B. UNE TRAJECTOIRE BUDGÉTAIRE PEU SOUTENABLE AU REGARD DES ÉCHÉANCES À VENIR
1. Un solde budgétaire négatif depuis 2023, qui ne pourra pas être absorbé à terme par la trésorerie de Frances Titres
Les recettes de France Titres se composent de taxes affectées et de ressources propres. Les principales taxes perçues sont celles relatives aux passeports, au regard de leur prix élevé par rapport aux autres titres, mais aussi la taxe relative au système d'immatriculation des véhicules ou encore la redevance d'acheminement du certificat d'immatriculation. À l'exception de cette dernière redevance, toutes ces taxes sont limitées à un plafond fixé par le ministère de l'intérieur, qui correspond, selon les données de la Cour des comptes, « en moyenne à 55 % de la taxe sur les passeports et à 74 % des autres taxes »85(*). Ainsi, les recettes de France Titres ne sont pas indexées sur la production et la délivrance des titres sur lesquels les taxes sont assises. Les ressources propres de France Titres sont issues des téléservices proposés, en particulier l'usage de l'application COMEDEC par les notaires, et le financement par d'autres ministères de la délivrance d'autres titres, comme les cartes agent ministérielles.
Alors que la situation de l'agence était déficitaire en 2019, de l'ordre de - 3 millions d'euros, la période 2020-2022 a été marquée par une augmentation plus dynamique des recettes par rapport à l'évolution des dépenses, créant un excédent budgétaire de 63 millions d'euros en trois ans.
Évolution de la situation financière de France Titres entre 2019 et 2024
(en millions d'euros)
Source : commission des finances d'après les données transmises par France Titres
Toutefois, entre 2022 et 2024, la situation s'inverse et les dépenses augmentent bien plus vite que les recettes, de + 38 % pour les dépenses, contre + 15 % pour les recettes. Le poste de dépenses qui a connu la plus forte augmentation est la dépense de production de titres sécurisés, qui suit l'évolution de la demande de titres, et qui est ainsi passé de 115,3 millions d'euros en 2018 à 189,3 millions d'euros en 2023. À cet effet volume s'est ajoutée une augmentation sensible des prix, entre + 2,6 et 4 % selon les titres en 2024, renchérissant ainsi les coûts de production.
Ainsi, à partir de 2023, les excédents générés pendant la crise sanitaire, de 2020 à 2022, ont été mobilisés pour résorber le déficit constaté, et seront également absorbés par le déficit prévisionnel de 2024. Dès lors, le niveau de trésorerie attendu fin 2024, nettement inférieur au solde prudentiel préconisé par la direction du budget86(*), ne permettra plus de supporter des déficits à compter de 2025.
Au surplus, le projet de loi de finances pour 2025 maintient le plafond des taxes affectées à France Titres, alors même que la LOPMI prévoyait une augmentation de 12 millions d'euros. L'agence évalue alors ses recettes totales à 341,6 millions d'euros, alors même que le deuxième budget rectificatif récemment adopté par le conseil d'administration prévoit des dépenses à hauteur de 394,9 millions d'euros pour l'année 2024. Si les dépenses sont au même niveau pour 2025, il en découlerait un besoin de financement de l'ordre de 50 millions d'euros.
2. Si des efforts sont déployés pour maîtriser les dépenses, une trajectoire budgétaire fondée sur la baisse des demandes de titres demeure fragile
Dans ce contexte budgétaire contraint, France Titres identifie plusieurs leviers d'économies.
En premier lieu, la baisse de la demande de titres sécurisés, notamment de titres d'identité, devrait permettre de ramener la dépense liée à la production de 181 millions d'euros en 2024 à 161 millions d'euros en 2025.
En second lieu, les dépenses d'acheminement, aussi liées au niveau des demandes de titres, seraient contenues à la baisse, de l'ordre de - 20 millions d'euros, avec un envoi des certificats d'immatriculation et des permis de conduire par lettre suivie, et non plus contre signature avec vérification d'identité.
En troisième lieu, il est de nouveau prévu en 2025 de réduire des plages horaires d'accessibilité du centre de contact citoyens. Ainsi, la dépense de support usagers externalisé devrait être contenue à hauteur de 16 millions d'euros.
Enfin, le parc de dispositifs de recueil (DR) des demandes de titres d'identité déployés dans les mairies ayant notablement augmenté, il sera stabilisé en 2025. La dépense correspondante concernera en très grande partie les liaisons téléphoniques et la maintenance des DR et devrait être ramenée de 11 à 11,5 millions d'euros.
Ces mesures sont principalement basées sur une hypothèse de réduction de la demande de titre, ce qui fragilise la soutenabilité de la trajectoire budgétaire de cette agence. Par suite, la rapporteure spéciale estime que cette situation n'est pas satisfaisante, et qu'il convient de revoir les modalités et le système de financement de France Titres.
* 85 L'Agence nationale des titres sécurisés (ANTS), Cour des comptes, avril 2024.
* 86 Deux mois de dépenses hors interventions.