interopérateurs ?
Enfin, j'observe qu'après une première réduction de ses crédits de près de 25 % en 2025, l'agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) subit dans le PLF 2026 une nouvelle baisse de 1 million d'euros de son budget. Or l'agence pilote non seulement le programme France Services, mais également d'autres programmes importants pour nos territoires : Action coeur de ville, Petites Villes de demain, Villages d'avenir. Dans le même temps, 18 millions d'euros restent fléchés pour le recours à des conseils de cabinets privés. Quelle est donc la vision du Gouvernement sur l'ANCT pour les années à venir ?
M. Michel Masset. - Ma priorité sera toujours la justice fiscale et sociale, et tandis que l'accès aux services, tant publics que privés, est indispensable à la vie des départements ruraux, la première préoccupation aujourd'hui me paraît être que les collectivités territoriales les plus pauvres ne s'appauvrissent pas davantage et que la solidarité nationale joue son rôle. À la suite de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), j'avais d'ailleurs élaboré un schéma d'accès aux services publics et privés essentiels à la population du Lot-et-Garonne.
J'attire en premier lieu votre attention sur la situation de certains bassins de vie dont toutes les communes et intercommunalités ne sont pas classées en zone France Ruralités Revitalisation (FRR), ce qui crée au sein de ce bassin de vie des distorsions et des concurrences, notamment pour l'installation des professions libérales - la situation de Marmande, dans le Lot-et-Garonne, en est un bon exemple. Nous vivons non pas sur un territoire cantonal ou intercommunal, mais dans un bassin de vie. L'ignorer plus longtemps serait une faute politique et des correctifs s'imposent.
En second lieu, les mesures du PLF 2026 relatives à la hausse de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) auront d'ici à deux ans des conséquences extrêmement lourdes dans les territoires, où les investissements ne manquent pourtant pas en direction de nouveaux centres de traitement des déchets ménagers offrant d'autres solutions que l'enfouissement. Prévoyez-vous d'accompagner les élus locaux dans la transition écologique ?
En dernier lieu, il importe qu'on laisse les territoires s'organiser, parce qu'ils sont souvent source de propositions. Vous-même avez d'ailleurs, dans votre propos liminaire, utilisé les termes d'« expérimentation ».
M. Hervé Reynaud. - Je me réjouis que notre rapporteur pour avis ait tout d'abord évoqué les départements, parce que s'il est bien une collectivité qui souffre, non pour cause de mauvaise gestion - vous l'avez dit - mais pour des raisons structurelles, ce sont les départements.
En 2014, le Premier ministre nous annonçait la suppression des conseils départementaux à l'horizon de 2021. En dépit de la volte-face qui a suivi, j'ai l'impression qu'il reste quelques réminiscences de cette annonce.
On ne sauvera certes pas les départements en abondant régulièrement les différents fonds d'urgence qui leur sont consacrés. Il faudra des réformes structurelles, prenant appui sur un discours clair quant au maintien de ce qui me paraît être la bonne échelle de proximité, ainsi qu'en attestent les inaugurations d'équipements publics auxquelles nous assistons régulièrement, en particulier dans nos communes rurales.
Dominique Faure, ancienne ministre
déléguée chargée des collectivités
territoriales et de la ruralité, s'est vu confier le 28 mai 2025 par
François Rebsamen, alors ministre de l'aménagement du territoire
et de la décentralisation, une mission pour dessiner les grands axes
d'une politique « renouvelée »
d'aménagement du territoire. La remise de ses conclusions était
prévue à la fin de l'année 2025, avec un point
d'étape en juin ou septembre.
La lettre de mission du ministre
soulignait sa volonté de relancer la stratégie nationale
d'aménagement du territoire pour les quinze prochaines années.
Cette mission se poursuit-elle et aboutira-t-elle à la définition
de réponses aux besoins actuels de réaménagement et de
nouvelle contractualisation entre l'État et les collectivités
locales ?
Mme Françoise Gatel, ministre. - Sur les aménités rurales, vous avez rappelé la progression de la dotation, passée de 40 millions à plus de 110 millions d'euros. Ces aménités sont aujourd'hui, et à l'initiative d'Élisabeth Borne, la première reconnaissance de la valeur ajoutée de nos territoires quand, depuis une quinzaine d'années, notre regard - c'est un constat - privilégiait l'urbanisation, la concentration et la métropolisation.
Ces aménités rurales concernent la valorisation de la biodiversité et de l'environnement, par exemple pour des communes situées dans des parcs naturels régionaux, où les dimensions touristiques et de développement durable prennent une importance particulière. Elles reçoivent, en application de différents critères, une indemnité dont le montant peut être important quand leurs budgets sont modestes. Elles en ont ensuite la liberté d'usage.
Quand ils travailleront à une réforme des finances des collectivités locales, le Sénat ou les associations d'élus gagneront à intégrer cette question des aménités rurales, avec non seulement la notion d'espaces, mais également celle de valeur ajoutée de ces espaces. Le calcul actuel de la DGF s'appuie avant tout sur le nombre d'habitants, qui constitue certes un bon indice du coût des ouvrages publics pour les collectivités. Cependant, à l'heure de la promotion du développement durable, notre pays a un besoin pressant, permanent et essentiel des apports de la « ruralité ». En dépendent en effet notre souveraineté alimentaire, nos ressources en eau et nos énergies renouvelables.
La question se pose aussi de l'élargissement du nombre de communes éligibles à la dotation « aménités rurales », et le cas échéant, celle de l'augmentation ou non de la somme à répartir.
Reconnaîtrons-nous les intercommunalités comme éligibles à la dotation « aménités rurales » ? Aujourd'hui, ce sont les communes qui sont membres des parcs naturels régionaux (PNR) et qui, à ce titre, doivent en respecter les obligations. Elles décident ensuite librement de confier leur compétence en la matière aux intercommunalités. Par respect pour la décentralisation et la confiance aux élus qu'elle induit, il ne paraît pas opportun de prévoir le transfert obligatoire de la dotation de la commune à l'intercommunalité. Dans ce domaine comme dans d'autres, la discussion doit être menée au sein de chaque intercommunalité, au titre du pacte financier dont leurs membres conviennent.
Vous m'invitez par ailleurs à la pédagogie : je ne manque pas d'en faire. C'est vous qui, avec les députés, votez le budget, et je le dis sans détour, faute de loi de finances, chacun sait que les avancées concrètes n'auront pas lieu. Je pense par exemple aux 600 millions d'euros dont serait doté le fonds de sauvegarde pour les départements.
Sur les maisons France Services, je rappelle que l'État apporte une contribution de 40 000 euros par structure, montant qui doit passer à 45 000 euros. Nous comptons actuellement 2 865 structures, dont 415 sont gérées par La Poste. Il est prévu que l'augmentation de leur dotation en 2026 soit financée par le FNFS. En 2027, un nouvel apport, permettant d'atteindre le montant de 50 000 euros, sera, lui, financé par le FNADT. Au total, l'État consacre 80 millions d'euros au dispositif.
Ces structures traitent plus de douze millions de demandes chaque année et recueillent auprès du public un taux de satisfaction sans équivalent, compris entre 90 % et 95 %. Leur taux de traitement dès la première demande est du même ordre.
Traiter de l'ANCT revient à aborder la question, plus large, des agences de l'État. Je salue d'ailleurs le travail que le Sénat a récemment réalisé à ce sujet. J'estime pour ma part que les solutions radicales ne sont pas toujours les meilleures si l'on n'a pas, au préalable, réalisé d'étude d'impact.
Il ne peut cependant pas y avoir, dans ce pays, sept ou huit personnes qui décident sur un même sujet. À la suite d'un décret pris au mois de juillet 2025 à l'initiative de François Bayrou, alors Premier ministre, le préfet est devenu le chef d'orchestre de l'ensemble des services et agences de l'État. Il se trouve que l'ANCT est la seule agence qui n'intervient qu'à la demande du préfet ; en ce sens, elle est véritablement pilotée par l'État, ce dont je me réjouis.
Son nouveau directeur général, Henri Prévost, a pour mission de procéder à une évaluation du mode opératoire de l'agence. Aux programmes que vous avez cités - Action coeur de ville, Petites Villes de demain, Villages d'avenir -, ajoutons les contrats de massifs, à destination des élus de la montagne, avec tout un travail sur l'évolution de l'offre touristique en moyenne montagne, dont s'occupe également l'ANCT.
Ce travail est très satisfaisant et je pense comme vous que nous devons être attentifs au recours aux cabinets de conseil, ce qui pose la question de l'ingénierie de l'État. Nous devons nous assurer, territoire par territoire, que cette offre d'ingénierie, répartie entre, d'une part, l'ANCT pour la conduite générale de projets et, d'autre part, le centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema) pour l'ingénierie de haute expertise - par exemple sur les ponts - est suffisante.
Au dernier congrès des maires et des présidents d'intercommunalité de France, nous avons réuni à un même stand les représentants de l'ensemble des agences qui dépendent du ministère dont j'ai la charge, réalisant ainsi un « village de l'État ». L'idée consiste à poursuivre le travail parfaitement assuré par certaines agences, tout en en conservant le pilotage au niveau de l'État.
Vous évoquez les schémas d'accès aux services pour le public. J'ai moi-même eu l'occasion d'en élaborer un en Ille-et-Vilaine, en collaboration avec le préfet, l'association des maires ruraux de France (AMRF), l'association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF), et le président du conseil départemental. Aussitôt après l'annonce de ce plan, j'apprenais la fermeture d'une trésorerie dans le département, le préfet m'expliquant que le directeur général des finances publiques ne dépendait pas de lui, ainsi d'ailleurs que le directeur académique adjoint des services de l'éducation nationale (Daasen). Nous ne pouvons accepter ce type de situation.
Je plaide pour que nous disposions de schémas d'accès aux services publics, et France Services apporte une pierre indispensable à l'édifice. Il conviendrait que le même type de travail soit engagé avec les départements au sujet des collégiens. Sous réserve de l'adoption d'une loi de finances pour 2026, le réseau France Santé proposera en outre une offre de soins de proximité.
Sur les zones FRR, qui prennent le relais des zones de revitalisation rurale (ZRR), le principe est celui d'un accompagnement des territoires les plus fragiles. Soit les territoires accompagnés parviennent à se développer et, dans ce cas, ils sortent du dispositif ; soit ils conservent cette fragilité et nous continuons de les soutenir par le jeu de la péréquation. À cet égard, il est permis de s'interroger quand on constate que quelque 20 000 communes bénéficient actuellement du dispositif.
La nouvelle carte du dispositif est du reste désormais établie à l'échelle de l'intercommunalité, ce qui explique qu'au sein d'une même intercommunalité une commune puisse en relever et une autre non.
Les ZRR sont maintenues jusqu'en 2027, leur suppression posant des difficultés ; et je vous garantis que rien ne changera avant cette échéance. Les zones FRR ne seront pas non plus remises en cause.
Je souhaite cependant que soit entreprise à leur égard une véritable mission d'évaluation en 2026, en collaboration avec les parlementaires. En effet, dès lors que les collectivités ont délibéré en ce sens, ces dispositifs permettent à certaines professions de bénéficier d'exonérations de charges ; or nous assistons à une forme de nomadisme de ces professions sous-tendu par un objectif d'optimisation fiscale, les professionnels arrivés au terme du bénéfice du dispositif choisissant de déménager pour continuer d'en bénéficier ailleurs. De plus, il est apparu que le dispositif FRR venait heurter d'autres dispositifs, par exemple en matière d'installation des professions médicales. Mon précédent collègue chargé de la santé et de l'accès aux soins, Yannick Neuder, et moi-même avons d'ailleurs déjà lancé une mission de comparaison des deux systèmes.
Sur la TGAP, je n'ignore pas le coût induit par le traitement des déchets et par la fiscalité qui s'y rapporte. La France s'est cependant vue infliger en 2023 une amende de 1,5 milliard d'euros, faute de recycler ses plastiques à hauteur des objectifs fixés par l'Union européenne, et nous ne pouvons aujourd'hui nous dispenser d'une réflexion sur la solution de fond à apporter à la situation. Il en va de même sur un autre sujet, celui de l'accompagnement des territoires littoraux face à l'enjeu du recul du trait de côte.
Quant au département, après des atermoiements au moment de l'adoption de la loi NOTRe, il a été consolidé. La création de grandes régions y a contribué. Je conviens qu'il apparaît dans les territoires ruraux comme un incontournable élément de solidarité et d'aménagement du territoire.
Comme je l'ai indiqué, le Premier ministre a adressé un courrier à tous les présidents des conseils départementaux pour les inviter à réfléchir à l'évolution du financement de leurs collectivités, qui pourrait notamment prendre la forme de l'attribution d'une fraction de CSG.
Je pense par ailleurs que les départements peuvent être, là où les collectivités territoriales le souhaiteront, la collectivité des réseaux : réseau routier, très haut débit et fibre, énergie, ou encore traitement des déchets, et que nous pouvons opportunément leur donner de la latitude pour intervenir dans ces différents domaines.
Sur la mission confiée à Dominique Faure, j'en confirme la poursuite et souligne qu'elle comporte un important volet relatif aux politiques contractuelles d'aménagement du territoire.
Mon avis personnel est que nous ne saurions en rester aux difficultés conjoncturelles de financement et nous en tenir à de la « tuyauterie » budgétaire par l'ajout de crédits ici ou là. Tirons les leçons de la crise actuelle et travaillons aux solutions de manière plus structurante.
Assurément, le principe d'annualité budgétaire revêt un caractère insécurisant pour les collectivités territoriales. S'il convient dans la plupart des cas de sécuriser les dotations de fonctionnement, nous devrions accepter l'idée de contractualiser la partie investissement. À l'issue des prochaines élections municipales, chaque préfet et sous-préfet pourrait ainsi rencontrer les maires de son ressort afin d'identifier ceux des engagements qu'ils ont pris en matière d'investissement qui entrent dans le cadre de la politique de l'État, par exemple la réhabilitation d'une école, et justifient son accompagnement pluriannuel. Il importe en effet de sécuriser de la sorte les plans de financement de ces projets, dont la mise en oeuvre se déploie sur plusieurs années.
La solution me paraît réalisable - nous connaissons déjà les contrats de plan État-région (CPER) -, sous réserve que l'ensemble des parties prenantes en conviennent et s'accordent mutuellement leur confiance, et à la condition de nous en tenir à des contrats simples qui n'accroissent pas les charges administratives des collectivités.
M. François Bonhomme. - Nous nous sommes tous réjouis du succès incontestable des maisons France Services, en dépit des quelques réserves que nous avions initialement pu formuler à leur endroit. Leur modèle est-il néanmoins duplicable au projet de labelliser, sous le nom de maisons France Santé, des guichets médicaux de proximité ?
Quelle serait la véritable plus-value de ces maisons France Santé ? Iront-elles au-delà d'un label d'affichage, dès lors que ce sont les conditions d'installation des professionnels de santé qui sont en jeu ? L'objectif d'obtenir un rendez-vous en quarante-huit heures nécessite un renforcement des secrétariats, des pools médicaux supplémentaires, des médecins remplaçants ou encore l'usage de la télémédecine que des opérateurs ne manquent pas de promouvoir tant auprès des collectivités que des pharmacies.
À ce stade, je ne vois pas clairement l'apport du nouveau label, sinon celui de valider en quelque sorte, sous la forme d'une opération-vérité, la qualité des structures existantes, lesquelles peuvent connaître des fortunes diverses.
M. Pierre-Alain Roiron. - Nous pensions que le Dilico serait conjoncturel, mais nous avons désormais le sentiment qu'il est devenu structurel pour le budget de l'État. Par rapport à l'an dernier, les critères de reversement aux collectivités se sont durcis. Cette question est importante pour les intercommunalités et les régions, qui aident les entreprises à s'installer sur nos territoires.
Le 25 septembre 2023, le Président de la République a souligné l'importance de la planification écologique. Pourtant, la dotation du fonds vert, qui s'élevait à plus de 2 milliards d'euros en 2023, n'atteindra plus que 650 millions d'euros en 2026, alors que nous demandons aux collectivités locales d'investir pour réduire leur empreinte carbone.
Le remboursement du FCTVA posera un problème de trésorerie et donc d'emprunt, alors que les taux d'intérêt ont fortement augmenté ces dernières années. Il ne faut pas négliger la question du coût final pour les équipements mis en place.
J'en viens au fonds de sauvegarde des départements, dont le montant doit passer de 300 millions à 600 millions d'euros. Combien de départements ont pu en bénéficier en 2025 ? Combien seront-ils en 2026 ?
M. Éric Kerrouche. - Il est dommage que nous soyons amenés à déposer un amendement pour augmenter le volume de la DPEL. En effet, si nous espérons tous que la proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local sera adoptée, ce texte ne sera pas grand-chose s'il n'est pas assorti de la promesse d'une augmentation de la DPEL, condition de la mise en place du statut, en tout cas pour les communes les moins peuplées. Il est regrettable que cette augmentation n'ait pas été directement intégrée au budget et que la loi n'ait pas été adoptée dans un même temps. Cependant, je suis certain que nous aboutirons à un accord sur ce point ; sans cela, nous serions collectivement en défaut vis-à-vis des élus qui nous ont fait confiance.
Je voudrais également revenir sur l'annonce du versement d'une prime régalienne, que je peine à comprendre. La proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local prévoit la remise par le Gouvernement d'un rapport quantifiant le temps dédié par les maires aux activités réalisées au nom de l'État. Nous aurions pu attendre ce rapport avant d'adopter une telle mesure, afin de savoir s'il fallait opérer des variations en la matière. Le Premier ministre a été un peu vite et cette annonce risque d'avoir de mauvaises conséquences sur des décisions que nous pourrions être amenés à prendre ultérieurement.
Enfin, une indemnisation est versée par l'État aux communes pour compenser le coût des opérations électorales. Celle-ci s'élève à 44,73 euros par bureau de vote et à 0,10 euro par électeur inscrit, ne couvrant que 15 % des dépenses effectives liées à l'organisation des élections. De plus, cette indemnisation n'a pas été relevée depuis 2006.
Mme Anne-Sophie Patru. - Le Gouvernement a annoncé qu'il tiendra compte des engagements que nous avons pris collectivement dans le cadre de la proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local, ce que je salue. J'espère que ce texte sera voté rapidement à l'Assemblée nationale.
Nos élus locaux nous font part de questionnements et d'incertitudes sur l'hypothèse de l'adoption d'une loi spéciale. Un tel vote aurait un impact sur la DETR, mais aussi sur l'organisation et le financement des élections qui se tiendront en 2026. Pourriez-vous apporter des précisions à ce sujet ?
Mme Françoise Gatel, ministre. - Monsieur Bonhomme, lorsqu'une chose fonctionne, elle doit nous inspirer. Quand l'initiative France Services a été lancée, il y a eu des débats. Pourtant, aujourd'hui, tout le monde le sait : le dispositif est une réussite.
Les maisons France Services permettent d'accomplir des formalités qu'on ne pouvait pas accomplir localement avant leur mise en place, même dans des communes de 100 000 habitants. La première fois que j'ai visité l'une de ces maisons, je me suis dit qu'il devait s'agir d'une visite Potemkine, qu'on avait rassemblé pour moi des gens satisfaits du service. Et puis j'en ai visité d'autres et partout les gens sont satisfaits, rassurés par l'accompagnement humain et un personnel remarquable.
Par ailleurs, je me suis rendue dans 52 départements et partout, y compris dans les grandes villes, les gens et les élus estiment que l'accès aux soins constitue un problème majeur. Vous avez raison, Monsieur Bonhomme : ce sont les collectivités qui se sont investies dans ce domaine. Aujourd'hui, certaines ont même embauché des médecins, ce qui peut créer des difficultés.
Le dispositif France Santé s'accompagne d'un processus qui doit permettre de retrouver, dans cinq ans, les effectifs du numerus clausus d'avant. Ainsi, nous allons généraliser l'option « métiers de la santé » dans les lycées et offrir, dans le temps, la possibilité de suivre une première année de médecine dans tous les départements. En effet, les médecins s'installent pour plus de 40 % d'entre eux là où ils ont été formés.
Tout le monde me dit que l'État n'accompagne pas les collectivités. Pourtant, 2 000 structures France Santé ont besoin d'être pérennisées et l'État se dit prêt à le faire ! Il ne s'agit pas seulement de donner un label. Nous accordons une aide de 50 000 euros, à condition que ces critères soient respectés : la possibilité d'obtenir un rendez-vous dans les quarante-huit heures, le respect des tarifs conventionnés et un fonctionnement assuré du lundi au vendredi. Je suis convaincue que beaucoup de parlementaires se rendront dans leur agence régionale de santé (ARS) ou iront voir leur préfet, pour savoir quelles seront les premières structures labellisées avant la fin du mois de décembre. Dans des communes où il ne reste que la pharmacie, celle-ci pourra s'appuyer sur un réseau et nous pourrons l'aider. Le financement du dispositif coûtera 130 millions d'euros par an à terme.
Monsieur Roiron, en ce qui concerne le Dilico, j'ai déjà répondu. L'an dernier, il n'y avait pas encore de conditions. Il ne s'agit pas de prendre de l'argent, mais de le restituer.
J'en viens aux départements et aux dépenses obligatoires. Une expérimentation est en cours sur la recentralisation du revenu de solidarité active (RSA) ; suivons-la avec intérêt. Il s'agit d'une dépense obligatoire, dont décide l'État, et pour laquelle on demande aux départements de faire un chèque. Peut-être faut-il, dans de telles hypothèses, rendre certaines fonctions à l'État.
Quant au fonds vert, il n'existait pas en 2022. Il est donc par construction plus doté aujourd'hui qu'alors. Cependant, quand on fait face à 3 400 milliards d'euros de dette, on doit trouver des moyens de faire baisser la dépense. Par ailleurs, la DETR participe à l'effort en la matière : existe-t-il encore des collectivités et des préfets qui décident d'utiliser la DETR pour financer des projets qui ne sont pas écologiquement vertueux ?
Certes, Monsieur Kerrouche, il aurait été préférable que la loi sur le statut de l'élu local ait été adoptée avant. Cependant, le Gouvernement sera attentif à ce que les dépenses générées par le vote de la loi soient programmées.
Le versement d'une prime régalienne a été annoncé. Nous aurions pu discuter longtemps et sans fin de son montant. Il a été fixé à 500 euros, ce que vous pouvez considérer comme symbolique, mais cette mesure concerne plus de 34 000 maires. Il s'agit de reconnaître que ces derniers accomplissent des actions au nom de l'État et nous n'avons pas souhaité mêler cette prime à l'indemnité destinée à couvrir les frais générés par le mandat.
En ce qui concerne les dépenses liées à l'organisation des élections, si elles n'ont pas été revalorisées depuis 2006, il faudra sans doute se pencher sur la question, mais je ne pense pas que nous le ferons maintenant.
Par ailleurs, je salue l'ensemble des bonnes volontés qui se sont manifestées de toutes parts autour de la proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local.
Madame Patru, une loi spéciale n'est pas un
budget. Elle constitue une solution d'urgence pour éviter un
shutdown comme en connaissent les Américains. Je peux
faire la liste de ce qui n'arrivera pas si une telle loi est
adoptée : le fonds de sauvegarde ne doublera pas, le budget de
France Services n'augmentera pas et nous ne créerons pas 100 maisons
supplémentaires,
les maisons France Santé ne seront pas
labellisées, le volume de la DPEL n'augmentera pas, la création
du statut de l'élu local sera compromise, et les élections
municipales auront lieu, mais l'indemnité normalement versée par
l'État pour compenser le coût de leur organisation ne sera pas
attribuée.
M. David Margueritte. - En 2021, l'État s'est engagé à compenser strictement la baisse de 50 % de la valeur locative des établissements industriels, avec la dynamique du PSR. Il s'agit d'une parole donnée ! C'est sur la base de cet engagement que les collectivités territoriales ont investi. En effet, lorsqu'on accueille des établissements industriels, il faut procéder à des investissements particuliers ; on le fait en se fiant à la parole de l'État.
Je ne suis pas convaincu par votre argument des 4,5 milliards d'euros versés par l'État en compensation. On peut dire qu'en baissant la compensation de 25 %, on revient à ce qui se faisait avant, mais la dynamique est d'abord liée aux établissements industriels ; les collectivités auraient pu en bénéficier largement sans la baisse de 50 %. L'objectif de réindustrialisation du pays est largement partagé et les collectivités concernées y ont largement contribué. Cette baisse de compensation envoie un mauvais message aux territoires concernés par de nouveaux projets industriels de grande envergure et aura des conséquences en termes de confiance.
Concernant France Santé, je suis un peu sceptique et n'ai pas senti un enthousiasme débordant sur le sujet. La question de la confiance se pose là aussi et quand vous annoncez le versement d'une allocation de 50 000 euros, les élus se demandent si cette dernière sera reconduite.
Dans le cadre du Ségur de la santé,
l'État s'est engagé à financer dans les régions des
places supplémentaires pour la formation des infirmiers.
Il
s'agissait d'une très bonne mesure. Cependant, nous sommes encore une
fois confrontés à un problème de parole non tenue.
L'ancien Premier ministre François Bayrou a écrit aux
régions le 8 janvier 2025 pour expliquer que ce financement ne valait
que pour l'année à venir. Or une formation d'infirmier dure plus
d'un an. J'ai déposé un amendement visant à
rétablir une pluriannualité du financement. Aujourd'hui, aucune
région n'ouvre de places supplémentaires d'infirmier sur
Parcoursup, car le budget promis n'a pas été alloué.
Disposez-vous d'informations qui seraient de nature à nous rassurer sur
le sujet ?
Mme Nadine Bellurot. - Je souhaiterais savoir où nous en sommes du contrat de présence postale territoriale et de son financement. Le fonds postal national de péréquation territoriale (FPNPT) est doté de 174 millions d'euros. Le Gouvernement s'engage-t-il dès 2026, comme il l'a fait pour la période 2023-2025 ?
Concernant la santé et l'accès aux soins, je voudrais évoquer l'initiative Médecins solidaires, qui fonctionne très bien et dont nous devrions nous inspirer. Il s'agit d'une plateforme rassemblant 800 médecins, dont un tiers sont des retraités, un tiers des actifs et un tiers des jeunes diplômés. Chacun s'inscrit pour passer une semaine dans une commune, y assurant ainsi une présence continue du lundi au samedi midi, cinquante et une semaines par an. Je craignais que ce roulement ne gêne les personnes âgées, notamment en milieu rural, mais le taux de satisfaction atteint 100 %. Le centre de santé est l'employeur, ce qui n'est pas le cas dans le dispositif défendu par le Gouvernement, au sein duquel les médecins viendraient pour deux jours, ce qui ne fonctionnera pas. Il faut peut-être partir de ce qui existe et qui fonctionne bien.
Mme Patricia Schillinger. - Les occupations illicites de terrains dans les communes constituent un sujet très délicat, qui crée beaucoup d'agacement chez les élus. Avec François-Noël Buffet et Bruno Retailleau, nous avons constitué un groupe de travail et un texte sera bientôt déposé. Toutefois, je souhaiterais attirer votre attention sur l'investissement que représentent pour les communes les mesures de protection des lieux stratégiques, comme les stations d'épuration. L'installation de dispositifs, comme des rochers ou des barrières, a un coût pouvant s'élever à 10 000 ou 20 000 euros, qu'il faut souvent assumer dans l'urgence.
Serait-il possible de flécher une aide spécifique dédiée à ces communes au sein de la DSIL ou de la DETR ? Tous les départements ne sont pas concernés, mais le nôtre compte actuellement environ 400 caravanes. Les occupants cassent les coffres électriques, laissent des quantités de déchets et procèdent à des travaux de terrassement, sur des terrains privés et publics. Il faut réfléchir à une manière de flécher une aide, au moins pour une durée déterminée ou à titre expérimental.
Mme Lana Tetuanui. - Il y a moins de trois semaines, les élus de l'assemblée de la Polynésie française ont voté en faveur du regroupement de la DETR, de la DSIL et de la dotation politique de la ville (DPV) au sein du FIT. La proposition d'établir ce fonds unique est-elle toujours d'actualité ?
Le Premier ministre a annoncé le versement de la prime annuelle de 500 euros à l'heure où nous demandons à tous les Français de se serrer la ceinture. Je rappelle que si la proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local est adoptée, les indemnités des élus seront déjà revalorisées. Les élus ne demandent pas l'aumône, Madame la ministre. De plus, si nous avons les moyens de faire de telles annonces, il faut arrêter d'expliquer que nous sommes confrontés à une dette abyssale. Il faut reconnaître le travail accompli par les maires, aussi bien en France métropolitaine que dans nos outre-mer, mais l'annonce du Premier ministre me laisse sans voix.
Mme Françoise Gatel, ministre. - Monsieur Margueritte, j'entends ce que vous dites sur la valeur locative des établissements industriels. Cependant, quand nous cumulons 3 400 milliards d'euros de dette, les efforts de redressement doivent bien être mis en oeuvre quelque part.
Concernant France Santé, l'État propose d'aider les collectivités qui ont mis en place un service ; si elles ne veulent pas des 50 000 euros proposés, il n'est pas obligatoire de les accepter ! Toutes les études d'opinion montrent que le sujet prioritaire pour chaque habitant est l'accès à la santé. Je salue la volonté du Premier ministre, qui souhaite garantir à chacun l'obtention d'un rendez-vous médical sous 48 heures, grâce aux maisons France Santé et à des structures mobiles. L'État propose désormais d'accompagner les efforts fournis par les collectivités.
M. Pierre-Alain Roiron. - Certaines régions font aussi des choses en la matière.
Mme Françoise Gatel, ministre. - Nous verrons l'année prochaine combien de communes souhaitent faire partie des 2 000 premières à bénéficier du dispositif. Nous apportons une réponse à l'angoisse exprimée par nos concitoyens en la matière ; on ne pourra pas dire que l'État n'a rien fait.
En ce qui concerne la formation des infirmiers, nous allons tenir la promesse faite par Jean Castex. Lors du congrès des régions de France, après la tenue d'une séance de travail importante, le Premier ministre a annoncé que nous allions couvrir cette formation. Cependant, le congrès s'étant tenu après la transmission du PLF au Parlement, le coût de la mesure ne figure pas dans le budget initial mais une enveloppe y sera dédiée, même si elle ne couvrira peut-être pas la totalité du coût de la formation.
Madame Bellurot, nous travaillons au contrat de présence postale avec Bercy.
L'initiative Médecins solidaires que vous évoquez est à saluer ; elle est d'ailleurs soutenue par l'État. Pour autant, ce que nous proposons fonctionnera également.
Madame Schillinger, je ne peux pas répondre à votre question. La DETR ne peut être mobilisée pour couvrir des dépenses de fonctionnement.
Madame Tetuani, je crois beaucoup à la différenciation. Vous n'avez pas le même avis en Polynésie française que les sénateurs : vous accueillez favorablement le FIT alors que ces derniers ne sont pas convaincus. À ce stade, sans loi de finances votée le FIT ne sera pas créé.
Enfin, j'entends vos propos concernant la prime de 500 euros. On me dit que l'annonce n'a pas été comprise. Cependant, le Premier ministre avait écrit aux élus locaux en annonçant qu'il allait reconnaître leur engagement au service de l'État et, un mois et demi plus tard, il l'a fait. On peut considérer que le montant n'est pas suffisant, mais notons que la promesse a été tenue.
Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous vous remercions de votre participation, Madame la ministre.